21/08/2013
"La Poule", de Jean-Philippe Rameau, interprété par Grigory Sokolov
http://www.youtube.com/watch?v=xcXY7dyK7eQ
On est projeté dans le poulailler, caquetant en chœur avec les gallinacés, piétinant sur la paille, évitant les œufs, nullement incommodé par l’odeur. Quelle imagination de la part du compositeur, Jean-Philippe Rameau. On imagine les poules au pas de l’oie, embrigadées, mais cherchant à se libérer de cette emprise, s’égaillant à maintes reprises, fuyant tout ce qui les contraint, restant malgré tout poules, dodues, échevelées, coquettes, secouant la tête avec obstination, avec quelques remords ou hoquets, puis reprenant leur rythme.
Où se trouve le coq ? C’est le triomphe de la féminité, dans toute sa vigueur. Un piétinement de talons hauts, de valses endiablées, telles les coquettes qui se mirent dans le miroir et sourient à leur image, entre elles, bien dans leur peau, heureuses d’être débarrassées d’une présence masculine qui les oblige à jouer le jeu de la séduction. Mais elles restent femmes, imaginatives et groupées, fières de leur indépendance, riant comme des folles, s’amusant d’un rien, se prenant par le bras, s’entraînant les unes les autres, relevant leur gorge pour mieux glousser, levant leur crête et humant l’air avant de hoqueter et de se donner en chœur. Quel bel ensemble que ce poulailler ! N’est-il pas aussi beau qu’une cour du XVIIème siècle, avec ses robes de taffetas, ses cerceaux, ses rires entendus, le tout caché derrière un éventail pour mieux médire contre les hommes.
Admirons le jeu de Grigory Sokolov qui comme toujours nous donne un aperçu de sa délicatesse et de sa virtuosité. Merci pour cette pièce brillante faisant rêver sans vouloir médire sur la féminité qui égaille le monde.
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20/08/2013
Le monde selon Garp, roman de John Irving
Le livre était lourd et volumineux (650 pages d’une écriture serrée), ce qui n’est pas encourageant pour en commencer la lecture. De plus, la quatrième de couverture était peu engageante, contrairement à ce qu’a voulu l’éditeur. Elle
évoquait le féminisme, la violence des hommes, la peur des femmes, cette opposition des sexes qui fit pendant un temps les premières pages des médias d’outre-manche. Bref, les clichés d’une Amérique éternelle peuplée de machos texans. Et je continuais à le penser au bout d’une cinquantaine de pages, malgré quelques bons mots : Jenny avait l’impression que ses études n’étaient rien d’autre qu’une façon polie de gagner du temps, comme si elle avait été une vache mise en condition pour recevoir la canule de l’insémination artificielle.
Je finis par me détendre et lus avec curiosité les cinquante pages suivantes. Enfin, je fus pris par le récit, non pas à la manière d’un triller à l’intrigue palpitante, mais en raison de la personnalité du personnage principal, S.T. Garp, fils de Jenny, une jeune fille de bonne famille devenue infirmière, qui se fait faire un enfant par un malade, le Sergent Technicien Garp, mitrailleur de queue d’un avion atteint par les balles au cours de la seconde guerre mondiale. Huit jours plus tard, je fermais le livre en me se disant que j’aurais bien poursuivi la lecture de cette saga délirante, bien qu’apparemment anodine : Garp luttant contre la concupiscence des hommes, rejetant la violence de l’environnement quotidien et assurant la protection des enfants. Tel est le sujet du livre, les peurs d’un père dans un monde fou, mais habituel. Et souvent je me suis dit : ces descriptions sont trop longues, ces sentiments sont trop étalés, je les saute. Mais je revenais par la suite sur ces métaphores pour ne rien perdre de l’ensemble.
Le livre est ambigu. Cela tient au mélange entre le récit parfois trop lent et la rapidité des événements clés qui ne sont qu’évoqués, puis repris de manière indirecte. Ainsi l’accident entre l’auto de Garp et celle de l’amant de sa femme, dont les dégâts sur la famille ont été considérables, n’est abordé qu’à travers ses conséquences. Pierre-Yves Petillon, qui présente le livre dans sa version française, nous dit : « On les compte sur les doigts d’une main, finalement, les livres où l’on rit à voix haute, où l’on s’esclaffe comme autrefois, lorsqu’on avait dix ans et qu’on allait voir un Laurel et Hardy dans un petit cinoche de quartier. » Je pense plutôt à une espèce de nostalgie difficilement interprétable que donne le roman, comme un arrière-goût d’entente entre l’auteur et le lecteur, mais qu’on n’ose pas avouer, n’y même reconnaître. On est gêné, mais heureux de l’être. On y prend plaisir sans savoir pourquoi. C’est ce qui fait la qualité du récit : inattendu, tant dans les événements que dans les émotions de Garp. Il en reste un sentiment curieux qui vous contraint à achever le livre sans comprendre son intérêt.
Quelques descriptions font rire : « Aaa, fit Garp (le père), comme Jenny l’attirait en elle et s’accroupissait en pesant de tout son poids. – Garp ? demanda-t-elle. ça va ? Est-ce que c’est bon, Garp ? – Bon, approuva-t-il, très distinctement. (…) A mesure qu’il se recroquevillait et que sa semence suintait sous Jenny, il se retrouva une fois de plus réduit aux « Aaa » ; il ferma les yeux et pleura. Quand Jenny lui offrit le sein, il n’avait pas faim. (…) Elle se sentait plus féconde qu’une glèbe bien préparée – la terre nourricière – et elle avait senti Garp lâcher en elle un jet aussi généreux que celui d’un tuyau d’arrosage en été (à croire qu’il voulait inonder une pelouse).
D’autres épisodes sont quasi sordides : Le mouvement des Hellen-Jamesiennes appartient à un monde inconnu dans lequel des jeunes femmes se font couper la langue pour lutter contre la violence faite aux femmes en souvenir d’Hellen James, violée à l’âge de douze ans.
Il est impossible de raconter en quelques phrases le livre, trop long, trop imaginatif et, apparemment, banal. Il s’achève sur les enfants de Garp : « Dans le monde selon son père, comme le savait Jenny Garp (sa fille), il faut avoir de l’énergie. Sa célèbre grand-mère, Jenny Fields, nous voyait naguère comme appartenant à diverses catégories, les Externes (les hommes qui avaient été brûlés), les Organes vitaux (les hommes blessés qui souffraient en dedans), les Absents (des hommes qui avaient cessé d’être là) et les Foutus (absents souffrant de maux propres aux externes ou aux organes vitaux). Mais dans le monde selon Garp, nous sommes tous des incurables (de la concupiscence).
07:42 Publié dans 41. Impressions littéraires | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, roman, amérique, violence, féminisme |
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19/08/2013
Vitrail et lumière
Un beau vitrail du XIXème siècle : architecture et couleurs font pour une fois bon ménage. Certes, cela ne vaut pas les vitraux médiévaux. Mais tout de même : la sainte famille, en couleurs, enchâssée dans un décor coloré (Eglise de la Trinité à Château-Gontier 53).
L’univers tout entier est contenu
Dans la lumière de l’amour de Dieu.
L’infiniment grand comme l’infiniment petit
Respire du même souffle de l’amour.
