18/08/2012
Robert Tatin (2ème partie, voir la première le 6 août)
Entrons maintenant dans le musée.
Mais est-ce un musée, cette bâtisse étrange qui ne semble tenir debout que grâce aux mille sculptures qui l’ornent : colonnes de personnages, chapiteaux de bas-reliefs, langue rouge du dragon avec ses dents en étoile surmonté d’une famille pour laquelle l’enfant est le plus grand et uni les parents. Quelle profusion d’idées, de symboles, d’aspirations !
La porte des géants de la peinture : Rembrandt, Van Gogh, Léonard de Vinci, Goya et Delacroix (pourquoi eux et pas Picasso, par exemple ?). Elle n’ouvre sur rien, mais elle impressionne par ses personnages hiératiques, protégés par leur femme qui semblent prier pour eux. Leurs yeux de voyants regardent l’univers, environnés des songes en bas-relief en creux.
Alors on se laisse guider, absorber à l’intérieur. C’est petit, cela ne fait pas musée, mais cour intimiste pour illuminés qui méditent sur le monde et l’homme. Les portes se reflètent dans l’eau du bassin, vertes, immobiles, immortelles. On entre dans le jardin des méditations. Disons qu’il s’agit plutôt d’un jardin de la rêverie et de l’imagination. Il faut se laisser guider par les images de pierre, les volumes enchantés de personnages ubuesques. C’est une sorte de cloître : « Au nord s'élève une statue haute de 6 m 50, appelée "Notre-Dame-Tout-Le-Monde", lien entre le ciel et la terre. Son socle plonge ses racines dans l'eau du bassin source de vie » (guide du musée)
A l’est, la "Porte du Soleil", se reflétant dans le bassin, est formée de deux statues-colonnes, qui évoquent l'union de l'homme et de la femme selon le Tao : le Yin et le Yang. « Les deux géants Yin et Yang (Féminin et Masculin) supportent le ciel où tourne la roue du destin, entre les cornes de l'Imagination et de la Raison. Yang, à droite, porte la fille du Monde sur ses genoux, tandis qu'à gauche, un garçon est assis sur ceux de Yin ». Le pilier central représente l'unité Adam-Eve, Eve-Adam. « Ici, il n'y a plus de dualisme entre la femme d'un côté, l'homme de l'autre (...) On est dans l'unité. » Sur le tympan, « le disque solaire se partage et se donne en rayons brillants et dispense son énergie de Yang pur en pleines noces de Yin-Yang. »
La « Porte de la lune » représente la Muse de l’Unité "mèrant" le Monde, qui appuie le pied droit sur le cube de la Raison et le gauche sur le croissant de l'Imagination. Assis sur les genoux de la Muse, un garçon et une fille se nourrissent aux sources de la vitalité créatrice. Robert Tatin dit : « J'essaie de retrouver les racines de la langue... Là, nous sommes dans les racines, pas dans les composantes. Les racines, c'est comme nourrir l'arbre, c'est comme nourrir l'Homme... mais les latins, à force de tirer sur la mamelle, un jour ils l'ont vidée. Alors il faudrait retrouver la Femme, il faudrait retrouver la Muse, la Mère mèrante ... ».
S’ouvre dans cet enchevêtrement les portes donnant accès au musée de peintures, céramiques et autres créations de Robert Tatin. Nous en parlerons une autre fois.
07:06 Publié dans 12. Trouvailles diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art brut, société, fantastique, peinture, poésie | Imprimer
17/08/2012
Le festin d’Esope, étude de Charles-Valentin Alkan
Une première version, assez romantique et belle :
http://www.youtube.com/watch?v=K4DEnboF7xE&feature=related
Une version technique plus enlevée, mais un peu mécanique :
http://www.youtube.com/watch?v=l1AFH2mgtv0&feature=related
Ou encore une version pleine de sensibilité qui en fait tout son charme :
http://www.youtube.com/watch?feature=endscreen&v=SSxbao_Chq0&NR=1
Charles-Valentin Alkan (en réalité Morhange, Alkan étant le prénom de son père), né en 1813, était un pianiste aussi renommé que Liszt ou Chopin. Il donna son premier concert à treize ans. Surnommé le Berlioz du piano par Hans von Bülow, il est considéré comme l’un des plus grands pianistes virtuoses qui non seulement dispose d’un jeu endiablé, mais compose à l’égal des plus grands pianistes.
Le thème de la pièce est donné dans les deux premières mesures. Très simple, très allante, c’est une danse échevelée qui se transforme en ouragan à certains moments, à la manière de Liszt, en murmure ralenti qui fait penser au Clair de lune de Beethoven ou encore en caresse à la manière Chopin. C’est une sorte d’improvisation sur un même thème, pleine d’imprévu, de charme, de virtuosité.
Discret, peu porté sur la vie publique, Alkan donna des concerts, mais eut de nombreuses périodes où il se contentait de composer, gagnant sa vie en donnant des leçons de piano. Il promut le piano à pédale, semblable à l’orgue qui servait déjà du temps de Bach pour permettre à l’organiste de répéter ses pièces d’orgue sans mobiliser un souffleur. Quelques pièces ont été écrites spécialement pour ce type d’instrument.
Ces compositions sont inégales. Elles peuvent être tapageuses, voire vulgaires ou encore aller jusqu’à la pédanterie. Mais elles cachent également une profonde connaissance de la musique et de l’âme hébraïque, impulsive et parfois rageuse.
07:34 Publié dans 51. Impressions musicales | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : musique, romantisme, piano, composition | Imprimer
16/08/2012
Destin
On voit la vie comme une flèche
Elle part d’un point A pour aller vers un point B
Mais cette vie est un boomerang
Car le temps peut aussi être circulaire
La vie s’achève lorsque le destin est bouclé
L’épanouissement peut te toucher
Ou partir à côté, dans l’espace
Parce que tu n’as pas pris ce qu’il te donnait
Tu as écouté les hommes et leurs conseils
Tu n’as pas écouté ton cœur
Tu as couru après une ombre de renommée
Sans comprendre que celle-ci
Etait en toi, enfouie sous les feuilles de l’artichaut
Le destin, c’est notre rêve en premier
Et notre désespoir en final
Mais cela peut aussi être l’inverse
Nos rêves sont versatiles et peureux
Ils ne se montrent jamais nus
Trop de pudeur les assaille
Alors ils se revêtent de mille paillettes
Que sont les rêves des autres pour vous
Et vous courrez de ci de là
Toujours épuisés d’une telle bataille
La vie est un combat, dit-on
Mais de quoi ? Laisse faire ta destinée
Qu’elle se révèle à toi
En toute innocence et lumière
Ce sera ton vrai combat
Le combat d’un contre tous
Tous ceux qui veulent ton bien
Sans comprendre qu’il t’appartient
Et que tu dois apprendre
A maîtriser ses impulsions
A écouter ses murmures
Comme l’eau qui coule entre les rochers
Et tu te laisses glisser entre les pierres
Limpide, fraîche, évanescente
Pour aller emplir ton destin
De femme (ou d’homme)
En toute liberté, libérée de l’esclavage
De ce que veut l’autre pour toi-même
Le vrai destin est celui de l’homme libre
Qui choisit les actes de sa vie
Sans se préoccuper de l’attente
Que la société a pour lui
Et le matin
Lorsque tu observes le soleil
Derrière les bras levés des arbres
Et qu’apparaît enfin son clin d’œil
Tu peux te regarder libre
Comme la bulle de savon
Que font les enfants
Dans le trou rond de leurs désirs
Souffle, souffle la vie à pleins poumons
Qu’elle te donne ce que tu attends
Et qu’à la fin du parcours
Tu reviennes au point de départ
Pour dire enfin
Oui, j’ai accompli ma destinée
Elle était moi-même
Unique, sans bruit, mais belle
Car mon âme s’est enrichie
Des étoiles de la création
D’un être unique
Mais… Où est-il ?
07:46 Publié dans 42. Créations poèmes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poésie, écriture, littérature, poème | Imprimer
15/08/2012
O Jésus, vivant en Marie
Né en 1608, Jean-Jacques Olier fait ses études à Paris où il joue les prédicateurs mondains. A l'âge de trente ans, il éprouve l'obscurité spirituelle et n'en sort qu'en 1641. Il crée alors une communauté de prêtres au sein de la paroisse de Saint Sulpice et il fait preuve d'une grande activité paroissiale tout en consacrant du temps à la confession et la direction spirituelle. Il meurt à 48 ans, mais déjà les Sulpiciens débarquaient au Canada pour assurer le service de la colonie.
Il est l'auteur de recommandations spirituelles et de prières telle celle-ci. Mise en musique sur un mode éclésial, elle se double d'une deuxième voix et d'un accompagnement en ison, à deux voix. Prière de méditation, elle calme l'esprit et le corps.
Une bonne manière de fêter le 15 août.
