12/11/2013
La nostalgie heureuse, récit d’Amélie Nothomb
« Tout ce que l’on aime devient une fiction. La première des miennes fut le Japon. (…) A aucun moment je n’ai décidé d’inventer. Cela s’est fait de soi-même. Il ne s’est jamais agi de glisse le faux dans le vrai, ni d’habiller le vrai des parures du faux. Ce que l’on a vécu laisse dans la poitrine une musique : c’est elle que l’on s’efforce d’entendre à travers le récit. Il s’agit d’écrire ce son avec les moyens du langage. Cela suppose des coupes et des approximations. On élague pour mettre à nu le trouble qui nous a gagnés. » (Prologue du récit)
S’agit-il de nostalgie ? Et celle-ci est-elle heureuse ? Rend-elle heureux le lecteur ?
Quant à moi, je suis sorti du livre déçu. Amélie retourne au Japon avec une équipe de télévision, en charge de trouver les impressions qu’elle a décrites dans ses livres, dont Stupeurs et tremblements, Métaphysique des tubes. C’est un compte-rendu de voyage écrit par une midinette en mal de souvenirs. Certes, quelques bons mots, quelques réflexions amusantes (et encore, assez peu). Mais l’on passe dans ce nouveau Japon, celui des brisures de la vie, sans y retrouver la magie de l’ancien, celui où s’agitait une petite fille, puis une jeune fille, avec le charme de la découverte du monde. On la sent d’ailleurs gênée de jouer son rôle d’écrivain à la recherche du temps perdu. Elle écrit mal ce qu’elle a bien écrit. L’inspiration n’est plus là. Le texte devient presque radotage.
Elle tente de retrouver la maison de son enfance et voit une femme étendre du linge dans son jardin. Je pense que, depuis l’âge de dix-sept ans, c’est moi qui m’occupe de la lessive. L’unique continuité de mon quotidien à part l’écriture, c’est le linge, au point que je me fâche si quelqu’un s’en charge à ma place. (…) La vérité m’apparaît grâce à cette inconnue : pour moi, être lingère, c’est prouver que je suis la fille de Nishio-san. Je contemple avec intensité cette femme qui pend des chemises mouillées. La caméra en conclut que c’est important et filme la femme.
Après sa visite à Nishion-san, sa nounou, elle pleure. Une joie de rescapée circule en moi. J’ai réussi l’épreuve. (…) Je mesure le miracle : Nishio-san et moi, nous nous sommes revues, je lui ai dit ce qui devait être dit, j’ai laissé circuler entre elle et moi un si terrible amour, et nous avons survécu.
Il lui arrive de se moquer d’elle-même : Pour reprendre la formulation génialement méchante de Balzac, à vingt ans, j’étais une jeune fille d’une beauté modérée. Cela ne s’est guère arrangé par la suite.
Elle retrouve Rinri, son ex-fiancé japonais raconté dans Ni d’Eve, ni d’Adam. Elle conclut cette retrouvaille par cette réflexion : En le retrouvant, j’ai aussi retrouvé un élément de ce qui fut mon quotidien avec lui : la gêne. (…) La gêne est un étrange défaut du centre de gravité : n’est capable de l’éprouver qu’une personne dont le noyau est demeuré flottant. Les êtres solidement centrés ne comprennent pas de quoi il s’agit. La gêne suppose une hypertrophie de la perception de l’autre, d’où la politesse des gens gênés, qui ne vivent qu’en fonction d’autrui. Le paradoxe de la gêne est qu’elle crée un malaise à partir de la déférence que l’autre inspire.
Elle finit sur une considération digne du pays du soleil levant : la grâce de ressentir le vide : A vingt ans, avec Rinri, j’ai vécu une belle histoire. Cette beauté implique que ce soit fini. C’est ainsi. (…) Ressentir le vide est à prendre au pied de la lettre, il n’y a pas à interpréter : il s’agit, à l’aide de ses cinq sens, de faire l’expérience de la vacuité. C’est extraordinaire. En Europe cela donnerait la veuve, la ténébreuse, l’inconsolée ; au Japon, je suis simplement la non-fiancée, la non-lumineuse, celle qui n’a pas besoin d’être consolée. Il n’y a pas d’accomplissement supérieur à celui-ci. (…) Une épiphanie de cet état espéré, où l’on est de plain-pied avec le présent absolu, l’extase perpétuelle, la joie exhaustive.
07:54 Publié dans 41. Impressions littéraires | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, roman, récit, japon, souvenir | Imprimer
11/11/2013
Hélicéchappée 4
A partir des deux premiers schémas du 18 octobre et du 4 novembre, toute une série d’impressions sont possibles. Elles comportent volontairement des ruptures visuelles et non la symétrie attendue en premier lieu. Nous verrons les possibilités offertes, nombreuses et variées.
L’attrait de cette impression tient à l’apparente continuité et symétrie des lignes principales formées par les S et disposées en carré qui en fait ne sont nullement droites et symétriques et à la discontinuité flagrante des lignes secondaires.
© Loup Francart
07:06 Publié dans 22. Créations numériques | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : op'art, art cinétique, abstrait | Imprimer
10/11/2013
Anniversaire
J’ai longtemps pensé que j’avais vingt ans…
Mais la pensée n’est qu’impression
Elle divague et entretient un climat bienfaisant
Sans commune mesure avec la réalité
Un incident mécanique a rouillé le moteur
Il y a peu. Il tourne sur trois pattes…
J’ai enflé comme un jouet d’enfant
Et commencé à m’échapper, retenu par des cordes…
Maintenant peut-être peut-on lâcher celles-ci
Et me laisser m’envoler virtuellement
Dans l’air poétique et transparent
Des jours d’automne déclinant sur l’horizon
Je cours toujours, goûtant une liberté retrouvée
Non celle de faire ce que je veux quand je veux
Mais celle de jeter au panier
Une histoire personnelle faite de morceaux de vie
Une vie en hoquets et soubresauts
Passant des sports équestres à la stratégie,
Agrémentée de propos philosophiques
Voire spirituels et de prétentions artistiques…
Pourtant ne dit-on pas
Qui trop embrasse, mal étreint ?
Mais le champ des investigations
Est si large et tentant…
Comment ne pas se laisser séduire
Par les sirènes d’un monde où tout est à découvrir
Devant ces ignorances déguisées en savoir poussif
Je vous rends hommage, lecteurs inconnus
Qui supportez depuis longtemps
Le fou du roi et l’asticot dénudé
© Loup Francart
07:42 Publié dans 42. Créations poèmes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poésie, écriture, poème, littérature | Imprimer
09/11/2013
Visite chez Apple, à l'Opéra
Sublime cette atmosphère ! Une banque détournée
Emplie de rêves flottant parmi les spectres…
Ils vont et viennent contemplant les machines
Des rectangles fins, enluminés, chatoyants
Sur lesquelles ils promènent leurs doigts
Tels E.T. levant sa main vers le ciel…
Aussitôt viennent les messagers en bleu
Cavaliers du désert chevauchant les désirs
Faisant briller l’étoile polaire montrée de l’index…
L’écran s’illumine comme une pierre précieuse
Et il parle net, inspiré, d’une voix ferme
Il viole la conscience de l’élu extasié
Il engage ses pions étincelants et alignés
Les fait miroiter en rondes diaboliques
Donne un coup de baguette magique
Et jette son filet sur la tentation solitaire…
Attrapé, le client se laisse aspirer...
