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15/03/2013

Danse soufi sur l’ennéagramme

Retour aux soufis en passant par Gurdjieff, cet étrange personnage. C’est très probablement lui qui a inventé cet ennéagramme. Le livre d’Ouspensky « Fragments d’un enseignement inconnu » (Stock, 1974) en donne une explication p.404.

http://www.youtube.com/watch?v=Qid15QgzXSI


 

Mais on est vite perdu dans les commentaires d'Ouspensky qui mêlent la théorie des octaves musicales mettant en évidence la discontinuité des vibrations et la déviation des forces à celle des chocs additionnels. Pour Gurdjieff, l’ennéagramme est le symbole universel du mouvement perpétuel : « Pour être compris, il doit être pensé comme étant en mouvement, comme se mouvant. Un ennéagramme figé est un symbole mort ; le symbole vivant est en mouvement. »

D’où cette danse qui met en évidence la ronde des hommes dans le mouvement perpétuel et l’importance pour ceux-ci d’entrer en harmonie avec ce mouvement.

Arrêtons-nous simplement à la beauté et à l’harmonie de la danse des hommes sur le chemin de l'éternité.

14/03/2013

L’ange du bizarre, le romantisme noir de Goya à Max Ernst, exposition au musée d’Orsay (1ère partie)

Vampires, diables, spectres, sorciers et paysages macabres. Tel est l’objet de cette exposition. Plutôt que du romantisme noir, il s’agit de l’apparition d’un imaginaire sortant de la raison et se plongeant dans l’inconscient. Cela commence au début du XIXème siècle par un tableau assez extraordinaire intitulé "Expulsion, lune et lueur de feu", peint par Thomas Cole en 1828, paysage mystérieux ouvrant sur les portes de l’inconscience ou de l’enfer.

Expulsion2_Moon_and_Firelight_1828_Thomas_Cole.jpg

Le monde coupé en deux, semblable des deux côtés et séparé par un pont de pierre branlant sur un abime. D’un côté, un coucher de soleil sur une mer perdue dans les montagnes et les racines, avec un deuxième soleil voilé et rouge. De l’autre, le même paysage montagneux, de jour, mais le pont donne sur une porte lumineuse, éclairée d’un feu vigoureux, dont on ne sait ce qu’il cache ou représente. On peut l’interpréter dans les deux sens : l’imaginaire et le réel, le conscient et l’inconscient avec les deux soleils. Mais où se trouvent les uns et les autres, on ne sait. Non seulement le tableau est expressif et suggestif, mais il est également d’une très belle facture. Bravo Thomas Cole, américain, paysagiste et peintre allégorique, auteur fascinant de nombreux tableaux traduisant l'empreinte du romantisme et du naturalisme !

Un deuxième tableau, intitulé "Dante et Virgile", de William Bouguereau et peint en 1850, reste dans la même veine picturale, très soigné, réaliste, et très académiste.

William-Adolphe_Bouguereau_(1825-1905)_-_Dante_And_Virgil_In_Hell_(1850).jpg

Puisant dans l’œuvre de Dante, il montre le combat de deux hommes : Capocchio, hérétique et alchimiste, mordu au cou par Gianni Schicchi, qui avait usurpé l'identité d'un homme déjà mort afin de détourner son héritage. Regardant la scène, Dante et Virgile. Spectacle horrible, mais empli de la beauté de ces corps exacerbés par une peinture très précise, dont l’anatomie est exagérée consciemment. La musculature et le cou de l’assaillant, amplifiés, met en évidence la rage et la violence de l’attaque. Théophile Gautier approuve : "Le Gianni Schicchi se jette sur le Capocchio, son rival, avec une furie étrange, et il s'établit entre les deux combattants une lutte de muscles, de nerfs, de tendons, de dentelés dont M. Bouguereau est sorti à son honneur. Il y a dans cette toile de l'âpreté et de la force, - la force, qualité rare ! ". C’est un combat à mort, où la haine se manifeste par la morsure des dents plantées dans la carotide de l’adversaire.

13/03/2013

Amusement sur les pavages de Penrose

 Source : http://serge.mehl.free.fr/chrono/Penrose.html

Éminent physicien et mathématicien, Roger Penrose est diplômé de l'université de Cambridge. Sa thèse (1958) porte sur les méthodes tensorielles en géométrie algébrique.

Entre 1964 et 1973, il enseigne les mathématiques au Birkbeck College de Londres et rencontre le célèbre physicien Stephen W. Hawking, son compatriote, à qui l'on doit un célèbre ouvrage : Une brève histoire du temps, Trous noirs et bébés univers.

Ils travaillèrent ensemble sur une théorie de l'origine de l'univers. C'est ainsi que Penrose apporta sa contribution mathématique à la théorie de la relativité générale appliquée à la cosmologie et à l'étude des trous noirs. Professeur à Oxford, il reçut, avec Hawking, le prix Wolf 1988 pour la physique et fut anobli par la reine d'Angleterre en 1994.

Contrairement à une conjecture que l'on croyait bien assise, à savoir que tout pavage du plan peut se ramener à un pavage périodique, Penrose montra (1974) que l'on peut obtenir un pavage non périodique en faisant usage de ces deux seuls types de "tommettes" judicieusement placées, faisant d'ailleurs apparaître deux types de décagones, éventuellement imbriqués, comportant chacun 5 pavés de losanges fabriqués à partir de deux triangles isocèles obtus et 5 pavés de losanges fabriqués à partir de deux triangles isocèles aigus.

 

Surgi de l’univers, cet ensemble trace sa route vers les humains, comme pour leur dire : "Oui, l’univers est organisé, intelligent et divin ! "

13-03-13 Pavage Penrose.jpg

 

12/03/2013

L'attente

Suspendu dans le mouvement,
Vous vous évadez du présent
Où êtes-vous ?

Hors des minutes
Dans les secondes éloquentes
Après l’appel du plongeoir
Avant l’éclaboussure de l’impact
Le corps arqué d’impatience

Dans le brouhaha, le silence
La tête vide d’occasions manquées
Seule compte l’avènement
Cet instant de complétude
Dont la flèche viendra toucher le cœur

Et vous n’êtes pas seuls
De longues files se forment
Serpentant devant l’ouverture
Unique, gardée par un cerbère
La matraque à la main

Patientez, il en reste le bien
D’un arrêt sur image, forcé
Equilibre précaire et symptomatique
D’espoir, de crainte, d’appréhension
Sur la pointe de l’âme

Vous n’êtes plus maitre de votre destin
Suspendu dans le mouvement
Vous attendez, vous entendez
La cloche de bronze d’une mort annoncée
Ou d’une vie jaillissante d’explosions

Frottez l’allumette de la flamme
Fermez les yeux et les oreilles
L’inconnue est au bord des lèvres :
La coupe du salut ou le couperet sordide

11/03/2013

"Les Sauvages", composé par Jean-Philippe Rameau et interprété par Grigory Sokolov

http://www.youtube.com/watch?v=bbIdN1-Cl3o



Une danse de sauvages ou une berceuse pour des nuits d’insomnie. Choisissez ! Quel que soit son but, on est entraîné par le rythme soutenu et on imagine assez bien l’arrivée des sauvages dans une forêt primaire, sautillants dans une nudité pudique.

L’interprétation de Sokolov est rapide, trop, au goût de certains. Mais quel entrain ! La musique coule entre ses doigts comme l’eau d’une source, sans heurt, avec harmonie, sans rythme trop marqué. C’est léger, gracieux et imposant de force tranquille.

