05/01/2014
"Noosphère" et "pensaction"
On oppose souvent le monde matériel et le monde spirituel, l’un fait de matière palpable, l’autre, hors de notre monde habituel, un monde révélé, imaginé, déclaré et devenu la chasse gardée des religions. C’est un peu vite classé. Que fait-on du monde des idées, monde sans consistance physique et qui traite à la fois du matériel comme du spirituel ? Une théorie, une pensée, un concept ont-ils une existence, non pas au sens matériel, mais par le simple fait qu’ils sont présents, évoluent et souvent meurent ?
Le concept de noosphère est dû au minéralogiste et chimiste Vladimir Vernadski avec ses études sur la biosphère. De manière plus large, on peut distinguer la géosphère ou monde inanimée (encore appelée lithosphère), la biosphère, monde vivant, et la noosphère ou monde de la pensée. Le Père Theillard de Chardin comprend l’idée de noosphère comme une nappe pensante faite de pensée et de conscience, qui enveloppe la terre. D’autres utilisent ce néologisme avec une vision liée à la notion d’information, l’infosphère, ou encore une vision gnostique, celle de gaïa, terre vivante.
Peu importe ces divergences. Ce qui compte c’est l’idée d’un monde qui n’est ni matériel, ni spirituel (au sens religieux habituellement utilisé). Certains considéreront que l’homme se distingue de l’animal par l’apparition de cette noosphère. Mais est-ce bien sûr ? Les animaux pensent à leur manière, ils ont des perceptions du monde et savent les utiliser pour survivre. Ils ont des sentiments au même titre que les hommes. La seule chose qui distingue l’homme de l’animal, c’est le langage et, grâce à l’existence de ce dernier, la conceptualisation, c’est-à-dire la capacité de penser le monde qui l’entoure en s’en extrayant plus ou moins.
Peut-on imaginer une forme de réalisation supérieure à celle de l’homme actuel ? Sans entrer dans des discussions théologiques pour savoir à qui appartient quoi, nous pouvons dire que le stade supérieur est très probablement celui de la « pensaction » où capacité pour un être d’agir directement par la pensée. Je pense et cette pensée devient action parce que je le veux. Je pense que je suis à tel endroit et je m’y trouve. Je pense que je suis à tel siècle et je m’y trouve. Je pense à une orange et elle est là, je peux la manger. Alors vous êtes Dieu, me direz-vous. Non, surement pas. Dieu est surement bien plus divin que cela. Dieu peut créer à partir de rien. La pensaction ne fait qu’utiliser d’une manière différente ce qui a une existence, matière et idée. Cet avènement mettrait fin à la dichotomie entre la pensée et l’action qui est une des limites de l’homme.
Le célèbre « Je pense, donc je suis » serait remplacé par « Je pense, donc j’agis » (et je me crée mon monde). Utopie complète, direz-vous ? C’est très probable tant que l’homme se concevra comme une entité qui s’oppose aux autres entités en tant que centre de son monde. C’est en cela que l’épanouissement de la noosphère est important. Car la création de liens d’interpénétration entre les êtres devrait permettre d’adopter de nouvelles règles de comportement : ne rien faire qui puisse nuire à un autre être vivant.
07:16 Publié dans 12. Trouvailles diverses, 61. Considérations spirituelles | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : science, religion, noosphère, conscience, immatériel, matériel, infosphère | Imprimer
16/11/2013
Eblouissement matinal
Le soleil commençait à monter sur l’horizon. Le ciel était pur, dénué de toute gêne. Pas un bruit. Je me pinçais le nez et soufflais pour déboucher mes oreilles, mais cela ne changea rien. Le silence était là, un monde sans un mouvement, sans une manifestation d’activité. Le temps s’était arrêté. L’espace prenait toute sa place, envahissant l’immensité de la voute céleste, la platitude de l’horizon et la granulosité des champs. Il dévorait et figeait les minutes qui passaient. Les secondes ne s’égrainaient plus. Elles semblaient de grosses gouttes de pluie qui hésitent à tomber et restent à se balancer sur la gouttière.
La voiture elle-même se mit à ralentir. J’étais ébloui par ce soleil qui tapait comme en plein jour à l’heure où il est le plus haut. Et progressivement, comme en mourant, le moteur s’arrêta, en accord avec mes impressions. Nous descendîmes sur le bord de la route, incertains, électrisés par cette ambiance insolite. L’air était frais, presque froid, mais les rayons de l’astre en feu réchauffaient les pommettes. On avait presqu’envie de se mettre nus et de se laisser bronzer, étendus à même le sol. Et toujours ce silence presqu’effrayant, extraordinaire, anormalement pesant. Nous fermions les yeux et nous laissions pénétrer par cette douce chaleur qui complétait le froid du matin. Nous devenions une tarte à la croute bien ferme, mais à la chair encore moelleuse, à peine cuite.
Ne pas parler, surtout ne pas crier. Prolonger cet instant de grâce infinie et de lourdeur sans fond. Le cosmos et la matière s’offrait à nous, bruts, étincelants, nettoyés de tout artifice, à portée de main. Nous contemplions l’astre lumineuse sans lunettes, sans peur de se brûler les yeux, l’extase nous prenait et nous devenions aussi léger que l’air. Ce silence extérieur devenait silence intérieur. Plus de pensée, plus de sentiment, une émotion pure qui ne soulevait aucune image. Le temps est arrêté, l’espace se dilue, l’âme se fait palpable, tout se concentre dans ce cœur dilaté qui bat la chamade.