Olivier Clément (voir l'article du 7 mars 2013) disait dans ses monologues qui lui servaient de cours : "L'ascèse est l'art de se transformer dans la lumière". Et le vitrail aide à aspirer à l'ascèse, non seulement par les représentations qu'il permet, mais surtout par la transparence de la lumière et sa quasi décomposition en couleurs qui donne, au-delà de la vision du visible, un aperçu de l'invisible.
L'église catholique a développé une symbolique de la lumière dans la liturgie. L'orthodoxie a même créé une théologie de la lumière. Mais il n'y a pas que dans les églises chrétiennes que la lumière est assimilée non seulement à une manifestation de la divinité, mais à l'essence même du divin.
Abû Hamid Muhammad al-Ghazali (1058-1111) dans le Michkât al-anwâr ou "Le tabernacle des lumières", partage son livre en trois chapitres. Le chapitre 1 montre que la véritable lumière est Dieu et que le nom de lumière appliqué à un autre être est purement métaphorique et à ne pas prendre au sens propre. Le chapitre 2 développe ce que représentent le Tabernacle, la Lampe, le Verre, l'Arbre, l'Huile et le Feu. Le chapitre 3 traite de la signification de la parole du prophète: "Dieu a soixante-dix voiles de lumière et de ténèbres; s'il les enlevait, les gloires fulgurantes de sa Face consumeraient quiconque serait atteint par son Regard."
La première acceptation de la lumière est qu' "elle désigne ce qui est visible par soi-même et ce qui rend visible autre chose". Mais il ajoute: "Tu as donc compris qu'il y a deux sortes d'yeux : un œil externe et un œil interne... L'œil externe appartient au monde visible et c'est le soleil sensible ; le soleil intérieur appartient au monde du Royaume céleste, il s'identifie au Coran et aux autres livres divins révélés". Et il conclut : "La lumière véritable est celle par qui, à qui et à partir de qui les choses se révèlent et au-dessus de qui il n'y a plus de lumière qui serait sa source et à laquelle elle puiserait".
06:43 Publié dans 12. Trouvailles diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : lumière, divin, religion, architecture, vitrail |
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18/08/2013
Absurde, j'ai retrouvé le goût salé
Absurde, j’ai retrouvé le goût salé
Des embruns pleurés aux grottes de l’océan
La pluie
Comme la bise sur l’arbre
Égraine de gouttes
La rêverie de l’œil sur le toit
Le carillon des larmes de la gouttière
Enchante ma cathédrale de zinc
Au regard de l’arbre qui, de ses bras tendus
Protège son corps d’écailles
Grisâtre, l’épiderme nuageux
Caresse les cheminées luisantes
06:55 Publié dans 42. Créations poèmes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poésie, écriture, poème, littérature |
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17/08/2013
Kodo
http://www.youtube.com/watch?v=C7HL5wYqAbU
C'est un groupe de percussionnistes japonais qui perpétue et réinvente la tradition musicale japonaise, en explorant toutes les possibilités offertes par le taiko, tambour de peau tendue sur bois utilisé dans les fêtes traditionnelles.
Ce n'est certes pas de la grande musique, mais c'est surement un tour de force peu commun, un exercice physique impressionnant.
07:39 Publié dans 51. Impressions musicales | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : musique japonaise, tambour |
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16/08/2013
Des cornichons au chocolat, roman de Philippe Labro
Livre culte, nous dit la quatrième de couverture : Toute une génération s’est reconnue dans le journal de cette adolescente de treize ans, sa solitude, sa révolte, son regard dérangeant sur les adultes, l’école, le travail et son goût indiscutable pour les sandwichs aux cornichons et au chocolat.
La préoccupation principale de Stéphanie : attendre ses règles qui ne viennent pas alors que les autres filles les ont eu : « Pour bien énerver Stéphanie, on va toutes se mettre en jupe ou en kilt pour bien lui montrer qu’on est des femmes et qu’on a nos règles et que c’est beaucoup mieux de porter des jupes quand on a des règles parce que quand même on est moins serrées, ça fait moins mal, on est sûr de ne pas tacher ses jeans, ça va drôlement humilier Stéphanie. »
Stéphanie découvre la musique classique avec Nicole, sa prof de musique. Elle avait dit : Ne vous préoccupez pas de tout ça, ce que la musique évoque n’a rien à voir avec le sens qu’un professeur ou un critique ou un parent peuvent lui donner. Et Stéphanie écrit dans son cahier : Les gens qui ont ce don-là, c’est comme Mutti (le chef d’orchestre) et Beethoven, ils peuvent se donner du bonheur quand ils veulent, à n’importe quel moment de la journée. C’est des privilégiés, voilà.
A la fin du livre, elle les a : Elle a réfléchi que ça y était donc maintenant, et que toute sa vie, trois ou quatre ou cinq ou six jours par mois, Elle serait obligée d’avoir cette gêne en Elle et avec Elle, et Elle s’est demandée pourquoi Elle avait tellement mais tellement désiré que ça lui arrive. Du coup, elle arrête son cahier. Fin !
Certes, certains mots, réflexions, idées sont drôles, sensibles, presque beaux. Mais sans doute ne suis-je plus attentif aux passions de l’adolescence et à ses questionnements. Ou peut-être les adolescents d’aujourd’hui ont d’autres préoccupations. Ou encore Stéphanie passe trop de temps aux toilettes, ce qui manque de charme.
Mais malgré tout ce n’est pas non plus un mauvais livre. Je ne suis tout simplement pas entré en osmose avec lui.
07:55 Publié dans 41. Impressions littéraires | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : société, adolescence, roman, littérature |
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15/08/2013
Nous te saluons
Ce 15 août, saluons la vierge Marie :

07:13 Publié dans 53. Créations musicales, 62. Liturgie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : liturgie, religion, christianisme |
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14/08/2013
La chaleur
La chaleur écrase de sa pesanteur
La paupière alourdie de nos corps
Le vent même dévore d’un souffle chaud
La poitrine blanche des hommes
Les lèvres collées de sécheresse
Le pied lourd de mille soucis
Ils attendent, impassibles
La relève qui ne veut pas venir
Collés à la terre desséchée
Ils grignotent à pleine dents
L’ombre imprimé sur le sol
Par le soleil ardent de leurs espoirs
Et rien ne vient. Rien.
Le matin, peut-être, la quiétude
Gagne les corps endormis de rêves
L’eau bienfaisante réveille
Les espoirs de la veille et du lendemain
L’eau maintenant, la boue
Les pleurs de chaque motte de terre
Engourdissent d’impuissance raideur
L’extrémité des membres terreux
Et nous nous retranchons en boule
Dans la moiteur de nos corps
07:44 Publié dans 42. Créations poèmes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poème, écriture, poésie, littérature |
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13/08/2013
Musique de la cour impériale de Chine
http://www.youtube.com/watch?v=8kk6K_5fxZs
Il nous transporte en d’autres temps et d’autres lieux, ce duo de flûte et percussions. La flûte chinoise ou xiao est proche de la flûte japonaise dite Shakuhachi plus récente. C'est un son troublant, qui perce le coeur et pénètre au plus intime de vous-même.
Sérénité et harmonie, parfois un peu sirupeux, voire lassant. Mais quel beau morceau d’anthologie !
