13/03/2014
Sutra du coeur
Le Sutra du cœur est le plus bref texte du corpus du Sutra de la Perfection de la sagesse. Il est récité quotidiennement dans les monastères zen :
« Sariputra (l’un des principaux disciples du Bouddha), la forme est vide et le vide est forme. Et vides sont les sensations, les perceptions, l’imagination et la conscience. Là où se trouve le vide, il n’y a ni apparence, ni sensation, ni perception, ni imagination, ni conscience. (…)
Il se termine par cette recommandation :
« Et voici le mantra du cœur de la perfection de la sagesse : Aller, aller, aller au-delà, au-delà du par-delà, que l'éveil soit réalisé! ».
Ce texte est à rapprocher de la notion de vacuité chère à la pratique du Zen. Le vide n’est pas l’absence de plein. Le vide est la condition nécessaire pour que le plein existe. Le plein a besoin du vide pour exister et le vide a besoin du plein pour être. Qu’est-ce que le vide ? C’est la non existence. Peut-on dire que le vide est le néant, au sens qu’il n’y a rien. Il y a le vide qui emplit tout, qui enveloppe tout, qui donne forme à tout.
C’est en cela que le sculpteur doit faire autant attention au vide qui entoure sa statue qu’au plein qui la définit. Sa perception du vide agit sur la forme qu’il donne.
De même les astrophysiciens s’interrogent sur ce vide sidéral à l’origine (ou non) du Big Bang. Comment le vide peut-il engendrer la nature des choses ?
De même également les mathématiciens s’interrogent sur les rapports entre le zéro et l’infini, car le zéro est un nombre entier naturel bien qu’il soit dans le même temps un nombre à part : 0 n’est le successeur d’aucun nombre, alors que tout nombre différent de 0 est le successeur d’un autre nombre.
Enfin, on peut aussi rapprocher cette expérience de l’expérience mystique de Saint Jean de la Croix : la foi est nuit, mais elle est le seul moyen de connaissance de Dieu.
La lumière existerait-elle s’il n’y avait pas l’obscurité du vide ? Elle ne serait pas visible, tout étant lumière. Le rapprochement des contraires est une des clés de la compréhension du monde.
07:05 Publié dans 61. Considérations spirituelles | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : spiritualité, vide, lumière, dieu, connaissance, vacuité | Imprimer
12/03/2014
Les formes
Les formes lui courraient dans la tête
Carrés noirs, ronds blancs, lignes
Points, rien… Quel mélange…
Une symphonie muette et colorée
Qui danse pour lui seul !
Dans son sommeil il les voit
Elles se dressent au pied du lit
Elles envahissent ses songes
Et ne lui accordent aucun repos…
Il les assemble au gré de la pensée
Du crayon sur le papier quadrillé
Elles se gonflent en trois dimensions
Prennent leur aise… Elles enflent…
Parfois elles détonnent… Douleur…
Comme une explosion dans la tête
Un vaisseau qui éclate…
Alors le sommeil vient
Il s’ouvre à l’esprit dérangé
Il balaye tout sur son passage
Et le vide s’installe, bienfaisant…
L’artiste flotte entre deux nuages
Eperdu de reconnaissance
Avant de retomber sur terre
Se cognant aux formes et aux couleurs…
© Loup Francart
07:53 Publié dans 42. Créations poèmes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poésie, écriture, poème, littérature, forme, peinture, couleurs | Imprimer
11/03/2014
Les arbre dénudés (1)
Un arbre en hiver, c’est comme un poulet sans plumes. Il est mort… Mais il leur reste leur orgueil, leur allure ou leur pauvreté naturelle : Pierre le Grand ou Saint François d’Assise !
Seuls, isolés dans les champs, ils se tiennent debout contre le vent et le froid, offrant au ciel leurs bras immenses et pleurant des gouttes de pluie en abondance.
En voici un, mutilé, manchot. Il lève son seul bras droit vers les cieux comme pour protester. Têtu, il se sait seul face à tous. Il ne se rase plus. Il attend… quoi ? Il ne sait. Il contemple son ombre et dit : « Je suis fier d’être là envers et contre tous. Admirez mon courage. Je veille sur l’herbe, sur les bois alentour, dressé dans le bleu de l’azur jusqu’à ne plus sentir mon bras ». Tel les stylistes, il dresse son membre et le laisse se dessécher. Il mourra ainsi, le doigt en l’air, couché dans la boue.
Celui-ci n’est qu’un champignon, une sorte de bolet au corps charnu que l’on rencontre sous les feuilles, à l’automne. Mais lui se tient là, dans sa puissance ramassée, ayant perdu ses membres, poilu et désossé. Il veille lui aussi. Regardez sa force contenue, son extrême concentration, ton front buté et ses poils hirsutes. Rien ne saurait le faire bouger. « Je suis là, et j’y reste ! »
La vieille garde, embarrassée de parasites qui l’encombrent tels les balanes sur le corps des baleines. Immobilisé par ce réseau envahissant, il tente de crier au secours, mais sa voix se perd dans l’air sec et ne suffit plus pour résonner. Alors il se tient là, tranquille, extatique, pathétique même, ouvrant ses doigts au monde, avant de mourir étouffé.
07:51 Publié dans 14. Promenades | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : nature, écologie, solitude, arbre | Imprimer
10/03/2014
Politiquement correct !
Le politiquement correct exige le non discernement. Toute distinction entre citoyens de la république est interdite. Le philosophe Alain Finkielkraut en a fait l’expérience après avoir dit : « Et puis il y a aussi une place en France pour les Français de souche ! Il ne faut pas complètement les oublier ! ».
Naïma Charaï, présidente de l'agence nationale Acsé (Agence pour la cohésion sociale et l'égalité des chances) explique qu’il « est inacceptable que ces propos soient tenus librement à la télévision sur une chaîne publique et qu'aucun des représentants du service public présents sur le plateau n'ait jugé opportun de relever ni de contredire ces affirmations que je trouve particulièrement choquantes. L'expression « Français de souche » est directement empruntée au vocabulaire de l'extrême droite, et elle est en totale contradiction avec l'article premier de la Constitution qui dispose : « La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion."
Comme déjà sont retirées du vocabulaire politiquement correct les notions de race, d’origine et même de sexe, que va-t-il nous rester pour nous distinguer les uns des autres ? Les noms ? Non, les CV doivent être anonymes. Le lieu d’habitation ? Non, c’est discriminer les banlieues. L’âge ? On parle d’abaisser la majorité à seize ans. Le mérite ? Les quotas imposent que certains citoyens accèdent à certaines grandes écoles sans concours.
Méfiance ! Ai-je le droit de parler de politiquement correct ? Rien que le fait d’en parler met en évidence le fait qu’il y a du non politiquement correct, interdit sur la place publique.
Que de clones de la citoyenneté et du bien penser républicain !
07:40 Publié dans 11. Considérations diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : société, politique, discrimination, république | Imprimer
09/03/2014
Dominique Christian, un peintre français de tradition chinoise
Il y a quelques jours, rentrant d’un vernissage près des grands boulevards, nous sommes passés rue de Trévise. Nous parlions de peinture et passions devant une boutique encore éclairée (il était neuf heures du soir). Je remarquais un vieil homme consultant une tablette et entouré de nombreux tableaux de style oriental. Il était occupé, concentré sur l’écran, sans attention à ce qui se passait autour. Une jeune femme sortit d’une porte latérale, belle, orientale elle aussi, vêtue d’une sorte de kimono, vivante comme un poisson émergeant de l’eau. Elle nous fit un grand sourire et indiqua notre présence au vieil homme. Celui-ci nous fit aussitôt signe d’entrer et se leva pour nous ouvrir. La jeune femme fut la première à la porte et s’effaça d’un sourire discret, tenant le battant pour nous laisser pénétrer. L’homme se contenta de dire : "Regardez… Vous ne trouverez pas à Paris d’autres peintres qui pratique ce style de peinture."