Tout à coup, un froissement de feuilles et de terre, suivi aussitôt d’une galopade étouffée. Un lièvre est sorti de sa forme, nous a probablement contemplés avant de prendre la fuite. Il court sur cette terre fraichement labourée, émettant de petits nuages de poussière et de respiration, délivrant la nature de cette torpeur obsédante, lui redonnant vie. Progressivement on entendit un petit souffle de vent sur l’herbe rase, un camion qui passait au loin sur la nationale, le bêlement d’un agneau venant de l’est. Le monde se remit en marche, avec sa puissance habituelle, comme si de rien n’était.
Mais que s’est-il passé ce matin-là. Un instant d’éternité ou l’angoissant arrêt du mouvement cosmologique ?
07:57 Publié dans 12. Trouvailles diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cosmos, majesté, nature, vie, silence | Imprimer
06/10/2013
Cordages
Achetez ces liens qui tissent l’amitié. Ils trainent par terre et tous peuvent en faire provision. Il suffit de quelques billets qui vous ouvrent la porte et font de vous l’homme le plus heureux du monde.
Serrés en rouleaux étroitement enlacées, ces cordages sont adaptés à tous, petits ou grands, maigres et gros, bien-portants ou malades. Ils ont l’air inoffensifs, mais font preuve d’autorité. On dirait des rouleaux de cordons explosifs : « Achetez-moi, sinon… »
Quelle envie enfantine ! Acheter une grande brassée de cordages et en décorer sa pièce de travail : couleur et tension. Des roses vifs, des jaunes lumineux, des bleus étincelants, des verts attendrissants, des blancs insoutenables. Et ces couleurs clignotent devant vos yeux, attirantes comme des éclairs de pierres précieuses.
Cet instant de pure folie vous fait oublier où vous êtes. Plus rien ne compte que cette symphonie de ficelles et cordes qui vibrent ensemble pour le plus grand plaisir des yeux.
Allons, il est temps de reprendre ses esprits et de poursuivre sa promenade au long des rues encombrées d’objets hétéroclites. Quel déballage et comme nos greniers regorgent de richesses oubliées qui sentent la poussière et font éternuer.
Mais vous conservez en vous-mêmes l’image ineffable des cordes vibrantes et colorées qui chantent seules dans leur caisse en un chœur vierge et pur.
07:35 Publié dans 12. Trouvailles diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : brocante, loisirs, société, à vendre | Imprimer
01/09/2013
L'enterrement de l'oiseau
Ils étaient trois, trois enfants devant la tombe de l’oiseau, tout à leur chagrin.
Quel jeu ! Enterrer un pivert trouvé mort dans l’herbe tendre un matin d’été.
Ils l’installèrent dans une boite à chaussures, entouré de coton hydrophile, les plumes soigneusement lissées. La goutte de sang du bec fut essuyée avant sa mise en bière. Le long du mur du jardin, un trou fut creusé dans la terre sèche. Ce ne fut pas sans mal. Pic et pioche furent employés. Ils travaillèrent avec ardeur sous le soleil du matin, protégés par les frondaisons.
Quand tout fut prêt pour l’instant solennel, ils se figèrent au garde-à-vous, l’œil embué et entonnèrent la Marseillaise. Puis, se regardant, ils entreprirent de chanter « Ce n’est qu’un au revoir, mes frères… ». Le carton enfoui dans son trou, ils le recouvrirent de la terre poussiéreuse qui, longtemps encore, laissa voir le bleu du couvercle, comme un avant-goût du ciel.
Alors le plus jeune accrocha à la croix fabriquée par les deux autres l’épitaphe longuement réfléchie et retranscrite telle quelle :
Cher Général Jean-Claude Pivert
Merci de votre loyal service tout au long de ces 50 ans. Merci de nous avoir fait en partie gagner les 2 guerres. Merci de ces trois médailles d’or, ces 4 médailles d’argent et ces 6 de bronze en parachutisme. Au nom de la France : MERCI.
Biographie :
Jean-Claude Pivert, né le 8 octobre 1910, mort le 21 août 2013, à l’âge de 103 ans. Marié avec Marie-Dominique, il eut trois enfant ; Pierre ; Paul ; Jack, qui ont 50, 20 et 10 ans. Mort Fauché par une voiture numéroté ZZ 345 SR département 01 : Ain.
07:41 Publié dans 12. Trouvailles diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : chanson, france, guerre, poésie, société | Imprimer
26/08/2013
Musica vini
L’entrée est longue et noble, loin de toute habitation. On prend le bateau de l’errance et c’est le départ pour une aventure unique. Rien dans les mains, rien dans les poches, presque rien dans la tête. Et défilent les champs et les arbres jusqu’à l’arrivée. L’atmosphère y est différente. Tout est tamisé : le regard erre de l’eau, de l’herbe, du ciel et des pierres aux sensations les plus insolites, la couleur des robes, le sourire des enfants, les plaisanteries des hommes, la vie qui passe, qui demeure et qui persiste.