09:28 Publié dans 53. Créations musicales | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : chant, musique, spiritualité | Imprimer
14/08/2012
Une forme de vie, roman d’Amélie Nothomb
« Chère Amélie Nothomb, Je suis soldat de 2ème classe dans l’armée américaine, mon nom est Melvin Mapple, vous pouvez m’appelez Mel. Je suis posté à Bagdad depuis le début de cette fichue guerre, il y a plus de six ans. Je vous écris parce que je souffre comme un chien. J’ai besoin d’un peu de compréhension et vous, vous me comprenez, je le sais. Répondez-moi. J’espère vous lire bientôt. »
Ainsi commence le roman dont le prétexte est l’obésité et l’objet réel l’art de la correspondance et ses inconvénients.
Se dévoilant peu à peu, Melvin annonce sa corpulence, réconfort permettant de lutter contre la terreur du combat : Je me suis enrichi d’une personne énorme depuis que je suis à Bagdad. Puisqu’elle m’est venue ici, je l’appelle Schéhérazade. (…) Elle parle des nuits entières. Elle sait que je ne peux plus faire l’amour, alors elle remplace cet acte par de belles histoires qui me charment. (…) Lorsque je rentre à fond dans cette fiction, j’entends sa douce voix féminine qui murmure à mon oreille des choses ineffables. Alors mes gros bras étreignent cette chair et la conviction est si puissante qu’au lieu de sentir mon gras, je touche la suavité d’une amoureuse. Et Amélie s’extasie : Qui veut faire l’ange fait la bête, on le sait depuis Pascal. Melvin Mapple ajoutait sa version : qui veut faire la bête fait l’ange.
Au fil des jours, elle apprend que cette obésité est devenue l’œuvre de Mel. Elle lui propose d’être sa marraine pour une exposition de body art. Elle lui demande une première photo. C’était une boursouflure en expansion : on sentait cette chair en continuelle recherche de possibilités inédites de s’étendre, d’enfler, de gagner du terrain. La chair fraiche devait traverser des continents de tissus adipeux pour s’épanouir à la surface, avant de s’encrouter en barde de rôti, pour devenir le socle du gras neuf. C’était la conquête du vide par l’obésité : grossir annexait le néant.
Elle poursuit néanmoins sa correspondance jusqu’au jour où elle demande une photo en uniforme. Pas de réponse. Après de nombreuses recherches, elle renoue et apprend que Mel n’est pas soldat et qu’il vit à Baltimore dans la grange de ses parents qui ne savent que faire de lui. Il menace de se suicider. Alors Amélie prend l’avion sans réfléchir. Mais elle finit par trouver un subterfuge pour éviter cette rencontre désolante, celle d'une victime devenue bourreau d’Amélie, trop faible pour se révolter de tant d’impudence.
Au-delà de l’histoire et du prétexte, Amélie se livre à une réflexion sur la correspondance et son intérêt. D’abord la forme : J’ai développé une théorie instinctive et expérimentale de l’art épistolaire. Ainsi, j’ai observé que les meilleures lettres ne dépassent jamais deux feuilles A4 recto verso.
Puis, l’intérêt : On rencontre quelqu’un, en personne ou par écrit. La première étape consiste à constater l’existence de l’autre : il peut arriver que ce soit un moment d’émerveillement. (…) Et soudain, l’autre est là, devant la porte. Dessoulé d’un coup, on ne sait comment lui dire qu’on ne l’y a pas invité. (…) Les gens sont des pays. Il est merveilleux qu’il en existe tant et qu’une perpétuelle dérive des continents fasse se rencontrer des îles neuves. Mais si cette tectonique des plaques colle le territoire inconnu contre votre rivage, l’hostilité apparaît aussitôt.
Enfin, le fond du livre : Le langage est pour moi le plus haut degré de réalité. – Le plus haut degré de réalité, c’est de retrouver dans un entrepôt à pneus de Baltimore un obèse mythomane. Compagnie et destination du rêve. Tout çà pour une absence de prétérition.
Et la confession sublime : Depuis que tu as commencé à écrire, quelle est ta quête ? Que convoites-tu avec une si remarquable ardeur depuis si longtemps ? Pour qui écrire, qu’est-ce que c’est ? Tu le sais : si tu écris chaque jour de ta vie comme une possédée, c’est parce que tu as besoin d’une issue de secours. Être écrivain, pour toi, cela signifie chercher désespérément la porte de sortie. La porte de sortie choisie cette fois-ci par l’auteur est assez surprenante : un pied de nez à l’administration américaine.
Pour finir, le livre est-il aussi passionnant et drôle que les livres qu’elle a écrits sur sa jeunesse ? Non, il faut bien le dire. Il y a certes de nombreux traits d’esprit : Je pensais qu’on était en guerre contre l’Irak, je découvre qu’on est en guerre contre le latex. Mais les descriptions de bouffe et d’engraissement rendent le livre un peu indigeste. On finit le livre en voulant se mettre à la diète. C’est d’ailleurs peut-être le cas d’Amélie, vu sa tête sur la couverture de son livre. Donc, appréciation mitigée : belle performance littéraire, mais sur un sujet qui manque de fond.
07:51 Publié dans 41. Impressions littéraires | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, roman, écriture, obésité, armée | Imprimer
13/08/2012
Shadowland, par le ballet Pilobolus
L’art de la transformation, une véritable magie, drôle, inventive, étonnante et charmante.
Laissons-nous séduire par ce pays des ombres qui laisse un goût d’autre chose impossible à définir. Si, Alice au pays des merveilles ! C’est un monde enchanté et enchanteur.
http://www.foliesbergere.com/PILOBOLUS-DANS-SHADOWLAND-fid116.aspx
07:59 Publié dans 11. Considérations diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : spectacle, danse, musique, poésie, art | Imprimer
12/08/2012
Le silence
Absence de bruit. Est-ce si sûr ?
On nous parle du silence de la campagne
Celle-ci a bien perdu ses écouteurs
Tout y concoure au réveil
Même l’ouïe dégagée du bourdonnement
Incessant des mouches dans la pièce
L’étable silencieuse du ruminement des vaches
Laisse sa douce chaleur odorante
Envahir les repères de ces évocations
Bottes aux pieds et paille dans les oreilles
Foin coupé un jour de grand vent
Les bœufs se décornent-ils ?
Le silence du ciel, pur, dur,
Raide comme le lit de bois
Où dorment les frères en prière
Sans cesse ils parlent dans leur cœur
Evoquant saints et saintes de Dieu
Mais pas un mot ne vient déranger
Le mystère de cet état de grâce
Et si nous rompions ce silence atterrant
Cette absence de sentiments et de passion
Pour qu’en un instant de folie
Les humains s’oublient et se concentrent
Sur leurs ressemblances plutôt que différences
Nous avons tous une bouche pulpeuse
Dont la singularité tient au langage
Si j’habitais en Chine, parlerais-je
De cette voix chantante et syllabique ?
La parole est prolifique,
Mais la parole sans le silence
N’est que bruit et pétarades
Les bulles de BD sont-elles encore audibles
Lorsque l’œil fatigué se laisse attendrir
Par des images plus évocatrices ?
Faut-il lire pour entendre
Le doux effleurement des pages
Sur la couverture du lit au matin ?
Le regard est parole d’un jour
La caresse est langage du corps
La peau elle-même se façonne
En chair de poule ou poils dressés
Pour dire son désaccord au vécu
Ou à l’inverse son aimable enthousiasme
De caresses délicates et de câlins attendus
L’amour n’a pas de mots
Rien que des attouchements,
Dans le silence des cœurs emmêlés
Quelle pensée sans les mots ?
Mémoire des odeurs et des sons
Ne pas pouvoir les nommer
Ni même se souvenir
De leur évocation studieuse
Qui rend la poésie prenante
Sans passé, le présent est manchot
Comment l’interpréter ?
Sans avenir, le présent glisse
Dans l'absence et le néant
Sans présent, y a-t-il attachement ?
Si le mur du silence se couvre
De papiers peints collés au bruit
C’est que cette absence de sons
Gênent notre sérénité simulée
La lettre tue l’esprit, dit-on
Alors nous répétons des formules
Nous les encombrons de commentaires
Nous nous amusons du perroquet
Et pratiquons le psittacisme
Mais savons-nous même que nous parlons ?
Si l’intelligence se sert des mots
Elle se développe de leur absence
Car c’est la liaison entre eux
Qui fait la force d’un concept
Amalgame de bulles
Filaments rugueux ou ténus
Comme une pelote emmêlée
Que rien ne peut dénouer
Ni trop gros, ni trop maigre,
Le concept se façonne
Entre silence et mots
Comme un pont de pierre
Sur le sable du mental
Nous pratiquons l’implicite
Le sous-entendu n’est-il pas manière
De dire ce que nous ne voulons entendre ?