Quelles paroles doucereuses susurre-t-il,
Quelle goutte à goutte distille-t-il
A l’oreille attentive et extasiée
D’appétences goulues et d’espoirs admiratifs…
Alors, convaincu d’avoir jeté la concupiscence
Et d’en recueillir les fruits doucereux
Le mage bleu sort de sa poche la boîte…
Elle n’est pas grande, elle fait tout
Elle tète avec entrain la manne ruisselante
D’un index recourbé, à l’image d’un chef d’orchestre
Il tape les étranges caractères fluorescents
D’un sourire condescendant, mais aimable
Il appuie sur le bouton final, une étincelle
Un départ dans la lune sans retour
Un oui discrètement prononcé : c’est bon…
Et vous voici possesseur d’un petit paquet doré
Merveille de beauté tentatrice, douce au toucher
Rayonnante et radieuse dans vos doigts emmêlés
Que vous ouvrez avec précaution et impatience…
L’objet repose au creux de son écrin
Comme un bijou somptueux et aguichant
Il vous tarde de le saisir et le caresser
Il tient dans la main avec aisance
Il repose au creux de votre paume
Vous allongez la main opposée
Et l’index rougeoyant délivre sa vérité…
Merci ô pourfendeur de rêves
Merci vendeur affriolant et décharné
Vous sortez de la banque enfumée
Et vous vous envolez sur les toits de l’opéra
Contemplant ce monde excité
Qui rassemble dans ce petit appareil
Toute sa vivacité, son emprise et sa tromperie…
La communication vous souhaite la bienvenue !
© Loup Francart
07:26 Publié dans 42. Créations poèmes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poésie, écriture, poème, littérature, communication, commerce, vente | Imprimer
08/11/2013
Dépression et méditation
Un état dépressif a souvent pour origine le sentiment de ne pouvoir maîtriser sa vie. Il vient après un évènement qui remet en cause votre vie, vos projets, ce qui compte pour vous. Ce qui semble être un échec dans votre vie devient un enfer car vous ne pouvez vous en échapper. Ce sentiment devient si puissant qu’il finit par occuper en permanence les pensées et de ce fait crée une tension psychologique incontrôlable. Comment s’en sortir ? Conscient que ma souffrance était due au fait que j’étais incapable de m’empêcher de ruminer toujours les mêmes pensées, j’ai cherché à faire taire cette souffrance.
En dehors de la médecine, je constatais que malheureusement notre civilisation occidentale ne nous offre rien. Je ne trouvais rien dans notre religion qui m’offre les moyens de lutter efficacement, rien que des consolations inopérantes face à une vie subie, de bonnes paroles sur l’amour et la compassion. Je me tournais alors vers la civilisation orientale qui propose non pas des philosophies différentes, mais de véritables sciences expérimentales destinées à transformer la psychologie ordinaire de l’homme.
Je commençais à pratiquer la méditation chaque jour, tôt le matin, sans chercher autre chose que l’apaisement du mental. Méditant d’abord sur le monde extérieur, j’en vins peu à peu à pouvoir méditer sur moi-même et mes propres réactions face à l’événement qui avait détruit mon univers antérieur. Cette pratique de la méditation créa très vite un soulagement. M’ouvrant à nouveau au monde, je me libérais du ruminement permanent des mêmes pensées. Cependant, je constatais qu’elles revenaient progressivement au cours de la journée parce que l’effet de la méditation du matin s’atténuait.
C’est ainsi que j’en vins à comprendre la nécessité d’un contrôle permanent sur soi. La seule méditation est insuffisante si elle ne se prolonge pas au cours de la journée. Elle crée une libération de la pensée, mais cette libération implique pour se prolonger la nécessité d’une transformation de soi, c’est à dire non seulement de son mental, mais aussi de ses perceptions, de ses émotions, de ses sentiments. Peu à peu, je découvris que la compréhension des choses et des êtres ne vient pas seulement de l’intelligence, mais aussi du cœur et du corps.
07:21 Publié dans 61. Considérations spirituelles | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : méditation, connaissance de soi, réalisation de soi, spiritualité | Imprimer
07/11/2013
Nelson Diaz-Lopes
Nelson Dias-Lopes exposait à la galerie Marie-Laure de l’Ecotais (49, rue de Seine 75006) jusqu’au 2 novembre. Il est brésilien, architecte et peintre. Il a commencé avec des collages de papiers peints, puis des assemblages en relief et enfin la peinture. Il n’abandonne cependant pas le relief, mais celui-ci épouse la peinture et n’est là que pour la mettre en valeur. Il apporte simplement la possibilité de créer des variations oculaires qui renforce l’effet bigarré du tableau sans jamais construire autre chose qu’un nouveau jeu de lumière et de couleurs.
Les couleurs sont chaudes, tropicales pourraient-on dire. Elles débordent de pesanteur ardente, comme un coucher de soleil au-dessus de la forêt équatoriale dans la moiteur des fleuves lents et paresseux traversant la plaine qui n’en finit pas. Les courbes sont peu sensibles, alanguies également et l’horizontalité accentue cette oppression visuelle qui devient presque vivante.
Cette fois-ci, c’est le matin. La visibilité est claire, lumineuse, plus éveillée. Les flots coulent avec abondance, encombrés de quelques récifs. Mais la tranquillité n’en est pas entachée. Elle est moins étouffante.
Parfois l’effet de paysages n’existe plus. Rien que de la géométrie, de vastes triangles allongées verticalement ou horizontalement avec toujours autant de couleurs vives, flamboyantes, comme un feu permanent qui couve et recouvre les émotions.
J’aime moins ces entrelacs et le choix des couleurs, plus terne, plus brouillon, sans doute accrocheur, mais plus par leur bizarrerie que par une vraie beauté sensuelle.
Et là les couleurs de la ville, pauvre, mais joyeuse, à l’image des couleurs des maisons, bariolées, enchantées, délirantes, en contrepoison de la misère. Et l’on entend en sourdine les danses des péons dans le soleil de la soirée, puis dans la noirceur de la nuit.
A l’entrée dans l’hiver l’optimisme nous gagne rien que de contempler cette arrogance dans la couleur.
07:58 Publié dans 21. Impressions picturales | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : peinture, couleur, abstrait, horizon | Imprimer
06/11/2013
Le pouvoir
« Il existe deux sortes de pouvoir ; spirituel et politique.
Le pouvoir politique, c’est celui d’influencer les autres par la contrainte. Le pouvoir d’embaucher et de licencier, de punir, d’emprisonner, de tuer même. Le pouvoir politique n’a rien à voir avec la sagesse ou la bienveillance. Il ne tient pas à une personne ni à son caractère, mais simplement à l’argent ou à la position. C’est pourquoi on l’appelle souvent le pouvoir temporel, car il est en général temporaire.
Le pouvoir spirituel, c’est le pouvoir d’influencer les autres à travers notre être, par exemple par la gentillesse, l’humour, la sagesse et l’amour. Son emblème est l’humilité. Plus les gens développent leur spiritualité, plus ils ont conscience que le pouvoir est un don de Dieu et n’a rien ou peu à voir avec leur réussite. »
Dr Scott Peck, Ainsi pourrait être le monde, pour réapprendre à vivre ensemble, Rober Laffont, 1994, p.139.
