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24/08/2018

Violoncelle et piano

Petites routes et chemins pour se rendre au "concert". C’est ainsi qu’est appelé ce rendez-vous avec un piano et un violoncelle : repérage cartographique, puis l’aventure, facilitée par une lecture attentive. Entrée dans un chemin couvert, un long bras sorti des feuillages, comme un trou de souris dans la ouate doucereuse. Débouchée sur un bâtiment, à gauche, environné de personnages fantômes. La maîtresse de maison s’avance. Oui, nous la connaissons : quelques jours avant, elle était venue nous porter un papier expliquant le concert. Elle s’avance d’un pas serein, vêtue d’une robe longue, dévoilant le bas des jambes, modestement. Une ceinture portée haute, presque sous les seins, rappelle ce XIXe siècle romantique, sage et endolori. Et ce sera bien l’intonation de la soirée, la marque que garderont nos esprits dans ce brouillard irréel d’un soir de fin de vacances.

Les lieux ? Arbres et verdure, une éclaircie sur la droite, un pré sans clôture, à l’herbe mi-haute, dans lequel nous garons la voiture. Quelques bâtiments que nous distinguons peu, enfouis sous les pousses d’arbrisseaux. Nous n’y prenons pas garde, préoccupés par les quelques personnes semblant attendre d’un air las. Nous en saluons quelques-unes, échangeons quelques mots avec l’hôtesse nous rappelant notre rencontre de la veille. Elle nous indique l’entrée dans un grand bâtiment, ressemblant plus à une grange qu’à une maison, dont la béance grise reste mystérieuse. Allons-y !

Nous pénétrons dans une grande pièce, mi-empierrée, mi-chaulée, recouverte de deux poutres monumentales. Un piano, un Schimmel si me souviens bien, sévère et tendre, étale son clavier. À ses côtés, un fauteuil vide. C’est le seul décor sur cette partie de la pièce où il faut maintenant accéder à une place. Peu de sièges, disparates, quelques bancs, quelques coussins, plusieurs tapis. Des gens silencieux, en attente, dont on se demande s’ils vont se mouvoir et s'émouvoir lorsque résonneront les premières notes. Nous finissons par trouver un canapé dans lequel est assise une jeune fille, ou plutôt une jeune femme d’une trentaine d’années. On s’assied en se tassant et ce rapprochement des corps réchauffe le cœur et donne à l’inconnu une impression de civilité. On attend, dans le silence compassé de l’ignorance de ce qui va advenir. Alors, on regarde la pièce. Une magnifique cheminée, forte, seigneuriale, mal jointe, il faut le dire, prend la salle sous sa protection, telle une main immense se fermant sur la passivité des spectateurs languissants. Nous sommes dans la salle d’apparat d’un châtelet et, ma foi, nous nous y trouvons bien. Elle est, malgré sa sobriété, chaleureuse et décorée avec goût.

Enfin, les derniers arrivants installés, la compositrice et pianiste Christine Jeandroz présente en quelques mots la jeune violoncelliste Mathilde Reuzé et la première partie du concert. Applaudissements… Silence… Installation de l’artiste… recueillement et… les premières notes : courante de la 6e suite pour violoncelle de Jean Sébastien Bach, mon musicien préféré. C’est difficile pour une jeune musicienne de commencer seule un concert. Elle le fait avec assurance, une technique parfaite, le cœur un peu serré, ce qui l’empêche d’y mettre toute la chaleur de l’âme qu’on attend d’une écriture musicale si assurée. Peu importe. On se laisse emporter par ces phrases de Bach qui prennent et reprennent le thème, explorant toutes les possibilités qu’offre le professionnalisme et l’intensité de l’émotion du grand compositeur. Précise, presque mathématique, mais empreinte de mysticisme, la mélodie se déroule et enchante nos oreilles, notre corps, notre cœur et notre esprit. Oui, Bach reste inégalé par sa capacité à émouvoir l’ensemble de l’être et à l’élever au-delà de l’apparence quotidienne.

Du piano, je ne retiendrai que le premier impromptu de Franz Schubert et le commentaire du programme : « Une femme amoureuse se souvient : la rencontre avec l’homme, les battements de sœur, l’attente.. Le reverra-t-elle ? L'amour naissant, la douceur, le désir, la complicité, puis les tensions, les apaisements, la passion, les ruptures, les retrouvailles, la douleur, la douceur, à nouveau. Et toujours, dans son cœur… l’amour. » Les notes s’égrainent, la mélodie se déploie, les sentiments s’expriment et l’âme s’envole. Je suis dans le salon de Georges Sand, parfois de la comtesse de Ségur, revivant les jours de l’adolescence où le romantisme prédomine.