L’interdiction de dire
Est remplacé par un silence salutaire
Qui en dit plus sans s’exprimer
La loi du silence s’exerce toujours
Devant la loi des armes
Immobile, décharné, insensible
Le vaincu éprouve l’inaccessible envie de crier
Mais il reste coi, replié sur lui-même
Comme le lapin pris au piège
Petite boule chaude et fragile
Mais très peu d’humains
Sont capables de silence intérieur
La vacuité n’est pas donnée à tous
Le silence du mental est libération
Une porte sur un autre monde
Celui de la connaissance intuitive
Plus besoin de mots, de signes,
Seul le sourire du Bouddha
Tient lieu de guide, inépuisable
Unique, le silence dit ce que nous sommes
Mon bruit me dissimule
Je me cache derrière mes paroles
J’en fais un écran de fumée
Parce que je n’ai rien à montrer
Ce rien n’est que remplissage
Qui gonfle le ballon jusqu’à l’éclatement
Bruit, où est ta victoire ?
Le silence est au-delà de l’avoir
Il s’empare de l’être
Lui donne vie et poids
Dans l’absence de mots
Que pèse l’homme
Si ce n’est son âme !
07:43 Publié dans 42. Créations poèmes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poésie, écriture, littérature, poème | Imprimer
11/08/2012
Ecriture
Néant du noir et blanc et du carré !
Film sans image, juste l’écran blanc dans le noir de la salle. Vous attendez et rien ne vient. Vous rêvez à d’autres films, vous multipliez les écrans, mais tous, ils sont vides. Et vos pensées se vident également : labyrinthe, plan, coupe industrielle, écriture ?
Pour se perdre dans le blanc, il faut qu’il soit bordé de noir, sinon rien, même pas la sensation d’évaporation. Regardez au centre, tranquillement, et vos pensées seront pacifiées au point de ne plus surgirent dans votre esprit.
Ecriture sans mots qui parle directement à l'être hors de toute personnalité.
06:44 Publié dans 22. Créations numériques | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art cinétique, op'art, peinture, abstrait, dessin numérique | Imprimer
10/08/2012
Judit Reigl (2ème partie)
Passons sur la période Guano et abordons tout de suite l’écriture en masse : « La peinture est placée par masses sur la toile. J’avais acheté un matériau qui sert aux maçons : un noir broyé qui sèche lentement, en profondeur, pendant des années, ainsi je travaillais toujours sur six à huit toiles en même temps. A partir d’un fond blanc, je plaçais sur la toile les mottes de peinture avec un lame souple et arrondie, quelquefois une simple baguette de bois, et je les "montais" ensuite de bas en haut sur la toile, en recouvrant, avec ce noir broyé, les couleurs plus légères placées en dessous. Je savais immédiatement si c’était réussi ou raté, et, dans ce cas, il n’y avait pas de retouche possible. » (Entretien avec Jean-Paul Ameline pour Art in America international review, 04/02/09, inédit en français).
En 1966, elle se passionne pour les bustes d’homme, jamais peint dans leur entier, mais dans leur force de suggestion : « A partir de février 1966, cette même écriture (abstraite) se métamorphosait indépendamment de ma volonté, plutôt contre celle-ci, en forme de plus en plus anthropomorphe, en torse humain. Imperceptiblement d'abord, puis de plus en plus consciemment après 1970, j'ai essayé d'intervenir, de souligner l'aspect émergeant de ces corps dressés. » (J. Reigl in catalogue de l’exposition Judit Reigl, Paris, Galerie Rencontres, 1973).
Les "Déroulement" recherchent la source du mouvement : « [Les] séries qui suivent Déroulement, viennent de la même source d'où sont issues la musique ou la poésie, c'est-à-dire du geste élémentaire, du rythme, du tempo, de la pulsation. » (J. Reigl, Entretien avec Jean-Paul Ameline, 2008, ibid.)
Elle poursuit sur la thématique du corps d’homme (pas des femmes), et c’est le 11 septembre 2001 : « En regardant les images à la télévision le 11 septembre 2001, j'ai eu comme tout le monde un choc terrible : la destruction des Twin Towers à New-York. Puis j'en ai eu un autre – ahurie – quand les corps commençaient à tomber, car cela me concernait personnellement. Ces corps en chute, c'est exactement ma problématique picturale (depuis les années soixante) qui s'incarnait devant mes yeux sur l'écran. Quelquefois immobilisés par l'arrêt de l'image, les corps semblaient monter autant que descendre, ou bien flotter dans un espace indéterminé. » (J.Reigl - propos recueillis par Claude Schweisguth, Artabsolument, Paris, n°4, printemps 2003).
Bravo Judit Reigl, admirable, qui avez eu le courage de traverser la moitié de l’Europe, le plus souvent à pied, pour réaliser votre destin de peintre. Vous étiez jeune, pleine de projets et vous les avez réalisés !
On ne peut aimer toutes vos toiles, elles sont tellement diverses. J’aime particulièrement les périodes "Centre de dominance" et "Ecriture en masse". L’un, équilibré, en mouvement permanent, avec de magnifiques noirs qui, formant la couleur principale, mettent en valeur les autres colories ; l’autre, un peu à la manière d’Henri Michaux, taches profondes, lumineuses bien que noires, sortant de la toile pour vous pénétrer et vous séduire.
07:13 Publié dans 21. Impressions picturales | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : peinture, art moderne, abstrait, réalisme | Imprimer
09/08/2012
Judit Reigl, peintre (1ère partie)
Judit Reigl est née en 1923 à Kapuvar en Hongrie. Après avoir étudié les beaux-arts à Budapest, elle fuit la Hongrie en 1950 et s’installe à Paris, puis Marcoussis.
Elle se consacre au surréalisme avec la fréquentation d’André Breton, d’abord de manière figurative, puis très vite abstraite, par l’écriture automatique :
« Tout mon corps participe au travail, "à la mesure des bras grands ouverts". C'est avec des gestes que j'écris dans l'espace donné, des pulsations, des pulsions. »
Puis, elle s’intéresse à la peinture abstraite dans les années 50 : « Le processus de la peinture devient [...] une activité viscérale et physique. Les œuvres créées sous les gestes impulsifs, spontanés et accidentels du corps sont des empreintes éphémères de l'action de peindre et du corps de l'artiste. [...] Eclatement, telles des cartes explosives de la matière touchant la toile, représentent l'affrontement de la surface et du corps, la lutte à la fois constructive et destructrice de la matière et de l'énergie.[...] la peinture éclate littéralement l'espace pictural dans un mouvement centrifuge, dirigeant le regard [...] au-delà du cadre, et la matière ainsi explosant dans tous les sens efface la hiérarchie de la surface.» (Agnes Berecz, Ecrire comme peindre : la peinture de Judit Reigl dans les années cinquante in Reigl Judit, catalogue édité par Erdesz and Maklary Fine Arts, Budapest, 2006, p.12)
Peu à peu, Judit Reigl se concentre sur le contraire de l’éclatement, ce qu’elle appelle le centre de dominance : « Sur le plan de la toile, le centre se propose en maelström, gouffre, tourbillon, qui creuse la profondeur de l'oeuvre, se déplace et s'ouvre, se fait et se défait, en se constituant. Etablissant alors en effet un espace où le centre est partout et la périphérie nulle part. » (Marcelin Pleynet, Reigl, Paris, Ed. Biro, 2001, p34).
07:01 Publié dans 21. Impressions picturales | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : peinture, art moderne, surréalisme, abstrait | Imprimer
08/08/2012
Identité
Besoin de rassembler tous les bouts d’être
Qui errent dans le paysage de ma solitude
Qui parle derrière l’identité du moi ?
Tous ces personnages multicolores
Toutes ces pensées futiles et fanées
Que nous montons haut dans nos cœurs
Comme des horloges de notre bonne santé
Un château de cartes poussé par la brise
Que reste-t-il de ces êtres diffus ?
L’angoisse d’un après qui ne sera plus
L’horreur d’un avant sans ficelles
Marionnette déchue de son animation
Qui s’en va au vent, l’œil fiévreux
Et court dans la campagne de ses prédilections
C’est le feu follet de tes amours
Le réservoir de tes possessions flétries
Tu cherches l’inconnu de ta préférence
En vain tu te tournes vers toi-même
Mais rien ne répond à tes souhaits
De retrouver celui que tu as perdu
Et ton âme erre dans le silence des corbeaux
Planant sur la nuit invisible
De tes erreurs et de tes rires
Fort de ta superbe, amaigri de tes richesses
Entassé dans le sac ordinateur
Où tu caches tes désirs et tes rêves
Et tout cela, hop ! Parti
D’un coup d’aile sur le front
Est passée la pesanteur du rire
Gras, lourd, plein de sous-entendus
Tu es là, perdu dans ta droiture
Comme le héros de sable
Un matin d’été en pleine mer
Et tu coules lentement, amèrement
Dans tes images de grandeur
Pendant que le socle petitement
Se désagrège, s’effrite, se dilue
Jusqu’à former un fleuve jaune
De bile odorante qui s’enfuie
Dans les vallées boursoufflées
De ton ardeur déchue et insaisissable
Cinq heures, drôle d’heure…
Ni la nuit, ni le jour
L’entre-deux ou même l’entre-trois
Mais dans quelle position ?