Alors choisissons le pouvoir spirituel, me direz-vous. Ce n’est pas si simple. D’abord, pour beaucoup de gens, le seul pouvoir est le pouvoir politique. Ils ne peuvent admettre un monde dans lequel ils seraient libres. Cela leur demande trop d’effort. Il est plus simple pour eux de se laisser guider dans un cadre précis duquel toute sortie mérite une punition. Enfermé dans un cocon de fer, tel est leur idéal. L’exercice du pouvoir spirituel n’est possible que si l’autre accepte de s’assumer en toute liberté. Le pouvoir spirituel propose. Il n’impose pas. Le pouvoir politique, lui, contraint. La personne qui l'exerce est dans une position hiérarchique et il peut exercer soit de manière bienveillante, soit de manière oppressante. Tout dépend de son passé et de la façon dont il a obtenu ce pouvoir.
Les limites du pouvoir politique sont données par la loi qui est variable selon les lieux et le temps. Il n’y a pas de limites au pouvoir spirituel. Il est beaucoup plus difficile à exercer pour cette raison. Et l’on a vu dans l’histoire de nombreux cas de pouvoir spirituel transformés en pouvoir politique contraignant. Pourquoi en est-il ainsi ? Parce que le pouvoir spirituel exige en préalable à tout exercice de l’utiliser pour se changer soi-même. Ce n’est que lorsque ce retournement personnel à été fait qu’il est possible de revêtir le pouvoir spirituel.
Alors méfions-nous des faux saints comme des politiques arrivistes et rendons à César ce qui lui appartient, sans confusion des genres !
NB. Scott Peck est un psychiatre. Il est l'auteur du livre "le chemin le moins fréquenté", guide sur l'éducation et la maturité, écrit en 1976. Il a ensuite abouti à son prolongement, "au delà du chemin le moins fréquenté". Il ne fait aucune distinction entre le spirituel et le mental donc aucune distinction entre évoluer spirituellement et évoluer mentalement, pour lui c'est la même chose. Il pense que l'évolution personnelle implique un travail complexe et ardu qui dure toute la vie et considère que la psychothérapie peut être une aide substantielle mais qu'elle n'est pas fondamentale. Il se situe hors tout courant dogmatique, ne se déclare ni Freudien, ni Jungien, ni Adlérien et défend la pluralité des voix vers l'évolution spirituelle.
07:19 Publié dans 11. Considérations diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : politique, société, pouvoir, autorité | Imprimer
05/11/2013
La détermination
Est-il vrai que la prévisibilité entraîne la détermination ?
Certes, il est prévu qu’un jour tout un chacun meurt
Il est sûr que tel jour, à telle heure, l’éclipse aura lieu
Est-ce une prison de fer ou un guide vers la liberté ?
La prévisibilité fixe-t-elle un cadre à la mobilité de l’esprit
Qui va et vient dans la multitude des possibles ?
Si tout bouge, rien ne bouge
La mobilité n’est que par rapport à un point fixe
La prévisibilité est référence, fil ténu étiré
Qui court d’un point à un autre, tel un muscle
Accroché sur le squelette de la providence
Et cette toile d’araignée s’étire dans l’espace
Des sensations, émotions, sentiments, pensées…
Mais qu’un jour le fil vient à rompre
Alors seule la détermination de l’être
Permettra de rebondir en un saut
Au-dessus du trou béant de l’échec
Résilience, rebondissement de la trajectoire
Ou détermination, sursaut de volonté
Que choisir, l’un qui n’est que circonstance de fait
Ou l’autre qui est rebond de l’esprit au-delà des faits
Les deux sont nécessaires, yin et yang
Chaussure et pied, rêve et réalité
La détermination est le chemin que l’on se creuse
Dans des circonstances incontrôlables
Mais prévisibles. Avec quel bistouri ?
Mélange de volonté, d’espoir et de courage
L’humain s’envole vers d’autres cieux
Ceux qui ne comptent rien que ce trou
Dans la poitrine devenu l’unique gaz
Du moteur personnel au-delà du moi…
Débarrassé de son histoire personnelle
L’âme fait des pirouettes d’extase
Dans l’air surchargé de bonheur
© Loup Francart
07:28 Publié dans 42. Créations poèmes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poésie, écriture, poème, littérature | Imprimer
04/11/2013
Hélicéchappées 2
Débrayage et glissade ! Le dessin est bien sûr inspiré du précédent (voir le 18 octobre), mais quel silence, un simple bruit de fond, et encore !
Et pour la prochaine fois, un assemblage donnant une toute autre vision.
Acrylique sur toile, 80 cm x 80 cm
© Loup Francart
07:43 Publié dans 23. Créations peintures | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : op'art, art cinétique, abstrait, géométrie | Imprimer
03/11/2013
La sieste
La sieste, obligation enfantine qui, chaque jour, entraîne des protestations, légitimes ou non, de la part des enfants. Mais comment ravir à leurs parents cette heure qui leur permet d’échapper à l’esclavage de leur progéniture ? De ces heures de repos forcé pendant les vacances d’été, il ne retient que le vol des mouches dans la pièce. Non, n’allez pas croire que cette pièce était un taudis attirant les mouches et autres prédateurs de viande fraîche. Elle leur offrait un havre de paix qu’eux-mêmes n’appréciaient guère, mais qui était réel. Il faisait chaud en cette saison, lorsque le soleil tapait sur les tuiles. Ils étaient découverts, une simple chemise et un drap était leur seule protection.
Il ferme les yeux et se revoit, étendu sur un lit cage, l’esprit embrumé, dans le silence de l’après-midi qui permettait d’entendre les rares voitures prendre le tournant à angle droit au bout du pré. Les vaches se tenaient souvent sous un des seuls arbres à deux pas de leur fenêtre. On les entendait ruminer, faire mille bruits, discrets ou non, parfois même meugler pour on ne savait quelle raison. Il attendait que le sommeil, libérateur de son ennui, le prenne dans ses bras et le conduise au pays des rêves. Il rêvait de fraîcheur, d’eau claire, de forêt profonde, de cave froide, jusqu’au moment où il se réveillait transpirant de chaud, une soif inextinguible au fond de la gorge.
Mais ce dont il se souvient le mieux, souvenir corporel et vivant, c’est le bourdonnement des mouches qui avaient élu domicile dans la pièce. C’était supportable lorsqu’elles se contentaient de tourner en rond au dessus de leurs têtes avant de se poser sur le plafond, en défi à toute gravité. Mais il leur arrivait trop souvent d’explorer leurs propres personnes, en particulier leurs visages encore enfantins qui devaient être doux à leurs pattes velues. Alors ils faisaient un geste de la main vers la joue ou le nez pour l’obliger à reprendre son envol ou, simplement, ils bougeaient la tête d’un geste décidé et rapide, comme le font les bêtes qui savent déclencher des ondulations de la peau propres à décourager tout animal à ailes. Le bourdonnement reprenait jusqu’à une nouvelle escale qui pouvait parfois être une main sortie du drap ou un pied en quête de fraîcheur.