Comparez avec l’interprétation de Casadesus, moins rapide, au rythme plus proche d’une danse interprétable, mais plus solennelle,  plus pataude et moins aérienne.

http://www.youtube.com/watch?v=p_yAEa2IUFY


Enfin, le ballet enchante les yeux autant que les oreilles. Dommage que les commentaires tournent autour d’opinions sociales et sociétales. Ce n’est pourtant qu’un divertissement à la manière de l’époque.

http://www.youtube.com/watch?v=3zegtH-acXE


10/03/2013

Jacques Villon, peintre cubiste

Jacques Villon, Né en 1875, mort en 1963, s’appelle en réalité Gaston Duchamp, frère de Marcel Duchamp, peintre dadaïste bien connu, et du sculpteur Raymond Duchamp-Villon.

Il commence par la gravure et le dessin et participe au Salon d'Automne de 1913 en tant qu’organisateur de la section dessin. Mais dès 1911, il fonde le groupe de Puteaux avec ses frères Raymond et Marcel, comprenant des artistes et des critiques comme Fernand Léger, Robert Delaunay, Francis Picabia, Kupka, Gleizes. Il élabore une forme de cubisme synthétique et crée le groupe de la Section d’or qui expose à la galerie La Boétie en 1912. Mais dès 1913, il se tourne vers l’étranger, dont New York où il envoie neuf toiles à l’Armory Show. Mais il est mobilisé en 1914 et participe à la grande guerre d’où il ramène cette toile « Soldats en marche » qui montre le degré d’abstraction obtenu.

Villon-Soldats-en-marche-1913.jpg

Son but était de montrer le mouvement au-delà des apparences d’ordre figé. Il y réussit, sans doute au détriment du sujet lui-même qu’on a du mal à percevoir. Mais on remarque déjà sa caractéristique : des couleurs qui se fondent entre elles, des lignes obliques qui s’entrecroisent, un art aux couleurs franches et un dessin réfléchi, travaillé. N’oublions pas qu’il était en même temps graveur. Admirons son Acrobate, peint en 1913, aux couleurs merveilleusement équilibrées et contrastées.

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Petite Peinture Cubiste 1921 by Jacques Villon, 1875-1964.jpeg

 

 

Après la guerre, il se fait connaître aux Etats-Unis où il est cubiste avant tout. Sa petite peinture cubiste de 1921 met en évidence l’empreinte du mouvement sur sa peinture.

 

 

 Admirons cependant son style particulier et son emploi de couleurs qui enchantent l’œil sans jamais choquer.

Villon-Fumée et arbres en fleurs.JPG

Vers la fin de sa vie, il retourne vers une peinture plus impressionniste avec un dessin toujours plus ou moins cubiste.

Le pont de Beaugency 1944.jpg

Enfin, animé par sa foi, il peint des sujets religieux et apporte à la cathédrale de Metz de très beaux vitraux. La couleur et la restructuration du sujet reste sa marque.

Il déclare ainsi que « la couleur est un poids dans la balance des émotions ».

Cruxifiction.jpg

09/03/2013

Le pissenlit

Premier jour de printemps, ou presque ! La nature s’oPissenlits 1.jpguvre à nouveau après ces mois d’hibernation. Vous vous promenez dans la douceur nouvelle de l’air et marchez dans votre jardin le nez en l’air. Parfois vous regardez au sol pour ne pas faire de faux pas sur une surface inégale. Et aujourd’hui vous remarquez ces tendres pousses en étoile. Ces sont de petites feuilles dentelées qui semblent sortir de la terre sans tige.

D’ici quelques jours votre jardin se couvrira de fleurs jaunes. Il sera presque trop tard pour en faire une salade. Son goût est amer certes, mais en mêlant quelques œufs durs et une vinaigrette à cette profusion vous vous régalerez. Comme son nom l’indique le pissenlit est diurétique. Mais il est également tonique, stimulant, laxatif, dépuratif. Votre pharmacie dans votre jardin, gratuitPissenlits 2.jpgement. Non seulement vous mangez les feuilles au printemps, mais vous préparez également les fleurs en tisane tout l’été, et pouvez faire une sorte de chicorée en automne avec les racines. Elles sont longues (jusqu’à 50 cm) et difficiles à arracher, mais vous les utiliserez tout l’hiver après les avoir fait sécher dans votre four.

Pourtant c’est une plante inconnue des livres de médecine jusqu’au XVIème siècle. Les grecs et les latins ne le mentionnent nulle part. Elle porte des noms divers : dent de lion, liondent, laitue de chien, couronne de moine, florin d’or, salade de taupe, etc.

Profitez donc de ces bonnes feuilles avant qu’elles ne deviennent trop acerbes. Mais si vous en avez dans votre jardin, et c’est probable, ne vous inquiétez pas, la tondeuse leur redonnera la douceur des jeunes pousses et vous pourrez en profiter jusqu’à l’été. Et s’il pousse trop vite, les enfants pourront faire voler leurs akenes, ces poils qui semblent de la neige au moindre coup de vent.

Pissenlits 3.jpg

08/03/2013

Arrondi et bleuté comme l’encre

Arrondi et bleuté comme l’encre
Le ciel referme sa voûte imperceptiblement
Sur la dentelle fragile de l’arbre mort
En haillons de feuilles décolorés.
Une à une, les brindilles s’évadent
Dans l’ombre. Mais vers le soleil disparu
Elles survivent plus longuement
Soutenues par le souffle du crépuscule.

07/03/2013

La vocation de l’homme : Olivier Clément

La vocation de l’homme : accomplir son humanité en devenant Dieu par grâce, c’est-à-dire pleinement vivant. (Olivier Clément, Sources, les mystiques chrétiens des origines, textes et commentaires, Stock, 1982, p.71)

 

J’ai eu le privilège d’être élève d’Olivier Clément. Un petit homme rond, dont le visage s’éclairait dès l’instant où il entrait dans son cours. christianisme, religion, mystique, humanité, méditationEtait-ce d’ailleurs un cours ? Non, plutôt une sorte de monologue transfigurant, d'où la poésie jaillissait en même temps que l’idée de l’homme, image de Dieu. Il se référait au texte qu’il avait préparé. Mais très vite, il abandonnait son papier et s’échauffait  de sa vision du monde. L’écouter revenait à remonter aux sources de notre être. Il n’étalait aucun concept, aucune philosophie compliquée. Pour lui, la théologie n’était nullement intellectuelle, elle était respiration, naturelle et enchanteresse. Il faisait part de son expérience de la vie, de ces moments où l’être se sent autre, élevé au-dessus de la matière. C’était à travers l’évocation d’une soirée d’été, d’un matin au bord de la mer, d’un voyage à la montagne. Et il disait toute sa joie de se découvrir homme, frontière entre le visible et l’invisible, le charnel et le spirituel, dans une situation d’incarnation, comme un médiateur entre la création et le créateur (idem, p.72). Il n’était pas bel homme, mais lorsqu’il évoquait ces moments, avec poésie, son visage s’éclairait et devenait lumineux.

C’était un homme simple. Il avait été élevé dans un milieu déchristianisé, agnostique, anticlérical. Son environnement était marqué par le « paganisme et l'athéisme militant socialiste », où la mort n'est que le néant, Dieu une invention des hommes et Jésus un mythe. Adolescent et jeune homme, il fait l’expérience de l’angoisse de l’homme devant le mystère de l’existence. À l'université de Montpellier, il plonge dans l'histoire des grandes religions et des civilisations. Après son agrégation d’histoire, il se retrouve dans le maquis. Il lit, il dévore, il médite les livres de Vladimir Lossky et Paul Evokimov : « À un moment donné, Dieu est venu me chercher et je l'ai suivi. J'ai mis entre parenthèses tout ce que je savais sur les religions. Je lui ai fait confiance. » Il fut baptisé à l'âge de 30 ans.

Il m’avait reçu plusieurs fois chez lui, à Ménilmontant. Il habitait un petit appartement dans une sorte d’HLM. Nous parlions de cette grâce qui nous avait touchés, de sa vision de l’humain. Oui, il croyait au progrès, à l’évolution de l’humanité, mais pas à celui du hasard et de la nécessité, dont le moteur ne serait que purement humain et aléatoire. Il croyait à la parousie et la présence permanente du divin dans la construction de l’humanité, tout en laissant l’homme libre de ses choix. L’histoire de l’humanité était pour lui profondément liée à l’histoire de chaque homme et à ses efforts pour laisser transparaître le divin dans sa vie.