Le cœur au-delà des sens
Tu navigues à vue sur l’océan
De ton imagination délétère
Dans les vagues de ton absence
Entre les débris de tes espoirs
Pour devenir un jour raisonnable
Petit vieux bien propre
Dépossédé des piqures de motivation
Tellement clean qu’il en est transparent
Sans assise véritable, ange déchu
D’un destin sans fin qui s’arrête enfin
07:10 Publié dans 42. Créations poèmes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poème, écriture, poésie, littérature | Imprimer
07/08/2012
Le roman pour Milan Kundera
Ces réflexions sont issues de la deuxième partie intitulée "Entretien sur l’art du roman", du livre L’art du roman, de Milan Kundera.
Le romancier n’est ni historien ni prophète : il est explorateur de l’existence. Ainsi se termine l’entretien. Cette phrase résume la vision de Kundera sur l’art du roman. Le roman est un morceau d’existence. Son but n’est pas d’examiner la réalité ou simplement de créer une réalité imaginaire. Il est d'explorer toutes les possibilités humaines, tout ce qu’un homme peut devenir et de voir ces possibilités se transformer en réalité en étant dans le monde. Le roman met face à face les intentions fondamentales de l’homme avec la réalité dans l’action. Le caractère paradoxal de l’action, c’est une des grandes découvertes du roman, nous dit Kundera. C’est en cela que l’écriture romanesque est passée d’un descriptif de ce que fait l’homme à la description de ce qu’il pense et vit intérieurement. Mais cette description n’est ni morale, ni philosophique. Elle est confrontée aux aléas de la vie et des situations. Dans le roman, l’intention et l’action sont le nœud de l’intrigue, comme Dante le dit : « En toute action, l’intention première de celui qui agit est de révéler sa propre image. »
Kundera explique cette évolution : Richardson a lancé le roman sur la voie de l’exploration de la vie intérieure de l’homme. (…) Joyce analyse quelque chose d’encore plus insaisissable que le temps perdu de Proust : le moment présent. (…) Mais la quête du moi finit, encore une fois, par un paradoxe : plus grande est l’optique du microscope qui observe le moi, plus le moi et son unicité nous échappent. (…) C’est Kafka qui ouvre une nouvelle orientation (…) : quelles sont encore les possibilités de l’homme dans un monde où les déterminations extérieures sont devenues si écrasantes que les mobiles intérieurs ne pèsent plus rien ? C’est en cela que Kundera écrit dans L’insoutenable légèreté de l’être : Le roman n’est pas une confession de l’auteur, mais une exploration de ce qu’est la vie humaine dans le piège qu’est devenu le monde.
Sans qu’il le dise ouvertement, Kundera tente d’aller plus loin. Rendre un personnage vivant signifie : aller jusqu’au bout de sa problématique existentielle. Ce qui signifie : aller jusqu’au bout de quelques situations, de quelques motifs, voire de quelques mots dont il est pétri. Rien de plus. Kundera cherche à décrire l’essence de la problématique existentielle de ses héros. En écrivant L’insoutenable légèreté de l’être, je me suis rendu compte que le code de tel ou tel personnage est composé de quelques mots-clés. Pour Teresa : le corps, l’âme, le vertige, la faiblesse, l’idylle, le Paradis. (…) Je me demande : qu’est-ce qui se passe avec elle ? Et je trouve la réponse : elle est saisie d’un vertige. Mais qu’est-ce que le vertige ? Je cherche la définition et je dis : un étourdissement, un insurmontable désir de tomber. Mais tout de suite je me corrige, je précise la définition : « … avoir le vertige c’est être ivre de sa propre faiblesse. On a conscience de sa faiblesse et on ne veut pas lui résister, mais s’y abandonner. »
Pour Kundera, le propre du roman est de se pencher sur l’énigme du moi : qu’est-ce que le moi ? Par quoi peut-il être saisi ? Et sa réponse est : par son code existentiel qu’il faut décortiquer dans diverses situations que le roman met en scène.
Peu importe les descriptions de ces situations, la netteté du passé du héros, les informations qui sont données sur sa personne. Seuls compte les quelques mots qui le définissent définitivement.
On peut cependant se demander si cette vision de ce que recherche le roman est la seule. Sûrement pas, même si l’évolution du genre romanesque semble s’arrêter, pour Kundera, au code des quelques mots qui caractérise ses personnages. On peut aussi considérer le roman comme une description poétique de l’homme confronté à une réalité incompressible et une rêverie, ou au moins une vision imagée, dans laquelle son esprit se meut. Ce décalage permanent constitue également une somme poétique qui elle-même met en évidence la confrontation du moi avec la réalité.
07:19 Publié dans 41. Impressions littéraires | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, roman, écriture, philosophie | Imprimer
06/08/2012
Robert Tatin, le pape du paradoxe (1ère partie)
http://www.musee-robert-tatin.fr/
Robert Tatin, le pape du paradoxe. Oui, je pense qu’on peut le définir ainsi. Qu’est-ce qu’un paradoxe ? Un raisonnement dont la conclusion contredit les prémisses, ou qui justifie deux conclusions contradictoires, et qui est le plus souvent porteur de vérité (Encyclopédie Philosophique Universelle, PUF, Paris, 1990, p.1848). Ce n’est ni un véritable artiste, ni un véritable artisan. Il se moque des catégories et voit le monde à son image, échevelé et créatif.
Son art : nous révéler la complexité inattendue de la réalité. Il met en évidence la fonction paradoxale du sculpteur : celui-ci détache-t-il au ciseau tout ce qui ne ressemble pas à son sujet ou s’attache-t-il à faire apparaître ce qui sera son sujet ? Il ne s’agit pas de sophisme, Robert Tatin n’est pas un manipulateur, il n’a pas de raisonnement trompeur. Il raisonne comme il l’entend, que cela plaise ou non à ceux qui l’écoute et regarde ses œuvres. Sous des dehors enfantins parfois, toujours prolixes, il met en évidence la singularité du monde, à la fois palpable dans sa réalité physique et gonflé d’une vérité mystique qu’il faut toujours deviner sans jamais la trouver.
Je ne vous raconterai pas sa vie, ni toute son œuvre, considérable. Ce qui est intéressant, c’est le cadre, l’espace de sa réflexion concentrée sur son lieu de travail pendant ses vingt dernières années. L’entrée de ce lieu est la grille qui donne sur la route et que l’on n’emprunte pas, malheureusement, puisqu’il faut « passer par la caisse ». Elle ouvre sur un chemin pavée bordée de statues prolifiques. Comme l’explique le site Internet consacré au musée de Cossé-le-Viven : « Ces premiers géants de ciment coloré nous plongent dans l'aventure humaine des premiers temps de l'Histoire, avec Vercingétorix, jusqu'aux héros légendaires dépassant les limites terrestres imaginés par Jules Verne. De nombreux artistes y sont également représentés, non seulement pour leur engagement déterminant dans l'Histoire de l'art, mais également comme les représentants de l'extraordinaire génie des hommes toujours en quête d'un idéal de perfection. »
Ces statues représentent les différentes époques de la vie de l'artiste. Devant les statues de Jeanne d'Arc et de Vercingétorix, on entre dans l'univers d'un enfant de 10 ans qui fait connaissance avec l'histoire de France.
Puis, sont représentés les questionnements de l’adolescence au travers des verbes Etre et Avoir.
Suivent alors Ste Anne et la Vierge de l'Epine, références à la mystique et à la métaphysique qui prolongent cette période de l'adolescence avec les trois interrogations : d'où venons-nous? Que faisons-nous? Où allons-nous ?
Le regard du visiteur sur la statue suivante, le Maître Compagnon, évoque la voie empruntée par Robert Tatin : celle des constructeurs de cathédrales symbolisant l’initiation et la quête de perfection.
C’est ensuite l’hommage au monde de l’art des XIX et XXème siècles. André Breton, Le Douanier Rousseau, Gauguin, Seurat, Auguste Rodin, Léonor Fini, Alfred Jarry, Ubu Roi, Toulouse Lautrec, Valadon-Utrillo, Pablo Picasso et Jules Verne sont autant de points de repère pour "l'oeuvrier" Robert Tatin, partagé entre les créations artistiques et artisanales.
Alors devant le visiteur ébahi, s’élève le musée, vision onirique de Robert Tain qui exprime sa compréhension paradoxale de la vie et du monde.
Nous en reparlerons.
07:43 Publié dans 12. Trouvailles diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art brut, société, fantastique, peinture, poésie | Imprimer
05/08/2012
Communication
Plus on communique,
Moins on en dit
Et moins on a à dire.
On ne communique plus pour informer, on communique pour se montrer alors que l’on n’a rien à dire, voire rien à présenter, vendre, proposer. Alors c’est d’une pauvreté déplorable, à l’égal d’un repas d’épluchures de pommes de terre. Et pourtant les marchands de communication ne cessent de vous importuner : « Nous sommes les rois de la communication. Tous sauront tout sur vous ! »
Qu’a-t-on à dire ? Peu importe au communiquant. Il vous fera un plan de communication sur Facebook, Twitter, MySpace, Linkedin et autres réseaux sociaux. « Faites vous des amis », nous disent-ils. Alors les gens sont fiers d’annoncer 60, 600, voire 6000 amis, voire beaucoup plus encore. Ils ne les connaissent pas, cela ne les intéressent même pas. Ce qui compte, c’est le nombre d’amis. Qu’échangent-ils ? Trois mots appauvris du style « J’dis respect » ou « C-t’un truc de ouf ! » ou encore « C’est trop mortel ! » pour les jeunes, pour les plus vieux, c’est « Sur la photo, mon tee-shirt semble bleu, en réalité, il est d'un beau vert bouteille ! » ou « Bin moi j'ai acheté un téléphone pour téléphoner. J'ai pris le modèle "robuste" qui casse pas quand il tombe. » (phrases toutes tirées des échanges sur Internet).