Il leur est arrivé, sachant leurs parents au rez-de-chaussée, loin des cris extasiés des trois frères, de jouer au petit tailleur. « Sept d’un coup », était-ce possible ? Les mouches tourbillonnaient en une ronde inlassable et ne se posaient qu’épisodiquement sur eux. La malheureuse mouche qui s’y essayait, était alors prise immédiatement pour cible. Il s’agissait d’approcher la main en utilisant des stratagèmes dignes de Sun Zu, par derrière, au dessus ou sur le côté. Le plus souvent, c’était peine perdue. L’insecte disposait de ressources insoupçonnées dans l’accélération, décollant comme une balle de fusil, pour ensuite tourner en rond au dessus du bras impuissant. Parfois, une d’entre elles se laissaient sacrifier, comme un suicide volontaire, pour prolonger le jeu. Ils poussaient alors des cris aigus et faisaient un bâton sur une feuille de papier qui servait à compter les points. « J’en ai trois ! » Cela, bien sûr, donnait lieu à des disputes sans fin sur le nombre réel de victoires, chacun ajoutant un bâton supplémentaire lorsque les autres avaient le dos tourné. Aussi en étaient-ils venus à faire des tas, maigres il est vrai, de mouches tuées au champ d’honneur. Ce n’était jamais que trois ou quatre cadavres les pattes en l’air, les ailes défraîchies, qu’ils jetaient ensuite par la fenêtre avant l’arrivée de leur mère pour le réveil. En entendant ses pas, ils se précipitaient dans le lit et faisaient semblant de dormir, ouvrant un œil fatigué à son appel. Certes, le soir la fatigue se faisait plus lourde que d’habitude, mais peu importe, la guerre déclarée était un événement important de la journée à laquelle il était difficile de renoncer.
07:04 Publié dans 11. Considérations diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : société, enfance, famille, mouche, petit tailleur | Imprimer
02/11/2013
Rêve argentin
http://www.youtube.com/watch?v=0qxbSN_-FP0
Quelle fougue émouvante et mélancolique!
On se promène dans les rues de Buenos Aires un soir de regret, quand la folie tourmente l’entendement et déguise les sens. On part vers le port avec le refrain en tête et peu à peu on court au rythme de celui-ci.
Course folle, parsemée d’imprévus dans les rues glauques et colorées du barrio de la Boca où s’amuse une population insolite de couples de tango déhanchés. Et le rythme s’accélère, devenant de plus en plus prenant, vous conduisant vers l’eau noire sur laquelle flottent de grands navires fantomatiques. Vous croisez des marins enivrés qui chantent les refrains s’échappant des troquets et qui tournoient sur place dans un ballet d’enfer. Enfin vous arrivez au bord de l’eau, noire comme la nuit, et vous contemplez un navire en partance vers un port inconnu, loin de tout.
Assis sur le bord du quai, vous rêvez et ce refrain vous entraîne si loin que vous perdez votre âme et vous retrouvez nu face à l’océan.
07:30 Publié dans 51. Impressions musicales | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : musique, improvisation, tango, argentine, violoncelle, accordéon | Imprimer
01/11/2013
N'importe quoi !
Tel l’avion qui tourne au ciel
Dans le brouillard des pensées
Il retrouve sa voix dans l’air…
Plongeon dans le vide, vertical
Obsédant et tyrannique …
Une pirouette, puis deux
Avant la succession de figures
En danse hélicoïdale…
Chaque nom se couvre d’opprobre
Banni par la coupure du temps
Il n’en reste plus
Que quelques mots sur la pierre…
Ce ballet aérien poursuit
En attaque flambant
Sa routine meurtrière…
Mais où vont donc les mots
Qui vous passent par la tête ?
Le cimetière de l’écriture
Est suspendu aux paroles frauduleuses…
Les croix usées des tombes
Grattent leurs puces sauvages
Au dos des concepts insolites
Allons, allons-y…
Dans les vallons
Des pleurs de crocodile…
Où vont les larmes des mots ?
© Loup Francart
07:34 Publié dans 42. Créations poèmes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poème, écriture, poésie, littérature | Imprimer
31/10/2013
FIAC 2013 - 3
Commençons par une très belle sérigraphie abstraite de Julio Le Parc, intitulée "A partir d’un ciel de van Gogh".
Quelle élégance ! Faite de vides et de pleins symbolisés par le cercle noir en haut et le demi-cercle blanc en bas, elle se conjugue, dans la deuxième moitié supérieure, avec la délicatesse des cercles qui s’enchevêtrent, en noir ou en blanc, en lunes, demi-lunes, quart de lunes, sous forme de dentelles précises qui arrêtent le regard sans qu’il y trouve quelque chose de précis.
Une huile sur toile de Jakob Bill, de 2005, à la galerie Denise René, très simple, harmonieuse comme un château à la Française, si l’on songe à lui faire faire un quart de tour à droite. Deux couleurs, deux types de traits horizontaux et verticaux, avec au centre une symétrie retournée. On peut penser qu’il manque en bas un trait horizontal à partir duquel partiraient les deux traits verticaux. Eh bien non ! Et c’est sans doute ce qui en fait le charme.
Toujours à la galerie Denise René, cette œuvre qui n’est ni une toile, ni une sculpture, un tableau sur lequel sont collées ces formes, blanches d’un côté et noires de l’autre. C’est l’œuvre d’un groupe d’artistes bruxellois qui explorent de vastes champs (architecture, urbanisme, art, design, musique, danse contemporaine). « Le nom du groupe abrite une signification phonétique et une signification écrite : celle de la prononciation « labo » pour leur approche expérimentale et celle, écrite, de « bau », le mot allemand pour « construction ». Ce double sens à la croisée du médium oral et écrit, représente le cadre d'un travail conceptuel, théorique et artistique étudiant l'influence des technologies de pointe sur l'art ; c'est une conception de l'art comme média. Dans cette perspective, leur nom est aussi une référence au Bauhaus qui poursuivit les mêmes objectifs puisque le design industriel peut être vu comme le résultat d'une méthodologie, d'une réflexion interdisciplinaire et expérimentale sur l'influence de l'industrialisation en cours sur le langage de l'art. » (From : http://www.lespressesdureel.com/ouvrage.php?id=1829)
Admirons cette sculpture discrète et équilibrée, pleine de majesté, faite de rayons de vélo, de fils entremêlés et de morceaux de toile. Elle a de la classe, mais j’ai mal photographié le nom de l’auteur et ne peux vous le donner.
Pour vous laisser sourire, cette œuvre qui n’a que la beauté de l’insolite. Elle est signée Marcus Oehlen et se dénomme Freefidelity-camp (2001).
Enfin cette sculpture curieuse de deux personnages conversant dans leurs fauteuils, riant furieusement d’être ainsi suspendus sur un mur, comme si le mouvement de leur balançoire avait stoppé sa course contre le panneau. Ils sont gris, pourquoi, je ne sais, et je sais encore moins pourquoi l’un d’eux à deux pantoufles de cuir jaune. L’auteur est Juan Munoz qui a intitulé son œuvre « 2 seated on the wall with big chairs (2000).
07:54 Publié dans 21. Impressions picturales | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art contemporain, marché de l'art, foire, salon, op'art, art abstrait, sculpture, peinture | Imprimer
30/10/2013
FIAC 2013 - 2
L’art cinétique ou l’optique art et surtout l’art abstrait ont une place importante à la FIAC. Certaines galeries en ont fait leur spécialité, telle la galerie Denise René, qui expose deux très beaux Aurélie Nemours, l’un au-dessus de l’autre, appelés 4+3+9+16 b+t+6 et 7 (facile de s’en rappeler !).