Musique ! Mais aussi le vin liquoreux (presque, mais pas tout à fait), ample, d’or transparent, aux reflets onctueux, à garder de la main dans son contenant au doux chatoiement. Admire sa toison telle le velours d’un chat. Elle te caresse la joue et danse pour toi avec une tranquille assurance : danse lente et majestueuse, ornée de broderies, du clavecin ouvert devant les yeux clairs de l’assemblée. Le son est étouffé. Il se fraye un passage parmi les cris des oiseaux, les craquements du bois, le raclement des chaises, la plainte d’un enfant. Les notes s’égrainent, une par une, deux par deux, puis trois contre deux, jusqu’à trois contre trois. Un violon entame la mélodie, courbe, ensorcelante, délurée, mais reposante, parfumée, au goût de miel et de myrrhe. Et danse devant tes yeux les bras dorés des femmes ensorceleuses et des enfants endiablés. Tu te laisses aller. L’arôme du vin active tes sens. Ils s’échauffent en toi comme l’eau du ruisseau sort de son lit. L’enivrante boisson te prend à la gorge, gouleyante, primesautière, insidieuse et, comme la fumée de l’innocence, te vole la primeur de la rationalité. Pourquoi chercher, te questionner, encombrer ta machine à penser ?
Laisse errer ton corps : écoute l’odeur ineffable des pas sur les feuilles, goûte l’ombre de la valse lente décrite par les notes caillouteuses de la guitare, vois le toucher rugueux du vin de Cristal qui palpite dans ton cerveau et l’enchante de mille sons et senteurs subtiles. Tu souris enfin, sans arrière-pensée. Le vide céleste t’envahit, ton regard ne se pose plus sur les faits, mais sur l’étincelle d’un sourire, la caresse d’une main, l’éclat d’une chevelure vibrante, la courbe d’une épaule dénudée. Alliance magique de l’ouïe et du goût, mais aussi de l’odorat, du toucher des cordes par l’archet et de la vue dansante d’une après-midi enchanteresse sous le soleil tardif, mais réel.
Le soir, retour aux réalités de la normalité, tu entrevois ce songe béat : l’archet du vent caresse les grappes de la félicité et emplit l’air de senteurs boisées qui te font tourner la tête. Folie de l’imagination (et de la boisson).
Merci à tous les organisateurs de cette après-midi. Un rayon de soleil sur une planche à repasser qui danse la gigue !
Et si vous avez l’esprit curieux (de quoi parle-t-il ?), entrez par la porte virtuelle dans la magie de cet événement :
06:38 Publié dans 12. Trouvailles diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : université d'été, musique, chanson, écriture, femme, vacances | Imprimer
19/08/2013
Vitrail et lumière
Un beau vitrail du XIXème siècle : architecture et couleurs font pour une fois bon ménage. Certes, cela ne vaut pas les vitraux médiévaux. Mais tout de même : la sainte famille, en couleurs, enchâssée dans un décor coloré (Eglise de la Trinité à Château-Gontier 53).
L’univers tout entier est contenu
Dans la lumière de l’amour de Dieu.
L’infiniment grand comme l’infiniment petit
Respire du même souffle de l’amour.
Olivier Clément (voir l'article du 7 mars 2013) disait dans ses monologues qui lui servaient de cours : "L'ascèse est l'art de se transformer dans la lumière". Et le vitrail aide à aspirer à l'ascèse, non seulement par les représentations qu'il permet, mais surtout par la transparence de la lumière et sa quasi décomposition en couleurs qui donne, au-delà de la vision du visible, un aperçu de l'invisible.
L'église catholique a développé une symbolique de la lumière dans la liturgie. L'orthodoxie a même créé une théologie de la lumière. Mais il n'y a pas que dans les églises chrétiennes que la lumière est assimilée non seulement à une manifestation de la divinité, mais à l'essence même du divin.
Abû Hamid Muhammad al-Ghazali (1058-1111) dans le Michkât al-anwâr ou "Le tabernacle des lumières", partage son livre en trois chapitres. Le chapitre 1 montre que la véritable lumière est Dieu et que le nom de lumière appliqué à un autre être est purement métaphorique et à ne pas prendre au sens propre. Le chapitre 2 développe ce que représentent le Tabernacle, la Lampe, le Verre, l'Arbre, l'Huile et le Feu. Le chapitre 3 traite de la signification de la parole du prophète: "Dieu a soixante-dix voiles de lumière et de ténèbres; s'il les enlevait, les gloires fulgurantes de sa Face consumeraient quiconque serait atteint par son Regard."
La première acceptation de la lumière est qu' "elle désigne ce qui est visible par soi-même et ce qui rend visible autre chose". Mais il ajoute: "Tu as donc compris qu'il y a deux sortes d'yeux : un œil externe et un œil interne... L'œil externe appartient au monde visible et c'est le soleil sensible ; le soleil intérieur appartient au monde du Royaume céleste, il s'identifie au Coran et aux autres livres divins révélés". Et il conclut : "La lumière véritable est celle par qui, à qui et à partir de qui les choses se révèlent et au-dessus de qui il n'y a plus de lumière qui serait sa source et à laquelle elle puiserait".
06:43 Publié dans 12. Trouvailles diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : lumière, divin, religion, architecture, vitrail | Imprimer
07/08/2013
La magie d'un instant
Ce matin, elle est descendue à la cuisine comme tous les jours. Après avoir allumé, elle mit la hauteur d’eau nécessaire dans le réservoir de la cafetière, retira l’ancien filtre, en inséra un nouveau et versa dedans ce qu’elle estimait être la bonne proportion pour obtenir un café ni trop fort, ni eau de vaisselle. Elle n’utilisait pas de doseur, estimant qu’elle devait seule en face de la machine à café prendre ses responsabilité en ce qui concernait le dosage. Elle s’assit, ouvrit son livre du moment et se plongea dans un autre monde déconnecté des tracas quotidiens comme des indigences du corps. Pendant ce temps, l’eau, réchauffée par les résistances, s’infiltrait dans le café en poudre bien tassé dans le filtre, le faisait gonfler, puis suintait en quelques gouttes dorées au-delà du papier blanc, et passait dans l’étroit goulet permettant à chaque goutte de la précieuse liqueur de tomber en gerbe au fond de la carafe. Progressivement, celle-ci se remplissait d’abord en étincelles giclant sur l’intérieur de la carafe, puis, dès l’instant où la surface du fond fut recouverte d’une couche de liquide d’une dorure rougeâtre, tendant vers le brun, en cercles concentriques s’écartant du centre pour se perdre sur le rivage de l’enveloppe et revenir amoindri à la rencontre d’un autre cercle émis par les jets de liquide venant du haut.