Etudiant, j’ai eu comme professeur Louis Marin, un grand spécialiste de l’art et de Nicolas Poussin en particulier. Grâce à lui je compris les cascades d’émotion qui envahissent ces œuvres classiques. Dans ces paysages à l’antique s’affichent des humains en proie aux passions, rapts, meurtres, orgies… C’est près de cinquante ans plus tard, après avoir appris la maîtrise des paysages chinois, que j’ai décidé de suivre le même chemin, c’est-à-dire l’envie de confronter la sérénité d’une nature au rythme mesuré avec les excès passionnels des êtres vivants.
Il est également philosophe, écrivain, manager et coach. Il explique : « Le paysage chinois présente la rencontre entre l'encre et le trait, entre l'ordre et le désordre. Il résonne de façon étonnante avec un des derniers textes de Platon, fondateur de la philosophie européenne qui, au quatrième siècle avant JC, décrivait comment le défini, "l'être", provient de l'illimité, le "non être". »
Parmi les techniques utilisées (frottage, estampage, tampons...), la plus spécifique est la peinture au doigt seul ; Originaire du Liaoning, elle donne à l'encre une liberté rare. D. Christian est sans doute le seul peintre occidental à maîtriser cette technique.
Qu’est-il cet homme qui pense et peint dans Paris comme s’il se trouvait dans les montagnes de Chine ? Il est beau de pensées limpides que son regard voit au-delà de nous. La jeune chinoise l'observe. Ils se connaissent bien. Qu’est-elle pour lui ? Elle rit de tous ces yeux qui réfléchissent son désir d’apprendre.
Il a une bizarrerie. Dans ses tableaux peints à la chinoise, il insère des images de peintres occidentaux. C’est curieux, irréel, inqualifiable.
Et il ajoute : Comme un récit, le monde se déploie à partir de l'énergie que procure une tension forte, un potentiel. Récit, peinture, musique ou érotisme tout est affaire de tension et de détente, de mesure et de démesure. Peindre le vivant c'est aussi peindre la mort, la disparition, l'absence.
Il expose principalement en Chine :
2012 exposition à LIJIAN (Yunnan)
2013 exposition à TIELING (Liaoning)
2013 exposition à XI'An (Shaanxi)
2013 à YAN'AN (Shaanxi)
2014 exposition à DALI (Yunnan)
2014 exposition à SHIDAO (Shandong)
2014 exposition à PEKIN
Un voyage en Chine d’une heure qui nous parut trois jours. Quel dépaysement !
07:39 Publié dans 21. Impressions picturales | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : peinture, orientalisme, chine, philosophie, paysage | Imprimer
08/03/2014
Elle s’élevait haut sur la scène
Elle s’élevait haut sur la scène
La danseuse aux pieds agiles.
Elle ne manifestait pas de gène
Seule, perdue sur cette île.
Parfois d’un saut plus truculent
Avant de redescendre d’un geste ample,
Elle dévoilait ses pauvres flancs
Et même un blanc triangle.
Sais-tu pourquoi les hommes
Se pressent au premier rang ?
Ils contemplent ses pommes
Et rêvent au noir sang.
© Loup Francart
07:14 Publié dans 42. Créations poèmes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poésie, écriture, poème, littérature | Imprimer
07/03/2014
Nyckelharpa et bagpipes: Anna Rynefors and Erik Ask-Upmark - Dråm
http://www.youtube.com/watch?v=BKuCe5Of6rY
Le nyckelharpa est un instrument traditionnel suédois dont on retrouve la trace dès le XIV° siècle (cf histoire). Instrument à cordes (“harpa” étant sans doute le terme générique pour ceux-ci) et à touches (“nyckel”), il fait partie de la famille des vièles. Sa particularité est de posséder un clavier muni, selon la période de laquelle il date, d’une, deux, trois, ou quatre rangées de touches, comme la vielle à roue (“hurdy gurdy” des anglais). Comme sur celle-ci, chaque touche dispose d’un sautereau (petite pièce de bois perpendiculaire à la touche) qui vient s’appuyer sur la corde pour en limiter la longueur vibrante. L’autre particularité du nyckelharpa est d’avoir des cordes sympathiques (12 sur les versions modernes). Ces cordes se trouvent en dessous des cordes mélodiques (celles que l’on frotte avec l’archet) et n’entrent en vibration qu’en fonction des notes jouées, par résonnance (par “sympathie”). Ces cordes donnent au son du nyckelharpa une certaine “ampleur”, proche de la réverbération de certains lieux. Il existe, dans le monde (et notamment en Inde) beaucoup d’instruments à cordes sympathiques (sitar, sarangî, rubab, vielle à roue, .....). En France, on parlait, à l’époque, d’’instruments “d’amour” (violon, quinton, viole,...) pour désigner ces instruments à cordes sympathiques. (http://www.nyckelharpa.fr/)
Après l’accord, le réconfort avec une gigue guillerette qui fait tomber les béquilles et entraîne même les infirmes. Et nos grands-mères (arrière-arrière…) dansaient cela avec chapeau, bas et sabots. Oui, c’est vrai, il nous manque ce piétinement des pas savamment entretenus, cette sauvage expression d’une liberté retrouvée dans le rythme, le pas et la chaleur humaine. Mais qu’importe refrain et couplets sont les bienvenus en ces jours tristes.
Ah, enfin, une vraie danse piquée et tressautée. Une harmonie retrouvée entre instruments, un véritable concert qui finit en queue de poisson. Quel bonheur que cette virée dans le passé.
Le folklore mérite une part dans l’histoire de la musique, car il est accessible à tous.
07:04 Publié dans 51. Impressions musicales | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : musique folklorique, danse, passé | Imprimer
06/03/2014
Le mercredi des Cendres
Dans le Carême, l'homme fait l'expérience intérieure de la purification du moi :
1° temps |
pénitence que le moi s'impose |
Le moi se coupe de ses attachements et réalise alors l'obscurité qui règne en lui. Il découvre l'intérieur de lui-même, n'ayant jusqu'alors vécu qu'à l'extérieur. |
2° temps |
purification du moi |
Coupé de ses attachements, le moi se purifie peu à peu. La bulle de l'être se nettoie par nos efforts et devient transparente. C'est alors que par moments la lumière divine pénètre en nous. |
3° temps |
mort à nous-mêmes |
Le moi s'est purifié. La bulle est propre, mais se noircit de nouveau à chaque instant. Il faut sans cesse la nettoyer. |
4° temps |
illumination |
L'esprit devient miroir de la lumière divine. Le moi devenu transparent laisse Dieu agir à travers lui dans le monde et offre le monde à Dieu. |
Les textes de la liturgie du Carême sont là justement pour montrer la difficulté de cette quête de Dieu dans laquelle les contraires se rejoignent :
"Qui s'abaisse sera élevé",
"Qui perd sa vie gagnera la vie éternelle".
07:09 Publié dans 62. Liturgie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : spiritualité, christianisme, carême, méditation | Imprimer
05/03/2014
Mondanités
Vous sonnez. Vous entendez le pas précis de votre hôtesse qui vient ouvrir. « Ah, chers amis, comme nous sommes heureux de vous recevoir ! » Vous entrez. On vous débarrasse de votre manteau tout en piapiatant pour ne rien dire. A peine installés dans le salon, vous la voyez filer sur un coup de sonnette inaudible. Elle revient avec une autre comparse tout sourire et miel soyeux. Et bientôt vous vous retrouvez six, puis huit autour d’une table si basse que les dames doivent couvrir leur corsage de leur avant-bras pour y prendre leur verre. On ne s’assied pourtant pas par terre comme au Japon. Les sièges sont confortables, hauts et pincés. On s’y installe droit et les femmes croisent les jambes élégamment sous le regard attendri des hommes. Ils attendent le moment crucial du décroisement et du recroisement qui s’annoncent par un froissement des bas dans un silence tonitruant. De leurs côtés les femmes se jettent des coups d’œil, observant l’homme encore jeune qui creuse ses abdominaux et resserre sa ceinture d’un trou, laissant apparaître alors de petites boursoufflures sur les hanches qu’il s’empresse de cacher dans les plis de sa veste.