Retour au violoncelle, accompagné par le piano dans la troisième partie du concert. Le jeu de la violoncelliste dépasse maintenant le seul aspect technique. À dix-sept ans, elle joue merveilleusement, avec retenue. Nocturne de Tchaïkovski, puis une composition de Christine Jeandroz. Enfin, un bis de Chopin, comme toujours, aérien.

Nous restons sous le charme de cette soirée hors du commun, parlons avec les uns et les autres autour d’une table emplie de verres et de friandises. La nuit est tombée, on fait connaissance sans presque se voir, ce qui ajoute au mystère de la soirée.

Il fait froid, il faut rentrer. Merci aux deux musiciennes de nous avoir enchantés en nous plongeant dans l’atmosphère intimiste du XIXe même si les pièces jouées dépassaient ce siècle mouvementé.  

 

03/02/2016

Le chant du violoncelle

https://www.youtube.com/watch?v=Ry4BzonlVlw

L’interprétation de cette Suite pour violoncelle N°1 en Sol Majeur Bwv1007 de Jean-Sébastien Bach est osée et n’a pas dû être facile à enregistrer, mais n’est-elle pas enchanteresse.

Ajouter un accompagnement à la suite, il fallait y songer !

03/05/2015

Largo du Concerto pour violoncelle en si mineur de Vivaldi

https://www.youtube.com/watch?v=Lv0-JNkxJlw


 

Une seule note et toute l’ambiance du largo est déjà là, un si majestueux, qui résonne tout au long de la pièce et vous enchante. C’est un doux ronronnement de l’âme qui remue en vous des élans et des tressaillements que vous ne connaissiez pas. Et peu à peu vous êtes submergé d’une paix  bienheureuse qui vous fait oublier tout souci. L’âme vibre en résonance, calmée, dévêtue de toute pensée, nue et reposée.

Et pourtant, elle n’est pas inerte, elle cherche dans ses changements de ton d’autres sonorités, des ouvertures qui font apparaître d’autres mondes sans toutefois les dévoiler complètement. L’âme s’élève, espère, chante, soupire et se réjouit d’être ainsi baignée de lumière tamisée.

 

O Dieu, pourquoi m’as-tu donné une âme ?
Elle erre dans le silence de la vie
Et espère… Elle ne sait… La paix...
L’enlacement du divin entraperçu…

 

02/11/2013

Rêve argentin

http://www.youtube.com/watch?v=0qxbSN_-FP0

 Quelle fougue émouvante et mélancolique!

On se promène dans les rues de Buenos Aires un soir de regret, quand la folie tourmente l’entendement et déguise les sens. On part vers le port avec le refrain en tête et peu à peu on court au rythme de celui-ci.

Course folle, parsemée d’imprévus dans les rues glauques et colorées du barrio de la Boca où s’amuse une population insolite de couples de tango déhanchés. Et le rythme s’accélère, devenant de plus en plus prenant, vous conduisant vers l’eau noire sur laquelle flottent de grands navires fantomatiques. Vous croisez des marins enivrés qui chantent les refrains s’échappant des troquets et qui tournoient sur place dans un ballet d’enfer. Enfin vous arrivez au bord de l’eau, noire comme la nuit, et vous contemplez un navire en partance vers un port inconnu, loin de tout.

Assis sur le bord du quai, vous rêvez  et ce refrain vous entraîne si loin que vous perdez votre âme et vous retrouvez nu face à l’océan.

22/10/2013

Suite pour violoncelle N°1 en sol majeur, interprétée par Mischa Maisky

https://www.youtube.com/watch?v=mGQLXRTl3Z0

Le prélude est une onde intuitive au-delà de la musique…

Une vibration troublant la pensée qui ne peut l’évaluer, entraînée par cette danse qui n’en est pas une… Une onde de notes qui s’enchaînent dans une logique absolue sans que l’on puisse la prévoir.

Bach, musicien de l’âme, a réussi la synthèse entre l’intuition musicale et la raison poussée à l’extrême de la logique musicale. Et cette rencontre entre ces deux manières d’aborder le monde lui donne une force sans équivalent encore dans le monde de la musique.