07:50 Publié dans 51. Impressions musicales | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : musique orientale, musique chinoise, gamme, modes |
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12/08/2013
Démocratie et valeurs démocratiques
La démocratie, régime politique dans lequel le peuple est souverain, est « le gouvernement du peuple par le peuple, pour le peuple » (Abraham Lincoln, 16e président des États-Unis). Le gouvernement démocratique s’oppose au gouvernement monarchique ou dictatorial (pouvoir détenu par un seul homme) ou encore au gouvernement oligarchique (pouvoir détenu par un groupe restreint).
Mais lorsqu’on parle des valeurs démocratiques, on ne parle pas de gouvernement, mais d’un système sociétal comprenant un ensemble de valeurs et de principes régissant la vie en société.
Dans le premier cas, la démocratie est un système qui permet de départager les opinions des citoyens sur les idées, les règles et les personnes qui doivent gouverner. A 50,01% la démocratie a parlé. Ensuite, selon le régime démocratique (démocratie directe, démocratie représentative ou démocratie semi-représentative) soit le citoyen n’a plus droit à la parole, soit il continue de décider sur plus ou moins de projets ou de règles.
Par contre les valeurs démocratiques constituent beaucoup moins une valeur qu’elles veuillent bien le dire. C’est en fait une langue de bois utilisée par les gouvernants pour inciter le peuple à se départir de son droit. Les valeurs démocratiques sont pratiquées en communication gouvernementale pour que les citoyens ne soient libres que le jour des élections. Sortis de cette journée, ils sont assujettis à l’idéologie dominante (provisoirement, jusqu’à une nouvelle élection). Ainsi toute réforme que la majorité des gens refusent passe plus facilement si le gouvernement met en avant les valeurs démocratiques. Une fois élu, l’élu n’a plus à prendre le pouls du peuple. Celui-ci n’a qu’à s’exécuter puisqu’il l’a élu. Le gouvernement peut devenir quasi dictatorial.
Ainsi est détourné complètement l’esprit de la démocratie au nom des valeurs démocratiques :
· Liberté : oui, le jour de l’élection. Et à partir de ce jour, le citoyen est assujetti à la loi du gouvernement élu, sans aucune possibilité de contester les décisions.
· Egalité : celle-ci est le maître mot. L’égalité passe avant les lois de la nature. Elle permet de détourner la liberté à son profit.
· Fraternité ; oui, entre groupe du même bord, celui qui détient le pouvoir, qu’il soit de droite ou de gauche, l’essentiel étant la fraternité des élites contre le peuple ou la fraternité de l’excuse contre la sanction.
07:05 Publié dans 11. Considérations diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : politique, société, philosophie, démocratie |
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11/08/2013
Une goutte de pensée
Une goutte de pensée... Cela peut-il se dessiner et se peindre ? Probablement non, mais on aime se dire que la pensée n'est rien d'autre que cette poche emplie de fragments agglomérés qui s'échappent au dehors par une bouche moustachue. Et la pensée suit son cours dans le monde, au fil des lieux et des temps.
07:17 Publié dans 24. Créations dessins | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : dessein, peinture, abstrait |
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10/08/2013
Je ne suis plus qu'un morceau d'être
Je ne suis plus qu’un morceau d’être
Qui vit encore, pour vivre,
Ne connaissant pas les frontières de la mort.
Un morceau d’être encore vivant.
Loin de toi, je ne suis rien.
Je me regarde, je m’interroge,
Nu, dévêtu de ta chaleur,
Pauvre, démuni de toute richesse.
Mon âme devenue désert
Guette dans l’ombre ta présence.
J’erre dans la nuit des jours,
Attendant patiemment ton retour.
07:32 Publié dans 42. Créations poèmes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poésie, écriture, poème, littérature |
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09/08/2013
La chapelle
Elle se trouve au bord d’une petite route, en face d’une maison enfouie dans les arbres. On ne se doute pas qu’il puisse y avoir là une chapelle avant de l’apercevoir. A la sortie d’un tournant elle est là, blanche, immaculée, fraichement repeinte, pierre précieuse dans la campagne.
Elle a un nom, elle a un lieu, elle a une histoire, mais j’ai tout oublié. Seul reste dans le secret de ma mémoire, sa blancheur crème et son clocheton surmontant son toit pentu. Elle dispose d’un enclos encombrée de quelques arbres. Il n’est pas bien entretenu, mais ce désordre lui plaît, elle n’en paraît que plus naturelle. Marie au milieu des passants, qui ne se distingue en rien. Et pourtant quelle distinction. Une porte surmontée d’un pilastre modeste, mais élégant, lui-même surmonté d’une niche dans laquelle se trouve la vierge avec l’enfant tenu à bout de bras, comme montré à la foule des pèlerins.
Car c’est un lieu de pèlerinage. Dans la première semaine de septembre a lieu à la chapelle une messe, le jour de la nativité de Marie. « Des enfants gardant leurs moutons sur un terrain appelé l'allée de la Tremblaye, virent dans un chêne une petite statuette qu'ils prirent pour une poupée et qu'ils remportèrent chez eux. » La chapelle fut édifiée en 1631.
Le clocheton a été refait. Il brille de tous ses feux et donne à l’édifice un air vague de chapelle orthodoxe, sans doute en raison de sa forme et de la boule qui porte la croix.
La porte est ouverte, entrons ! Venant du dehors, aveuglés par la lumière de l’après-midi, nous sommes surpris par son éclat. Il vient du vitrail en damier bleu et blanc par lequel perce un rayon de soleil. Lumière irréelle, irradiant l’autel. Tout est propre, bien rangé, fleuri, prêt pour une messe de mariage. Les noces de la nature et de la mystique !
Un nuage passe. L’intérieur reprend un aspect naturel : une petite chapelle perdue au milieu des champs qui offre au passant un instant de prière dans le calme.
Enfant, nous aimions nous arrêter dans un tel lieu, à genoux, la tête vide, attendant on ne sait quoi. Même impression. Je perds ma rationalité et prend le large sur les nuages de mes souvenirs. Quelques instants dans le passé, avec les yeux de l’enfance innocente. N’est-ce pas le dessein des constructeurs. "Eveillez-vous et priez l’immaculée !"
Où est-ce ? Vous pourriez trouver, les indices ne manquent pas. Dites-le-moi si vous le découvrez !
07:31 Publié dans 14. Promenades | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : religion, vacances, mystique, beauté |
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08/08/2013
Le chat
J’ai hérité d’un chat. Pour quelques jours, Dieu soit loué. Impassible, il contemple les papillons et lève la patte pour tenter de les attraper. Mais ce sont des papillons de nuit qui s’élèvent haut dans le ciel. Alors il lève ses moustaches et les regarde partir jusqu’à ce qu’ils soient hors de sa vue. Il semble dormir, mi-assis mi-couché sur le lit, mais le moindre bruit le fait sursauter. De temps à autre, un frémissement parcourt sa colonne vertébrale, comme la main d’un spectre fouillant sa fourrure.
Ah ! Il se lève et vient près de moi en ronronnant. Il se couche complètement et son ventre respire au rythme de ses grognements chaleureux. Sa queue remue parfois, juste à la pointe, comme un être à part entière, indépendant de la masse de poils bercée par la brise venant de la fenêtre ouverte. Le bruit de l’envol d’un pigeon dans le noir le redresse instantanément, les yeux apeurés. Il est souple, vif, et reposé, serein, presqu’apathique. Il passe ses jours et ses nuits assis, couché, sur un tapis, dans un fauteuil, sur un lit.