Moins on a à dire, plus on le dit. On solde de navrantes banalités comme si l’on se disait des choses essentielles. Pourquoi ? On peut y voir plusieurs raisons. On est fier d’avoir de nombreux amis avec qui on correspond. On est fier de son outil technologique (téléphone portable, ordinateur portable, iPad, iPhone et autres ustensiles fonctionnant avec Internet) qui sert à communiquer, donc communiquons. On a besoin de correspondre en permanence pour ne pas se sentir seul. Enfin, et surtout, on communique parce que les autres communiquent et vous disent qu’il est important de communiquer. Tous les marchands de communication sont bien sûr les premiers à communiquer sur l’importance de la communication, l’importance des réseaux sociaux, l’importance de la multiplication de ses connaissances. Il s’agit ici d’une véritable compétition, d’une course à la recherche d’amis, à la recherche du paraître. Toute personne qui se veut connu ou qui veut se faire connaître, ne peut qu’avoir un blog, un compte sur Facebook, des abonnés, etc. etc. etc.
Ainsi ce qui compte ce n’est pas le contenu de la personne, son être, mais son avoir, et, avant tout, ses moyens. Le culte de la technologie et de la « (re)connaissance » a dépassé le culte de l’argent : montre-moi quels sont tes réseaux et je te dirai qui tu es !
Quelle belle manipulation de la part des communicants ! Cependant, il arrive que certaines personnes ont des choses à dire, alors allons tout de même voir ce qui se passe sur les réseaux, mais ne nous laissons pas submerger par cet engouement qui vous oblige à donner une petite phrase sans intérêt en échange d’un peu de notoriété. Rappelons-nous ce mot de Lao Tseu : Celui qui sait ne parle pas, celui qui parle ne sait pas. Ce n’est pas à prendre au pied de la lettre, mais néanmoins attachons-nous à ce que nous avons à dire avant de communiquer.
07:58 Publié dans 11. Considérations diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : communication, information, société | Imprimer
04/08/2012
Evasion
Enfermé en toi-même, tu tentes de sortir
Et tu te heurtes à ta méconnaissance
Il n’y a pas de porte de sortie, rien !
Tu tournes en rond dans ton propre labyrinthe
Ne trouvant pas à l’horizontal, tu cherches
Vers le bas, mais le sol est dur
Puis vers le haut, mais la pesanteur
Te ramène à ton insuffisance
Alors contente-toi de toi-même
Comme l’éléphant de sa largeur
Ou le serpent de sa longueur
Sois dans ta prison de chair
Tel le poisson dans l’eau claire
Respire le parfum de tes faiblesses
Et cesse de vouloir t’en affranchir
C’est au profond de toi-même
Que tu trouveras la porte ouverte
Grande ouverte sur l’univers
Et tu sortiras le cœur léger
Sans amertume ni préférence
Pour explorer d’autres cieux
Plus vastes, inconnus, magnifiques
Trou noir brillant d’odeurs subtiles
T’élevant en fumée sur les toits
De ta candeur et de ton absence
07:40 Publié dans 42. Créations poèmes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poésie, écriture, poème, littérature | Imprimer
02/08/2012
Gymnopédie 1, d’Eric Satie
http://www.youtube.com/watch?v=R21ZJBAK_6U
Calme, paisible, les notes s’égrainent, rythmées par la main gauche, deux notes simples sur un accord de ré majeur augmenté. La droite chante la mélodie, très simple, en écho de l’accompagnement. On ne sait s’il s’agit d’une mélodie ou de la prolongation de l’accompagnement, mais est-ce un accompagnement ? Ne serait-ce pas des gouttes de pluie qui tombe sur le zinc de la gouttière et qui nous ébranle avec toute la douceur du liquide de ces pluies d’automne, une sorte de brouillard d’eau.
On peut parler de musique minimaliste, c’est-à-dire d’utilisation d’un fond régulier, sorte de pulsation qui donne à la musique son ambiance avant de lancer les courts motifs de la mélodie qui elle-même reprend les mêmes notes inlassablement. C’est en cela que cette musique est apaisante.
En fait Satie, sous des dehors humoristes et fantasques, était un mystique et cette pièce, au-delà de tous les attributs musicaux que l’on voudrait lui donner, en est le reflet. C’était un être insolite, une sorte de précurseur de tout un courant de pensée, dont le minimalisme qui n’apparaît aux Etats-Unis qu’en 1965. Il écrivait aussi, de courtes pièces drolatiques qui exprimaient une vision de la vie différente, aérienne et affranchie de toute idée de séduction. Eric Satie était un être entier et, rien que pour cela, il mérite notre attention. Seuls ces gens-là révèlent l’au-delà du miroir à ceux qui ne le voient pas.
07:14 Publié dans 51. Impressions musicales | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : musique, minimalisme, mysticisme | Imprimer
01/08/2012
Grâce matinale
Il est quatre heures. Tout dort dans la maison. Aucun bruit ne vient me frapper l’oreille. Je suis dans la cuisine, assis à la table, devant un bol de café. Et tout d’un coup l’éveil !
La grâce s'empare de moi et le vide s’installe dans ma poitrine, me suffoquant. Plus rien n’obstrue ma vue. La pellicule du moi ne m’empêche plus de voir la réalité. La cuisine devient si nette que j’ai l’impression de la voir pour la première fois. Voici ses tableaux accrochés aux murs, chacun racontant son histoire, fenêtre ouverte sur d’autres mondes. Et tous les objets entassés sur les étagères, bocaux vides ou pleins, bouteilles et pots : tous d’une netteté absolue. J’en reste éberlué. Comment se fait-il que chaque jour, je laisse l’habitude du quotidien me submerger ? Quelle est donc cette pellicule qui s’installe sur ma vue et prend le bonheur d’un jour de grand nettoyage. Je suis vide de souvenirs, vide de paysages connus. Je découvre pour la première fois ce que je vois chaque jour, là une poupée abandonnée dans un coin de la cuisine, revêtue d’habits blancs comme une jeune baptisée. Elle a les yeux fermés, je la redresse, elle me regarde, souriante, presque vivante, et je suis le petit garçon qui voit en elle l’affection indélébile des parents pour leur progéniture.
L’heure sonne au clocher, elle résonne et m’éveille à nouveau, car j’allais déjà perdre ces instants de grâce par l’évocation de souvenirs anciens. A nouveau, la transparence du réel. Je peux la saisir à pleines paumes, m’en rassasier dans une fête sans paroles où tout est intérieur. Je ne suis plus. Seul est là un être que je ne connais pas, lui-même transparent. Jeux de vitrail qui ouvrent sur la réalité qui, elle-même, semble sans existence. Cette transparence vibre au plus profond de moi, lorsqu’en un instant, tout redevient comme avant.
Une minute, deux minutes, une vie… Que sais-je ? Ce saut dans l’inconnu m’a rafraîchi l’esprit. Tout est plus léger. J’aborde cette nouvelle journée avec l’ardeur d’un voyageur dans une nouvelle contrée. Et cet instantané va rester jusqu’au soir sous mes yeux, comme une photo vivante d’un jour semblable aux autres.
07:18 Publié dans 61. Considérations spirituelles | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : photo, vie, écriture | Imprimer
31/07/2012
Mandala abstrait
http://www.youtube.com/watch?v=N10A8wKlGAs&feature=related
Partir vers un autre monde, si différent, en esprit, par l’ouïe et la vue, et laisser son imagination vagabonder dans le vide de la pensée. Les images se succèdent, sans autre vision que cet astre fantomatique qui se promène dans l’univers, seul, voyageant à des milliers d’années-lumière, occupant toutes vos pensées.
Om Tryambakam Yajaamahe
Sugandhim Pushti Vardhanam
Urvaarukamiva Bandhanaan
Mritor Muksheeya Ma-Amritaat
« Aum, nous adorons celui qui a trois yeux
Shiva, celui qui rayonne et qui nourrit tous les êtres
Puisse-t-il nous libérer de la mort et nous rendre immortels
Comme le fruit qui est cueilli de l’arbre »
Aum, son primordial, à l’origine de tous les mots, sortant de la gorge, roulant sur la langue et terminant sa course sur les lèvres. Utilisé dans de nombreux mantras, comme c’est le cas ici, la vibration engendrée par le son facilite l’éveil de la conscience.