Olivier Clément était un grand homme, porteur d’espérance, un homme comme on en rencontre peu, car rares sont ceux qui osent parler de ce qui les motive intimement et savent en faire part aux autres. Il a ainsi réalisé pleinement sa vocation, en devenant vraiment vivant, à l’image et à la ressemblance du divin.

 

 

Olivier Clément (1921-2009)

Théologien laïc et historien, né le 18 novembre 1921 à Aniane (Hérault), Olivier Clément s’est converti au Christ après une longue recherche dans l'athéisme et les spiritualités asiatiques. Il est devenu l'un des témoins les plus estimés et les plus féconds de l'orthodoxie en Occident. Ayant étudié la théologie notamment sous Vladimir Lossky (1903-1958) et Paul Evdokimov (1901-1970), il devient un des pionniers et colonnes du renouveau théologique orthodoxe du XXe siècle. Agrégé d'histoire, il a longtemps enseigné au lycée Louis-le-Grand à Paris. Professeur à l'Institut de théologie orthodoxe Saint-Serge, il est l'un des fondateurs de la Fraternité orthodoxe en Europe occidentale. Auteur fécond et apprécié, il a publié une trentaine d'ouvrages et une centaine d’articles consacrés à l'histoire, la théologie, la spiritualité et la vie de l'Église orthodoxe, et à la rencontre de l'orthodoxie avec le christianisme occidental, les religions non-chrétiennes et la modernité. Pendant plusieurs décennies, il a été secrétaire de rédaction de Contacts, Revue française de théologie et de spiritualité orthodoxe. Il reçut plusieurs distinctions honorifiques, dont : Docteur honoris causa de l'université de Louvain-la-Neuve (Belgique), de la Faculté de théologie orthodoxe de Bucarest (Roumanie) et de l'Université catholique Sacred Heart du Connecticut (États-Unis). Père de famille et grand-père, il est décédé à Paris le 15 janvier 2009.

From:
Pages orthodoxes La Transfiguration http://www.pagesorthodoxes.net/index.htm#index

 

06/03/2013

Quelle différence entre la littérature, la musique et l’art plastique ?

Quelle différence entre la littérature, la musique et l’art plastique ?

La littérature est là pour raconter une histoire, que celle-ci soit une histoire dans l’histoire, des réflexions sur l’histoire de l’homme ou encore l’histoire de ce qui pourrait se passer dans l’avenir. Bref, la littérature raconte, avec sérieux, avec humour, avec vindicte, avec émotion, le temps qui passe et ce qui reste de ce temps.

La peinture est plus subtile. Certes pendant longtemps, elle a elle aussi raconté une histoire, à sa manière, par les yeux et non les oreilles. Mais la photographie, puis, le cinéma, la télévision et maintenant les multimédias ont mis à mal la peinture d’antan, les paysages, les portraits et l’académisme. Désormais la peinture, pour une bonne part, ne raconte plus, elle rêve, en couleurs, en formes, en mouvement ou même à l’arrêt tel le carré blanc sur fond blanc, de Malévitch. Son objet est d’éveiller en nous des émotions, des sensations, des sentiments, bref du rêve qui reste encore palpable parce qu’on peut toucher les œuvres, qu’on peut les regarder, qu’on peut même les sentir. Mais elle s’approche tranquillement de la musique, en sœur plus jeune. Il faut une part d’imagination, d’exaltation, voire de délire, pour apprécier la peinture telle qu’elle se présente aujourd’hui. Beaucoup n’y comprennent plus grand-chose. L’abstraction leur est négation parce que coupée de l’histoire et des histoires.

La musique ne raconte rien, sauf la musique de films et quelques pièces drôles parce qu’imitant les bruits de la vie humaine, animale, végétale ou minérale. Telles sont la Poule de Rameau, le Tic toc choc de Couperin, le Carnaval des animaux de Camille Saint-Saëns, le Catalogue d’oiseaux d’Olivier Messian et bien d’autres compositions charmantes. Mais la musique va au-delà de l’histoire et de ses apparences. Que fait-elle ? Elle nous enchante sans que l’on puisse réellement savoir pourquoi. Elle va même plus loin. Elle est construite autour d’une mathématique différente de celle qui nous est enseignée: pas de système décimal, mais plusieurs systèmes (octave à cinq notes comme dans la musique asiatique, à sept notes dans la gamme diatonique, à douze notes chromatiques, voire d’autres comme dans la musique indienne). Les écarts entre les notes ne sont pas exactement semblables selon la manière d’accorder l’instrument et l’époque, etc. Qu’est-ce à dire ? L’harmonie des sons procède d’une autre logique que la logique décimale. Diviser l’octave en dix sons et vous n’aurez qu’une cacophonie. Il ne s’agit donc pas de penser la musique en termes de fréquences, c’est-à-dire en considérant la succession des notes, mais d’atteindre la véritable cosmologie de la musique, dans son étendue temporelle et spatiale. La musique exprime le Tout Autre derrière la matérialité des instruments et la physique des sons.

Et pour accompagner cette réflexion, appuyez-vous sur une musique de John Cage :

https://www.youtube.com/watch?v=NR0zVdjYXcw


05/03/2013

Musique irlandaise

Lord Of The Dance - Feet Of Flames (Hyde Park London)

http://www.youtube.com/watch?v=gdVF2pefNpg

  

 

Les danses irlandaises ont une spécialité, seule la partie inférieure du corps danse. Le buste, les bras, la tête sont figés de manière raide. Le dos est droit et les bras tenus fermement le long du corps, les poings serrés ce qui facilite une bonne position, sans crispation. Au contraire, les jambes sont toujours en mouvement rapide car la musique pour danser est souvent très vive.

Certes, cette représentation est médiatique et athlétique. Elle tombe dans le paraître. Mais dans le même temps, ces danses sont hors du temps. La légèreté des corps suspendus dans leurs bonds, la célérité des flexions des jambes, l’agilité des pieds, en font une figure emblématique de l’homme. Elles en montrent à la fois le désir permanent de s’élever au-dessus de lui-même et celui de s’amuser sans complexe dans sa réalité quotidienne.

Elles mettent également en évidence l’importance des groupes humains. Rien ne se fait seul ou le seul est associé et soutenu par le groupe. Il ne vaut que par le fait qu’il s’appuie sur le regard des uns (sur la scène) et les applaudissements des autres (les spectateurs).  

Enfin ces danses expriment la nature profondément sociable de l’humanité avec ses bons et mauvais côtés : l’ordre impératif, la fonction de répétition, l’imitation pour le meilleur et pour le pire. Et toujours, ceux qui s’efforcent de sortir du lot comme un jaillissement, produit du groupe, émanation de sa volonté et preuve de liberté malgré tout.

Les mille pattes sont en marche, entrons dans leur lente montée vers l’exaltation !

 

04/03/2013

La délicatesse

Sur des pincettes, j’approche
Du bout des yeux, je dévisage
L’oreille attentive, silencieuse
Crissement du verre sur le fer
Tempête dans la tête
Au sein de nuits débordantes
Je flotte dans la salive
Des neiges d’antan
Là dans le ruisseau
Le plus beau des trésors
Trois perles d’Ankara
Blanches, translucides

Delicatessen : charcuterie
Ou restauration de luxe ?
Extrême pointe de l’être
En équilibre sur les cieux
Montée sensible du nectar
Dans la colonne vertueuse
Jusqu’à l’explosion sucrée
Sans ces gouttes subtiles
Que serai-je devenu ?