Tiens ! Nouveau petit bruit qui le conduit à la porte fenêtre. Il s’assied face à l’obscurité, le visage tourné vers la lune, baigné d’une faible lueur, comme une porcelaine. Il sort même sur la terrasse et ses yeux luisent dans le noir. Mais bien vite, il rentre d’un pas délié, remuant sa fourrure avec noblesse, faisant admirer les liaisons entre son corps et ses membres. Oui, un chat se déplace avec fierté ou en folie, griffant le sol, courant entre les pieds des fauteuils, dérapant sur les tapis, pour atteindre en une seconde la porte entrouverte.
C’est un compagnon qui s’adapte à votre rythme. Il ne veut qu’une chose, quelques caresses sur son dos arrondi, couché contre votre corps, s’imposant pour un bain d’intimité. Puis il repart comme s’il ne vous connaissait pas, indépendant, solitaire. Quelle drôle de vie que celle d’un chat ! Indépendance et affection ou, tout simplement, une vie de chat.
07:59 Publié dans 11. Considérations diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poésie, vacances, repos |
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07/08/2013
La magie d'un instant
Ce matin, elle est descendue à la cuisine comme tous les jours. Après avoir allumé, elle mit la hauteur d’eau nécessaire dans le réservoir de la cafetière, retira l’ancien filtre, en inséra un nouveau et versa dedans ce qu’elle estimait être la bonne proportion pour obtenir un café ni trop fort, ni eau de vaisselle. Elle n’utilisait pas de doseur, estimant qu’elle devait seule en face de la machine à café prendre ses responsabilité en ce qui concernait le dosage. Elle s’assit, ouvrit son livre du moment et se plongea dans un autre monde déconnecté des tracas quotidiens comme des indigences du corps. Pendant ce temps, l’eau, réchauffée par les résistances, s’infiltrait dans le café en poudre bien tassé dans le filtre, le faisait gonfler, puis suintait en quelques gouttes dorées au-delà du papier blanc, et passait dans l’étroit goulet permettant à chaque goutte de la précieuse liqueur de tomber en gerbe au fond de la carafe. Progressivement, celle-ci se remplissait d’abord en étincelles giclant sur l’intérieur de la carafe, puis, dès l’instant où la surface du fond fut recouverte d’une couche de liquide d’une dorure rougeâtre, tendant vers le brun, en cercles concentriques s’écartant du centre pour se perdre sur le rivage de l’enveloppe et revenir amoindri à la rencontre d’un autre cercle émis par les jets de liquide venant du haut.
Ça y est, le café est prêt ! Elle avait sous les yeux ce breuvage délicat, non plus doré, mais presque noir, qui avait des reflets plus clairs si on sortait la carafe de son logement. En tendant le bras et ouvrant la main pour saisir la poignée, elle vit un éclair de l’œil droit, une sorte de feu interne, rouge comme une pivoine, qui ne dura qu’un très bref instant. Il venait de la fenêtre derrière la cafetière.
– Un reflet dans la vitre, c’est tout, pensa-t-elle.
Elle tendit à nouveau la main vers l’anse et cette fois-ci perçut un reflet bleu nuit, comme un scintillement dans la pâleur de la nuit qui devint vert. Curieuse et étonnée, elle se pencha vers ce feu tonifiant qui semblait la narguer. C’était maintenant un petit point rouge vif, incroyablement lumineux, comme une virgule suspendue dans l’air, avertissement d’une journée différente, comme un signe de bonheur ouvert sur le monde. Le jour était là, mais la lueur continuait son embrasement, resplendissante. Elle bougea un peu la tête, montant le menton de quelques millimètres et la flamme s’allongea, prenant des teintes successivement de rouge, jaune, vert et bleu. C’était un ruban qui s’étirait, n’émettant qu’une seule couleur, mais qui se transformait au fil du déplacement de la tête. Voulant en avoir le cœur net, elle se pencha vers la fenêtre, cherchant quel était cet éclat qui se propageait sur la vitre. Elle comprit que ce n’était pas celle-ci qui émettait le reflet. Au-delà, sur l’évier de pierre, se trouvait un petit panier contenant divers objets, dont un disque d’ordinateur de couleur acier qui créait la lueur fascinante. L’ampoule électrique du plafond se reflétait sur le disque, créant une réfraction et dispersant chaque couleur l’une après l’autre et non ensemble comme pour l’arc-en-ciel habituel. Bougeant précautionneusement la tête, elle ne se lassait pas de faire surgir d’abord un rouge brillant, chaleureux, chaud comme un incendie, puis un orange lumineux, ensoleillant, puis un jaune paille étincelant, à lécher, puis un vert plus pâlot, émeraude pure, enfin un bleu nuit éblouissant, pur, qui s’éteignait en améthyste sombre. Quelle merveille que ce reflet unique qui se contorsionnait sous ses yeux, prenant sur la largeur du disque un spectre irréel qui lui chatouillait l’œil et entrait dans son cerveau en feu follet. Pas d’autre pensée. Pas la moindre distraction. Le feu sacré de la lumière décomposée pour elle, ce matin. Surprise d’un jour nouveau, la main sur la cafetière, le regard fixé, qui rendait son corps transparent. Elle devenait l’esprit du feu. Elle était la lumière pure, franche, vivante en elle-même, irradiant sur le monde sa nouvelle virginité.
Quel instant ! Elle dut se forcer à se détacher, à remplir sa tasse de café, à y mettre une goutte de lait qui s’élargissait en nuage dans le liquide noir et lui donnait une teinte plus claire, virant à l’ocre. Elle but le breuvage chaud comme à une source vive, pensant intérieurement à un bain nettoyant son être intérieur pour lui donner l’aspect d’une glace réfléchissante sans l’ombre d’une poussière. Après avoir bu, elle quitta sa place, abandonnant le reflet magique et alla éteindre la lumière, mettant fin à un moment d’éternité.
08:21 Publié dans 12. Trouvailles diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : éternité, réfraction, lumière, enchantement, femme |
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06/08/2013
Lumière
Il a piégé la lumière un jour de grand vent. Elle est apparue au bout de son pinceau, innocemment, sans mot dire, nitescence des couleurs : bleu et vert, d’où transparaissent le jaune et le rouge. Quelle cacophonie ! Cet assemblage hétéroclite devient vitrail.
Ce matin, il s’est levé, a contemplé la naissance du jour, a imprimé cet embrasement : l’immanence divine…

07:22 Publié dans 22. Créations numériques | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : dessin, peinture, optique art, art cinétique |
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05/08/2013
Ce qui se conçoit bien s’énonce clairement
« Elle me donne sans cesse en exemple le génie d’Einstein : ses conclusions sont toujours claires et ses calculs souvent faux, ce qui le distingue de la plupart des chercheurs dont la rigueur alimente l’hermétisme. En fait, il trouve d’abord, et il cherche après. Il a l’intuition de la théorie, il en déduit le résultat, puis il en développe les conséquences jusqu’à les rendre limpides – et par là même incontournables. Alors il revient en arrière pour étayer sa découverte par les calculs nécessaires à la démonstration, mais à ses yeux, c’est du temps perdu. » (Didiervan Cauwelaert, La femme de nos vies, Albin Michel, 2013, p.138).