Cette construction du chant se retrouve dans de nombreuses traditions religieuses par l’usage de l’ison (note tenue en accompagnement du chant) et d’une phrase courte, répétitive, facilitant le repos du mental, amenant progressivement l’absence de pensée et l’entrée en soi-même. Etonnant d’ailleurs comme ce chant est proche de la musique occidentale de style religieux : longue tenue d’une même note, le Do de notre gamme, qui est la note centrale sur laquelle tourne l’ensemble du chant et de son accompagnement par l’ison. Et le chant se déroule sur trois notes, comme dans la plupart des chants primitifs, Mi, puis Ré, avec deux autres notes accessoires, un Fa diminué et un Sol à l’octave inférieure, point de départ de l’aum, parfois à peine ébauché avant le Do.
Ce tableau est une sorte de mandala moderne, support de méditation. Volontairement abstrait, il utilise l’art optique pour imprégner l’œil des mêmes sensations que l’oreille. L’œil s’égare dans cette sphère jusqu’à ne plus chercher. Alors on trouve la paix dans un monde en changement permanent.
05:08 Publié dans 23. Créations peintures, 51. Impressions musicales | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : op'art, art cinétique, peinture, dessin, mandala, méditation, spiritualité | Imprimer
30/07/2012
Le style
Le style, c’est la patte de l’auteur
Il y en a de bons, il y en a de mauvais
Que voulez-vous y faire ?
A quoi tient-il, ce sésame ?
Cela tient tant à la manière de dire
Qu’à ce que l’on a à dire.
La manière :
Brut comme le champagne en hiver
Doux comme la pomme en automne
Tendre comme le pissenlit au printemps
Chaud comme la tomate en été
Mais cela ne nous dit rien
De ce qu’est la manière. Et pourtant ?
Phrases courtes, sans fioritures
Qui font froid dans le dos
A force de les écouter
Mais qui sonnent comme le gel
Sur les branches des cyprès
Consonance des mots, au gré de la phrase
Bonbon gargarisant de douceur légère
Je me lèche les babines de ces caresses
De syllabes attendrissantes et colorées
Phrase fleuve, ruisseau de feu
Emplie d’événements inattendus
Et de peinture écaillée et tremblante
Prolongeant le récit avec délectation
Phrase sans ponctuation
Raide d’une justice humaine
Emprunte d’absence de visibilité
Mais piquant les nerfs à vif
Phrase sans phrase, sans début
Ni même fin avant la conclusion
On s’y empêtre, la botte lourde
Parfois même on s’enlise avant
Et on échoue sur une page, désespéré
Phrase sans le balancement du verbe
Où les mots se bataillent, vindicatifs
Jusqu’au coup de poing sanglant
Qui assassine le lecteur, froidement
C’est un style inusité, certes
Mais certains s’y complaisent
Le nez dans le vent, la communication fraîche
Nous ne poursuivrons pas ces évocations
Qui ne font que dire en lettres
Ce que d’autres expriment en chiffres
Vingt sur vingt à l’auteur, ou encore
Zéro, triple zéro, quel écrivain prétend-il être ?
Peut-être n’a-t-il pas cherché son style
Ou l’a-t-il trouvé en solde, sur une étagère.
Mais ce que l’on a à dire est aussi nécessaire
A cette définition de ce que d’autres appellent touche
S’ajoute les paroles de la chanson
Dont nous n’avons évoqué que la musique
Elles peuvent être historiques
Et conter la fabuleuse aventure d’un quidam
Qui se ressuscite d’un passé glorieux ou malheureux
Elles peuvent être imaginaires, enturbannées
D’événements impossibles et drôles
Enrobées d’un milieu défendu ou vertueux
Monsieur Hulot au pays des merveilles
D’autres styles content l’inédit ou le futur
Ils se veulent scientifiques, mais « fictionnent »
Retour à la strophe précédente,
Où l’imaginaire devient prolixe
Les amours sont des sujets sensibles
Mais tellement rabâchés. Cependant
Y a-t-il plus séants que ces visages
Qui se regardent et se disent eux-mêmes
Dans le frottement des peaux ?
La misère fut pendant un temps sujet
La croissance est passée par là
On ne parle plus que de besoins
Grandissants certes, impérieux aussi
Revendicatifs pour les forts en style
L’éloquence est le dernier refuge
Des esclaves de la déraison
Arrêtons là cette litanie du contenu
Qui n’est pas sans effet sur le contenant
Car en fait le style, pur, chargé
Ecrémé, pourrait-on dire réalistement
Ampoulé de lumière vive et criarde
Reste l’artifice imparable
A l’éditeur malin pour refuser
Le manuscrit déchu au rang de paperasse
Pourtant le style produit du sens
C’est ton langage intérieur
Encore faut-il que le comprenne
Le lecteur irascible et paresseux
S’il y a un style pour chaque auteur
Il y a des styles pour le lecteur,
Appréciés ou détestés, selon les cas
Qu’y faire, si ce n’est être soi-même
07:37 Publié dans 42. Créations poèmes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poésie, écriture, littérature, poème | Imprimer
29/07/2012
Carol of the Bells (for 12 cellos) ThePianoGuys
http://www.youtube.com/watch?v=e9GtPX6c_kg&feature=relmfu
Quelle frénésie endiablée, une danse de sorcière dans les bois, sur les places des villes, dans les lampions, parmi les patineurs ou la solitude des montagnes. C’est beau de rage contenue, d’avertissement au monde dont on ne sait quoi, de danse venant de nos grands-mères, de tendresse aussi, cachée en accompagnement.
Est-ce réellement un cantique. On peut en douter, mais peu importe. On a passé un bon moment à s’enchanter les oreilles !
07:10 Publié dans 51. Impressions musicales | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : musique, violoncelle, danse | Imprimer
28/07/2012
Journal d’hirondelle, d’Amélie Nothomb
Amélie Nothomb est imprévisible, et une fois de plus, elle surprend. L’avant-dernier paragraphe du livre nous dit qu’il s’agit d’une « histoire d’amour dont les épisodes ont été mélangés par un fou. », mais cela ne correspond pas à ce qui y est abordé. J’avoue que je n’ai pas aimé cette histoire abracadabrantesque d’un narrateur qui devient tueur à gages en écoutant un album de Radiohead, tout cela suite à un pseudo chagrin d’amour.
Certes elle reste toujours aussi acerbe, inventive de bons mots.
Tirer à deux reprises dans la tête était la règle. Le crâne, parce qu’il valait mieux détruire la centrale. Dans l’immense majorité des cas, la première balle tuait. La deuxième, c’était par sûreté. Ainsi, il n’y a avait pas de rescapé. (…) Pour ma part, je bénissais cette loi du deuxième coup, qui redoublait ma jouissance. En appuyant sur la détente une seconde fois, je m’aperçus même que celle-ci était meilleure : la première sentait encore son huile de doigt.
Mais tout ceci ne fait pas une histoire qui émeut, une histoire qui nous parle. Les dialogues restent, mais l’ambiance décourage. Quel intérêt porter aux meurtres d’un tueur qui lui-même s’ennuie à tirer dans la tête de quidam qu’il ne connait pas. Il se dit insensible, mais à quoi ? L’auteur nous met en présence d’un sadomasochiste et cherche à nous passionner sur ses aventures qui se terminent en arroseur arrosé.
Tout cela confirme ma métaphysique : le corps n’est pas mauvais, c’est l’âme qui l’est. Le corps c’est le sang : c’est pur. L’âme c’est la cervelle : c’est de la graisse. C’est le gras du cerveau qui a inventé le mal. Mon métier consistait à faire le mal. Si j’y parvenais avec tant de désinvolture, c’est parce que je n’avais plus de corps pour entraver mon esprit. Du corps, je n’avais que la minuscule prothèse de perceptions nouvelles découvertes à la faveur des meurtres. La souffrance n’y était pas encore apparue : mes sensations n’avaient aucune notion de morale.
La fin du livre est à la hauteur de son déroulement, le narrateur, qui est le tueur à gages, meurt de constipation. Mourir de constipation est une chose difficile à comprendre. L’esprit humain, qui se représente facilement le trépas diarrhéique, est incapable de concevoir l’inverse. Je me console en pensant que je saurai bientôt en quoi cela consiste. J’ai accompli mon acte d’amour : j’ai mangé les écrits d’Hirondelle. (Je ne dévoile pas de qui il s’agit, sinon le livre n’aurait plus lieu d’être lu).
Bref, ce n’est pas digne d’Amélie Nothomb qui nous a donné bien meilleur.
07:22 Publié dans 41. Impressions littéraires | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, roman, nothomb | Imprimer
27/07/2012
Supernova
Une supernova est l'ensemble des phénomènes conséquents à l'explosion d'une étoile, qui s'accompagne d'une augmentation brève mais fantastiquement importante de sa luminosité. Vue de la Terre, une supernova apparait donc souvent comme une étoile nouvelle, alors qu'elle correspond en réalité à la disparition d'une étoile.
Regardons une explosion :
http://www.youtube.com/watch?v=oajSXi4NTB8
Toujours dans la ligne de l’optique art, cela se traduit par ce tableau peint il y a un mois et qui montre l’inéluctabilité de la fin de chaque chose.