Leur beauté tient à leur simplicité. Surtout ne rien chercher à voir, car alors ils ne signifient rien. Simplement se laisser charmer par leur rondeur (bien qu’il n’y ait que des angles droits) et la couleur des sentiments qu’ils inspirent (malgré l’absence de couleurs si l’on considère que le noir et le blanc ne consacrent que des limites).
Une galerie de Berlin (Captain Petzel) expose une magnifique toile de Sarah Morris, intitulée Marquès de Herval et peinte très récemment.
Elle est tendre, veloutée, très féminine dans ses couleurs, mais très masculine dans ses formes. L’oblique (ni debout, ni couché) le caractérise. L’œil saute immédiatement sur le rectangle le plus grand (en haut à gauche) et sur le saumon prédominant sur l’orange. Puis, les diagonales du bas, à gauche encore, semblent dire : « N’ai-je pas mon élégance ? » Enfin, le troisième coup d’œil va à la rencontre des diagonales et des droites verticales et horizontales, dans ce petit carré non clos, à l’emplacement du nombre d’or. Oui, c’est harmonieux, viril et envoutant.
Tout ceci dans un décor de rêve, du moins en certains lieux, loin des pâtés de certains artistes :
A propos, restons sérieux. La lance à incendie d’hier n’est pas une œuvre d’un artiste connu ou inconnu. Il s’agit tout simplement d’une véritable lance que des gens mal intentionnés ont déroulée de son support. Néanmoins, elle est bien présente à la FIAC ou au moins au Grand Palais.
07:17 Publié dans 21. Impressions picturales | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art optique, art abstrait, art cinétique, fiac | Imprimer
28/10/2013
FIAC 2013 - 1
La FIAC 2013 ressemble à s’y méprendre à celle de 2012 : même foule, composée de personnes âgées habillées en Play boy (pantalon violet, petite veste serrée, col ouvert ou foulard maghrébin, et, pour les femmes, pantalon encore plus serré, ceinture gigantesque, maquillage éprouvé), de messieurs très stricts en costume trois pièces, de jeunes de deux sortes, farfelus de style pseudo-artistes ou élégants comme un homme d’affaires et bien sûr des inévitables hôtesses d'accueil au sourire chaleureux.
Les œuvres, si l’on peut appeler ainsi certaines d’entre elles, sont à plus de cinquante pour cent désolantes, à trente pour cent affligeantes et il ne reste que vingt pour cent sur lesquelles on peut se pencher avec intérêt, et encore… Qu’est-ce qui les caractérise quasiment toutes : le paraître, au même titre que les gens qui les regardent. Et, pour paraître, il faut se faire remarquer. Cela a toujours été le cas, me direz-vous. Oui, mais dans l’art on cherchait, jusqu’à il y a peu, à le faire par la beauté. Maintenant, le laid, le vulgaire, l’insipide servent à attirer autant que la beauté. Surprendre est devenu le maître mot et le seul acte possible dans ce monde curieux où le paraître est le seul mode de vivre. Admirez cette lance à incendie, modèle 1980, inutilisable, symbole d’une humanité molle, acceptant tout, même l’insipide. Ce pourrait être, paraît-il, la vie politique de notre pays…
Cependant, rassurez-vous, il y a également quelques œuvres dignes d’un vrai salon et quelques galeries qui font perdurer l’idéal millénaire. Aujourd’hui, rendons hommage à Louise Nevelson, que j’ai découverte à l’âge de vingt-cinq ans et que je retrouve, intacte et enchanteresse dans ce meuble, objet, œuvre, que sais-je… La poésie des boîtes qui s’assemblent les unes dans les autres, boîtes dont le sens n’apparaît pas parce que contenant et non contenu. Peintes en noir, accumulant parfois quelques autres objets, elles défient par leur équilibre et leur beauté sauvage la notion même d’esthétisme. Cela peut aller jusqu’à d’étranges machines pour ne rien faire, pourvus d’engrenages, de roues qui ne bougent pas, voire de robinets d’où rien ne peut couler. Ici, c’est une sorte de meuble, armoire, buffet, inutilisable, objet de décoration inopérant, ou encore instrument de musique des musiciens ambulants, dont on ne peut bien sûr tirer aucun son.
En quoi est-elle belle, cette pièce ? Tout d’abord l’équilibre harmonieux des différentes boites qui la composent. Mais surtout, et c’est en cela qu’elle constitue un œuvre d’art, elle se laisse regarder, on ne sait que dire, mais on la regarde encore et peu à peu s’installe la paix. Vous êtes transformé par cet objet insolite qui capte votre regard. Vous éprouvez ce tremblement intérieur qui vous fait dire « C’est beau ». Vous ne savez pourquoi, mais cela vous suffit.
07:12 Publié dans 21. Impressions picturales | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art contemporain, foire, beauté | Imprimer
27/10/2013
Fin
Un fil, ténu, isolé, tendu comme un arc
Il balance entre le ciel et la terre
Et le cœur chavire entre ces deux extrêmes
Le plein des souvenirs et le vide de l’avenir
Qui donc coupera de sa lame aiguisée
Ce hauban secoué par le vent et l’âge
Et laissera partir l’âme purifiée
Vers l’inconnu attendu et craint
La vive force s’est calmée, sereine
Et assume sa faiblesse, gracieusement
Le regard dit encore la volonté
Mais elle est désormais intérieure
Et le souffle de la vie se dérobe
Comme le filet d’eau d’une source
Désormais tarie. Quelques gouttes encore
Et l’âme s’échappe en un soupir
Est-elle passée de l’autre côté ?
A-t-elle franchi le rubicond lumineux
Parcouru le tunnel d’inversion
Où l’envers devient l’endroit ?
Partagé entre le silence et la parole
Chacun est réservé devant le mystère
Une aspiration vers un sourire
Ou l’effondrement d’un rêve ?
© Loup Francart
07:38 Publié dans 42. Créations poèmes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poésie, écriture, poème, littérature | Imprimer
26/10/2013
Jesu, meine Freude (Motet BWV 227) de Jean-Sébastien Bach par le Vocalconsort Berlin
http://www.youtube.com/watch?v=a4SKrGYMp7A
Un moment de pleine paix, un acte d’abandon, l’homme face à l’amour divin, l’agapè, un amour pur qui s’exprime sobrement, à plusieurs voix qui met en évidence son amplitude. L’harmonie chantante n’est perceptible qu’à certains moments, laissant sur d’autres mesures chaque voix indépendante, comme détachée des autres. Et cette succession de passage font du motet un morceau singulier, plein d’inattendus et de variations. L’accompagnement très discret de l’orgue renforce les voix sans jamais les écraser comme c’est souvent le cas.
Alors laissons-nous porter par ce chant magnifique dont les paroles,même si elles sont quelque peu désuètes, oscillent entre l’abandon amoureux et l’impératif moral :
Jésus, ma joie, la prairie de mon cœur,
Jésus, mon ornement,
depuis longtemps, ce (mon) cœur est anxieux
et te réclame !