Platon avait bien saisi cette différence majeure entre la pensée rationnelle, déductive et argumentative, la dianoia, et la pensée perceptible, immédiate et évidente, le noûs. Mais le siècle des Lumières nous a fait perdre l’intuition au profit du rationnel, reléguant la première parmi les faux amis. Cela s’est accentué au XIXème siècle. L’intuition ne joue qu’un rôle négatif, elle ne peut délivrer de message que si elle est relayée par la rationalité qui seule peut consacrer la vérité. Et si cela n’était que prudence et précaution de la part d’hommes à l’imagination limitée ?
Tout d’abord, reconnaissons que l’intuition va au-delà de l’inférence. Elle ne chemine pas entre les propositions jusqu’à une conclusion. Elle va droit au but, sans masque, et s’impose par la force de la pensée avant d’être ensuite disséquée dans une démonstration à trouver. C’est le propre du génie. C’est un éclair de vérité qui émerge des nuages de pensée et s’impose à celui qui le vit. C’est la pomme de Newton dont la chute entraîne la pensée vers la conclusion recherchée depuis longtemps. C’est justement parce qu’elle est recherchée depuis longtemps qu’elle apparaît soudain, claire et impérative. Sans travail, l’intuition n’existe pas.
Alors, soignons nos intuitions, tendons l’oreille à leurs murmures. Ensuite viendra le travail de démonstration, la construction rigoureuse d’une pensée qui ne laisse aucune fuite dans sa logique.
07:43 Publié dans 11. Considérations diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : intution, déduction, induction, rationnel, conception |
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04/08/2013
L’âme s’expose
Quand l’âme ouvre sa fenêtre au monde
Et montre au vent sa blancheur lessivée
Les yeux des hommes se révulsent
Les oiseaux eux-mêmes cessent de planer
Pour s’emprisonner dans l’espace
Une goutte d’éternité ravive l’œil
Et lui donne un regard vierge
Penchée au-dessus de l’allège
Elle s’édifie de sa contemplation
Et respire l’air pur de la bonté
Sa blessure volontaire, divine
Lui rend sa légèreté d’antan
Lorsqu’à peine née, elle offrait
La transparence de sa vision
Aux parents accaparés de soins
Cette ouverture, l’âme au chaud
Les mains froides tendues au dehors
Fait du postulant un capitaine
De bateau ivre dans la tempête
La vie enserre l’histoire, même si
Les oiseaux entrent dans la pièce
Et se repaissent d’or et de myrte
Ils s’envolent lourds de trésors
Pour poursuivre leur chasse
D’autres huis ouverts sur le monde
Jusqu’au jour où, d'une bouche âpre
Un dernier souffle, rare
Exhale un rire rauque
Dans l’air empesé du matin
Et se tait… définitivement
La fenêtre sur le monde se ferme
Le dehors n’ouvre plus sur le dedans
Le dedans ne donne plus son trésor
Au regard des hommes seuls
Dieu est bien là, derrière la vitre
Ronronnant près de l’âtre
Attendant la fin des jours
07:17 Publié dans 42. Créations poèmes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poème, écriture, poésie, littérature |
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03/08/2013
Un début à Paris, récit de Philippe Labro
On aime ce livre parce qu’il nous livre les impressions, déboires, passions, bévues, sentiments d’un jeune homme des années 60 qui commence son apprentissage dans la vie de journaliste. Celle-ci débute comme assistant de
relations publiques d’une compagnie maritime américaine, ce qui consiste à publier un court portrait de personnalités arrivant en France.
– C’est de toi, çà ? C’est pas mal. Si tu as une idée, quelque chose d’un peu plus étoffé, amène-le-moi. Je suis toujours preneur d’un bon portrait.
C’est bien sûr sa jeunesse que raconte l’auteur. Est-ce arrangé, probablement un peu, mais pas trop. On est vite pris par le récit. Ce n’est pas une histoire au vrai sens du terme, mais plutôt une série de portraits successifs dont chacun est un petit chef d’œuvre. Et cela commence dès le chapitre 2 avec l’interview de Blaise Cendras, haut en couleurs et empli de conseils de l’interviewé : – Soyez optimiste. Faites vite. Restez près de la vie.
Philippe Labro s’explique dans le prologue sur cette période : – Il n’y a pas de chiffre étalon pour mesurer la durée d’un apprentissage. Deux ans, dix ans, vingt ans ? A partir de quand peut-on affirmer que l’apprentissage est terminé, que l’on domine son métier ? Les sages vous répondent que cela n’a pas de fin et vous les écoutez en souriant devant une telle platitude.
Il y a la rencontre avec Wence, journaliste, puis écrivain : Il était élancé, mince, avec de longues jambes sur un corps souple. Il avait un petit nez court et pointu, une bouche délicate aux lèvres fines, des lèvres troublantes pour un homme, presque trop sensuelles. D’une description physique du personnage, il passe imperceptiblement à un portrait moral : – Il était le seul à posséder cette sorte de lunettes. C’eût été un détail si cette monture et ces verres n’avaient pas fait ressortir l’éclat singulier des yeux de Wenceslas, son regard enjôleur et presque câlin lorsqu’il décochait son interrogation favorite, empruntée, selon lui, à Mozart : – M’aimez-vous ? M’aimez-vous vraiment ? La question revenait comme une antienne, une véritable litanie. C’était la phrase clé de Wence. Ce portrait se poursuit sur plusieurs pages, entrecoupées d’anecdotes plus ou moins longues, de diversions sur d’autres personnages tout aussi hauts en couleurs.
La baronne avait les seins nus sous sa blouse. Cela m’épatait, j’en restais ahuri quelques instants ; ce qui m’étonnait le plus, c’est que j’étais le seul à avoir repéré ce charmant, cet affolant, cet extraordinaire détail. C’est ainsi qu’il fait la connaissance avec Béatrice de Sorges, la trentaine. Il en tombe amoureux comme on peut l’être à cet âge : Béatrice de Sorges suscitait chez moi une brusque poussée de désir physique, alliée à l’intuition d’un danger. Mais ce danger ne me faisait nullement peur. (…) – Madame, la mouche dont vous parlez n’est pas une mouche. C’est le plus beau des papillons. C’est vous ! C’est vous qui me mettez dans cet état-là.
Il fait connaissance avec une très jeune fille, extraordinaire, dont la beauté constitue une insulte faite aux femmes autour d’elle. Lumière de Moralès, une sorte de voyante, d’une sagesse bien au-dessus de son âge, au comportement étonnant. Et puis, que voulez-vous, je vais vous dire, je suis un peu devin. Je devine les choses. Je vous regarde, je vois votre façon de conduire. (…) Vous voulez tout, mais vous ne savez pas ce que vous voulez, ni dans quel ordre. Elle lui vole un baiser. Ils s’écrivent, échangent leurs pensées. Elle disparaîtra de sa vie, mais il la reverra plus tard, plus vieille, plus mûre encore.
Festival d’étincelles, de personnages mythiques tel ce petit homme, patron de presse, lors d’un déjeuner au Berkeley, de rencontres insolites, telle cette vieille dame, mère d’un meurtrier, qu’il serre dans ces bras avant de la quitter. Un livre que l’on quitte avec regret, non pour le récit, mais pour le charme des descriptions, l’acidité des peintures, l’envoûtement du détail, l’humilité du narrateur. Un livre à relire dans le désordre, au fil des personnages, en comparant l’art et la manière d’en faire l’effigie.