Ça y est, le café est prêt ! Elle avait sous les yeux ce breuvage délicat, non plus doré, mais presque noir, qui avait des reflets plus clairs si on sortait la carafe de son logement. En tendant le bras et ouvrant la main pour saisir la poignée, elle vit un éclair de l’œil droit, une sorte de feu interne, rouge comme une pivoine, qui ne dura qu’un très bref instant. Il venait de la fenêtre derrière la cafetière.
– Un reflet dans la vitre, c’est tout, pensa-t-elle.
Elle tendit à nouveau la main vers l’anse et cette fois-ci perçut un reflet bleu nuit, comme un scintillement dans la pâleur de la nuit qui devint vert. Curieuse et étonnée, elle se pencha vers ce feu tonifiant qui semblait la narguer. C’était maintenant un petit point rouge vif, incroyablement lumineux, comme une virgule suspendue dans l’air, avertissement d’une journée différente, comme un signe de bonheur ouvert sur le monde. Le jour était là, mais la lueur continuait son embrasement, resplendissante. Elle bougea un peu la tête, montant le menton de quelques millimètres et la flamme s’allongea, prenant des teintes successivement de rouge, jaune, vert et bleu. C’était un ruban qui s’étirait, n’émettant qu’une seule couleur, mais qui se transformait au fil du déplacement de la tête. Voulant en avoir le cœur net, elle se pencha vers la fenêtre, cherchant quel était cet éclat qui se propageait sur la vitre. Elle comprit que ce n’était pas celle-ci qui émettait le reflet. Au-delà, sur l’évier de pierre, se trouvait un petit panier contenant divers objets, dont un disque d’ordinateur de couleur acier qui créait la lueur fascinante. L’ampoule électrique du plafond se reflétait sur le disque, créant une réfraction et dispersant chaque couleur l’une après l’autre et non ensemble comme pour l’arc-en-ciel habituel. Bougeant précautionneusement la tête, elle ne se lassait pas de faire surgir d’abord un rouge brillant, chaleureux, chaud comme un incendie, puis un orange lumineux, ensoleillant, puis un jaune paille étincelant, à lécher, puis un vert plus pâlot, émeraude pure, enfin un bleu nuit éblouissant, pur, qui s’éteignait en améthyste sombre. Quelle merveille que ce reflet unique qui se contorsionnait sous ses yeux, prenant sur la largeur du disque un spectre irréel qui lui chatouillait l’œil et entrait dans son cerveau en feu follet. Pas d’autre pensée. Pas la moindre distraction. Le feu sacré de la lumière décomposée pour elle, ce matin. Surprise d’un jour nouveau, la main sur la cafetière, le regard fixé, qui rendait son corps transparent. Elle devenait l’esprit du feu. Elle était la lumière pure, franche, vivante en elle-même, irradiant sur le monde sa nouvelle virginité.
Quel instant ! Elle dut se forcer à se détacher, à remplir sa tasse de café, à y mettre une goutte de lait qui s’élargissait en nuage dans le liquide noir et lui donnait une teinte plus claire, virant à l’ocre. Elle but le breuvage chaud comme à une source vive, pensant intérieurement à un bain nettoyant son être intérieur pour lui donner l’aspect d’une glace réfléchissante sans l’ombre d’une poussière. Après avoir bu, elle quitta sa place, abandonnant le reflet magique et alla éteindre la lumière, mettant fin à un moment d’éternité.
08:21 Publié dans 12. Trouvailles diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : éternité, réfraction, lumière, enchantement, femme | Imprimer
15/05/2013
Baby & me : the new evian film
Pas mal cette pub. Discrète sur la marque, elle est un tour de force sur le montage. C’est la nouvelle pub d’Evian : renversante !
Oui, ils sont drôles ces petits bonhommes.
http://www.youtube.com/watch?v=pfxB5ut-KTs
07:58 Publié dans 12. Trouvailles diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : pub, eau, nature, bébé | Imprimer
07/05/2013
Le marché aux puces de Saint Ouen
Les puciers de Saint Ouen accueillent les chineurs dans de bien étranges demeures. Certains stands font moins de deux mètres carrés. L’homme y tenait debout, mais ne pouvait bouger qu’en sortant sur le trottoir. On peut presque se perdre dans ces marchés multiples. En 1920, Robert Vernaison, concessionnaire de droit de stationnement aux Halles de Paris, puis loueur de chaises des jardins publics parisiens, et propriétaire d’un terrain à Saint-Ouen, installe des baraques en bois préfabriquées sur ce morceau de zone appelé lieu dit "les 26 arpents". Devenu le marché Vernaison, il reste l’empreinte et l’enseigne de la chine de Paris et est le plus attrayant.