Delicatessen : épicerie fine ?
Légère et élégante, elle reluit
De mille feux de légende
Fille de roi ou princesse tam-tam
Que sait-on de cette solitude ?

La délicatesse est bigote
Elle se pâme de différences
Caresse ses airs évaporés
Et chante ta chanson d’amour

La délicatesse est sirupeuse
Elle colle aux doigts de miel

La délicatesse fatigue
Exigence de limpidité
Le rare tue, comme l’acier

Mais toujours la délicatesse attire
Quelle ombre au soleil ardent
Sous son parapluie doré
Se cache les ruisseaux d’avenir

03/03/2013

Eblouissement

Cette explosion de lumière revient-elle sur elle-même pour se concentrer en un point par gravitation comme pour les trous noirs ou, au contraire, crée-t-elle un autre univers comme pourraient le faire les trous blancs ?

Tout est possible, cela dépend de la position et de l’observation du spectateur. Apprendre à considérer les objets d’une autre manière, d’un autre axe, avec une vision différente.

13-01-20 cubes symétriques2.jpg

Qu’est-ce qu’un trou blanc ? Regardez cette vidéo :

http://www.youtube.com/watch?v=E-IIxgK8qi8


02/03/2013

Promenade montagnarde

J’ai vu les montagnes étirer leur blancheur au réveil des matins, aux veilles des soirs. A l’aube, de grisâtres nuages voilaient leurs cimes endeuillées et se jouaient des lumières accrochées comme des vers luisants sur leurs flancs arrondis et tachés de rousseur. Leur tristesse insolite couvrait les forêts bleutées de larmes transparentes, prisonnières des trames d’araignées oisives.

Les promontoires allégés sentaient au réveil l’encre et le papier-peint, peint de fleurs inconnues et de blanches opuscules. Je riais de voir leur lente paresse à lever leur vieilles têtes vers la lumière des cieux.

Lorsque la nuit étendait son manteau, comme un cavalier sur les flancs de son cheval, la neige bleue riait de ses lèvres gercées sous nos pas malhabiles. Mes bâtons frappaient sa coquille comme les voyageurs sur l’huis des auberges inconnues. Je sentais le silence infini comme on sent l’odeur de l’obscurité. Dans les ravins obscurs, même l’eau suspendait son chemin en de longs filaments, comme les doigts d’une morte de verre et l’on n’entendait plus le mélancolique frémissement des pleurs de ces monstres alanguis. Parfois, les cimes respiraient l’air pur et buvaient les rayons dorés des soleils brûlants, tandis que leurs pieds nus ou nantis de poils verts, flottaient au caniveau des dieux.

Mon âme était naïve, elle avait perdu la perversion des couleurs humaines, le gris de leurs vêtements, le brun des cheveux ébouriffés et le rose de leurs mains avides.

Un jour, je possèderai une montagne. Elle aura les flancs lisses comme ceux d’un enfant et les pieds burinés des sages qui marchent en Inde, nus. Sa barbe verte aura des reflets bleus en regardant le ciel bronzé ; j’y enfouirai les pieds, écartant les orteils, comme dans le sable chaud. J’étirerai mes pas tout au longs de ses rides et caresserai du doigt ses phalanges mauves. Ses yeux bleus serviront de miroir aux étoiles riantes et aux robes des fleurs. Elle sera coquette et futile, aimant ses nombreuses parures, mais gardera la pureté des visages d’enfants.

01/03/2013

La perception du divin

Un jour, l’Homme prend conscience qu’il est devenu sensible à une certaine perception du Divin répandu partout. Interrogez-le. Quand cet état a-t-il commencé pour lui ? Il ne pourrait le dire. Tout ce qu’il sait, c’est qu’un esprit nouveau a traversé sa vie.

« Cela a débuté par une résonnance particulière, singulière, qui enflait chaque harmonie – par un rayonnement diffus qui auréolait chaque beauté…Sensations, sentiments, pensées, tous les éléments de la vie psychologique de prenaient l’un après l’autre. Chaque jour ils de venaient plus embaumés, plus colorés, plus pathétiques, par une Chose indéfinissable, - toujours la même Chose. Puis la Note, le Parfum, la Lumière vagues ont commencé à se préciser. Et alors je me suis mis à sentir, contre toute convention et toute vraisemblance, ce qu’il y avait d’ineffablement commun entre toutes ces choses. L’Unité se communiquait à moi, en me communiquant le don de la saisir. J’avais vraiment acquis un sens nouveau, - le sens d’une qualité ou d’une dimension nouvelle. Plus profond encore : une transformation s’était opérée pour moi dans la perception même de l’être. L’être désormais a commencé à m’attirer et à me griser. »

(Teilhard de Chardin, Le Milieu divin, Editions du Seuil, 1957, p.159)

 

C’est le commencement de la vie, une exaltation, une envolée, une évasion et un émerveillement. Cet état est semblable à l’amour. Sauf que cet attrait nouveau pour le monde n’est pas lié à la présence ou l’absence de l’être aimé(e). Il est universel et porte sur tout : les hommes et les femmes, les espèces animales et végétales, les paysages, l’obscurité et la lumière, l’immensité du cosmos. L’être s’agrandit, se dilate, tout en se dégonflant lui-même de toute velléité de richesse matérielle ou morale. Vous flottez dans l’azur tout en observant avec une acuité nouvelle un monde nouveau, illuminé, transfiguré par cette présence que vous ignoriez.

Malheureusement cela ne dure pas. Reviennent les jours mornes et silencieux. Quelle épreuve ! Vous perdez votre raison de vivre. Vous vous efforcez de la regagner. Vous y arrivez, vous échouez, vous êtes balloté entre un monde sans signification intérieure et un état où tout s’explique de manière claire. Ce n'est pas une compréhension intellectuelle. Ce n'est pas un raisonnement extérieur à vous-même. Cette expansion est perceptible instantanément, sans filtre, sans concepts. Elle vous unit. Il n’y a plus d’un côté les émotions, les sentiments, et de l’autre l’intellect ou encore le physique. Vous vous harmonisez et vous unifiez. Surtout ne pas conceptualiser cet état. Cela suffit à le désenchanter.

Allons, est-ce possible ? Oui, et cela est donné à tout homme. Merci à celui qui se cache derrière tout cela.

28/02/2013

Multivers

Est-il possible…
Oui, est-il possible que l’univers ne soit pas unique?
Notre univers qui contient toute la matière
Et donc, par définition, le tout
Serait-il un parmi d’autres de matière différente ?
Mieux même, ces univers autres interpénètreraient
Le nôtre, lui causant des perturbations
Comme le papillon réorientant la trajectoire d’une tempête
Le souffle d’une femme sur votre joue
Déchaînerait-il de semblables perturbations
Dans votre univers intérieur et unique
Oui. Sûrement. Quel tremblement !
Ce soupir mêlé au vôtre n’introduit-il pas
Une tempête intérieure bouleversante ?
Et  c’est ce coup de tonnerre dans votre monde
Qui vous fait dresser l’oreille vers l’espace
Mais aussi loin que le permettent votre vue et votre ouïe
Vous ne voyez rien, vous n’entendez rien
Mais vous ressentez dans vos entrailles
Cette révolution inhabituelle et chaude
Bouillie d’émotions et de sensations
Ah, quel malheur et quel bonheur
Que ce tremblement de terre
Que l’amour met en nous comme une semence
D’une vie meilleure et plus large

27/02/2013

Qu’ai-je donc fait, de Jean d’Ormesson

J'ai tenté de lire d’Ormesson il y a longtemps, si longtemps que je ne me souviens plus de quel ouvrage il s’agissait. Je m’étais ennuyé, le trouvant pédant. J’ai acheté ce livre dans un vide grenier et en ai commencé la lecture.littérature, roman, société, écrivain, philosophie Miracle, les 70 premières pages m’ont passionné. Je l’ai trouvé drôle, cultivé, au fait des questions éternelles sur l’homme, sur ce que chacun d’entre nous est et sur ce qu’il est lui-même. « C’est moi » est son leitmotiv des premiers chapitres : Bonjour. Bonsoir. C’est encore moi. Ne me dites pas que j’exagère... C’est vrai, j’ai du mal à me quitter.