07:30 Publié dans 41. Impressions littéraires | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, récit, journalisme, portrait |
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02/08/2013
Improvisation sur le canon de Pachelbel, par Hiromi Uehara
http://www.youtube.com/watch?v=4S8ExFHXH94
On lui pardonne la préparation du piano, empruntée à John Cage (Le piano préparé est en réalité un ensemble de percussions confié aux mains d'un seul interprète, explique John Cage), qui n’apporte pas grand-chose.
Elle entre progressivement dans son improvisation, d’abord en poursuivant avec la main gauche le thème du canon, mais déjà de manière syncopé. Puis en lâchant complètement ce thème pour un thème très swingué, allante plein d’entrain, qui se termine par une trille probablement un peu trop pesante (05.50). Mais elle lui permet de rebondir sur un autre thème qui lui-même enchaîne sur un tremblement de la main droite pendant que le thème principal revient à la main gauche (06.00). Ce thème reprend la mélodie du canon manière swing. Puis, c’est la folie maîtrisée, pleine de dissonance, qui se termine gentiment, pacifiquement, en pied de nez, de manière classique.
Hiromi est une pianiste extraordinaire, capable de passer d’un rythme ou d’un thème à l’autre en un tour de main. Elle a le tempo dans le sang, la délicatesse du doigté, le don de passer de la main droite à la main gauche, à la manière de Glenn Gould, mais bien sûr dans un autre registre. Elle est enthousiaste et sereine, heureuse de jouer pour son public qui lui rend bien une ferveur passionnée.
07:56 Publié dans 51. Impressions musicales | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : musique, jazz, classique, improvisation |
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01/08/2013
James Mackeown expose à la galerie 26
L’intimité dévoilée, tel pourrait être le titre à donner aux tableaux de James Mackeown. Un coin de prairie ou de plage, un regard par la fenêtre, une scène de la vie quotidienne. Le regard de James Mackeown est sans arrière-pensée, clair de bonheur serein, d’impressions enfantines. La vie entre en vous et s’épanche dans ce regard où les couleurs ne maquillent rien. N’êtes-vous pas en bord de mer, les yeux emplis de la majesté des vagues qui se perdent sur la plage ?


Et là, à la maison, dans la cuisine, le matin, quand se prépare le repas de midi, dans la clarté et la fraicheur de la fenêtre ouverte.
James Mackeown aime les fenêtres. Elles ouvrent sur le monde, mais permettent de conserver une certaine intimité. Le regard par la fenêtre est une observation de timide qui n’ose se plonger dans la vie ou au contraire de quelqu’un qui a compris que la vie doit être regardée avec recul.


Ou encore une interrogation sur ce monde surprenant, inquiétant, mais impuissant à détruire votre paix intérieure.

Il aime la noblesse du quotidien, les matins endormis, les jeux d’enfants, les promenades dans la forêt, les bistrots et les pubs.

Il vit en France, mais il est d’origine irlandaise. Il aime la Normandie, ses bois, ses plages, ses maisons qu’il décrit par le jeu de coups de pinceau bleus, verts, ocres qui donnent une transparence magique et lumineuse. Et chaque tableau est un composé entre l’extérieur et l’intérieur, l’un affiché, l’autre à deviner. Les fenêtres permettent d’exprimer ces deux sensations.
Il expose actuellement à la galerie 26, 26 place des Vosges 75003 Paris.

07:58 Publié dans 21. Impressions picturales | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : peinture, dessins, art pictural, impressionisme |
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31/07/2013
Le regard du poète
Dans la certitude des jours, passe le regard
Assuré, empli de lui-même, qui contemple
Le vaste monde en conquérant démesuré
Incapable de voir au-delà de sa sphère trouble
Pourtant un battement d’ailes, un baiser
Une épine dans la peau, un chat renifleur
Une lune empesée, le cri d’une mouette
Créent le retournement recherché, attendu
Il a chaussé les lunettes de poète
Le regard se parebrise sous le vent
Qui s’engouffre le long de la colonne vertébrale
Et descend jusqu’au ventre chaud
Là où le lait devient étoile ou chemin
Et se perd dans la solitude de l’espace
Le poète au regard clair ne voit plus
Il s’ouvre et sort ses ailes de papillon
Il s’envole dans un ciel pur et transparent
Pour rebondir sur le souffle délétère
Qu’il est seul à domestiquer
Il tangente à la circonférence de l’impossible
Aux aguets, à l’écoute, à la fragrance, à la caresse,
Du peuple invisible des mots qui s’enchaînent
Sans se connaître, en grappes volages
Et c’est ce vide sidéral qui libère les toxines
Et fait monter au cerveau ces explosions
Qui créent le mythe du poète inspiré
Un voyage dans un ciel immaculé
Grand corps nu à l’enveloppe diaphane
Qui ne résiste pas à la douche enfiévrée
Des zigzags chaotiques de la sensation
Monte sur le vaisseau incontrôlable
Et crie de toutes tes forces
Train 10819 pour l’évasion, départ 03h23
Les voyageurs montent sans bagage
Nus devant l’éclair de lucidité,
Qui transperce leur regard
Et leur donne l’amour de l’univers
07:31 Publié dans 42. Créations poèmes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poème, écriture, poésie, littérature |
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30/07/2013
Complexité
Jardin à la Française vu d'avion, pilules digestives ou encore carrelages ? Qu'est-ce à dire :

07:30 Publié dans 22. Créations numériques | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : part optique, art cinétique, dessin |
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29/07/2013
Aux fruits de la passion, roman de Daniel Pennac
Une famille de fous et des amis encore plus fêlés ! Yasmina, Clément Clément, Loussa de Casamance, Théo, Clara, Gervaise, etc… La tribu Malaussène est complexe, embrouillée, vivante, prodigue, un sac de nœuds plutôt que de
vipères, envoûtante, drôle aussi. Le charme de l’indémêlable. Thérèse est amoureuse et rien ne l’empêchera d’aimer, ce que le vieil Amar traduit par : « Inch Allah, mon fils, ce femme veut, Dieu le veut. Yasmina m’a voulu parce que Dieu a voulu que je veille Yasmina. Tu comprends ? Il faut avoir l’esprit aussi large que le cœur de Dieu. »
Et qui Thérèse aime-t-elle ? Un conseiller à la Cour des comptes, au costume trois pièces, dit Marie-Colbert de Roberval, plus exactement Conseiller référendaire de première classe. Marie-Colbert était un type si grand, si droit et si bien élevé que le pan de son veston rebiquerait toujours au-dessus de ses fesses rebondies. Glabre, bien en chair, d’une pâleur idéale, il posait sur le monde un regard qui voulait se porter loin. Sa poigne était ferme et je l’imaginais volontiers mélomane, ce genre à jouer du Bach à heure fixe, avec une obstination de métronome.
Malgré toutes les tentatives de la famille Malaussène, Thérèse, la cartomancienne, finit par épouser Marie-Colbert. Le lendemain matin, elle réveille Benjamin, son frère : « Je peux avoir mon lit ? » et : « On parlera plus tard. » La suite rocambolesque est laissée à votre lecture. Jusqu’à la dernière page rebondissements, incompréhensions, rêves et bébé à l’appui : les fruits de la passion s’enrichissent.