La conversation se déroule. Elle a ses règles. Comme le temps psychologique, elle enfle et se désintègre avec régularité. Parfois un convive à l’égo acéré monopolise le verbe dans une danse des mots qui lasse peu à peu l’assistance. La maîtresse de maison, si elle tient son rôle, détourne subtilement la conversation d’une petite interrogation insidieuse qui n’a rien à voir avec ce qui préoccupait l’assemblée auparavant. « Avez-vous lu… Avez-vous vu… Pensez-vous que… Souhaitez-vous que… » L’un des invités comprend à demi-mot et répond aussitôt sur le même ton. Changement de rythme, changement de thème. On passe à une autre symphonie. L’orchestre se recompose. Le soliste varie, mais les musiciens savent enchaîner sans difficulté. La mondanité a des avantages, comme la politesse. Peu importe les paroles et même la mélodie jouée, l’impression suffit aux convives. Leurs yeux en témoignent : regard prudent d’un vieillard encore vert vers une cinquantenaire bien roulée, expression effarée d’une jeune dame devant l’attitude insistante d’un quadragénaire qui use et abuse de son verre à pied, attitude soumise et effacée d’une toute nouvelle mariée qui écoute son mari sorti d’une grande école parisienne énoncer des banalités d’un air docte. Les bruits de la Cour mobilisent en un instant la conversation : Savez-vous que le chef de cabinet du ministre… Toute l’attention se condense autour du détenteur de l’information. Il devient le héros du jour, il explique et réexplique, il ajoute des détails qu’il ignore, enjolivant les faits de motifs excitants comme les trilles du soliste sur une mélodie fade. Ayant épuisé son pouvoir d’imagination, le conteur s’arrête brusquement en attente qu’un autre comparse prenne le relai. Rien ne vient. Un silence inquiétant se fait. Il dure peu, mais ce peu se fait long, laissant un arrière-goût dans la gorge qui fait dire à l’hôtesse que le repas est servi. A défaut de grives, on mange des merles !
Le concert se poursuit sans entrave. Les uns parlent pour ne rien dire. Les autres ne parlent pas parce qu’ils ne savent que dire. Certains parlent ou plutôt se parlent à eux-mêmes en s’écoutant parler. D’autres encore tentent de parler, mais ne sont pas écoutés. Peu enfin se demandent ce qu’ils font là, isolés du reste des convives, mais ils maintiennent un semblant d’intérêt par quelques mots bien sentis qui fait dire au reste de l’assemblée qu’ils ont une qualité d’écoute hors du commun. Il convient bien sûr, de temps en temps, au moment de l’arrivée d’un plat, lorsque le premier convive a piqué sa fourchette perspicace sur une viande dorée, de s’exclamer sur les délices que l’on goûte. Que les mots soient criants de vérité et que le ton y soit. Votre hôtesse vous jette un regard éperdu de reconnaissance avant de reprendre part à la conversation de son voisin.
Ainsi se poursuit le diner, dans une bonne humeur factuelle, couvert d’un brouillard inaudible d’exclamations et d’inflexions, qui peignent un paysage à la Turner que l’on traverse à l’aveugle. Vient enfin le moment que votre corps attend bien que votre tête lui dit de se tenir tranquille, celui du départ du cocon, d’une extraction en douceur du piège moelleux de bonnes intentions de l’hôtesse charmante qui est tout sourire. Vous saluez les comparses de cette scène conventionnelle avec moult sourires et poignées de main rugueuses et vous retrouvez dans la nuit, cherchant le trou de la serrure de votre voiture dans les sièges de laquelle vous vous écroulez avec un soupir de bonheur. Enfin seul, face à soi-même, même si vous êtes en couple. Vous vous souriez. Après ces fariboles déjantées, vous prenez la main de votre complice et lui dites tendrement qu’il est bon d’être ensemble sans ce brouhaha virevoltant de mots prononcés sans pouvoir. Et pourtant : « Parlez, il en reste toujours quelque chose ! » Où se cache le pouvoir ?
07:38 Publié dans 11. Considérations diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : société, savoir-vivre, comédie, social | Imprimer
04/03/2014
Elle était belle
Elle était belle, elle avait vingt ans…
Elle court maintenant vers sa fin
De ses pieds menus et désespérés
Elle pousse un cri de désespoir
Mais se réjouit des jours passés
Elle était belle, elle avait vingt ans…
Elle va vers son destin tragique
La tête couverte d’un cache noir
Elle sait le drame qui l’attend
Mais elle chante pour le courage
Elle était belle, elle avait vingt ans…
Elle s’agenouille humblement
Tendant son cou fragile à la lame
Elle prie dans son cœur d’enfant
Mais pleure sur la vie à venir
Elle était belle, elle avait vingt ans...
Admirez sa superbe innocente
Elle vous regarde et vous n’êtes plus là
Vous avez peur de la voir, nue
Mais plus vivante que jamais
Elle était belle, elle avait vingt ans…
Mais qu’avait-elle fait ?
Elle était belle
© Loup Francart
07:23 Publié dans 42. Créations poèmes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poésie, écriture, poème, littérature | Imprimer
03/03/2014
Je te reparlerai d’amour, roman de Pascal Jardin (Julliard, 1975)
Un livre sans commencement ni fin. Des pages magnifiques et d’autres sans intérêt. On glisse dessus comme dans un rêve, laissant de côté certains passages, relisant trois fois d’autres.
Pascal Jardin est le père d’Alexandre Jardin, un auteur dont plusieurs livres sont de petites merveilles : voir Le petit sauvage (voir le 7 janvier 2013) ; Fanfan, le 29 juin 2012 ; Bille en tête, le 22 février 2013 ; Les coloriés, le 6 janvier 2014 ; Chaque femme est un roman, le 1er mai 2013 ; Le Zubial, le 3 mai 2012. Il est le fils de Jean Jardin, personnage truculent qui lui inspira La guerre à neuf ans et Le nain jaune. Il fut scénariste, dialoguiste et écrivain. Il fut aussi le héros de nombreuses pages des livres de son fils, dont Le Zubial.
Le livre commence dans un bistrot, avec le souvenir de Clara, il finit un matin de juillet lors d’un retour de Clara. Les mêmes phrases : Faut-il donc être fou pour avoir tout misé sur une simple femme, une bête qui mord autant qu’elle caresse, avec une petite tête dure comme le fer où les idées des hommes n’entreront jamais, une bête, belle comme un dieu païen, et si vulnérable avec son ventre qui saigne toujours une fois par mois.
C’est un livre circulaire, avec des dérivations, des impasses et de longs cheminements comme ces descriptions splendides de personnages extraordinaires. Ainsi Clara, nue, et Julien le mari de Clara : Ils étaient des animaux. Il n’avait plus que des corps. Encastrés l’un dans l’autre, ils fonctionnaient avec la joie dite de la première fois, et qui, tout bien pesé, ne vient qu’après longtemps, quand on a tout exploré de l’autre, qu’on est rodé, usé, poli, frotté à l’autre. L’amour fort, le contraire des premiers bafouillages, l’anti-puberté, la femme avec des hanches, la femme qui sent la femme et l’homme comme un chien. Sur elle le poids de lui, le poids de sa vie. Ils se connaissaient, ils se reconnaissaient.
Mais tout ne tourne pas autour de Clara. D’autres femmes sont le prétexte de portraits tendres et virulents. Ainsi de Frédérique : Elle avait des cheveux roux et se faisait par coquetterie un regard de myope pour mieux paraître étonnée. Dans le mode le plus fabriqué, le spectacle, elle était restée une paysanne. Les coudes sur la table, elle tartinait son pain avec des gestes bibliques. Elle ne prenait sa douche qu’en mettant de l’eau partout. Toujours elle s’habillait trop vite, et sortait dans la rue à demi boutonnée. « Il faut que j’aille », disait-elle, désireuse et pressée de courir le monde. (…) Elle avait vingt-cinq ans. Les hommes lui courraient beaucoup après. Elle courrait assez peu. C’était un petit prince. Une enfance difficile lui avait appris à survivre. Jamais elle ne se plaignait, ni du temps, ni des dents, ni de rien.