Mais immédiatement après, il constate que moi, c’est vous : Chacune des créatures conquérantes et voués au néant qui sont passées sur cette planète a le droit de se lever et de dire : « Moi » comme moi. Je suis moi. Chacun de vous est un moi comme moi. Je – mon Dieu – est un autre. Aussi finit-il ce chapitre par cette supplique : Ne m’accusez pas, je vous prie, de ne m’occuper que de moi ; En parlant de moi, je parle de vous. Quel beau pied-de-nez !

Bien qu’il ne parle que de lui – et du temps – il reste primesautier. Progressivement, il commence à faire étalage de sa culture.  Pris sous l’angle de l’humour, cela passe. Il parle de sa paresse : Tout m’amusait. Rien ne me retenait. Tout me plaisait. Rien ne m’attirait. Il avoue même qu’il écrit toujours la même chose. Il aimait apprendre. Il était curieux. Puis il entre dans son côté plus « Regarde-moi » alors qu’il dit dans le même temps « Je ne cherche pas à plaire… Je vise à mieux : à me plaire. Le succès me paraît être un résultat et non un but. » C’est sûrement vrai, mais faut-il le dire ? Tous le proclament un fois le but atteint. Le livre change donc de portée. Il parle de sa famille, de ses ancêtres, de ses châteaux, de leurs rapports avec Dieu, de leur manière de table. Et cela perd le livre qui jusqu’ici nous charmait malgré certains dérapages. Il parle également de son Ecole, de ses professeurs, des trotskistes. C’est long et ennuyeux, malgré quelques beaux effets de style. Ce contraste entre la rue d’Ulm et sa famille lui permet de constater que tout s’écroule, sauf l’argent : l’argent hier, était, sinon une force de l’ombre, elle ne l’a jamais été, du moins un outil subalterne, un instrument au service du pouvoir. Tout, désormais, tourne autour de lui. Il est devenu le pouvoir.

Il reprend alors sa méditation sur Dieu et ses liens avec les hommes dans la troisième partie du livre, mais de manière indirecte. L’homme est le seul être capable de penser le tout. Il est remonté au big bang, il peut prédire comment les étoiles finiront. La vie et, au-delà de la vie, l’univers sont des machines à transformer l’avenir en passé. L’avenir ne se transforme pas directement en passé : il passe par le présent. Le monde est un paradoxe et un mystère parce que l’homme est dans le temps. Jean d’Ormesson  tente alors de faire coïncider la physique et la métaphysique dans des évocations brèves de l’espace, de la lumière, de l’eau, de la pensée, de la parole. Et toujours, il revient au temps. Il me semble que le temps n’est pas fermé sur lui-même et qu’il renvoie à autre chose. A quoi ? A l’éternité. (…) Dans ce monde, le temps est tout, mais, au regard de l’idée que nous sommes capables de nous faire de l’infini, il est une limite, une servitude, une imperfection. Il est la marque de notre condition misérable. A l’origine de l’univers, il naît avec le tout qu’il accompagne de bout en bout. Il est signe d’autre chose, vers quoi nous nous précipitons. De quoi est-il donc le signe ?

Dieu est caché, nous dit l’auteur. On ne peut ni prouver son existence, ni son inexistence. La science s’arrête à l’existence de l’univers, au-delà qu’y a-t-il ? La science est là. Dieu est ailleurs. Hors de ce monde. Hors du temps. A l’écart de nos lois que déchiffre la science. La science parle. Dieu se tait. La science est présente sur tous nos fronts. Dieu est absence.

Qu’a-t-il donc fait, finalement ?

Il a essayé d’être libre. Et ce qui l’intéresse, c’est l’avenir. Il s’obstine à lui faire confiance. Qu’ai-je donc fait ? Rien, bien entendu. Je le dis sans affectation et avec un peu d’orgueil. Rien, dans ce monde et dans le temps, ce n’est déjà pas si mal. Je suis entré dans le temps. J’ai fait partie de ce monde. C’est une chance inouïe, un bonheur et un triomphe. (…) Je me retourne encore une fois sur ce temps perdu et gagné et je me dis, je me trompe peut-être, qu’il m’a donné – comme ça, pour rien, avec beaucoup de grâce et de bonne volonté – ce qu’il y a eu de meilleur de toute éternité : la vie d’un homme parmi les autres.

Oui, on peut le dire, à côté de ses fièvres aristocratiques agaçantes, en dépit de son côté satisfait d’être ce qu’il est, Jean d’Ormesson sait nous faire lire l’histoire d’une autre manière, englobant ce qui préoccupe les hommes depuis des temps immémoriaux : d’où je viens et où vais-je ? Et celui qui dit moi, c’est nous.

26/02/2013

Pierre Fulcrand, à la galerie Lazarew

La galerie Lazarew (14 rue du Perche 75003 Paris) a une particularité, elle n’expose que des peintres pour lesquels son directeur, Alexandre Lazarew, éprouve ce qu’il appelle « un coup de cœur ». D’ordinaire, les galeries se spécialisent plus ou moins dans un style ou une époque. Ici rien de tout cela. Cela marche à l’amour de la peinture et du peintre. Quelle promotion que d’être convié à exposer dans une telle galerie !

C’est au tour de Pierre Fulcrand, un oublié du public, d’y être exposé. Et pourtant, il est décédé en 2004. Né en 1914, il fait les Beaux-Arts à Paris, passe du figuratif à l’abstraction, suit quelques-uns des grands mouvements, puis acquiert progressivement sa liberté. Anxieux, fuyant la presse et les vernissages, il se retire à Eygalières pour peindre dans la solitude ses plus beaux tableaux.

 

On classe son œuvre sous la désignation d’abstraction lyrique.  Mais cela suffit-il à exprimer son art ? Probablement pas. Pollock, Rothko étaient également qualifiés d’abstrait lyrique. Mais leur peinture avait-elle à voir avec celle de Fulcrand ? On pourrait aussi parler de peinture gestuelle. En effet, l’artiste le dit lui-même : "Je mets la fougue en premier. La construction vient ensuite, plus facilement, en deuxième position." 

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Ce premier tableau met bien en évidence l’importance que le peintre accorde à l’expression de l’émotion.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 Inversement, ce second tableau montre l’équilibre que le peintre trouve dans la peinture,abstrait,peinture lyrique,peinture gestuelleconstruction : deux grandes masses sombres séparées par un bleu céleste entre lesquelles se glisse une composition abstraite, elle-même balancée et stable. C’est une sorte de repos que le mouvement même de chacun des éléments entretient.

 

Et pourtant l’artiste lui-même avoue ses tourments lorsqu’il peint. Chaque tableau sort d’abord du cœur, en bouillonnement d’émotions. Progressivement, il y ajoute l’équilibre indispensable, cherchant comment arriver, par le geste et la couleur, au fini souhaitable plutôt que recherché.

 

Et cet équilibre des masses, formes, couleurs, mouvements, il le trouve. Ce tableau lumineux où contrastent obscurité et lumière, geste et passivité, vivacité et lassitude, couleurs chaudes et froides, en est la preuve.

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25/02/2013

Le mystère de l’unicité des êtres

Chaque homme est unique. Contrairement à ce que beaucoup pensent, le monde animal possède le même mystère. De même que dans le monde humain, chaque animal est unique et se distingue de son voisin bien qu’il appartienne à la même espèce. Chacun d’entre eux détient une phéromone spécifique qui en font un spécimen singulier, un trésor étonnant parce que seul au monde. Et il en est de même des plantes, des cailloux, des astres et des galaxies.