07:01 Publié dans 22. Créations numériques | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : peintre, art, op'art, art cinétique, peinture, dessin, étoile | Imprimer
26/07/2012
Le feu
Floue, marbrée, scintillante sous le regard
La flamme survit, grandit, s’épaissit
Votre cœur se soulève et s’échappe
Vous êtes parti au-delà de vos espérances
Dans ce non-lieu de l’absence
Là où plus rien ne vous retient
Hormis cet attachement du regard
A la danse divine du feu
Vous vous enflammez au figuré
Vous dansez sur l’air des carabins
Vous ne pensez plus, vous n’êtes plus,
Rien de tout cela n’existe, rien
Que l’exaltation du pauvre
Rien que l’ombre et le piment
Orgie de couleurs et de sons
Jusqu’au devenir de l’avenir
Ouvert sur l’obscurité et le froid
D’un désert enchanteur, mais traître
Pourtant certains aiment à le cracher
Portant à la bouche un alcool frelaté
Et le projetant en nuages brumeux
Au loin, dans un ciel pur et matinal
Pour en faire un déluge de flammes
Une poudrière charmante
Un tube de chaleur rayonnant
Et le quidam applaudit, amusé
De voir la domestication de l’ardeur
Consommée en une fois, éphémère
D’autres le donnent, la main tendue
Le cœur en miettes, détendus
Ou encore en éventail, les doigts joints
Pour abriter la combustion
Du vent de la colère
Et les deux visages, éclairés
Se regardent enfin dans la chaleur
D’une sympathie commune
Quelle fumée délicieuse
Sort de cette flamme minuscule
Et l’on tire, l’on tire sur le bout
Jusqu’à se faire exploser
Le cerveau de brouillard nocif
De souvenirs indélébiles
De pensées moroses et vertes
J’en connais qui adorent le jeter
A l’instar de l’huile brûlante
Qui s’enflamme au contact
De la tempête de concepts
Qui a raison, le sais-tu ?
Probablement personne
Seule la variation de température
Entraîne ce vent de protestations
Dans le vide stellaire du pouvoir
Il peut être éternel, impassible
Se consommant sans cesse
Une géhenne infirme de fraicheur
Dans laquelle se précipitent, seuls
L’insouciant ou l’avide
Cherchant tous deux
Une raison de vivre et de mourir
Enfants, ne jouez pas avec lui
Il mord, lèche la paume des mains
Comme un chien insatiable de caresses
Ou encore vous prend les jambes nues
Et vous empêche de courir
Vers le rêve ou l’amitié
La terre s’en fait une ceinture
Qui couve sous la végétation
Et s’ouvre un chemin incandescent
Vers un azur obscurci par la cendre
Ah, le trop de vapeur sorti de son cœur
En faire un art, au mépris du solide
N’est-ce pas une drôle de vocation
Le métal en fusion devient ruisseau
Et coule dans le fond de la gorge
Pour durcir au goût du patient
Qui s’étouffe et se lasse
Mais il peut être modéré et doux
Comme un agneau tendre et fragile
Vous le regardez vous dire son amour
Ou cuire un met parfumé
Et vous vous réjouissez de sa vaillance
Humble, lumineuse, caressante
Sa flamme vous assure une rente
Qui vaut mille possessions
Ou autre sorcellerie maligne
Vous vous réjouissez de ce bain
De jouvence non mérité
La braise peut couver sous le boisseau
Et dire tout en langue
Comme inspiré célestement
Le cœur enflammé, débordant
De miel et de bienfaits
Tourné vers le seigneur du monde
Reconnaissant son odeur
D’encens, s’oubliant lui-même
Dans le tourbillon de sa puissance
Parmi les quatre éléments
Avec l’eau, l’air et la terre
Que fait-il à compter à ce point ?
Car destructeur et vorace
Il vous entraîne en volutes
Et devient cendres noires
Retour à la terre, à l’astre originel
Que l’eau lave inlassablement
Et que l’air disperse, invariablement
Alors que reste-t-il de ce feu
Qui le matin, avant qu’il ne se lève
Vous embrase l’être
Et vous conduit, en cortège
Vers les adorables envies d’un jour
Ou les tâches harassantes et vaines
D’un quotidien inlassable
Il vous occupe en arrière-plan
Comme un chardon qui vous pique
Pour vous rappeler sa beauté
Que nous reste-t-il ?
Lumière et chaleur,
Laquelle préférez-vous ?
07:34 Publié dans 42. Créations poèmes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poèpe, écriture, poésie, littérature | Imprimer
25/07/2012
Distorsion
Les liens invisibles de l'univers apparaissent parfois au détour d'un rêve. On comprend alors la complexité du monde. Nous n'en voyons que les apparences alors que son incroyable cohérence nous crève les yeux. En un instant de grâce, celle-ci nous illumine, comme un cheval fou dans la largeur du cosmos.
Et nous tentons de garder ce souvenir en mémoire, sans grand succès, mais avec entrain. Nous en traçons le dessin et comblons le vide des évocations. Voici ce que cela donne (gravure faite il y a déjà longtemps) :
07:56 Publié dans 25. Création gravures | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : dessin, peinture, gravure, abstrait | Imprimer
24/07/2012
Psaume de David, d'Heinrich Schutz
Le paume 150 ''alleluja lobet den herren'' est chanté par l'ensemble "La chapelle Rhénane", sous la direction de Benoit Haller, pendant les folles journées de Nantes en 2009.
http://www.youtube.com/watch?v=mWbIpX6osFo&feature=related
Le psaume éclate : alléluia, alléluia ! On ne s’attend pas à une telle vigueur.
Alléluia ! Louez Dieu dans son temple saint, louez-le au ciel de sa puissance ;
louez-le pour ses actions éclatantes, louez-le selon sa grandeur !
Louez-le en sonnant du cor, louez-le sur la harpe et la cithare ;
louez-le par les cordes et les flûtes, louez-le par la danse et le tambour !
Louez-le par les cymbales sonores, louez-le par les cymbales triomphantes !
Et que tout être vivant chante louange au Seigneur ! Alléluia !
Et Dieu est loué par la voix, ces voix chantant chacune sa partition, en parfaite harmonie, avec la même vigueur, le même entrain. Chacune d’entre elles résonne avec sa particularité, son timbre, sa compréhension du texte.
Un accompagnement musical assez extraordinaire qui ne masque pas le chant par ses cuivres, qui sonnent avec dynamisme, mais sans exagération.
Quelle belle louange du Seigneur, chaque verset fait l’objet d’un véritable tableau musical, dans lequel chaque chanteur peut s’exprimer en toute liberté, chacun en harmonie avec les autres. Puis reprise du chœur, le tout dans une verve qui ne se dément jamais.
Bravo au chef, Benoit Haller, car il est toujours difficile d’atteindre une telle harmonie dans la préservation des individualités, qu’elles soient des chanteurs ou des instruments.
Oui, la musique baroque est une musique envoûtante, toujours inattendue, vigoureuse, remise à l’honneur depuis quelques temps pour le bonheur de nos oreilles, grâce à quelques découvreurs de nouveaux manuscrits, mais surtout au talent de nouveaux chefs qui apportent leur fougue au service d’une musique éblouissante de santé et de joie de la vie.
07:55 Publié dans 51. Impressions musicales | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : musique baroque, chant, musique sacrée | Imprimer
23/07/2012
De vrais Japonais
http://www.youtube.com/watch?v=4YaGE0x-t4A&feature=related
C’est vrai, le Japon est un bien étrange pays. Regardez ce groupe ordonné. Après quelques manœuvres, ils se présentent. Ce n’est plus un groupe, mais plusieurs, de tailles différentes. L’Uchi-soto (dedans-dehors) est le concept de base de la vie sociétale au Japon. Lorsqu’on est devant un membre d’un groupe extérieur, on doit l’honorer et même lui faire un cadeau. Alors on reste humble parce que l’on fait partie du groupe interne. Mais ces groupes ne sont pas permanents, ils se mélangent et se modifient selon les situations. Ce sont des cercles qui s’interpénètrent dans lesquels chaque individu peut avoir des positions différentes selon le groupe du moment auquel il appartient.
C’est ce qu’illustre cet ensemble, groupe qui se scinde en sous-groupes, rapidement, qui s’évapore, mais qu’il faut reconnaître et dont il convient d’estimer l’importance. Tous sont un, l’un est le tout.
Malgré tout, quel humour dans cette démonstration très soldatesque. Un humour froid, parfois invisible, d’autres fois volontairement exagéré. Le Japonais a besoin de son groupe, il ne peut s’en passer. Heureusement encore qu’il peut s’échapper de l’un pour se réfugier dans l’autre et monter de piédestal.
Rêvons un peu. Imaginons-les, tout d’un coup, s’échappant de leurs rangs comme les aigrettes d’un pissenlit sous un coup de vent.
Non, ce n’est pas possible, le Japon ne s’en remettrait pas !
07:50 Publié dans 11. Considérations diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : société, civilisation, culture | Imprimer
22/07/2012
Aurore
Quel bonheur !