Ou encore l’Oiseau : Le nez était fin et petit, et les narines ouvertes laissaient voir en leur base une veine minuscule dont le rouge foncé tranchait avec la peau blanche de noctambule. Les yeux étaient importants, fendus en amande, très mobiles, le front bombé et haut était particulièrement masqué par une coiffure bouclée. La bouche sensuelle, aux lèvres fortes, contenait un sourire sans cesse retenu sur des dents de loup assez peu régulières, mais fort enviables. Les pommettes hautes, le cou long et les épaules carrées évoquaient les Olympiades ou quelque dieu du stade. Les mains potelées, comme chez les enfants, s’ornaient sur les ongles d’un rouge très foncé et récemment posé. Les seins accrochés haut sur le buste possédaient des points admirablement dressées. La taille d’une minceur évidente était le contrepoint à des hanches superbes, un beau passage pour une naissance. Les cuisses étaient musclées, les jambes fines et longues s’appuyaient sur des pieds un peu grands pour l’ensemble. Ils avaient cependant un attrait profond. Cambrés, ils donnaient leur assise au personnage…
A la fin du livre, la phrase du début qui se poursuit ensuite : ... Et pourtant, ceux qui voient le soleil dans les yeux d’une maîtresse, et lisent leurs blessures sur les lèvres peintes en rouge, et la houle du large dans les hanches d’une femme, ceux-là voient bien plus loin que la plupart des autres.
Alors laissez vous tenter. Vous y trouverez des pages charmantes et vous sauterez celles qui vous ennuient.
07:14 Publié dans 41. Impressions littéraires | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : livre, roman, femme, amour, société | Imprimer
02/03/2014
Le retournement des idées
La République se proclame égalitaire. A chacun sa chance ! Jules Ferry, en matière d’éducation, en fit son cheval de bataille. Tous peuvent accéder aux grands postes par la réussite aux concours et examens.
Depuis quelques années, et cela s’accentue sans cesse, l’égalité ne consiste plus à permettre à tous de travailler pour que tous puissent réussir. Elle implique un quota d’accès aux grandes écoles et universités sans concours ni examens. Il n’est plus question de sélectionner, car sélectionner c’est exclure. L’égalité est un postulat et non un résultat. Elle doit être imposée. Pourquoi ?
Les défenseurs de cette thèse proclament que l’inégalité ne tient pas à l’aptitude de chacun devant les tâches. Elle tient aux conditions sociétales et culturelles dans lesquelles celui-ci se trouve. Le bourgeois passe des diplômes. Le fils d’ouvrier, l’immigré n’y a pas accès en raison de son rang social. Alors l’égalité consiste à lui ouvrir les portes sans démonstration de son savoir-faire. Pas d’examen, pas de concours. L’égalité commande son intégration. C’est ainsi que Sciences Po, et d'autres écoles dites grandes, accueille des élèves de lycées défavorisés. Pourquoi certains sont sélectionnés, pourquoi certains lycées sont élus et pas d’autres ? Peu importe. Cette inégalité est retournée par l’objectif final : tant de pourcentage pour telle banlieue, telle appartenance, telle communauté, telle minorité, etc. L’égalité se retrouve derrière les statistiques et non derrière la valeur intrinsèque d’hommes et de femmes sélectionnés pour leurs aptitudes.
Désormais l’égalité consiste à donner à tel ou tel catégorie l’accès à ce qu’il ne peut par lui-même acquérir. La démocratie n’est plus affaire de partage des chances, elle consiste à donner à des catégories sociologiques déterminées ce que d’autres doivent acquérir par le travail.
07:18 Publié dans 11. Considérations diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : société, politique, éducation, formation, égalité | Imprimer
01/03/2014
Le miroir dans un miroir (Spiegel im Spiegel), d’Arvo Pärt
http://www.youtube.com/watch?v=iVa8zbqvLUM
Arvo Pärt une fois de plus nous surprend. Quelques notes égrainées accompagnées par un chant très léger… Quelle atmosphère ! S’agit-il d’une musique d’enterrement, d’une nuit sans sommeil, du repos après les feux de l’amour ou encore de la méditation d’un adepte du zen.
Rien de tout cela. Vous êtes seul face à vous-même, vous est renvoyée votre propre image, à l’infini. Rien que moi et ce moi n’est rien. Ce n'est qu’une enveloppe sans fond qui échappe à votre vue. Vous vous trouvez bien dans cette vision incongrue d’une forme invisible. Plus un souvenir, plus de volonté, plus d’avenir et même pas une présence dans l’instant. Et vous vous élevez dans les airs comme la fumée d’une cigarette dans un cendrier abandonné sur une plage.
Aux frontières de l’absurde ou une entrée dans la non douleur ? Le temps n’existe plus. Il tourne en boucle, avançant gauchement sur le chemin de la sérénité. Parfois une note aiguë résonne dans la tête comme une goutte d’eau qui tombe sur le crâne. Mais rien n’éclate, rien ne vient troubler l’inertie du corps qui n’est plus. Ce n’est plus une attente, ni même une absence.
Et pourtant le temps s’égrène avec ses trois notes et parfois quatre.
07:42 Publié dans 51. Impressions musicales | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : musique, minimalisme, musique répétitive, musique mystique | Imprimer
28/02/2014
L'eau dans tous ses états
L’eau, dans tous ces états
Remonte à la source
En vertu d’une équation :
Plus de cent pour cent
De hauteur de barrages
Par rapport à la dénivelée
L’eau n’est plus ce qu’elle était…
Qu’a-t-elle de moins ?
Non c’est en plus, invisible
Dilué dans la masse d’eau…
Cela donne des boutons,
Et fait des buveurs d’eau
Des rats courant en tous sens
Mais on trouve aussi dans cette eau
Des bouchons monstrueux
Qui nivellent à des hauteurs de noyade…
Il faut les faire sauter
Pas question de les manœuvrer !
Adieu long fleuve tranquille
Désormais cours jusqu’à la mer…
Personne ne peut t’attraper
Ni tremper ses doigts de pied
Dans cette eau désormais sacrée
© Loup Francart
07:09 Publié dans 42. Créations poèmes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poèmz, écriture, poésie, continuité écologique, eau | Imprimer
27/02/2014
L'enfant
L’enfant est un adulte déjanté. Avec une désarmante candeur, il vous sort quelques vérités incongrues telles que la présence d’un grain de beauté sur la joue ou le léger rebond de votre estomac. On ne peut s’empêcher d’en rire sur le moment, puis de pleurer sur le délabrement progressif du corps qui s’épuise à se renouveler et sur la personnalité élaborée avec tant de peines.
Je ne suis plus ce que je croyais être. Si je monte encore les escaliers quatre à quatre, je ne les descends plus que deux à deux. Si je lève toujours le coude, mon verre commence à trembler. Certes, j’ai toujours vingt ans, mais ces vingt ans sont devenus virtuels. De la réalité à la fiction et non l’inverse.
L’enfant voit les gens comme il les observe, sans l’ajout de l’habitude et du conformisme. Il se promène chaque jour dans des rues inconnues et considère leur nouveauté. Il s’émerveille à sa manière, par simple constat d’une réalité qu’il ne connaît pas suffisamment pour ne plus la voir. Cet émerveillement n’est pas l’extase de ce qui sort de l’ordinaire. Il est dû au contact de l’ordinaire qui est encore pour lui extraordinaire, ce qui n’est pas le cas de l’adulte. Seul le poète le rejoint dans cette extase. Chaussant ses lunettes de découvreur de la réalité, il fait lui aussi des focus sur une réalité devenue autre. Comme l’enfant, il tente de l’expliquer avec ses mots. Ceux-ci ne sont pas toujours compris parce qu’ils traduisent des images que le lecteur ou l’auditeur ne connaît plus ou ne connaît pas.