Seule la mémoire, parce que défaillante et peu perspicace, seule notre cécité devant les mystères du monde, font croire au hasard et à la nécessité, à l’ennui et à la norme. Dieu, dans sa subtile inspiration, invente pour chaque être humain un lieu de singularité, la chambre d’accès à sa magnificence. Elle se manifeste par le physique, par le psychisme et plus profondément encore par l’âme, unique pour chacun de nous.

Oui, l’âme est la chambre des secrets qui ouvre à l’au-delà du temps, un monde où tout est épanouissement et enchantement. Les yeux ouverts dans notre achèvement, nous contemplons le monde divin à travers la réalisation des autres et de nous-mêmes.

Rien n’est jamais semblable lorsque le temps s’arrête, alors que nous imaginons généralement un monde immobile et souverainement ennuyeux. Le paradis, c’est la rencontre des contraires, l’arrêt et la vitesse infinie d’un temps qui devient autre. Sorti du temps et de l’espace de notre univers, l’homme devient Dieu, ou presque. Il n’est plus ni vivant ni mort au sens terrestre, il baigne dans une félicité intérieure et extérieure (mais peut-on dire qu’il sache encore où se trouve l’extérieur et l’intérieur ?) où tout est arrivé à sa propre réalisation.

24/02/2013

Pourquoi faut-il que le temps s’accélère ?

Pourquoi faut-il que le temps s’accélère ?
Jeune, il se traîne comme l’escargot
Les jours vous paraissent des mois
Les vacances sont au-delà de l’océan
Quand viennent les premiers examens
Il accélère son rythme. On s’essouffle !
Puis il reprend son lent cheminement
Au gré des occupations professionnelles
Jusqu’au stress des échéances immanquables
Pourtant, en soi, il ne concède rien
Il se tient immuable dans sa robe rose
Et regarde les hommes s’agiter
Comme des pantins échevelés
Et l’autre, en face, soupire
Quand nous arrêterons-nous ?
Les enfants passent et partent
Et tu es toujours là, le même
Ou du moins le crois-tu
Mais tout s’accélère et s’emballe
Tu ne sais plus où te tenir
Les mois sont des jours,
Les années sont des mois
Et file la laine sur le rouet
Qu’ai-je entre les doigts
Ce bout de fil qui devient si petit
Qu’il finit par casser, par maladresse
Ignorance ou parce que c’est l’heure
Tu n’as pas changé en réalité
Tu restes l’heureux enfant
Qui courrait dans les prés
Et cependant la vie t’a marqué
S’est imprimé en toi subtilement
Tu es un homme, un de plus
Dans la longue liste des passages
Qui s’agrandit imperceptiblement
Je suis, j’ai été et que serai-je ?
Au-delà de l’horizon s’étend
La longue nuit, calme et envoûtante
Mais elle reste inaccessible
Tant qu’on n’a pas franchi le pas

23/02/2013

Dévoration et renaissance

Matière triangulaire qui dans l’agitation cosmique et par gravité forme une masse d’abord informe, puis quasi ronde.

13-01-25 Triangles Primerose2.jpg

Avez-vous vu cette étoile dévorée par un trou noir ?

http://www.youtube.com/watch?v=TUdTndJWXjU


Mystère de l’univers où même la matière la plus compacte se laisse absorber comme le moustique est englouti par la plante carnivore.

 

22/02/2013

Bille en tête, roman d’Alexandre Jardin

Chaque famille a son vilain petit canard. A la maison, ce rôle me revenait de droit. J’y voyais une distinction. En contrepartie de cet avantage, je fus expédié à Evreux en pension. Evreux, ville où l’on est sûr de n’avoir aucun destin. Véritable banlieue de l’histoire, les réussites y sont lentes. La province a toujours fait de l’ombre aux ambitieux.

Décidé à lutter contre la tyrannie de son père, Virgile, le narrateur, ne demande13-02-21 Bille en tête A Jardin.jpg pas la permission de grandir. Il se sacre adulte lui-même. Son premier essai est malheureux : fuir la pension en prenant le train pour Paris avec un camarade et se retrouver au commissariat. Heureusement, l’Arquebuse, grand-mère et personnage de poids, vient l’en délivrer.

Il fait connaissance avec Clara, une femme mariée, lors d’un diner auquel son père l’emmène. Il ose lui dire : « Clara, j’ai quelque chose à vous demander. A table, je voudrais être assis à votre droite, pas à la table des enfants. » Puis il lui donne rendez-vous à la sortie de son collège. Et elle y est : « Clara s’est avancé vers moi. Elle m’a regardé. Je lui ai pris la main. Nous étions seuls. Les oiseaux chantaient pour nous. Le soleil aussi brillait pour nous. Dieu qu’elle était belle dans sa robe qui laissait voir ses jolies jambes. » Tout alla très vite. Le soir même, il est à l’hôtel guidé par Clara pour ses premiers pas dans l’amour. Le lendemain, se promenant avec sa conquête sur la plage de Deauville, il rencontre son père et lui annonce : « Je suis venu avec Clara, je l’aime. » Elle éclate de rire, tentant de faire croire à une mauvaise plaisanterie.

Virgile fait la connaissance de Jean, le mari de Clara. Avec Clara et Jean notre vie à trois dura encore quelques mois. Il l’emmène chez sa grand-mère. Ils font de la barque sur l’étang. Ils redeviennent enfants. Mais son père à nouveau les rattrape.

Exilé à Rome, dans une pension prison, il trouve le moyen de faire venir Clara. L’apprenant par une photo sur un magazine, son père finit par le mettre à la porte : « Virgile, je ne te jette pas hors de chez toi. Tu es déjà parti. » Il devient coursier dans un journal.

La mort de l’Arquebuse met fin à cette errance d’adolescent. Virgile prend conscience de ses avancés dans la vie. De retour à Paris, après l’enterrement, il se précipite chez Clara : « Clara, il m’arrive quelque chose de formidable. Je vais quitter mon enfance. Je vais te quitter. » En la quittant, je rompais le dernier lien qui me rattachait à ces longues années de souffrances ; je mettais fin  à mon infinie tristesse d’être petit. Haut les cœurs !

Vous me direz que tous les livres d’Alexandre Jardin sont semblables. Oui, c’est vrai. Mais quelle fraicheur d’invention pour fêter l’amour, la jeunesse, la liberté. C’est une bouffée d’oxygène dans un monde asphyxiant, un remède à la mélancolie, voire à la dépression. « Chaque fois que tu vis, que tu écris ou que tu dis avec légèreté quelque chose de grave, tu gagnes en grandeur », dit l’Arquebuse à Virgile.

21/02/2013

Stabat Mater, de Pergolèse

http://www.youtube.com/watch?v=9mrVZHPikqM

 

 

Le Stabat Mater évoque la souffrance humaine de Marie devant son fils crucifié et la souffrance du chrétien devant l’approche de sa mort. Il constitue une séquence, pièce liturgique chantée le 15 septembre, jour de Notre-Dame des Douleurs. C’est un chant de méditation par excellence. Composé au XIIIème siècle par le franciscain italien Jacopone da Todi, il dit la douleur de Marie :

Debout, la Mère, pleine de douleur,
Se tenait en larmes, près de la croix ,
Tandis que son Fils subissait son calvaire.
Alors, son âme gémissante,
Toute triste et toute dolente,
Un glaive transperça.
Qu'elle était triste, anéantie,
La femme entre toutes bénie,
La Mère du Fils de Dieu !
Dans le chagrin qui la poignait,
Cette tendre Mère pleurait
Son Fils mourant sous ses yeux.