Un stand au coin d’une de ses minuscules rues. Il est fermé. C’est normal. Il est habité de squelettes. Le stand est propre cependant et ses locataires sont bien tenus, même s’ils datent d’un siècle écoulé. Ils surgissent de ce décor maladroit et font la fête avec entrain. Regardez ce couple élégant qui tourne avec aisance et dignité. N’est-il pas racé ?
Et cette femme au regard d’acier qui vous appelle : « Venez dans mon monde, entrez dans la boutique, participez à notre fête ! » Vêtue de plumes, elle rit de toutes ses dents en attirant le client.
Et si vous vous laissez tenter, vous vous retrouvez exposé en habit à la curiosité des passants qui admirent votre solennité. Alors vous buvez un verre de cognac pour vous consoler de ne pouvoir bouger. La cigarette reste autorisée dans ce lieu d’avant la loi anti-tabac.
Attention. la boutique est gardée par une femme de tête, chauve et tenace, qui vous barre le chemin. Cela vaut peut-être mieux !
Quel séjour ! Heureusement, je croise quelques mètres plus loin des moines bouddhistes qui marchent en procession, graves, portant la lumière du monde. Ils viennent de loin et de deux monastères différents. Merci, petits frères, d’accompagner au royaume des morts le vivant que je suis !
07:02 Publié dans 12. Trouvailles diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : société, femme, culture, chine | Imprimer
05/05/2013
Le monastère d’Alcobaca, au Portugal
http://www.youtube.com/watch?v=s9A0_kwUSzI
Splendeur et gigantisme. Cette abbaye vaut le détour. Y a-t-il autre chose à dire ?
Juste un mot : était-ce vraiment une abbaye dans laquelle vivaient une multitude de moines ?
Et si vous voulez en découvrir plus, regardez ce panorama :
07:05 Publié dans 12. Trouvailles diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : portugal, tourisme, unesco | Imprimer
25/04/2013
Papier et parfum
Une fois encore, le jardin du Palais royal et ses galeries s’efforcent de relancer l’attention des passants par d’extravagantes présentations. Malgré la beauté et l’élégance de son péristyle, il n’offre que peu de promeneurs à ses boutiques. Seuls les clients fortunés ou curieux ouvrent la porte de celles-ci pour découvrir divers objets attrayants ou fanés.
Admirons aujourd’hui ce parfumeur qui a trouvé le moyen d’attirer l’œil avec des décors insolites et gracieux. Peu de moyens, de l’imagination à revendre, des éclairages tamisés, qui conduisent le spectateur dans un monde féérique.
La première devanture, de boules et de papier journal, vous introduit dans la peau d’une princesse inca. Pourquoi inca ? Me demanderez-vous. Ah, je me souviens, elle me rappelle la sculpture bouchant l’entrée d’une galerie dans Le temple du soleil, une des aventures de Tintin. Ce regard fixe et inquiétant de la princesse aide à mieux sentir les délices olfactifs de son parfum.
La seconde devanture rappelle les corridas espagnoles et les señoritas qui cachent leur visage à l’ombre des plis de leur éventail. La chaleur aidant, ceux-ci vous voilent la réalité jusqu’à ne vous montrer que des frémissements de plis et de ronds. Le parfum aidant, vous succombez à leurs charmes.
La troisième, que l’on pourrait intituler « l’information », est bien aussi une charmante. Mais elle est enfouie dans la profusion médiatique et ne respire que l’encre et le papier. Elle n’a pas droit au parfum qui pourtant se sert d’elle pour se vendre.
Enfin la dernière ouverture sur ce magasin magique est cubiste tout en restant informationnelle. Mourir enfouie sous les paquets-cadeaux, quelle belle fin, n’est-ce pas ?
06:48 Publié dans 12. Trouvailles diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : magasin, décoration, parfum, femme | Imprimer
17/04/2013
Eurydice mourante, de L. Nanteuil
La galerie Colbert, rue Vivienne, ainsi dénommée parce qu’elle fut, à ses débuts, propriété de la famille du même nom, est splendide de néo-classicisme.
« Dans la première moitié du XIXe siècle, le quartier, profitant de l’animation des cafés, commerces et maisons de jeu du Palais-Royal, change de dimension : la rue Vivienne prolongée jusqu’aux grands boulevards assure désormais le lien avec ce secteur en développement. Il devient un des lieux privilégiés d’implantation des passages couverts, nouveaux espaces, à la fois publics et privés, offrant aux piétons des chemins protégés et aux marchands de nouveautés des vitrines. Les galeries Colbert et Vivienne constituent le premier maillon du réseau de passages qui relient le Palais- Royal au boulevard Montmartre. Sans raccourcir le chemin, elles permettent d’éviter les encombrements de la rue Vivienne, une des plus fréquentées de la capitale, ainsi que la boue et les crevasses qui sont alors courantes. » (Source : http://www.inha.fr/spip.php?rubrique273).
Elle abrite l’Institut National d’Histoire de l’Art (INHA). Elle est souvent déserte, alors que sa voisine, la galerie Vivienne, est un lieu de passage et d’achats.
Sous la grande verrière, au centre de la rotonde, se tient une reproduction d’Eurydice mourante, mais encore bien en vie puisqu’elle se tient debout. L’original est au Louvre et en marbre. Elle émeut d’être là, seule dans cette galerie déserte, n’ayant plus la force de lever la tête vers cette verrière qui donne sur le ciel bleu.