Laissons-nous porter par ces vagues de notes qui nous entraînent dans un ciel plus pur, dénué de nuages, vierge de l’aspérité égocentrique. Nous volons sur la pensée, la contemplant de loin, comme un pilote de Montgolfière, sans bruit, bercé par le vent léger qui nous entraîne au-delà des idées, au-delà des mots dans cet amas de sensations sans formes qui procure les délices d’une connaissance différente, irraisonnée, mais fortement prégnante. C’est un courant d’ondes, une danse sur un fil électrique que l’équilibriste n’ose toucher longuement. Et l’esprit ne se lasse pas de cet intermède qui s’insinue dans tout le corps, le laissant en transe.

Oui, Bach est vraiment le plus grand des musiciens par la synthèse qu’il effectue entre le cœur, vision intuitive d’une mélodie au-delà d’une phrase musicale, et la raison, construction intelligente et ordonnée des notes entre elles.

29/07/2012

Carol of the Bells (for 12 cellos) ThePianoGuys

 

http://www.youtube.com/watch?v=e9GtPX6c_kg&feature=relmfu

 

Quelle frénésie endiablée, une danse de sorcière dans les bois, sur les places des villes, dans les lampions, parmi les patineurs ou la solitude des montagnes. C’est beau de rage contenue, d’avertissement au monde dont on ne sait quoi, de danse venant de nos grands-mères, de tendresse aussi, cachée en accompagnement.

Est-ce réellement un cantique. On peut en douter, mais peu importe. On a passé un bon moment à s’enchanter les oreilles !

 

20/05/2012

Suite n°1 pour violoncelle de J-S Bach : dans le bruit et la musique

 

http://www.youtube.com/watch?v=V7edkwJsgN0&feature=related

 

Le métro et Bach, qui aurait pensé à un tel assemblage.

Et pourtant, c’est beau et poignant ! Cela tient-il à la jeunesse des musiciens, à leur ensemble, à leur position, ou à l’ambiance particulière du métro, le bruit des rails, le défilement des images, l’absence de voyageurs, ou encore à la musique de Bach, entraînante, mais faite de pauses, de diminuendo, de forte et de piano.

La musique est plus forte que le quotidien semblent-ils dire à travers ce qu’ils jouent. Ils ne sont pas dans le métro, mais dans Bach, le compositeur génial, toujours d’actualité, intemporel, immortel pourrait-on dire. Rien ne les trouble, ni le bruit, ni les sautes de lumière, ni le déplacement. Rien, le prélude de la suite n°1 se joue, émeut, fait monter les larmes aux yeux des connaisseurs, quelle beauté que cette musique extraordinaire, faite de tendresse, d’entrain, d’émotion, de générosité et d’élévation jusqu’à nous sortir de nous-mêmes pour nous laisser porter dans un au-delà qui nous semblait pourtant inaccessible.

Et pour ne pas tromper les vrais amateurs de musique, écoutons le même morceau joué par Rostropovich, plein de sérénité, mais très vif, comme empreint d’une illumination qui lui permet de jouer avec un tempo rapide, mais empli de paix.

 

http://www.youtube.com/watch?v=MUAOWI-tkGg&feature=related

 

28/04/2012

J.S. Bach - Suite No. 2 pour violoncelle en ré mineur BWV 1008 - I. Prélude

 

http://www.youtube.com/watch?v=gNiHcxIzACs

 

 

L’autre jour, place des Vosges, j’ai rencontré un musicien solitaire qui jouait, seul, au bord du trottoir, les yeux fermés, perdu dans son rêve musical pendant que les passants glissaie12-04-21 Violoncelliste red.JPGnt autour de lui, presque sans le voir. Certains s’arrêtaient, puis repartaient très vite, comme soumis à une obligation impérative. Et le violoncelle continuait à jouer de sa voix grave, enjôleuse, encouragé par les mains du violoncelliste qui n’existait que pour mieux faire passer l’esprit de la musique dans l’âme du passant. Les sons se répercutaient sous les voûtes de la porte d’entrée sur la place, comme pour mettre en évidence la solennelle majesté du lieu et dire à tous qu’ici se trouve un bout de Paris différent. Mais peu importe aux gens qui passent, ils sont tellement occupés par leurs propres pensées qu’ils ne perçoivent pas la beauté du lieu et de la musique réunis.

 

Quel prélude ! Comme des vagues au bord d’une plage, par un temps froid, dans la solitude d’un coucher de soleil, lorsque, seul, vous contemplez l’immensité de la mer qui se résume au bruit de chaque vague qui vient frapper le rivage. Derrière ce bruissement rythmé, vous percevez l’âme des eaux et du ciel et vous vous retrouvez nu devant tant de beauté non dite, mais que vous ressentez dans votre corps autant que dans votre cœur.

La paix vous envahit et vous devenez un réceptacle sans pensée propre, ouvert à l’univers.