Il évoque le croyant qui ne peut que partager cette peine, conscient que c’est en partie par ses fautes que Marie souffre :

Quel homme sans verser de pleurs
Verrait la Mère du Seigneur
Endurer si grand supplice ?
Qui pourrait dans l'indifférence
Contempler en cette souffrance
La Mère auprès de son Fils ?
Pour toutes les fautes humaines,
Elle vit Jésus dans la peine
Et sous les fouets meurtri.
Elle vit l'Enfant bien-aimé
Mourant seul, abandonné,
Et soudain rendre l'esprit.

La prière demande à Marie le partage de cette souffrance. C’est une longue plainte à la fois sur le sang du Christ et l’affliction de sa mère devenue mère de tous les hommes :

Ô Mère, source de tendresse,
Fais-moi sentir grande tristesse
Pour que je pleure avec toi.
Fais que mon âme soit de feu
Dans l'amour du Seigneur mon Dieu :
Que je Lui plaise avec toi.
Mère sainte, daigne imprimer
Les plaies de Jésus crucifié
En mon cœur très fortement.
Pour moi, ton Fils voulut mourir,
Aussi donne-moi de souffrir
Une part de Ses tourments.
Donne-moi de pleurer en toute vérité,
Comme toi près du Crucifié,
Tant que je vivrai !
Je désire auprès de la croix
Me tenir, debout avec toi,
Dans ta plainte et ta souffrance.
Vierge des vierges, toute pure,
Ne sois pas envers moi trop dure,
Fais que je pleure avec toi.
Du Christ fais-moi porter la mort,
Revivre le douloureux sort
Et les plaies, au fond de moi.
Fais que Ses propres plaies me blessent,
Que la croix me donne l'ivresse
Du Sang versé par ton Fils.

Enfin, la méditation porte sur la propre mort du croyant et demande à Marie son soutien et la gloire du Paradis :

Je crains les flammes éternelles;
Ô Vierge, assure ma tutelle
À l'heure de la justice.
Ô Christ, à l'heure de partir,
Puisse ta Mère me conduire
À la palme des vainqueurs.
À l'heure où mon corps va mourir,
À mon âme, fais obtenir
La gloire du paradis.

Le Stabat Mater a été l’objet de nombreuses inspirations tant de la part de musiciens (Vivaldi, Palestrina, Scarlatti, entre autres, et, plus récemment, Poulenc, Arvo Pärt) que de peintres (par exemple : Rogier van der Weyden, Hubert van Eyck, Matthias Grünewald, jusqu’à Picasso).

Stabat mater 5.JPG

Pablo Picasso - La crucifixion 6.jpg

 En 29:48 – Magnifique duo pour la conclusion :

Quando corpus morietur,
fac ut animæ donetur
Paradisi gloria.

C’est-à-dire :

À l'heure où mon corps va mourir,
À mon âme, fais obtenir
La gloire du paradis.

Et la séquence finit bien en envolée dans la gloire du Paradis pour les siècle des siècles.

20/02/2013

J'ai retrouvé mon âme

J’ai retrouvé mon âme d’adolescent
La vie s’ouvre à moi grandement
Comme un livre inépuisable
Dans lequel les mots sont des actes
Délivré de la lutte quotidienne
Je coule des jours sans fin
Dans les délices de la créativité
Quel envol ! Mille hirondelles
Qui virevoltent dans un ciel pur
Pas d’heures, pas de soucis
Une promenade dans la nuit
Seul face à la vacuité ineffable
Et laisser son cœur et son esprit
Divaguer dans l’immensité
A la recherche du diamant brut
Qui se cache en soi, voilé
Par la lourdeur du savoir
L’expérience n’est rien sans fraicheur
Alors en se versant un seau d’eau
Sur le corps dénudé
Laisser tourbillonner le moteur
De la renaissance en vous
Sans faux combustible
Sans fausse richesse éperdue
La transparence vous prend
Et vous envoie dans l’univers
Pour vous enchanter les yeux
D’un parfum d’inconnu

19/02/2013

Les êtres aimés n’ont pas d’âge

Dans le livre d’Alexandre Jardin, « Bille en tête », on trouve cette très belle phrase que dit Virgile à Clara : « Tu peux devenir vieille, folle ou malade, tu seras toujours Clara. Je verrais toujours ta vraie figure, tes cheveux superbes, ta peau blanche, tes hanches pour les enfants et tes seins pour l’amour. »  Miracle de l’amour.

On voit vieillir ses parents ou ses amis. On ne voit pas vieillir celui ou celle qu’on aime (sauf si bien sûr on ne l’aime plus). Il ou elle est toujours mon ou ma fiancé(e), auréolé(e) du visage aimé(e), du corps que l’on tient délicatement dans ses bras.

Le soir, lorsqu’on se retrouve seuls, on s’approche de la tendresse et de la chaleur de l’autre, qu’elle se manifeste par la douceur pour elle ou la force pour lui, et on monte au paradis, dans une bulle de sensations maintes fois éprouvées, mais toujours nouvelles. Alors les jours n’existent plus, l’éternité est commencée sur terre. Nous sommes enfermés dans notre bulle et le monde habituel nous paraît lointain. Ses bruits sont estompés comme si l’on plongeait la tête sous l’eau, légèrement. Il ou elle est présent(e). Nous sommes seuls sur terre et cette seule présence nous suffit pour vivre dans l’éternité.

Oui, nous sommes dans notre bulle, prison rêvée, entretenue, encouragée, dans laquelle toi et moi ne font que nous comme un seul soi. Cet être à deux, devenu un et unique, flotte au-dessus des contingences. Je ou tu regarde(s) le visage aimé(e) et l’histoire s’arrête, l’osmose s’effectue. Tu es ma ou mon fiancé(e) pour toujours. Et cet engagement dure, dure, comme une promesse d’immortalité, au-delà du temps qui coule.

Nous le savons, la durée nous rejoindra, mais nous aurons vécu notre rêve jusqu’au bout, jusqu’à cet instant où l’un de nous partira en disant : « Je t’attends de l’autre côté ». Et même s’il ne pouvait le dire, nous le savons, il ou elle y sera.

 

18/02/2013

Le grand exterminateur, roman de Virgil Gheorghiu

Bucarest signifie « ville de la joie ». C’est un nom prétentieux. Une ville où la joie est permanente n’existe pas sur terre. Ainsi commence ce roman dans un monde fou, celui de la dictature roumaine. Son objet est une chasse à l’homme. Celui-ci, Trajan Roman, est sauvé par une enfant de douze ans, Dragomirna,roman, livre, société fille du directeur de la police. Trajan n’arrive pas à situer et à comprendre la fillette qui est devant lui. Quelquefois, Dragomirna parle et agit comme une toute petite fille. Comme les enfants. Une minute après, elle s’exprime comme les adultes. Dans la personne de Dragomirna tous les âges sont mélangés. Elle est semblable au grenadier. Lui, n’est qu’un paysan, fils d’un curé de campagne, mort d’épuisement provoqué par l’archevêque Isidor, à la solde du pouvoir. Il eut la chance de rencontrer le professeur Cicérone Trifan qui dirigeait la commission pour la préparation du saint et grand concile, et surtout sa fille qu’il finit par épouser. Mais des documents ont été subtilisés et sont recherchés par la police.

Le cœur du subtil complot est expliqué au chapitre VI. Staline découvre que l’énergie dépensée par l’eau bénite n’est pas moindre que l’énergie atomique. (…) Les soviets, sans l’arme atomique, ne pourront jamais réaliser le communisme. Staline n’oublia pas, non plus, qu’il y a quelque chose qui est aussi minuscule que l’atome et que la société communiste ignorait jusqu’à cette date. C’est l’individu. Dans un Etat communiste, l’individu est nul. Il n’a aucune valeur. La personne humaine équivaut à zéro. (…) Staline découvrit de la sorte que l’individu est aussi important que l’atome. Ces deux découvertes durent presque simultanées. L’individu, l’être humain est une plante qui a ses racines dans le ciel. (…) En matière sociale, on a découvert l’énergie de l’insignifiant, du tout petit, et l’individu. Il possède une énergie égale à celle de l’atome : voilà la base de la nouvelle sociologie.