L’enfant apprend la réalité. Le poète redécouvre la réalité. Entre les deux, le monde nu, frêle et réel. Quelle plongée refroidissante avant de remonter revêtu de la couronne de laurier !
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26/02/2014
Sauf les fleurs, de Nicolas Clément (Buchet-Chastel, Paris, 2013)
Dans nos besaces, il y a avait toujours une tartine en plus. (…) Nous ouvrions nos besaces, les chevaux se régalaient dans nos mains gantées de souffles chauds. Aujourd’hui, il me reste peu de mots et peu de souvenirs. J’écris notre histoire pour oublier que nous n’existons plus.
Ainsi commence le récit de Marthe, une petite fille, puis jeune fille, étonnante d’innocence et de maturité. Elle raconte le calvaire de sa famille : un père qui boit et qui bat sa femme et ses enfants. Une mère qui supporte tout pour les protéger, des enfants conscients, mais qui restent des enfants.
Le récit est frais, anodin, empli du présent plein de terreur et d’un avenir imaginaire et consolateur : Je ferai des études pour être professeur de grenier et de livres anciens. Chaque chapitre égraine les ans. Ils se terminent par J’ai douze ans. J’ai seize ans… Elle découvre l’amour : Dans la chambre apprivoisée, ses mains me trouvent après m’avoir cherché caresses. J’oublie le filet percé qui me juge. Des paroles me poussent dans la bouche, que ne trompe plus mon vœu de silence. La douceur de ses hanches me suspend à la barre de ses yeux, puis je retombe ses jambes plus légères que le vide. A l’odeur de ses mots fous dans mes cheveux, je sais que Florent a souci du puzzle que je suis, tandis que s’estompe l’image clouée à l’envers de ma boite. Né d’un fil entre deux paysages, nous vivons d’une bouchée d’équilibre, notre envol, notre saut rattaché.
J’ai dix-huit ans… Le grec ancien lui tient lieu de refuge comme l’amour de Florent. J’ai hâte de ses yeux, je l’écoute respirer. Avant d’aller jouer, Florent m’appelle, nous nous fouillons, j’ai juste assez de place pour jouir. Sur le piano, il y a "Les plus belles chansons du temps passé", ouvert à la page huit. Il joue ma partition toute blanche et n’est lui chaque fois que j’écris, trois soupirs par seconde.
J’ai dix-neuf ans… L’année terrible où elle tue son père qui a tué sa mère. Tout ceci est conté d’une voix tranquille, comme détachée des évènements. Elle flotte dans un monde où rien ne marche et ne semble pas troublée. Papa visse le journal dans la bouche du mannequin. Le juge ordonne "Recommencez, plus lentement". Je recule. Je les vois attroupés, affairés à comprendre. Je m’approche du buffet. J’arme et je tire. Papa s’écroule. J’essuie mes jambes plaquées au sol. Un gendarme me ceinture. Nous n’avons plus rien à craindre. Je suis étrangement calme.
Une histoire terrible, contée du bout des lèvres par un mélange de franchise et de naïveté : Je voulais une mère avec des épaules pour poser mes joues brûlantes. Je voulais un père avec une voix pour m’interdire de faire des grimaces à table. Je voulais un chien avec un passé de chat pour ne pas oublier qui j’étais. Je voulais un professeur pour me surprendre…. Je n’ai pas eu tout ce que je voulais, mais je suis là, avec mes zéros, ma vie soldée du jour qui vaut bien ma vie absente d’avant. Je tombe rond ; mon compte est bon.
07:02 Publié dans 41. Impressions littéraires | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, roman, récit, poésie | Imprimer
25/02/2014
Le mystère du bonheur
Les hommes courent après le bonheur sans jamais le rattraper. Parfois ils sont si proches de lui que son parfum les envahit, les amollissant et les privant ainsi de ses bienfaits. Plus rarement encore, électrisés, ils le touchent du doigt et en restent sans réaction. Qu’est-ce que le bonheur ?
La première approche que l’on peut faire est comparative. Le bonheur se mesure et s’apprécie par rapport au malheur. Mieux même, le bonheur est l’absence de malheur. Est-ce si vrai ? Peut-on comparer l’intention d’éprouver du bonheur qui est encrée en chaque homme avec l’arrivée d’un malheur qui n’est, a priori, nullement recherchée ? Le premier serait le saint Graal, le second la tuile qui tombe sur la tête dans la rue. Pour le premier une recherche de toute une vie, pour le second une angoisse toujours présente. Cette approche a le mérite de mettre en évidence l’absence d’échelle de perception entre les deux concepts. Le malheur peut se mesurer comme on fait mesurer la douleur de 1 à 10. Mais le zéro n’est pas le bonheur. Il ne signifie que l’absence de malheur.
La deuxième approche permet sans doute d’aller plus loin. Elle est également comparative. Le bonheur serait un état d’être qui se situe sur une même échelle que la satisfaction du désir ou l’extase de la joie. Très vite cependant, l’on perçoit que ces deux dernières notions se situent dans l’instant, alors que le bonheur implique une certaine durée. Elles ne sont que des vagues nées du vent de la vie, alors que le bonheur se trouve dans les eaux profondes et sans mouvement, qui ne sont pas touchées par les aléas extérieurs. La satisfaction du désir, c’est-à-dire le plaisir, n’entraîne qu’un simili bonheur d’un instant. L’extase de la joie est une explosion brutale qui s’éteint progressivement de la même manière que l’eau qui bout se refroidit obligatoirement. Le bonheur est une sérénité durable que les riens de la vie ne peuvent atteindre.
Qu’est-ce qui fait cette différence entre le bonheur durable et la jouissance instantanée du plaisir ou la jubilation fervente de la joie ? Ne serait-ce pas leur cause ? Je recherche les seconds dans les événements de ma vie. Je découvre le premier en moi, grâce à la contemplation du mystère du monde, mais hors de tout impact momentané du monde sur moi. Oui, le bonheur est un retournement des perspectives. Il n’y a plus de ligne de fuite, mais perception d’un mystère qui s’agrandit en harmonie et de manière permanente. Le bonheur est une ouverture. Le plaisir et la joie ne sont que des explosions provisoires qui cessent lorsque les derniers débris sont retombés sur le sol.
Alors, que signifient ces mots : le mystère du bonheur ? Le mystère est inaccessible à la raison ou plutôt l’étude rationnelle ne permet pas d’en faire le tour. C’est par exemple ce qu’il y a au-delà du big-bang. La science approchera cet instant premier de la naissance de l’univers, mais elle ne saura jamais, sauf à changer de perspective, qui est à l’origine. A travers le comment, elle permet de répondre au quoi, mais pas au pourquoi. Pourtant, nous sentons bien, dans le même temps, que le bonheur dépend de nous. Ce ne sont pas les évènements qui en sont la cause, mais notre façon d’être et de vivre qui détermine la part de bonheur dont nous disposons.
Peut-on conclure, provisoirement, que le bonheur est une notion générale, mais qui se vit individuellement ? Je fais mon bonheur par ma façon de d’être et de vivre, mais ce bonheur m’est personnel dans sa réalisation. Oui, chaque homme est un mystère unique et c’est ce qui en fait sa grandeur.
07:20 Publié dans 11. Considérations diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : bonheur, société, connaissance, perception | Imprimer
24/02/2014
Le consternant silence de la nuit
Le consternant silence de la nuit
Quand l’œil ouvert promène sa caméra
Sur la chambre agrandie d’obscurité...
Un reflet dans la glace… Froid dans le dos
Un grincement de meuble… Mal aux dents
Le vol d’un moustique… Attente sans fin
La nuit n’est plus ce qu’elle était...