Un feston amarante embrase l’horizon
Rien ne bouge
Toute la nature est attentive
A cette naissance d’un jour nouveau
La noirceur s’estompe
Gris anthracite… ardoise… fumée
Puis bleu nuit… bleu outremer
Bleu saphir devenu acier
Jusqu’au bleu ciel, éperdu
Ouvert sur le monde
Comme une couverture de bonheur
Ajoutée sur les pieds du dormeur
Et moi, veilleur, le regard allumé
Je célèbre l’innocence et la liberté
De la brise dans les feuilles
Qui chatoient les ombres encore visibles
D’une nuit qui part, solitaire
Un jour nouveau s’en vient
Glorifions-le, car toujours
Est unique cette présence espérée
De l’illumination et de la transparence
L’âme renouvelée, je pars
A la conquête du monde, serein
07:36 Publié dans 42. Créations poèmes | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : poésie, écriture, poème, littérature | Imprimer
21/07/2012
Œuvres complètes (1954-2002) de Tomas Tranströmer
Tomas Tranströmer est prix Nobel de littérature (2011). En France, qui parle de lui ? Peu de personnes, car c’est un poète et il n’écrit pratiquement que des vers. Et encore, aucun de ces vers ne versifient. Ils viennent dans la pensée et s’échappent avant qu’on ait le temps de les mettre en boite. C’est du bouillonnement premier, un jus de chaussette qui sent l’escapade rafraichissante, la pinte de bière fleurie, le sel de mer un jour de pluie.
Ce qui frappe chez lui : l’art de la métaphore ! Elle est audacieuse, précise, bouleversante lorsqu’on l’a comprise. C’est ainsi que les paysages de Turquie scintille « dans la lunette du vautour », que « l’éveil est un saut en parachute hors du rêve ». Alors chaque objet se met à danser de sa musique particulière, à chatoyer de son existence solitaire. Et le poète tente de préciser l’impénétrabilité des choses : « Je suis couché sur mon lit, les bras en croix. Je suis une ancre confortablement enfouie qui retient l’ombre profonde au-dessus d’elle, cette grande inconnue dont je participe et qui est certainement plus importante que moi ».
Son traducteur, Jacques Outin, l’appelle le poète du silence.
Las de tous ceux qui viennent avec des mots,
Des mots, mais pas de langage,
Je partis pour l’île recouverte de neige.
L’indomptable n’a pas de mots.
Ses pages blanches s’étalent dans tous les sens !
Je tombe sur les traces de pattes d’un cerf dans la neige.
Pas des mots, mais un langage.
L’écriture de Tomas Tranströmer est sobre, faite de courtes phrases, parfois sans verbe, un mot, une idée qui se laisse deviner. Mais la métaphore est toujours juste, évocatrice, belle, même si elle surprend par sa hardiesse. Il marche sans faiblesse sur le fil de l’évocation imperceptible et tout ce qu’il voudrait « dire reluit, hors de portée, comme l’argenterie chez l’usurier ». Les souvenirs l’observent :
Un matin de juin, alors qu’il est trop tôt
pour s’éveiller et trop tard pour se rendormir.
Je dois sortir dans la verdure saturée
de souvenirs, et ils me suivent des yeux.
Ils restent invisibles, ils se fondent
dans l’ensemble, parfaits caméléons.
Ils sont si près que j’entends leur haleine,
bien que le chant des oiseaux soit assourdissant.
Tomas Tranströmer choisit d’explorer « la banale vétusté-modernité des choses, le monde ordinaire-extraordinaire de tous les instants que l’on vit » (Alain Jouffroy, Le manifeste de la poésie vécue, Gallimard, 1995). Et ce présent concret et naturel devient un jardin secret, illuminé de mille feux, sorti du jeu des mots et des comparaisons. Pour lui, l’observation crée la réalité. Les situations l’intéressent plus que la chose en elle-même. Il le dit : « Deux vérités s’approchent l’une de l’autre. L’une de l’intérieur, l’autre de l’extérieur, et on a une chance de se voir en leur point de rencontre. »
Eau qui croule qui croule fracas vieille hypnose.
Le torrent inonde le cimetière de voitures, rutile
derrière les masques.
Je serre fort le parapet du pont.
Le pont : ce grand oiseau de fer qui plane sur la mort.
07:39 Publié dans 41. Impressions littéraires | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, poésie, poème | Imprimer
20/07/2012
Benoît Trimborn, à la galerie Ariel Sibony
C’est simple, parfois simpliste, mais d’une beauté !
Et vous vous laissez aller dans ce calme, ce vide de la nature élémentaire à deux surfaces, deux couleurs, parfois sans aucune nuance. De grands aplats, des petites papillotes de peinture pour simuler le tremblement acide des feuilles ou des céréales, des mélanges entre deux pour dire l’ombre. L’expression d’une solitude aimée et d’un besoin de communiquer sa vision.
Alors, on regarde, on rêve, on part vers les sommets de la perception, à partir de quelques couleurs, d’un trait, d’une ombre. On est bien sûr surpris au premier abord. Il n’est évident de se laisser faire face à si peu de manifestation d’une vérité à prendre.
On refuse cette vision d’une seule face avant de plonger, doucement, tranquillement, dans sa surface et de s’y noyer. On repose enfin dans la couleur, dans le tremblement léger, dans la quiétude insoupçonnée de chaque tableau, et l’on s’y endort, serein, reposé, vidé de soi, vidé des autres, vidé même de tout contexte, pour ne plus vivre que cette aventure incroyable, l’osmose de l’impression, de la perception, de la sensation, des sentiments enfin. Tout ceci se mélange en vous, jusqu’à la synthèse finale, l’immensité de la nature et son unité interne, une construction qui tend vers la beauté.
Merci, Benoît Trimborn, pour cette simplicité qui devient art de voir, de sentir et de communiquer ce chatoiement imperceptible d’une nature indomptable.
08:02 Publié dans 21. Impressions picturales | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : peinture, exposition, création | Imprimer
19/07/2012
L'ignorance
L’ignorance est un état, non pas d’être, mais de conscience, chrysalide qui ne parvient à être papillon. Elle se regarde sans jugement.
Ignorer quelque chose, est-ce ne pas connaître son existence, à tel point qu’on n’en cherche rien, ni forme, ni modèle ? Fumée verte, dans la cage de l’escalier aux mille portes du savoir.
Serait-ce peut-être connaître l’existence, mais manquer de connaissances sur son goût, son toucher, sa couleur et son odeur ? Je ne la connais pas, car je ne l’ai pas éprouvé, et du bout du pied nu, je tâte son eau trouble pour savoir si je peux m’y plonger.
On en dresse parfois le constat. Quel trou sans fond de la méconnaissance ! Qui sait ce que contient la délicate absence du collier, fortuné et visible, de colifichets enrobés de la crème du savoir, embaumés de mots savants. Et pavane la danse de la bêtise, marquée par le rythme mécanique du morse qui crie au secours : SOS, SOS, la mort de l’innocence !
Il arrive que de grands inconséquents, forts d’inventaires et de définitions, ne sachent pas prendre garde aux fourmis qui montent sur leurs jambes. Nouveauté non vérifiée, technologie qui fait irruption dans le salon des meubles anciens et bouleverse en un tour de main les platebandes où piqueniquent les gras docteurs de l’inventaire des monuments esthétiques, parlant d’or et raisonnant d’airain.
Ignorance et misère sont souvent, mais pas toujours, synonymes. Dis-moi ce que tu gagnes, je te dirai ce que tu sais ! Cependant la richesse matérielle n’est pas d’un grand secours aux handicapés de l’encéphale. Mieux même, certains n’oublient pas de se débarrasser de leur manteau de vison ou d’astrakan pour voir venir le bateau de l’entendement. Mais, kouik, rien ne vient, l’espoir n’est pas l’égal d’un potentiel démesuré.
Un autre synonyme, plus chaleureux, est l’association de l’ignorance avec l’innocence. Chaste ignorance, que celle du candide nu de savoir. Revêtu de son phare scintillant, il pénètre l’âme et rompt les faux semblants. Il éclaire les trous noirs de désirs inassouvis et d’envies défendus. Jusqu’où va-t-il fouiller ? Il creuse la carrière de la science et de sa préscience fait un pied de nez à l’ignorance terrestre des choses célestes. C’est Eve qui mangea la pomme et la discorde arriva par la faute de leur manque de discernement. Elle donne la connaissance, mais de quoi ? De la seule ignorance humaine, celle du bien et du mal. Abjecte inexpérience que celle-ci. La chaussette ne se raccommode pas avec la laine de l’intempérance vis-à-vis des biens de ce monde.
Ignore ton désir d’avenir, ignore ton goût d’un passé révolu, ignore le fruit chaleureux du présent, et fait irruption dans le nuage d’inconnaissance qui te révélera l’entière vérité au-delà de toute certitude. L’intellection à plat, tu peux monter vers l’absence et t’emplir du bonheur du non savoir. Quelle jouissance ! La tête vide, le cœur plein d’intenses rayonnements. Brasier des soirs d’été…
07:43 Publié dans 11. Considérations diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poésie, écriture, littérature, poème | Imprimer