Agneau de Dieu, mon fiancé,
hors toi, sur la Terre,
rien ne doit m'être plus cher
07:34 Publié dans 51. Impressions musicales | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : musique, classique, baroque, choral, chant | Imprimer
25/10/2013
Ni trop, ni trop peu : le juste milieu
Le juste milieu est la voie de Dieu. C’est un équilibre fragile, toujours en suspend, mais combien prometteur, car il prolonge l’intentionnalité de la vie.
Equilibre des forces, équilibre des volontés, équilibre de tout ce qui s’affronte ou au moins s’oppose. Equilibre et non extinction des affrontements par une entropie des forces et des volontés opposées.
L’univers ne nous conduit ni vers la fuite dans l’infini, ni vers le retour au big bang. Il cherche la maîtrise physique, informationnelle et psychique des influences qui concourent à la réalisation de sa divinisation. Telle est l’intentionnalité du créateur.
La création de la noosphère, nappe de pensée enveloppant la biosphère, puis son développement, comme une enveloppe immatérielle, constitue l’outil qui doit permettre cet avènement. Un outil et non une fin.
« Par jeu conjugué de deux courbures, toutes deux de nature cosmique, – l’une physique (rondeur de la Terre), et l’autre psychique (l’attraction du réfléchi sur lui-même) – l’Humanité se trouve prise, ainsi qu’en un engrenage, au cœur d’un « vortex » toujours accéléré de totalisation sur elle-même. » (Teillard de Chardin).
07:19 Publié dans 61. Considérations spirituelles | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : religion, science, devenir, équilibre | Imprimer
24/10/2013
La galerie Véro-Dodat
Déserte, mais splendide, aux boutiques regorgeant d’objets rares, chers ou insolites, la galerie Véro-dodat est une curiosité parisienne, précieuse et bien peignée.
L’entrée est discrète, en particulier dans la rue Jean-Jacques Rousseau. L’autre est plus grandiose de par ses statues qui surmontent le portail.
L’impression de profondeur est donnée par les carreaux de marbre noirs et blancs. On a presqu’envie de se laisser glisser sur les fesses jusqu’à l’autre bout, comme dans un toboggan. La symétrie avec la verrière en fait presqu’une œuvre d’art optique : quelle ligne de fuite parfaite !
Le plafond de verrière possède cependant quelques peintures du siècle dernier, romantiques comme le reste.
Vous entrez dans un salon aux vitrines strictes, taillées dans le bois et un alliage de cuivre. Elles sont magnifiques, petites fenêtres arrondies en haut, portes somptueuses, éclairages de boules suspendues au-dessus de chaque porte.
Et chaque boutique est souvent un trésor de présentation, parfois d’objets inutiles, comme abandonnées, à la manière des romantiques du XIXème siècle. On s’attend à voir sur un lit de repos une créature rêveuse, pas tout à fait endormie, ni non plus entièrement réveillée. Mais le bruit des pas d’un passant résonant sur le carrelage vous ramène à la réalité : le vide d’un désert grandiose peuplé de cadavres exquis conservés dans leur bocal de verre.
Des friandises, bien sûr, ou des produits de beauté
Et même des jambes dans tous les sens
07:38 Publié dans 14. Promenades | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : promenade, passage, curiosité, boutiques | Imprimer
23/10/2013
Avant le big bang
Avant le big bang, qu’y avait-il ?
Le néant, le vide, l’inexistant ?
Ou le Tout, la vie pleine, le créateur ?
Qui a mis cette étincelle en route ?
Cela craque une allumette
Et tout commence par une explosion
"Au commencement Dieu créa le ciel et la terre"
Rien et deux mondes, le psychique et le physique
Le ciel ne se mesure pas. Il vous prend
Et son parfum vous le fait désirer
"Que la lumière soit et la lumière fut"
Transpercé par ce coup de lance
Le monde se mit à bouger. Première nuit
Plongée dans la matière. Quel dépaysement…
© Loup Francart
07:20 Publié dans 42. Créations poèmes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poésie, écriture, poème, littérature, univers, création, information | Imprimer
22/10/2013
Suite pour violoncelle N°1 en sol majeur, interprétée par Mischa Maisky
https://www.youtube.com/watch?v=mGQLXRTl3Z0
Le prélude est une onde intuitive au-delà de la musique…
Une vibration troublant la pensée qui ne peut l’évaluer, entraînée par cette danse qui n’en est pas une… Une onde de notes qui s’enchaînent dans une logique absolue sans que l’on puisse la prévoir.
Bach, musicien de l’âme, a réussi la synthèse entre l’intuition musicale et la raison poussée à l’extrême de la logique musicale. Et cette rencontre entre ces deux manières d’aborder le monde lui donne une force sans équivalent encore dans le monde de la musique.
Laissons-nous porter par ces vagues de notes qui nous entraînent dans un ciel plus pur, dénué de nuages, vierge de l’aspérité égocentrique. Nous volons sur la pensée, la contemplant de loin, comme un pilote de Montgolfière, sans bruit, bercé par le vent léger qui nous entraîne au-delà des idées, au-delà des mots dans cet amas de sensations sans formes qui procure les délices d’une connaissance différente, irraisonnée, mais fortement prégnante. C’est un courant d’ondes, une danse sur un fil électrique que l’équilibriste n’ose toucher longuement. Et l’esprit ne se lasse pas de cet intermède qui s’insinue dans tout le corps, le laissant en transe.
Oui, Bach est vraiment le plus grand des musiciens par la synthèse qu’il effectue entre le cœur, vision intuitive d’une mélodie au-delà d’une phrase musicale, et la raison, construction intelligente et ordonnée des notes entre elles.
07:29 Publié dans 51. Impressions musicales | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : musique classique, violoncelle, baroque | Imprimer
21/10/2013
Ombres et lumières de Venise : Bernard Bouin
Venise, entourée de sa brume d’ondes et de rêve, mystérieuse comme une femme qui ne se dévoile que prudemment. Elle attire par la tendresse de l’eau et de la lumière qui s’y reflète. Elle rejette par la froideur et l’inaccessibilité de sa masse composée de ruelles et de couloirs.
Et Venise à nouveau, soleil couchant, dans la gloire de son site exceptionnel, eau, ciel et terre confondus, contraste des lumières, diaphane de l’air, aérien de l’eau, noirceur des terres et de la ville.
Encore Venise, approchée, domestiquée, laissant voir ses deux campaniles, chiens de garde de sa virginité. Elle ne se dévoile toujours pas, reste sur son quant-à-soi, imprenable, inimaginable, comme un mythe inatteignable, mais vivant, comme une naissance.
Cette exposition se trouve galerie de l’Europe, 55 rue de Seine, jusqu’au 22 octobre (alors pressez-vous !). Nous en reparlerons, ainsi que du peintre évidemment, qui est Bernard Bouin.
07:22 Publié dans 21. Impressions picturales | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : peinture, figuratif, voyage, cité des doges | Imprimer
20/10/2013
Matière et esprit
Est-il possible que nos scientifiques ne prennent comme objet d’étude que la matière ? Ignorent-ils que la pensée existe ? Surement pas ! Pourtant, pour eux, seule la matière est réelle. L’esprit ou l’âme, ou le moi et le soi, n’existent pas. L’intelligence ? Peut-être. Un simple assemblage de cellules qui, par le hasard ou la nécessité, est devenu un objet capable de produire de la pensée.
