03/08/2015
La république sans démocratie
Voici un paradoxe de la culture libérale post-moderne : une éthique de la discussion associée à un étouffement des débats. (…)
Tout débat noué autour des seuls concepts antinomiques est voué à un perpétuel match nul entre arbitraires. On peut dans un tel débat, identifié le plus passionné, le plus nombreux, le plus éloquent, le plus riche, le plus puissant, le plus rusé ou celui qui crie le plus fort. Mais un tel débat ne peut absolument pas identifier le plus juste.
(Henri Hude, La force de la liberté, nouvelle philosophie du décideur, Economica, 2013, p.93)
Il est vrai qu’un tel débat, celui de l’iniquité des débats dit républicains, mais sans démocratie, nécessiterait tout d’abord de redéfinir ce que l’on entend par république, puis par démocratie, puis par liberté de pensée et enfin par débat. Longue digression pour arriver au constat qu’effectivement le débat n’est plus ce qu’il doit être, mais le lieu d’affirmation des idées sans possibilité de les confronter.
Confronter deux idées suppose l’instauration d’un dialogue dans lequel chacun joue à partie égale et admet que l’autre puisse s’exprimer et faire valoir ses arguments.
Or la communication, ce maître mot du post-modernisme, empêche par nature le débat, car elle décrète que la liberté est l’ultime objectif de la république et de la démocratie. Au nom de la liberté, tout est possible et même impératif. Tout est de valeur égale ou plutôt rien n’a de valeurs en soi. Mieux même, celui qui cherche à faire valoir la justesse de ses valeurs dans un débat ordonné est un ennemi de la démocratie. Seule compte in fine la force de l’affirmation et non la force de l’argumentation.
C’est pour cela qu’il n’existe plus dans notre société de vision politique. Celle-ci suppose d’avoir construit un programme qui donne une vision de l’avenir à au moins une dizaine d’années et qui définisse la manière dont on compte y conduire la nation. Or que nous sort-on aujourd’hui ? Au mieux dix mesures (ou plus, ou moins) pour faire évoluer la triste situation de notre pays qui s’enfonce de plus en plus dans l’absence d’avenir. Comme si l’avenir d’un pays dépendait de mesures à prendre sans idéal ni vision, ni politique ! Dans cette société, le bien commun n’existe pas. Seul comptent les biens particuliers de certains contre les biens particuliers d’autres. Que le plus fort gagne ! Et l’on assiste à l’alternance des aveugles qui ne cherchent qu’à faire profiter son camp au nom d’une idéologie de droite ou de gauche sans vision d’avenir.
La communication a remplacé l’argumentation et fait du débat un affrontement dans lequel le vainqueur est connu d’avance et orchestré par la machinerie d’une démocratie qui n’en est plus une. Il est intéressant d’ailleurs de constater que le terme de démocratie est actuellement, dans les débats politiques, de moins en moins utilisé et remplacé par celui de république. La république c’est l’organisation du pouvoir des élites entreprenantes d’une nation pour conduire celle-ci vers un avenir meilleur et plus libre pour l’ensemble des personnes. La démocratie est la juste participation à l’action de l’Etat et à la vie politique de la cité de la majorité des citoyens. Une république sans démocratie, c’est la domination sans débats d’une oligarchie grâce à l’instauration de concepts idéologiques, de propagande médiatique et de fictions juridiques.
La seule façon de restaurer le débat politique est bien un retour à la confrontation des idées, donc à l’édification d’une vision de l’avenir et la mise en place d’une politique, puis d’une stratégie pour y conduire la nation.
01:30 Publié dans 11. Considérations diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : politique, république, démocratie, débat, communication | Imprimer
12/08/2013
Démocratie et valeurs démocratiques
La démocratie, régime politique dans lequel le peuple est souverain, est « le gouvernement du peuple par le peuple, pour le peuple » (Abraham Lincoln, 16e président des États-Unis). Le gouvernement démocratique s’oppose au gouvernement monarchique ou dictatorial (pouvoir détenu par un seul homme) ou encore au gouvernement oligarchique (pouvoir détenu par un groupe restreint).
Mais lorsqu’on parle des valeurs démocratiques, on ne parle pas de gouvernement, mais d’un système sociétal comprenant un ensemble de valeurs et de principes régissant la vie en société.
Dans le premier cas, la démocratie est un système qui permet de départager les opinions des citoyens sur les idées, les règles et les personnes qui doivent gouverner. A 50,01% la démocratie a parlé. Ensuite, selon le régime démocratique (démocratie directe, démocratie représentative ou démocratie semi-représentative) soit le citoyen n’a plus droit à la parole, soit il continue de décider sur plus ou moins de projets ou de règles.
Par contre les valeurs démocratiques constituent beaucoup moins une valeur qu’elles veuillent bien le dire. C’est en fait une langue de bois utilisée par les gouvernants pour inciter le peuple à se départir de son droit. Les valeurs démocratiques sont pratiquées en communication gouvernementale pour que les citoyens ne soient libres que le jour des élections. Sortis de cette journée, ils sont assujettis à l’idéologie dominante (provisoirement, jusqu’à une nouvelle élection). Ainsi toute réforme que la majorité des gens refusent passe plus facilement si le gouvernement met en avant les valeurs démocratiques. Une fois élu, l’élu n’a plus à prendre le pouls du peuple. Celui-ci n’a qu’à s’exécuter puisqu’il l’a élu. Le gouvernement peut devenir quasi dictatorial.
Ainsi est détourné complètement l’esprit de la démocratie au nom des valeurs démocratiques :
· Liberté : oui, le jour de l’élection. Et à partir de ce jour, le citoyen est assujetti à la loi du gouvernement élu, sans aucune possibilité de contester les décisions.
· Egalité : celle-ci est le maître mot. L’égalité passe avant les lois de la nature. Elle permet de détourner la liberté à son profit.
· Fraternité ; oui, entre groupe du même bord, celui qui détient le pouvoir, qu’il soit de droite ou de gauche, l’essentiel étant la fraternité des élites contre le peuple ou la fraternité de l’excuse contre la sanction.
07:05 Publié dans 11. Considérations diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : politique, société, philosophie, démocratie | Imprimer