Oui, c’est un drôle de livre et un livre drôle, plein d’humour déjanté, de surprises offensées, de méli-mélo entre une vieille France devenue mafieuse et Belleville devenue prude.
06:33 Publié dans 41. Impressions littéraires | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : roman, littérature, société |
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28/07/2013
Guillaume Macaire, entraîneur
Hier, à une réception, j’ai rencontré Guillaume Macaire, entraîneur de chevaux de course, un homme passionné et passionnant. Les cheveux frisés, la pommette haute, le sourcil broussailleux, il semble vous regarder du haut de sa corpulence
gentille, le menton levé sur ses certitudes. Il n’a qu’une petite taille, mais sa passion en fait un grand homme.
Il faut l’écouter parler de sa préoccupation permanente, le cheval bien sûr. C’est une passion dévorante, qui l’allège, l’éclaire, lui donne des ailes lorsqu’il se laisse aller à ses confidences. Tout son visage s’illumine, son sourire devient intérieur : il parle de ce qu’il aime, de cet animal sacré qui a transformé sa vie et en fait une légende. Et vous ne pouvez qu’écouter cet homme respectable et respecté parler de son affection unique, grandiose, exaltante, pour les courses, et derrière les courses, les chevaux. A dix ans, il est emmené par ses parents sur l’hippodrome de Compiègne. Il regarde ce monde inconnu de lui, admire l’agitation grave des soigneurs autour du dieu fringuant, observe l’attitude des spectateurs dont les yeux reflètent une vive inclinaison vers cet animal extraordinaire (mais les cavaliers ne parlent jamais d’animal lorsqu’ils parlent de leurs chevaux), aux membres racés, à la robe fine et brillante, qui piétine sur place comme en un jeu subtil pour mettre en évidence sa force, sa fougue, sa verve, sa maturité au jour de la course. Et en un instant, il se dit : « Ce sera mon métier ! »
Il s’anime, explique, raconte sa vision du cheval et sa manière de le débourrer, de le dresser, de le préparer psychologiquement, d’en faire un être surnaturel qui se donne à fond pour son cavalier : « Le cheval se donne tout entier. Le seul problème est de savoir l’obtenir. Certains cavaliers sont maladroits, autoritaires, bloqués sur des principes, alors qu’il faut laisser vivre sa monture pour qu’elle donne le meilleur d’elle-même. » Il vous dit cela de sa face réjouie, un sourire large, l’œil pétillant. Elle rayonne de bonheur rien que d’évoquer sa passion. Il enchaîne sans cesse de nouvelles remarques, des arguments, des commentaires, des précisions, des références, et rien n’arrête son discours passionnant parce que passionné.
Il s’est fait tout seul. Il conserve de ses jeunes années le souvenir vif de l’ambiance sacré qui règne autour des chevaux et du monde des courses, de cette attention permanente des hommes aux soins à donner à ces créatures merveilleuses. On voit dans ses pensées les images de ces années difficiles, mais combien passionnantes : les odeurs de l’écurie au petit matin, la senteur de la mousse blanche sur l’encolure que laisse la transpiration après le galop, le bruit léger des galops sur les pistes de terre, la dépression subtile de l’air au passage d’un étalon lancé à pleine vitesse.
Sa passion s’appuie sur une réflexion, une éthique de vie, une vocation qui s’est affirmée au fil des années jusqu’à le modeler dans toute sa sagesse d’homme de cheval qui voit ses rapports avec le monde en amoureux de la vie. Oui, c’est l’amour qui l’anime, lui donne joie, le tranforme en philosophe, tout cela grâce à l’image vivante en lui de l’association de l’homme et du cheval dans une chevauchée fantastique qui peuple ses rêves depuis plus de cinquante ans.
Oui, Monsieur Macaire est un homme enviable. Il a fait de sa vie un rêve qui l’élève et qu’il sait transmettre aux autres. Cela mérite le respect !
08:40 Publié dans 11. Considérations diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : passion, course, cheval |
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27/07/2013
Le portrait
Faire un portrait… Non point en image…
Mais en quelques mots bien affilés
Décrire au-delà des apparences
Les foncières qualités et insuffisances d’un être
Lui montrer que l’on a pensé à lui...
Seul dans la nuit de la foule atone
Faire jaillir une étincelle vivante
De ces lignes malhabiles, mais véridiques
Pour qu’il se reconnaisse et les autres aussi...
Oui, c’est un métier au pinceau acerbe
C’est un don au bout de la langue
Qui expose la pensée en musique des lettres
Et imprime dans l’air du temps
Cet instant imprévisible où apparut
Derrière l’être de chair l’ombre divine
Qui fait que les mots sortent, un à un
Sans peine ni repos, espacés parfois
Mais toujours incisifs, appropriés
Hauts en couleurs, sonorité brillante
Comme un arrière-goût d’inventaire...
Nez, bouche, oreilles, quel mélange
Chaque morceau d’être à sa particularité
Sa couleur unique, sa musique spécifique
Et tous se rassemblent en une danse
Qui en fait un tableau vivant
Vibrant de sentences alertes
Oui, un portrait est plus qu’une image
C’est un monde en soi, insolite
Sortant du cerveau bouillonnant
D’un observateur impartial
06:36 Publié dans 42. Créations poèmes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poème, écriture, poésie, littérature |
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26/07/2013
Les hérons
Ce matin, courant près du canal Saint Martin, je tombai en arrêt face à une devanture dans laquelle les mannequins étaient semblables à des hérons. Leurs pattes étaient tellement fines qu’ils semblaient sortir de l’eau, l’air sérieux, une main en l’air, la taille étroite, la cuisse moulée, le mollet gainé. Telle est la mode. Il faut un chausse-pied pour enfiler ce pantalon de toile non élastique qui est une double peau. Aussi fais-je maintenant attention au profil des jeunes hérons qui se promènent dans la rue. Ne pas les bousculer, le pantalon risque de craquer sous la pression psychique et même physique d’un effort inconsidéré.
Le terme héron est un terme générique désignant de nombreuses espèces d'oiseaux appartenant à différents genres d’une même famille. Il y a des Hérons Cendrés, très courants, habillés de gris foncé, mal engoncés dans leur costume de commercial. Il y a de Grands Hérons, espèce moins fréquente, mais en augmentation. Ils croissent en taille et en nombre. Il y a également des Hérons Coiffés, de panama de préférence. On trouve aussi des Hérons Impériaux, la tête haute, le corps stylisé, se tenant sur une patte, étroite bien sûr, élégamment vêtus d’un pantalon rouge débordant largement sur des chaussures bateau aux lacets roses, mais toujours serré sur le mollet.