Mais qu’est-ce que la pensée ? Une activité psychique (et non physique) ou une représentation psychique permettant de concevoir le monde (pensare : peser), c’est-à-dire se le représenter et s’en faire une idée. La pensée, nous dit Platon, est le « discours que l'âme se tient à elle-même sur les objets qu'elle examine ». Elle établit, grâce aux informations fournies par nos sens, une sorte de miroir face au réel qui lui permet d’émettre un jugement et de prendre des décisions. Peut-on dire que toute cette merveilleuse machine qui permet la connaissance n’existe pas ?
Theillard de Chardin donne, à la suite d’autres philosophes (et maintenant, imperceptiblement, de quelques scientifiques), une explication : chaque parcelle de matière est faite d’un extérieur (perceptible par nos sens et étudié par la science) et d’un intérieur, qui échappe à l’étude de l’extérieur. Il y aurait donc un psychisme de la matière comme elle a un physique : chaque particule de matière dispose d’une psyché. Ce n’est que récemment que l’homme s’est rendu compte que non seulement les animaux, mais également les plantes pensaient et même agissaient. La mécanique quantique décrit la structure et l'évolution dans le temps et l'espace des phénomènes physiques à l'échelle de l'atome. Elle montre que « les électrons ne sont ni vraiment des ondes ni vraiment des particules. (…) Le monde quantique est étrange, le flou probabiliste y règne et au fond, il indique une structure sous-jacente aux phénomènes qui est au-delà de l'espace et du temps » (www.futura-sciences.com). Cela expliquerait le principe de superposition dans lequel un système physique peut se trouver dans un état et dans un autre (le chat de Schrodinger).
Mais n’entrons pas dans ces considérations trop compliquées pour nous et contentons-nous d’une réflexion d’hommes ordinaires. Certes, la science (mais laquelle ?) prend bien en compte le psychisme en tant que données d’étude permettant à la médecine et la psychologie d’établir des règles et de définir des principes. Mais inversement, la pensée en soi est exclue de l’étude de l’univers en tant qu’élément important pour le comprendre. On sait maintenant que la compréhension, c’est-à-dire toute vision de l’univers, dépend de la position de l’observateur (donc de son point de vue). Il y a ainsi une imbrication étroite entre l’univers physique, dit réel, et un univers psychique ou plutôt entre une vision de l’univers extérieur et une vision intérieure.
Oui, nous avons besoin de commencer à rapprocher philosophie et science, métaphysique et physique. C’est un des plus grands défis posé à nos chercheurs : agrandir la vision de ce qu’ils ont à chercher.
07:28 Publié dans 11. Considérations diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : science, philosophie, univers, métaphysique, théologie, pensée | Imprimer
19/10/2013
Les taches sur le mur
Les taches sur le mur
Sont l’ombre de mes pensées...
Une fenêtre recèle le ruban
Que porte un homme dans la rue...
La glace reflète l’envers des murs
Et les ombres transformées
Sont sans doute la vérité…
Qui se cache parmi les mots ?
C’est une longue énigme
Que je cherche encore
© Loup Francart
07:48 Publié dans 42. Créations poèmes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poème, écriture, poésie, littérature | Imprimer
18/10/2013
Hélicéchappée
Elle aurait pu tourner et s’échapper dans le vent de l’espace, mais la pesanteur a refreiné ses envies. Elle est rivée à son cadre et rien ne peut l’en faire bouger. Elle rêve pourtant de partir au loin, d’acquérir l’autonomie du trait, de la forme, voire de la couleur. Mais... Elle est figée pour l’éternité !
Acrylique sur toile, 80x80cm
© Loup Francart
07:33 Publié dans 23. Créations peintures | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art cinétique, art optique, op art, peinture acrylique | Imprimer
17/10/2013
La formule de Dieu, roman de José Rodrigues dos Santos
Acheté dans une brocante, qui trainait sur une table… Un thriller qui traite de l’origine de l’univers, à la frontière de la science et de la théologie mystique… Il n’est pas vieux (il date de 2006), il est important (575 pages), il combine de manière fine les dernières découvertes de la science sur le Big bang et son origine avec la Bible, le bouddhisme, le Tao, le Zen et autres philosophies ou religions. Tout cela est enrobé, comme une tarte tatin, d’une couche de messages codés où la cryptographie a fort à faire et se trouve surmonté du fantôme d’Einstein à l’origine de l’énigme.
Quel galimatias me direz-vous. Eh bien non ! C’est, malgré une histoire qui ne sert que de couverture au vrai fond du livre, un trésor de construction et de connaissance. Le point de vue de tous les grands savants y passe, chacun apportant sa pierre. L’illumination des grands mystiques également : la Cabbale avec ses sephirot, la bhagavad gita, le ying et le yang.
C’est beaucoup mieux que Dan Brown ou même Umberto Ecco. Bravo à ce journaliste qui met en scène Tomas Noronha, professeur de cryptologie et de langues anciennes et Ariana Pakravan chargée d’identifier un manuscrit écrit par Einstein, qui donnerait une formule permettant de construire une bombe atomique avec des moyens très simples. En fait, ce manuscrit cacherait la formule de Dieu, c’est-à-dire de l’origine du monde. Tout se précipite dans un tourbillon incessant entre l’Iran et ses ayatollahs, les Etats-Unis, bien sûr avec la CIA, le Tibet, toit du monde, et la fin de la vie, interrogation aussi pressante que celle de son commencement. La boucle est bouclée, mais comment : Que la lumière soit (telle est la formule de Dieu) ! Qui a fait naître cette lumière ?
L’univers naît, vit, meurt, entre dans la non existence et renaît à nouveau dans un cycle infini, dans un éternel retour qu’ils appellent la nuit et le jour de Brahman. L’histoire hindoue de la création du monde est celle de l’acte par lequel Dieu devient le monde, lequel devient Dieu. (p.570)
A la fin du silence se trouve la réponse.
A la fin de nos jours se trouve la mort.
A la fin de notre vie, un nouveau commencement. (p.571)
La fin est décevante. Elle ne nous apprend rien. Mais que de chemins parcourus entre la première et la dernière page.
Qui a créé la lumière ?
07:25 Publié dans 41. Impressions littéraires | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : roman, thriller, religion, science, big bang, dieu, mystique | Imprimer
16/10/2013
Le vol du bourdon, de Rimski Korsakov
http://www.youtube.com/watch?v=XZXippwOh8Q
Un moment de virtuosité, où le temps suspend son vol. Le bourdon est là, actif comme à son habitude, feuilletant chaque bouton de trèfle. Est-ce réellement un bourdon ? On pense plutôt à une abeille ou une guêpe. Le bourdon est trop lourd et maladroit. Mais Rimski Korsakov a dû en étudier beaucoup avant de pouvoir créer cette musique géniale. Exemple parfait d’une musique descriptive, alliance du son et de l’image, l’un réel, l’autre virtuelle, mais si profondément ancrée en soi que l’on se voit couché dans l’herbe, à l’écoute de ces battements d’ailes qui créent une tempête dans les nuages de l’imagination.
http://www.dailymotion.com/video/x111qdx_le-vol-du-bourdon-au-piano_music
Les deux interprétations se valent. La bassiste est aussi frêle que son basson. La pianiste a des mains ailées comme la voilure du bourdon.
Elles nous donnent à tous une leçon de travail qui vaut toutes les morales du monde !