Son sculpteur est Charles-François Lebœuf dit Nanteuil ou Lebœuf-Nanteuil, né à Paris en 1792. Il est l'élève de Pierre Cartellier (1757-1831). Son marbre, "Eurydice mourante", réalisé à Rome en 1822 et présenté au Salon de 1824, est acheté par le roi pour le jardin du Palais Royal. A l'exposition de 1827, Lebœuf-Nanteuil obtient la médaille d'or de première classe. Il reçoit de nombreuses commandes pour Paris, notamment le fronton de Notre-Dame de Lorette, les bas-reliefs situés au-dessus des portes du péristyle du Panthéon et plusieurs sculptures pour la décoration du Louvre.
En aviez-vous entendu parler ? Et pourtant, elle est belle cette Eurydice. Elle n’a pas le corps parfait tel qu’on l’entend actuellement, mais elle a la grâce de sa pose et la singularité de son attitude. Statue classique, elle donne néanmoins une impression de modernité indéfinissable. Allez la voir, cela lui fera plaisir !
06:20 Publié dans 12. Trouvailles diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : sculpture, classicisme, promenade, art | Imprimer
15/03/2013
Danse soufi sur l’ennéagramme
Retour aux soufis en passant par Gurdjieff, cet étrange personnage. C’est très probablement lui qui a inventé cet ennéagramme. Le livre d’Ouspensky « Fragments d’un enseignement inconnu » (Stock, 1974) en donne une explication p.404.
http://www.youtube.com/watch?v=Qid15QgzXSI
Mais on est vite perdu dans les commentaires d'Ouspensky qui mêlent la théorie des octaves musicales mettant en évidence la discontinuité des vibrations et la déviation des forces à celle des chocs additionnels. Pour Gurdjieff, l’ennéagramme est le symbole universel du mouvement perpétuel : « Pour être compris, il doit être pensé comme étant en mouvement, comme se mouvant. Un ennéagramme figé est un symbole mort ; le symbole vivant est en mouvement. »
D’où cette danse qui met en évidence la ronde des hommes dans le mouvement perpétuel et l’importance pour ceux-ci d’entrer en harmonie avec ce mouvement.
Arrêtons-nous simplement à la beauté et à l’harmonie de la danse des hommes sur le chemin de l'éternité.
06:59 Publié dans 12. Trouvailles diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : gurdjieff, philosophie, spiritualité | Imprimer
09/03/2013
Le pissenlit
Premier jour de printemps, ou presque ! La nature s’ouvre à nouveau après ces mois d’hibernation. Vous vous promenez dans la douceur nouvelle de l’air et marchez dans votre jardin le nez en l’air. Parfois vous regardez au sol pour ne pas faire de faux pas sur une surface inégale. Et aujourd’hui vous remarquez ces tendres pousses en étoile. Ces sont de petites feuilles dentelées qui semblent sortir de la terre sans tige.
D’ici quelques jours votre jardin se couvrira de fleurs jaunes. Il sera presque trop tard pour en faire une salade. Son goût est amer certes, mais en mêlant quelques œufs durs et une vinaigrette à cette profusion vous vous régalerez. Comme son nom l’indique le pissenlit est diurétique. Mais il est également tonique, stimulant, laxatif, dépuratif. Votre pharmacie dans votre jardin, gratuitement. Non seulement vous mangez les feuilles au printemps, mais vous préparez également les fleurs en tisane tout l’été, et pouvez faire une sorte de chicorée en automne avec les racines. Elles sont longues (jusqu’à 50 cm) et difficiles à arracher, mais vous les utiliserez tout l’hiver après les avoir fait sécher dans votre four.
Pourtant c’est une plante inconnue des livres de médecine jusqu’au XVIème siècle. Les grecs et les latins ne le mentionnent nulle part. Elle porte des noms divers : dent de lion, liondent, laitue de chien, couronne de moine, florin d’or, salade de taupe, etc.
Profitez donc de ces bonnes feuilles avant qu’elles ne deviennent trop acerbes. Mais si vous en avez dans votre jardin, et c’est probable, ne vous inquiétez pas, la tondeuse leur redonnera la douceur des jeunes pousses et vous pourrez en profiter jusqu’à l’été. Et s’il pousse trop vite, les enfants pourront faire voler leurs akenes, ces poils qui semblent de la neige au moindre coup de vent.
07:47 Publié dans 12. Trouvailles diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : phytothérapie, cuisine, nature, printemps | Imprimer
01/02/2013
Désirs et reflets
A l’image de la vie : Les fruits et légumes bien encadrés dans leurs cases. Ils servent à la cuisine du restaurant et montrent leur aspect frais et réel.
Mais tout ceci se trouve derrière une vitre qui reflète le monde extérieur. On ne peut voir à l’intérieur ce que font les cuisiniers. S’agitent-ils ? Méditent-ils et laissent-ils légumes et fruits se couper, se saler, se prélasser dans l’eau chaude jusqu’à devenir une soupe bienfaisante ou un accompagnement de viande ? C’est l’alchimie mystérieuse de la vie, l’apprentissage permanent des décisions qui ne vous appartiennent pas.
Et le monde défile sous le regard des légumes, sans les voir, sans en sentir la subtile odeur et contempler leurs couleurs éclatantes. La beauté à portée de main. Mais que faire des aveugles passants qui ne savent pas la richesse qu’ils côtoient ?
Signalons cependant que nous n’avons pas goûté la cuisine de ce restaurant. La vue de ses trésors nous a rassasiés.
07:12 Publié dans 12. Trouvailles diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : photo, paris, vie | Imprimer
26/01/2013
Ils ont perdu la boule !
Des extra-terrestres à la mode, quelle aubaine !