Alors Staline tente d’utiliser cette énergie spirituelle que l’église détient par l’intermédiaire d’un Concile. Pour gagner le ciel, il faut d’abord détruire la société capitaliste et instaurer la fraternité communiste sur la terre. L’Eglise est comme un bateau. Au lieu de diriger le navire de l’Eglise vers le ciel, on le dirigera vers le paradis communiste. C’est quelque chose de plus certain et de plus concret que l’éternité.

La découverte des documents volés compromet la géniale idée de l’organisation d’un Concile destiné à affirmer cette nouvelle orientation de l’Eglise. Alors toutes les ressources de l’Etat sont mises en branle pour retrouver ces documents.

La candeur de Trajan sera la source de son malheur. Il se lie d’amitié avec Taky Tsèp, un espion envoyé par le président de Roumanie pour lui faire dire le nom de celui qui a livré le document signé de sa main. Ce que Trajan se refuse à dire, jusqu’au jour où il apprend la mort de Dragomirna.

Une véritable machination est ensuite montée pour mettre à mort Trajan. Un exterminateur, Baxan, est nommé. Il finit par gagner. Trajan « se suicide » au jour et à l’heure prévus. L’Etat gagne contre l’individu. L’énergie collective a été plus forte que l’énergie spirituelle. Le paradis communiste peut continuer à exister.

Et pourtant il est tombé tout seul, se prenant les pieds dans le tapis !

17/02/2013

Danse argentine No.3, de Alberto Ginastera

http://www.youtube.com/watch?v=LunXZJtfgJQ&feature=related

 

 

Compositeur peu connu en Europe, Alberto Ginastera était argentin. Il a enseigné la composition au Conservatoire de Buenos Aires, puis quitta l’Argentine au moment de la dictature. Il a écrit des opéras, des symphonies, des concertos, ainsi que de la musique de chambre, et des pièces de piano ou de chant. Il créa de nombreuses musiques de film. Aux débuts des années soixante, il produit son chef-d’œuvre inspiré des musiques indigènes, Cantata para América Mágica op. 27, pour soprano et orchestre de percussions (1960), ainsi que le Concerto pour piano et orchestre op. 28 (1962).

Pianiste surdoué, il compose ses danses argentines à la fin de sa vie, mais elles restent inachevées. Intitulée « Danza del gaucho matrero », cette troisième danse demande une grande dextérité. Elle est échevelée et ressemble à une course haletante, au galop dans la pampa, sautant les obstacles, descendant des terrains abruptes, avant de repartir, toujours au galop, dans la plaine désertique.

On s’interroge sur l’objectif du compositeur : un morceau purement argentin, dédié aux gauchos et à l’immensité du pays, ou une pièce destinée à montrer la maîtrise de l’interprète. Ce n’est probablement ni l’un, ni l’autre : un morceau composé pour ravir notre ouïe, sans recherche, comme un courant d’air passant derrière le cou, entre les deux oreilles, comme un train qui passe et que l’on continue à entendre dans le lointain.

16/02/2013

La peinture

La peinture. Elle me colle au cerveau
Blanche ou noire, elle se déploie
Et envahit mon champ de vision interne
Il n’y a plus qu’elle, immense
Etalée en couches serrées, striées
Mes mains s’agitent, ouvertes
Sur un monde de couleurs vives
Entre la forme et le trait
Fine pointe de rasoir sur le regard
Etincelle de brillance aiguë
Pierre précieuse qui résonne
Dans l’univers impitoyable
Des sensations rondes et chaudes
Certes, je fatigue, je me bas
Contre l’erreur, le poil de pinceau
Qui se tord et chavire
Contre l’angle qui se courbe
Contre le trait qui fuit
Contre la goutte qui déborde
Contre la lassitude qui m’ensevelit
Mais lorsque tout est fini
La lumière apparaît dans la nuit
Déborde de la toile
Et illumine l’esprit
Oui, peindre est une tâche
Sublime et épuisante
Qui, au final et à chaque fois
Fait respirer un air d’éternité

15/02/2013

Pierre Parat, peintre et architecte, à la galerie Deprez-Bellorget (15 rue de Seine 75006) – 2ème partie

Les dessins sont une façon de mettre en évidence la maîtrise de Pierre Parat. Admirez par exemple ce quatuor à cordes vu dans le tressaillement de la mélodie dont le mouvement pictural permet d’entendre la sonate de Beethoven. Chaque musicien semble réalisé d’un trait de plume, vibrionnant. Pas de visage, aucun décor, mais des sons qui se perçoivent hors de l’oreille, entre l’œil et le souvenir de concerts.

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Des encres de Chine, également, abstraite, d’un style complètement différent, mais aussi captivant.

 

 

 La peinture reste cependant son mode d’expression préféré, qu’elle soit en couleurs ou noire et blanche, tel « Ecroulements d’eaux » :

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Ou « Jeté par l’ouragan » :

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La lumière. Elle jaillit, vêtue de blanc, comme un chant dans le silence d’un éclatement de couleurs : en aplats, horizontaux, verticaux, obliques, groupées ou éparpillées, dissimulées derrière la surface des apparences ou au contraire éclatantes de présence.

Soleil bas.jpg

parat-tsunami.jpg

En opposé, l’obscurité, toujours plus importante, comme pour mieux faire ressortir l’importance de la lumière : elle mange la toile, envahit l’esprit, le brouille, le trouble. Ce d’autant plus qu’entre les deux, la couleur s’affirme, pleine, entière, liant les opposés en larges taches claires, pures.

(Ci-joint "Tsunami")

Seul le trait évoque le sujet du tableau, comme un rappel léger du texte derrière la musique. Mais le mouvement pallie à cette absence de signification immédiate. Il permet de laisser l’imagination libre d’interpréter directement sans effort conceptuel et de laisser les sensations envahir l’espace visuel. (ci-dessous "Femmes au Yémen")

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Bravo à ce surdoué qui reste jeune grâce à sa faculté de création. Puisse-t-il continuer encore longtemps à nous charmer !

14/02/2013

Pierre Parat, peintre et architecte, à la galerie Deprez-Bellorget (15 rue de Seine 75006) – 1ère partie

Allez voir le site de cette galerie. Il expose de nombreux tableaux de Pierre Parat. De même pour le site suivant :

http://www.deprez-bellorget.com/index.php?id_artiste=44

http://francais.agonia.net/index.php/article/1763617/index.html

Dommage que cette galerie commence par un boyau d’un mètre de large dans lequel toute œuvre perd de sa puissance par l’obligatoire proximité de l’œil. Ce n’est pas le meilleur des œuvres de Pierre Parat qui y est accroché, mais cela donne une mauvaise impression au départ. Arrivé dans la véritable galerie, une grande pièce au fond du couloir, on peut voir quelques tableaux de Pierre Parat. C’est ainsi que l’on fait connaissance avec un peintre, par hasard, au fil des promenades. En un instant se crée une symbiose entre l’œuvre et votre être intérieur. Vous êtes touché par une couleur, une ombre, une forme, et vous tombez amoureux de cette toile.

Cieux ultramarins.jpg

Alors vous recherchez sur Internet ce qui est dit sur celui qui vous livre sa conception du monde et sa vie. Pierre Parat est avant tout un architecte très connu ayant réalisé de nombreux gratte-ciels, bureaux ou habitations. Mais trêve de baratin, regardez cette vidéo :

http://www.dailymotion.com/video/xvlx6c_pierre-parat-l-architecture-a-grands-traits_creation


 

L’exposition est malheureusement finie. Mais allez à la galerie Deprez-Bellorget (15 rue de Seine 75006) et vous verrez quelques-unes de ces œuvres. Si vous n’avez pas le temps, jetez un œil sur son site. Vous y trouverez dessins et peintures.