Elle court sans savoir où elle va
A l’aveugle, en femme échevelée
Elle me tient de sa main gantée
Et m’entraîne dans les précipices
En farandoles inlassables et vertueuses
Jusqu’au réveil hurlant
Premières lueurs de l’aube...
Les cheveux se dressent sur la tête
Rien d’autres ne te retient
Love-toi sur toi-même
Et sois comme le juste…
Endormi...
© Loup Francart
06:27 Publié dans 42. Créations poèmes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poésie, écriture, poème, littérature | Imprimer
23/02/2014
Edouard Pignon : Les plongeurs
"Au début, on ne voit rien. On voit un ensemble de choses, mais on ne voit rien, ou plutôt, on voit comme tout le monde. Ce qu'il faut, c'est une longue observation méditative, crayon en main. Et au bout d'un certain temps on s'aperçoit que les choses commencent à avoir une autre vérité. La réalité apparaît beaucoup plus vraie. Cela demande beaucoup de temps"
Quelle idée de peindre des plongeurs. Mais lorsqu’il peint, il devient plongeur, il se fond dans la vague et l’eau, se noie dans l’élément liquide et se laisse entraîner au gré des courants. Quel exercice : peindre des séries de plongeurs et de plongeons, entremêlement de formes, de volutes et de couleurs.
Soleil et mer, couché sur la plage, je suis également la lente modulation de chaque vague lorsqu’elle se retourne pour mourir sur le sable. Et ce brassage informe, cette épuisante lutte de la vague contre la terre se noie dans l’azur et le soleil.
Les plongeurs bleus (1966) :
Il se glisse dans la fraicheur terrifiante des profondeurs sous-marines. Ce plongeon en apnée le dissout. L’air devient l’eau, le liquide devient bulle. Les formes se fragmentent au gré des mouvements et lancent des éclairs blancs. Pourquoi ce sang qui se glisse dans la chair et sacrifie à ce baptême mouvementé ?
Les plongeurs rouges (1965) :
Un plongeon c’est la disparition progressive et subite du corps dans l’origine informe. Ne subsistent plus que les fuseaux et les pieds qui battent l’essence même de la vie. Mais cela peut aussi être un mouvement inversé : le corps est né, il sort de sa substance, il émerge de l’eau pour prendre pied dans l’air, puis bientôt la terre.
Les plongeurs (1960) :
Ici c’est l’étude de l’impact entre l’air et l’eau. Un instant magique où la différenciation se ressent sans analyse. Entrée dans l’inconnu des corps gorgés de soleil. Seul compte cette seconde où les doigts touchent la surface vierge et y imprime la rencontre entre les deux éléments.
Une multitude d’attitudes, de couleurs, d’impact, de dissolution. Ce n’est pas une représentation visuelle du plongeon, mais la sensation même de l’entrée dans l’eau ou du séjour dans une substance autre. La courbe des vagues suit la courbure des muscles. C’est un véritable corps à corps dans lequel pénètrent l’œil, puis la chair, puis l’esprit.
La toile me débarrasse de moi-même et me fait entrer dans la sérénité bienheureuse de l’immortalité.
Né dans le Pas-de Calais, à Bully les Mines, en 1905, Marles les Mines fut le pays d'enfance du peintre figuratif Edouard Pignon. Edouard Pignon était une figure singulière. Roux, il se trouvait laid. Mineur, il refusait de répondre en patois. Il voulait être écrivain et devint peintre. Peintre figuratif, il résista à la montée de l'abstraction. Homme du Nord, sa peinture a la lumière et la violence des couleurs du Midi où il vécut et fut ami de Picasso. Il est mort en 1993. (http://proussel.voila.net/pignon/pignon.htm)
07:15 Publié dans 21. Impressions picturales | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : peinture, peintre, impression | Imprimer
22/02/2014
La puissance de la musique
On se surprend à ne plus penser quand on écoute de la musique. Pas toujours certes. On peut même dire que c’est un phénomène rare. Mais parfois, un accompagnement insolite d’une mélodie connue, un son étrange et déconnecté de l’habituel vous revivifie. Vous n’êtes plus perdu dans vos pensées. La cigüe de l’éveil vous prend et vous enveloppe de sa conscience. Vous émergez d’un fatras embrouillé et vous plongez dans l’inconnu, le noir ou le blanc sans autre couleur. Un trou dans l’existence, juste suspendu par le fil d’araignée d’un son. Et ce son creuse le vide dans votre poitrine. Retournement des contraires. Vous êtes nu devant l’immensité et n’avez rien pour protéger votre nudité. Vous n’avez même pas conscience de celle-ci. Vous n’avez plus de pensée. Certes, cela ne dure que quelques secondes, et encore. Mais ce bref moment est une éternité pour vous.
Le plus souvent on écoute la musique comme étant une chose à connaître, à aimer ou à travailler. Elle reste extérieure à vous-même. On la caresse, on la cajole, mais elle reste autre, comme un personnage que vous rencontrez dans la rue et que vous attirez chez vous, dans votre intimité, sans toutefois jamais dépasser les règles du bon sens. Mais aujourd’hui nous parlons d’autre chose, d’un éclairage particulier. Quelqu’un appuie sur un bouton et tout s’arrête : pas de mouvement hors de celui de la musique, le calme du vide bienheureux. Ce n’est pas le néant, c’est un état d’apesanteur qui vous porte au septième ciel et vous donne la connaissance immédiate de la vie. Cela ne dure que l’instant où d’un coup de pouce sur la pierre du briquet vous faites jaillir l’étincelle et une flamme qui s’éteint vite sous un souffle d’air.
Alors la musique se révèle une science nouvelle qui donne accès à l’inconnu, une mathématique spécifique qui vous soigne du quotidien. La science à ce prix, n’est-ce pas un délice…
07:37 Publié dans 11. Considérations diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : musique, son, harmonie, connaissance | Imprimer
21/02/2014
La politesse
La politesse a deux fonctions.
Elle régule les rapports entre les êtres humains et permet d’éviter les heurts d’humeur, voir la manifestation ouverte d’animosité. Elle facilite ainsi la bonne marche de la société.
Mais elle peut également, et ses avantages se transforment alors en inconvénients, devenir langue de bois lorsque les parties ne veulent pas se parler. Sous prétexte d’éviter tout heurt, il devient impossible de s’exprimer et de faire part de son point de vue. L’échange n’existe pas sur le sujet de discorde qui est évacué sous prétexte de risque de confrontation.
Cela s’accompagne d’une discrimination à la parole. Les autorités seules y ont droit, en usent et en abusent. Les autres doivent écouter sous le prétexte d’éviter le démêlé verbale. Lorsqu’on veut faire part de son point de vue, il est trop tard, ce n’est pas le moment, ce n’est pas le sujet de la réunion. Bref, toutes sortes de faux arguments pour vous empêcher de vous exprimer. C’est ainsi que gouvernent nos politiques et notre administration. Cela évite d’avoir de véritables échanges participatifs.
Mais bien sûr, il y a eu concertation ! Celle-ci signifie que les deux parties ont été conviées à une réunion au cours de laquelle seules les autorités ont la parole, sans aucune réponse aux quelques questions qu’elles permettent de poser à l'autre partie.
07:23 Publié dans 11. Considérations diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : société, politique, liberté, langue de bois, désinformation | Imprimer
20/02/2014
Le virtuel et le réel
Oui, c’est vrai, comment distinguer
La réalité de la virtualité ?
Certes, je palpe la première
Et ne goûte que des yeux la seconde
Je me baigne dans le réel
Et nuage dans le virtuel…
On me dit que le virtuel
Existe sans se manifester
Pourtant les réseaux sont bien là
Pour signifier le mécontentement
On me dit que la parole est réelle
Mais la langue virtuelle
Ah ! Parler est vrai
Mais le Français n’est pas révélé ?
Le virtuel est le réel en puissance
Le réel possède-t-il tant de force ?
La mémoire virtuelle se déconnecte
Mais ma mémoire ne fait-elle jamais défaut ?