N’est-ce pas nos attitudes habituelles ? Bien mis, en conversation, mais chacun dans son monde. La face blindée dans ce lieu magnifique, les jardins du Palais Royal. Ils ne savent pas qu’ils sont là, les yeux fermés sur leur complétude. Et pourtant ils reflètent ces jardins, ces arbres, les jets d’eau, mais à leur manière, en rond, laissant leurs pensées errer en boucle.
Et ceux-ci, que sont-ils, jeunes hommes ou femmes déjà ? Un délicieux mélange pour vendre, encore, vêtements et colifichets. Ils réfléchissent la nature dans leur magnificence pour mieux attirer le client dans ce monde clos des achats frénétiques. Mais tout ceci avec élégance.
En ces jours de solde, nous sommes conviés à une évasion hors du temps. Se perdre dans les rêves les plus fous, les atours les plus séduisants, et marcher sur la tête, les yeux dans les nuages de la cupidité.
07:36 Publié dans 12. Trouvailles diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : soldes, société, attitudes, clients | Imprimer
09/01/2013
Au fil des boutiques : JB Guanti, gantier
Nous avons déjà eu l’occasion d’admirer certaines boutiques de gants (voir au fil des boutiques : la maison Fabre, du 18 mai 2011, http://regardssurunevissansfin.hautetfort.com/archives/category/decouvertes/index-1.html). Ne méritent-ils pas notre admiration ces boutiquiers qui s’efforcent de transformer en œuvre d’art leur devanture et de nous faire rêver devant les fantasmes qu’ils proposent.
La boutique est colorée, vivante, et les gens s’arrêtent pour y jeter un œil curieux avant de continuer leur chemin. Elle ne désemplit pas de personnes aux mains nues qui regardent tristement leurs doigts refroidis et bleutés et qui ressortent revêtus de cuir ou de laine de toutes les couleurs.
Nous assistons à un ballet bien réglé de mains ordonnées, strictes, qui serrent dans l’une l’autre échevelée, comme le font les BCBG qui ne peuvent mettre ensemble leurs deux gants, prêts à baiser la main d’une beauté survenant sur le trottoir. Cette fois il s’agit d’un bataillon de jeunes gens attentifs, fiers de mettre en évidence leur attention aux jolies filles de la rue Tronchet. Un environnement tel que la séduction devient jeu d’enfant.
Les messieurs plus sérieux sont à l’écart et mettent en évidence leur magnificence inégalée. Certes, même comportement, même attitude, mais avec quelle grâce et lenteur. Le sérieux devient jeu de séduction d’un autre âge, mais les gants restent la qualification des séducteurs quadragénaires du quartier. Quartier chic, donc soumis aux pressions du paraître et de l’élégance visible. Raideur des articulations, mais souplesse et tenue du cuir !
Mais les dames ne sont pas en reste !
Certaines restent sportives, aériennes, et se chaussent de gants à trous ou de peaux de gibiers coûteux.
D’autres se veulent plus féminines et classiques, et s’affublent de gants à pois. Quel effet au bout des doigts !
Enfin, certaines n’hésitent pas à paraître sérieuses, femmes d’affaires, mais strictes jusqu’au bout des ongles, revêtues de noir assaisonné de bleu ou rose fuchsia se dissimulant derrière l’élégance classique.
Et chacun, homme ou femme, repart fièrement, ganté de neuf, sortant de la boutique comme un prince du siècle dernier, remerciant les vendeurs de leur attention charmante.
07:40 Publié dans 12. Trouvailles diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : mode, élégance, société | Imprimer
11/12/2012
Le credo du créateur (Paul Klee, Théorie de l’art moderne, Editions Gauthier, 1968)
« L’art ne reproduit pas le visible ; il rend visible ».
C’est ainsi que Paul Klee pose son postulat, et il explique : « Tout devenir repose sur le mouvement. (…) L’œuvre d’art naît du mouvement, elle est elle-même mouvement fixé et se perçoit dans le mouvement (muscle des yeux) ».
En cela, il s’intéresse à la construction du tableau qui se fait dans le temps et l’espace, pièce par pièce comme il le dit. Mais le spectateur fait trop souvent le tour de l’œuvre instantanément. Et il rate l’œuvre, car le mouvement est donné préalablement à tout. « La paix sur la terre est un arrêt accidentel du mouvement de la matière. Tenir cette fixation pour une réalité première, une illusion. »
Pour cela, le peintre moderne utilise le graphisme : « Plus pur est le travail graphique, c’est-à-dire plus d’importance est donnée aux assises formelles d’une représentation graphique, et plus s’amoindrit l’appareil propre à la représentation réaliste des apparences. »
C’est donc tout ce travail d’abord imaginaire, puis gestuel, qui produit l’œuvre d’art. La difficulté est de le mener de bout en bout, dans l’harmonie du mouvement. Seul l’équilibre du mouvement permet l’obtention du repos. C’est ce que Paul Klee appelle la « polyphonie plastique ».
La peinture est avant tout manuelle. La pensée conçoit, mais seule la main, le corps, créent. En musique, la création s’effectue en deux temps, un temps de mise au monde, travail de composition qui se transcrit par l’écriture de la partition, et un temps de manifestation par l’interprète qui anime la musique et la fait connaître. Pour le peintre, ce travail s’effectue en une seule fois et le spectateur doit en reconstituer les étapes.
Comprendre un tableau, c’est aller au-delà de la première impression et comprendre pourquoi et comment il fut peint ainsi. Ainsi le tableau rend visible sa beauté et par là la beauté du monde, car, comme le dit encore Klee, l’art est à l’image de la création, c’est un symbole tout comme le monde terrestre est un symbole du cosmos.