Le héron est toujours du sexe masculin avec ses petits héronneaux. Il n’y a pas de héronne. C’est normal. Elle porte le même pantalon étroit et fume les mêmes cigarettes. Seule différenciation : le sac pendule, plein à craquer de trésors cachés dans lequel il convient de fouiller longuement avant de trouver l’objet désiré, un téléphone, qui s’arrête de sonner lorsqu’on met la main dessus. Son aigrette a du charme et lui donne l’œil égrillard. La cendre qu’elle revêt est plus lumineuse. Elle marche souvent en héronnière, devisant avec ses compagnes, voire même quelques hérons. Elle marche sur la pointe des pieds disposant d’un ergot spécifique lui permettant de montrer un mollet avantageux aux hérons. Parfois, et souvent même, elle s’arrête, prise d’une inspiration, et se repose sur une jambe étirée, l’autre paisiblement croisée pour mettre en évidence le galbe de son avant-jambe. Et si le héron lui plaît elle bat des ailes comme pour s’envoler. Elle se soulève de quelques centimètres, en lévitation, avant de redescendre près des jambières du mâle choisi. On ne sait plus alors quelle patte appartient à qui.
C’est une mode bien plaisante. Elle met de la couleur à défaut d’épaisseur : rouge, nous l’avons dit, mais également jaune canari, vert pistache, bleu azur, orange et autres ravissements de mélange bizarre. Mais cela sera rangé à la fin de l’été, lorsque les hérons redeviendront de simples citoyens vêtus bien sûr de noir, y compris la chemise. Employés des pompes funèbres sont-ils ?
07:19 Publié dans 11. Considérations diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : mode, société, animaux, femme |
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25/07/2013
Le kouan
Le kouan, c’est la contemplation d’un être sur le monde, en prenant de la hauteur, comme s’il regardait du haut d’une tour. C’est une vision nouvelle qui donne le pouvoir de passer du matériel au spirituel.
Ce dessin fait à l’encre de Chine met en évidence le contraste entre la verticalité du pont représentant le matériel et l’horizontalité de l’eau et de la terre. La lune crée le lien entre les deux.

06:57 Publié dans 24. Créations dessins | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : contemplation, spiritualité, dessin, création |
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24/07/2013
le bourdon
La chaleur a l’avantage de nous sortir de notre mode de vie habituel. L’activité forcenée n’est plus de mise dans cette atmosphère moite et étouffante, quand le ciel surchargé de nuages ne sait où déverser son déluge. Aussi, hier, à l’instar du chat crémeux à la queue bariolée, ou encore de l’écureuil caché derrière la branche, à l’ombre, m’étais-je étendu sur l’herbe attendant que la canicule ne me pousse dans la piscine. Je lisais tranquillement, savourant cet instant de solitude et de calme, lorsque mon regard fut attiré par un mouvement dans l’herbe rase.

Un bourdon voletait de fleur en fleur, ces fleurs proliférantes, aux pétales pointus, fleurs de trèfle qui jonchent la pelouse. J’avais le visage au même niveau que ces fleurs et observais ce ballet inlassable accompagné du bourdonnement caractéristique de ce corps rondouillard et agile. Je m’aperçus très vite qu’il s’agissait réellement d’un véritable travail, incessant, un travail à la chaîne, solitaire certes, mais reproduisant sans cesse les mêmes gestes : voleter au-dessus du trèfle pour repérer une fleur chargée de pollen, l’aborder en essayant d’accrocher ses pattes sur deux ou trois pistiles ou sur une feuille à proximité, plonger sa langue pour aspirer le nectar dans chaque calice et reprendre son vol vers une autre fleur. Une récente découverte a mis en évidence que « les fleurs se manifestent aux butineurs par un signal électrique, un peu l’équivalent d’une enseigne au néon au-dessus d’une vitrine. A leur surprise, les chercheurs ont découvert que les bourdons terrestres (Bombus terrestris) sont effectivement capables de détecter les champs électriques des fleurs, et apprennent à utiliser les variations de ces champs comme indication pour reconnaître les fleurs les plus intéressantes à butiner – celles où ils pourront trouver le plus de nectar. (…) En somme, la situation d’interdépendance entre les fleurs et les insectes pollinisateurs fournit, selon Daniel Robert, « une leçon de publicité sincère », l’intérêt de la fleur étant de « dire la vérité » sur son état. »

Et, inlassablement, le bourdon ne cessait de voler, se poser, aspirer, repartir pour une autre fleur plus blanche, plus chargée de pollen. Un ballet au premier abord, puis, en observant plus longuement, un travail de forçat, car sans un instant d’arrêt, il ne cesse d’aspirer pour, plus tard, dégorger sa récolte et revenir avec autant d’allant et de célérité vers le champ permanent des fleurs de trèfle. J’ai eu la vision des ouvriers en usine, accomplissant sans cesse le même geste, infatigables, s’essuyant parfois le front pour retenir les gouttes de transpiration au bord des cils.

Un bruit proche me fit lever les yeux et perdre cette contemplation fascinante. Retour à la vie normale après une plongée dans le petit monde des parterres piétinés.
07:16 Publié dans 11. Considérations diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : contemplation, vie animale, fleurs |
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23/07/2013
Quatuor pour la fin du temps, Olivier Messiaen
http://www.youtube.com/watch?v=jXxmvsllhCg
"Lorsque j’étais prisonnier, et j’ai conçu et écrit ce quatuor pendant ma captivité à Görlitz en 1941, l’absence de nourritures me donnait des rêves colorés : je voyais l’arc-en-ciel en l’ange et d’étranges tournoiements de couleurs. Mais le choix de l’Ange qui annonce la fin du Temps, repose sur des raisons beaucoup plus graves.
Musicien, j’ai travaillé le rythme. Le rythme est par essence changement et division. Etudier le changement et la division, c’est étudier le Temps. Le Temps (mesuré, relatif, physiologique, psychologique) se divise de mille manières dont la plus immédiate pour est une perpétuelle conversion de l’avenir en passé. Dans l’éternité, ces choses n’existeront plus. Que de problèmes ! Ces problèmes, je les ai posés dans mon quatuor.
Au nom de l’apocalypse on a reproché à mon œuvre son calme et son dépouillement. Mes détracteurs oublient que l’apocalypse ne contient pas que des monstres et des cataclysmes : on y trouve aussi des silences et des adorations, de merveilleuses visions de paix." (Olivier Messiaen)
Ce quatuor contient huit mouvements : Liturgie de cristal ; Vocalise pour l'Ange qui annonce la fin du Temps ; Abîme des oiseaux ; Intermède ; Louange à l'éternité de Jésus ; Danse de la fureur pour les sept trompettes ; Fouillis d'arcs-en-ciel, pour l'Ange qui annonce la fin du Temps ; Louange à l'immortalité de Jésus.
Le rythme est le sujet du quatuor. Le Temps est dilaté, il s’écarte du rythme de la vie quotidienne, matérielle. Il prend ses aises, refuse la mesure rythmique, la périodicité, la mélodie ordinaire fondée sur des reprises. Messiaen va même jusqu’à écrire : « Une musique rythmique est une musique qui méprise la répétition, la carrure et les divisions égales, qui s’inspire en somme des mouvements de la nature, mouvement de durées libres et irrégulières ».
On est parfois choqué par la dureté du piano, l’aigu de la clarinette. Mais bien souvent on respire les sons authentiques de l’éternité, juché sur un savon qui se laisse glisser du bord du lavabo jusqu’au siphon où le temps s’arrête. Et par cet étranglement, on écoute fasciné, les sons d’un monde sans temporalité.
05:45 Publié dans 51. Impressions musicales | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : musique contemporaine, éternité, spiritualité, temps, temporalité, rythme |
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