Oui, c’est vrai, quelle potentialité
Que ce plus qui vous accompagne
Et vous tire par la manche
Pour vous noyer d’une brume d’informations !
© Loup Francart
07:40 Publié dans 42. Créations poèmes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poème, écriture, poésie, littérature | Imprimer
19/02/2014
Ce qu’il advint du sauvage blanc, roman de François Garde
« Au milieu du XIXème siècle, Narcisse Pelletier, un jeune matelot français, est abandonné sur une plage d’Australie. Dix-sept ans plus tard, un navire anglais le retrouve par hasard : il vit nu, tatoué, sait chasser et pêcher à la manière de la tribu qui l’a recueilli. Il a perdu l’usage de la langue française et oublié son nom. Que s’est-il passé pendant ces dix-sept années ? C’est l’énigme à laquelle se heurte Octave de Vallombrun, l’homme providentiel qui recueille à Sydney celui qu’on surnomme désormais le sauvage blanc. » (Résumé 4ème de couverture)
On ne le saura pas, malgré les efforts d’Octave. Narcisse disparaîtra sans qu’il ait dévoilé ce qu’il fit pendant ce séjour imposé en Australie. On le devine cependant, car un chapitre sur deux est consacré à ses premières impressions : solitude, désespoir, incompréhension. Un martien parachuté dans le monde des hommes qui souffre de la soif, de la faim et de l’indifférence des sauvages.
L’autre moitié du livre est consacrée au récit d’Octave, homme raffiné, très à cheval sur les convenances, mais modeste et dérouté par le silence de Narcisse. Il écrit à son protecteur, le président de la Société de Géographie, et lui conte ses difficultés. Il sera l’objet de la risée lorsqu’il présentera son sauvage à la société : moquerie, incrédulité, voyeurisme. Narcisse est invité à se présenter à l’impératrice. Il parle pour la première et dernière fois ; il chante même, une mélopée imprévisible faite de miaulements, répétitions saccadées de syllabes, claquement de langue, grognements syncopés, sifflements. Quelque chose de la rudesse de l’Australie, de la solitude de ses déserts, de l’ardeur du soleil sur une terre craquelée… L’impératrice lui donne une bague et lui accorde un emploi dans l’administration. Ne sachant où le mettre, on finit par l’envoyer à l’île de Ré : garde magasin au phare des Baleines.
Un jour Narcisse disparaît et personne ne le retrouve. Evaporé, il devient une légende. Octave meurt. Plus personne ne se souvient de ces deux personnages haut en couleur qui marquèrent l’opinion de façon contrastée : drame véridique ou récit de faussaire ?
L’écriture est bien celle de la bonne société du XIXème siècle, compassée, emplie de références à la vision sociale d’alors. Le récit en devient long. Il tarde à dire les choses. On s’ennuie parfois sur ces précautions oratoires qui enrobent le déroulement des faits. Le récit lui-même s’embrouille à la fin. Pourquoi cette disparition, qu’advient-il réellement de Narcisse ? On ne le saura pas et l’on reste sur sa faim qui commençait à s’atténuer en raison de la monotonie du récit.
07:09 Publié dans 41. Impressions littéraires | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : livre, roman, aventure, géographie, société | Imprimer
18/02/2014
L'envie
L’envie, un besoin, un impératif très enfantin qui glisse vers l’adolescence et l’âge mûr jusqu’à encore émettre son clignotant dans les dernières années. « Oh, Maman, j’en ai tant envie ! » Et vous attendez ce jour de Noël avec une impatience extrême jusqu’au moment où vous l’avez. Je me souviens, adolescent, d’un cyclomoteur qui fut l’objet d’une folle expectative, avec ses rebondissements, ses pleurs et la joie de la possession.
Il y a trois types d’envie.
Le plus simple, et qui n’est nullement répréhensible, est le désir d’avoir ou de faire quelque chose, que quelque chose arrive. C’est une convoitise qui vous prend à la gorge, qui obsède vos pensées, qui vous rend malade jusqu’à sa satisfaction. Ainsi en est-il de l’homme qui achète une voiture hors de prix et qui invite sa femme à faire un tour pour lui dévoiler sa merveille. Il en est de même de la femme qui a acheté une robe également hors de prix et qui invite son mari à l’admirer, un soir, après un bon diner bien arrosé. Seule la banque ne s’en remet pas.
Un deuxième type d’envie, plus ennuyeux à gérer, est le désir de ce qu’un autre possède. On entre alors dans la démesure. On est prêt à dépenser beaucoup plus que ce que nous mettrions normalement. Prêt à se quasiment ruiner pour montrer que l’on peut posséder la même chose, que l’on est aussi riche, aussi pourvu, bref mettre en avant l’orgueil, la vantardise et le satisfecit. Ce genre d’envie, une fois satisfait, supprime cette tension raisonnée du corps et de l’esprit pour l’objet convoité. Vous l’avez, votre envie est passée, vaincue… La vie continue…
Le troisième type d’envie est un sentiment de frustration face au bonheur d'autrui ou à ses avantages. C’est un désir qui ne peut être satisfait. Il vous fait mourir à petit feu. Vous tendez la main au travers des grilles d’une prison imaginaire, la paume vers le ciel sans attendre qu’il y tombe quelque chose. Vous le savez, mais ne pouvez vous en empêcher. Votre esprit se rapetisse, vous vivez dans une boite de sardine à rêver d’une vie hors de proportions par rapport à vos compétences et à vos aspirations. Désir fréquent que celui de l’envieux de la vie de l’autre. C’est un moteur tyrannique qui ne possède que des mauvais côtés. Mieux vaut l’abandonner en chemin et partir à l’aventure sans savoir où l’on va.
Peut-on perdre toute envie ? Peut-on vivre sans désir ? C’est ce passage de l’envie à la liberté qui marque le tournant d’une vie. Celle-ci est au-delà de l'envie. Elle illumine le parcours sans jamais le contraindre. Elle éclaire la pensée et l’action sans jamais y mêler le désir. C’est un état d'esprit qui conduit à la réalisation de soi que l’on n’atteint bien évidemment jamais totalement. Mais ces plumes caressantes du bonheur suffisent à combler une vie agitée. Libre parce que sans envie, quelle sérénité !
07:50 Publié dans 11. Considérations diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : société, homme, liberté, philosophie, humanisme | Imprimer
17/02/2014
Barrière du conformisme
Quel titre ! Est-ce bien prudent ? Probablement non. Pourtant, derrière, la lumière de la création. Une telle figure est impossible, mais cependant n’est-elle pas belle?
Aux quatre coins une pyramide : un, puis deux, puis trois. Mais celle-ci est dédoublée à l’horizontal. Elle monte, puis redescend. Et les marches qui les séparent montent, puis redescendent. Une ronde sans fin, sans finalité en dehors de la curiosité et, aussi, de l’élégance.
Oui, ce pourrait être un objet à exposer dans un cabinet de curiosité.
© Loup Francart
07:47 Publié dans 22. Créations numériques | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : op'art, art cinétique, peinture, dessin numérique | Imprimer
16/02/2014
Le corps et l'âme
Je fouille en moi vainement
Pas une trace de l’âme
Descente dans l’obscurité du corps…
J’ai le vertige des vierges…
Le noir et rien, sans palier…
Un nœud lâche, puis deux...