07:28 Publié dans 51. Impressions musicales | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : musique, nature, virtuosité, piano, basson | Imprimer
15/10/2013
Les yeux
L’œil est le fond de l’âme
Mais celle-ci est-elle noire ou bleue ?
Le tripot ou les enfants sages ?
Trou d’épingle dans une feuille de papier
On y admire la pointe de l’humain
Source d’un rayonnement intense…
Ce peut être un soleil chaleureux
Une lune chafouine et malheureuse
Un astre inconnu et sans vie
Une étoile aiguisée et scintillante
Ou même un trou noir aspirant ton regard…
Les yeux de l’esprit sont la lampe de poche
De l’explorateur du château de verre
Ses larmes sont la seule vérité
Que la vue entraperçoit dans la brume…
Un tremblement à la surface de l’eau
Un grattement de doigts fragiles
Fuite du temps, absence d’espace…
Tu n’as plus que les yeux pour pleurer…
Il coûte les yeux de la tête !
Rien que cela ! Fait à l’œil pourtant
Par un aveugle aux mains de fée
Et la femme enceinte jusqu’aux yeux
L’achète comme un talisman précieux
Pour les beaux yeux de son amant…
L’argent, elle s’en bat l’œil
Ses rondeurs ne lui font pas froid aux yeux…
Et lorsque le regard, aux soirs d’été,
Dénote l’harmonie des sentiments
Qui est le mieux loti, l’œil de chat
Ou la larme de gazelle…
Manger des yeux vaut mieux
Même s’ils sont plus gros que le ventre
Que se manger le blanc des yeux…
L’œil de verre seul est impassible
Devant tant de provocations…
Ouvre l’œil ô mon âme
Et marche vers la lumière, impassible…
Quel coup d’œil ! Verts, les a-t-elle
Emeraudes en couple, deux phares dans la nuit…
De braise, l’autre les porte
On ne peut l’approcher, elle brûle…
De jais, ceux-ci roucoulent tendrement
Surpris de ne pas trouver la paire…
Noisettes, ils sortent des bois, tendres
Et se posent sur vous, charmeurs…
Vairons, l’âme boite dans son logement
Merlan frit ou œil de biche ?
Oui, le monde vu de l’œil de bœuf
Devient le centre du cyclone
Alors…
Ne gardez pas vos yeux dans votre poche
© Loup Francart
07:32 Publié dans 42. Créations poèmes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poème, écriture, poésie, littérature, vue, regard âme | Imprimer
14/10/2013
Les photographies de Robert et Shana Parke-Harrison
Et voici d’autres artistes américains tout aussi loufoques qu’Ethan Murrow, mais aussi doués, dans un processus de création très différent. Ce sont en effet des photographes. Mais dotés d’une imagination sans limites.
Ils réalisent leurs tableaux, parce que l’on peut bien parler de tableaux, c’est-à-dire d’une vision du monde propre à l’artiste, à partir de premières photographies montées sur papier grand format, qu’ils ajustent de façon à créer une véritable scène, dans laquelle leurs personnages jouent un rôle comique, naïf, navrant ou poétique. Tout cela est photographié à nouveau pour donner ces chefs d’œuvre imaginatifs.
« Notre processus de création tente bien souvent de faire une réplique de ce qui se passe dans les rêves, où des éléments n’ayant visiblement rien à faire ensemble, obéissent tous à un instant placé dans un cadre narratif plus grand (…) Nous recherchons divers sujets pendant quelques mois. Ensuite nous commençons à développer les idées et à faire des croquis des images. À partir de là nous fabriquons les accessoires et commençons à expérimenter en photographiant tout cela. Nous continuons à développer les accessoires et les idées jusqu’à ce que nous obtenions l’image désirée. Nous la photographions à ce moment-là. Puis nous collons plusieurs images afin d’obtenir l’impression finale qui est ensuite montée sur un panneau puis peinte. »
Chaque personnage est confronté à la nature, envoûtante, belle et étrange. Chaque morceau de celle-ci est détourné de sa fonction réelle. Regardez ce pré tout ce qu’il y a de plus banal. Il devient une couverture gigantesque que le personnage s’efforce de tirer vers lui pour recouvrir une terre aride, le tout sous un ciel normal, tranquille, un ciel de tous les jours.
Et là, quelle étrange machine, une sorte d’avion, dirigeable, hélicoptère, encombrée d’hélices, de seaux, tournant dans un ciel irréel, avec un personnage qui sème ou laisse tomber quelques pièces d’on ne sait quoi !
Oui, il faut sauver cette terre qui, malgré ses défauts, fait de nous ce que nous sommes, des hommes perdus dans l’immensité, et dont la tâche est d’instaurer un monde plus clair, plus humain. Mais quelle tâche difficile qui demande tant et tant d’efforts !
Alors, parfois, cet homme pète les plombs et s’envole vers un monde encore plus irréel…
Ou plus poétique…
Ces artistes sont exposés à la galerie Suzanne Tarasieve, 7 rue Pastourelle 75003 Paris.
07:25 Publié dans 21. Impressions picturales | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art contemporain, photographie, peinture, image, tableau, imagination, nature, poésie | Imprimer
13/10/2013
Première prise de fumée
Il y a des souvenirs corporels qui restent même si l’on en oublie les circonstances. Ainsi, lisant un livre où l’auteur évoque sa première cigarette, il se souvint de sa « première prise de fumée ». Au moulin, comme ils avaient coutume d’appeler le lieu de leurs ébats, on trouvait de nombreux sureaux dans la haie de séparation avec le voisin. Vous connaissez ces petits arbustes de bois souple et léger qui produisent des fleurs blanches et odorantes, puis des fruits noirs en grappes serrés. Des fleurs, on peut faire des beignets au parfum sublime. Des fruits, on extrait de la gelée ou du sirop. Du bois, on tire d’excellentes cigarettes s’il est suffisamment sec. Ils ne le savaient pas. Un enfant du pays leur révéla l’intérêt de ces branches séchées et leur montra comment tirer au travers de ce tube pour fumer élégamment et tousser au mieux.
L’initiation faite, ils firent des provisions de branches de sureau, droites et grosses comme des cigares de la Havane. Ils les firent sécher à l’abri des regards des parents et quelques jours plus tard, prirent une après-midi pour fumer, comme les adultes prennent une heure ou deux dans un bistrot pour déguster un bon vin. Ils avaient dérobés dans la cuisine une boite d’allumettes. L’ainé s’essaya le premier à cette tâche nouvelle : tirer sur un morceau de bois pour en extraire une fumée foncée et lourde qui le fit immanquablement tousser. Qu’à cela ne tienne ! Tous voulurent s’éprouver. Les yeux piquants de cette fumée acide, les lèvres imprégnées de poussière de bois coupé, les poumons enflammés par cette vigueur bizarre qui leur faisait croire qu’ils goûtaient la drogue du diable, ils riaient et parlaient forts sous l’emprise de cette nouvelle addiction.
Ce n’était qu’une illusion qui avait le charme du prohibé. Pendant une année, ils se réservèrent des après-midis au fond du petit bois, à l’abri des regards soupçonneux, pour fumer à loisir. Ils en ressortaient fatigués, avec un mal de cœur obligatoire, mais heureux bien sûr de s’essayer à l’interdit.
07:30 Publié dans 11. Considérations diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : fumer, fumée, addiction, loisir, initiation | Imprimer