Détente de la carcasse
Les défenses s’évanouissent…
Une lueur apparaît, lointaine
Je la perds, je la retrouve
Je m’allège et je me perds
Il reste toujours cette pellicule
Qui colle à l’être, tenace
Et qui empêche le départ…
Soudain, éclaircie, directement
Le blanc succède au noir
Le ying au yang
La hauteur à la profondeur
En descendant je monte
Et cette montée me ravit
Je perds mon poids
Je ne suis plus qu’une colonne
D’air purifié et rafraichissant
Et cela me suffit…
Ouverte à tous vents
Seule l’âme subsiste
© Loup Francart
07:26 Publié dans 42. Créations poèmes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poème, écriture, poésie, littérature | Imprimer
15/02/2014
Le Tao Dance Theater
http://www.youtube.com/watch?v=4uMsXniWCHI
Une belle présentation du Tao dance theatre, compagnie chinoise créée en 2008. Le style est très moderne, mais, comme son nom l’indique, il garde son fond culturel chinois. Le Tao ou la voie est le chemin à suivre pour parvenir à la maîtrise. Il se traduit également par le principe ou l’art de…
Cette présentation met bien en valeur cette maîtrise à acquérir par le mouvement et les temps d’arrêt. Pauses et changements sont l’expression d’une même réalité.
L'utilisation d'une sorte de contine inspirée à la fois de l'Afrique et des banlieues est certes déroutante. Mais... C'est... la mondialisation.
07:33 Publié dans 51. Impressions musicales | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : danse, philosophie, musique, chine | Imprimer
14/02/2014
L’influence ou la liberté
M.Oppenheimer et son équipe ont donnés des textes à lire à des étudiants en variant la taille et le style de la police de caractère "12-point Comic Sans MS 75% gris" et "12-point Bodoni MT 75% gris" pour les uns, "16-point Arial Black" pour les autres. C’est-à-dire :
-
12-point Comic Sans MS 75% gris : Est-ce lisible et pratique pour apprendre la physique?
-
16-point Arial Black : Est-ce lisible et pratique pour apprendre la physique ?
Puis, ils ont questionné les lecteurs sur le contenu des textes. 86,5% de ceux qui avaient la version point Comic Sans MS 75% gris répondent correctement, c’est-à-dire se rappellent des détails, contre 72,8% pour ceux qui avaient la version la plus lisible. Presque 15% de différence. Pourquoi ?
Eh oui, à vouloir trop mâcher, on désintéresse ceux qui ont l’esprit éveillé et qui sont prêts à chercher des heures plutôt que d’être enseignés pas à pas et cajolés benoîtement. C’est dans la difficulté que l’homme se découvre homme et non dans l’apathie. Inversement, l’enseignant ne souhaite souvent qu’une chose, la soumission à ce qu’il enseigne, sans dérogation. Car derrière tout cela, il y a la sacrosainte idéologie de l’influence. Vladimir Volkoff, le spécialiste de la désinformation, un jour où nous allions en train à Lille pour une conférence sur le renseignement, me dit : « Il n’y a pas de dialogue sans recherche d’influence. Tout homme cherche à influencer l’autre, quel qu’il soit. Ce peut être en forçant la main, ce peut être en douceur. Mais dans tous les cas, ce que j’expose à l’autre, dès l’instant où la conversation est sérieuse, cherche à le convaincre ».
En ces jours où la communication prime sur l’information, c’est d’autant plus manifeste. Et si l’on vous demande de dire si vous aimez ou non (like), c’est bien pour mesurer le degré d’influence qu’a pu avoir votre message, même s’il est pauvret par nature.
Mais dans la réalité profonde de l’homme se cache un désir de connaître qui n’a rien à voir avec l’influence. La liberté est le moteur de la discipline des grands hommes, qu’ils soient artistes, explorateurs, inventeurs ou tout autre métier dans lesquels la décision est le fruit d’un long cheminement. Peu importe les difficultés, peu importe les échecs, l’homme sait trouver en lui la volonté de poursuivre envers et contre tous. Cette tension intérieure est sa récompense et même si parfois elle ne mène nulle part elle a contribué à façonner sa personnalité et conduit à la réalisation de soi.
07:03 Publié dans 11. Considérations diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : information, formation, désinformation, apprentissage, liberté, réalisation de soi | Imprimer
13/02/2014
Exposition Art Déco, au Trocadéro
Une exposition qui a du succès, à tel point qu’on a du mal à admirer tout ce qui est proposé. Une multitude de gens s’y pressent : vieilles dames en mal de souvenirs, vieux messieurs très dignes sur leur canne, conférencières papotant telles des reines autour de leurs abeilles, jeunes filles au moins par deux, etc.
Il est vrai que l’expo développe tous les aspects d’une révolution culturelle à l’égal ou même supérieure à l’art nouveau, son prédécesseur chronologique. L’art déco est même, pour certains, une réaction à l’art nouveau. Ce dernier s’inspire principalement de la nature et de la courbe. Pas d’angles droits, mais des courbes végétales inspirées des fleurs, arbres, animaux. La courbe satisfait l’œil, enrobe ses perceptions, enjolive la réalité. C’est le « style nouille » qui en fait méritait mieux que ce surnom pamphlétaire. L’art déco lui succède à la fin de la première guerre mondiale. Il reprend certaines de ses caractéristiques : mouvement international, style nouveau qui s’étend à tous les domaines : art, architecture, décoration. Mais il redécouvre l’angle droit, la symétrie, un ordre plus classique. Il garde cependant un dessin et des volumes proches de l’art nouveau. Mais il utilise des matériaux nouveaux et s’étend non seulement à l’architecture privée ou publique, mais aussi aux usines, gares, métro, etc. Bref, ce mouvement révolutionna l’entre-deux guerres et nous voyons encore de nombreux monuments qui datent de cette époque.
Quand j’étais enfant, nous avions dans notre chambre un cosy art déco. Nous n’en avions pas un grand respect. C’est dommage. Il représentait une époque particulière : l’entrée du modernisme dans la vie quotidienne à l’échelle mondiale : le même style à Fougères et Mexico.
Ce fut une véritable déferlante d’art déco : bâtiments, jardins, sculptures, décoration, dont voici quelques exemples :
La force et l’intelligence, maquette du monument à la défense du canal de Suez (1930)
La petite fille aux tortues, de Renée Letourneur, dans les jardins d’Albert Laprade combinant architecture, sculpture, végétation, fontaines.
Des immeubles tels que nous les connaissons maintenant, sous forme de cubes accumulés et de baies vitrées.
Et la femme tient un rôle particulier : moderne, emblématique, symbolique d’une nouvelle conception de la vie. L’art déco touche également la mode.
En sortant des salles d’exposition, vous ne pourrez que voir le tableau de Jean Dupas (1925) intitulé La Vigne et le Vin devant lequel trône une Torpedo Grand Sport.
07:12 Publié dans 21. Impressions picturales | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art déco, architecture, art nouveau, mode, peinture, sculpture, décoration | Imprimer
12/02/2014
Un poème
Un poème, c’est un rond dans l’eau
Créé par l’impact d’une ivresse soudaine
Une gifle décoiffante d’un fait insolite…
Les sens en alerte tu guettes l’éveil
Aujourd’hui il ne vient pas, pourquoi ?
Remue la tête, déménage tes poussières
Souffle sur le décor et entame la valse
De la folie des mots qui s’enchaînent…
Laisse-toi bercer par la cathédrale
Et les résonances de ses fils de verre…
L’orgue se tait, l’organiste est mort
D’une crise de larmes et d’étincelles
Le chien aboie dans la tribune
Quoi de plus naturel !
Le fumet des mots d’antan a disparu…
Odeur des greniers ou des caves
Un relent de moisi ou de renfermé
Qui saute à la gorge étonnée…
Et tu poursuis en tournant à la main
Ta perceuse, fouillant dans le sable
Et la pierre jaunie d’écume
Jusqu’à l’étincelle attendue divinement
Qui met le feu aux poudres
Et chavire tes perceptions latentes…
Sautez le chat huant et l’éléphant rose
Ça clignote dans l’ellipse grammaticale…
Secoue la caisse de résonance…
Extrais le jus de l’ignorance
Et couche-le sur le papier
Laisse-le baver sur la feuille blanche
Qu’il se dessine seul en noir
Tache bienfaisante et fertile
Qui fait rire l’innocent
Et ricaner l’averti…
La mer des mots n’en finit pas de déborder…
© Loup Francart
07:41 Publié dans 42. Créations poèmes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poème, écriture, poésie, littérature | Imprimer