07:52 Publié dans 12. Trouvailles diverses, 21. Impressions picturales | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : théorie de l'art, création, peinture, musique, art moderne | Imprimer
09/10/2012
Vous montez ou vous descendez ?
Cette photo prise dans l’escalier de la mairie de Brantôme n’est pas sans rappeler les gravures d’Escher où les personnages montent, descendent, errent dans les escaliers fantomatiques.
Admirons également cette photographie d’Ezekiel (http://www.mayoz.fr/photographe/ezekiel/) :
Serait-ce une nouvelle forme de labyrinthe ? Un monde sans gravité qui nous entraîne vers des espaces sans fin et non plus seulement des surfaces ?
De quoi nous interroger comme le fait Jean-Pierre Luminet sur la forme de l’univers :
http://luth2.obspm.fr/~luminet/LeMondeSciences.pdf
07:31 Publié dans 12. Trouvailles diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : univers, sciences, photographie, labyrinthe | Imprimer
07/09/2012
Robert Tatin : la Frénouse (voir les 6 et 18 août)
"Ainsi que tous les jeunes gens de mon âge je m'inquiète de la Religion, de la Mort, de la maladie, de la santé, de la guerre, de la misère... Je m'inquiète surtout du bonheur du malheur - mais considère toutes ces choses très loin - pour plus tard - pour demain ?... J'ai même besoin d'oublier toute cette agitation du monde afin de me faire, premièrement, un corps sain, un esprit clair et un Cœur Humain. J'ai même Peur de ce trop grand Idéal que d'aucune philosophie m'apporte avec l'intention de m'Eclairer. Pourtant une LUMIÈRE insolite me visite, me visite et me laisse une lueur... Véritable "Conscience" Véritable responsabilité d'où répondre... la réponse... l'écho... D'où faire ART... afin de communier avec tous les enfants du monde..." (Robert TATIN)
Papin avait l’âme d’un créateur. Il aimait tout faire et n’était pas comme ces artistes qui donnent des directives à une poignée de petites mains qui sont ses exécuteurs de « chefs-d’œuvre ».
Il a été architecte :
"Nous sommes en présence d'un module architectural imaginé en fonction de la Nature environnante, par essence non finie. Une initiative, comme celle entreprise par cet Artiste, peut entraîner une continuité architecturale. L'esprit de cet ensemble comporte d'ailleurs en lui-même un exemple à suivre quant à l'Adaptation de la Nature, apportant un élément nouveau pour les Urbanistes et les Architectes, recherchant depuis le début de ce siècle, la forme, le volume et les caractéristiques d'édifices pouvant s'allier avec l'environnement Naturel..." (Lise TATIN)
Il a été céramiste :
TATIN qui était depuis longtemps sur la piste d'un matériau nouveau est arrivé à constituer ce matériau avec de la terre mêlée de colorants qu'il "tape" sur des poteries et qu'il travaille alors comme une vraie peinture au pinceau, au couteau, au doigt. La cuisson rend la peinture inaltérable. TATIN s'enorgueillit d'être à présent, non seulement "sculpteur de terre" mais "peintre de terre". Il y a là, en effet, une vraie révolution dans la céramique. (Pierre GUÉGUEN, 1954)
Mais il a surtout été peintre :
"...Il n'y aurait qu'à regarder et à voir, si tu peux regarder et voir tes propres yeux: tu sais peindre. Il n'y a pas à savoir dessiner, tu vois bien, alors tu trouves les moyens de dessiner à ta mode. Il s'agit de trouver par toi-même tes propres signes, il s'agit encore de signifier tes propres signes, avec foi, avec violence, avec la paix, avec tendresse et autres et autres. Il s'agit de peinturer en se souvenant de la parole de Chesterson : "tout enchaînement d'idées peut conduire à l'extase, tous les chemins mènent au royaume des fées". "Le progrès en peinture n'a rien à voir avec ce que la T.S.F. appelle progrès, trop de traités de peinture tous emplis de grandes bonnes volontés se montrent trop épris d'un art X ou Y et pas assez de l'art sans adjectif sauf celui de RÉEL. Voir c'est être présent, opter c'est voir, voir serait confortable avec choisir ou opter, optimisme alors...Peut-être". (Robert TATIN)
Le sculpteur :
Robert Tatin a utilisé deux manières : la statue et le bas-relief. Il travaillait d’abord l’idée, puis la technique. L’idée, c’était sa conception du monde, des relations entre l’homme et l’univers, entre l’homme et l’image que l’homme se fait de lui-même, entre les hommes eux-mêmes et plus profondément entre l’homme et Dieu. La sculpture n’avait rien de représentative des attitudes ou expressions. Elle s’efforçait de donner sur un bloc l’essentiel de ce qu’avait été celui qui était représenté. Les bas-reliefs sont encore plus symboliques, il ne représente que des idées. Ils sont l’expression de la conception du monde de Robert Tatin. Ses voyages lui ont permis de progressivement atteindre une connaissance des cultures et d’en faire une synthèse personnelle. Ses bas-reliefs en donnent des flashs. Comment définir ce personnage à cheval, à la fois chevalier, roi mage, prince hindou ou sorcier africain ? Le rêve et la réalité confondus dans des scènes multiples et oniriques.
Robert Tatin mérite notre respect. Il a vécu sa vie comme il l’entendait, se moquant des racontars et du qu’en dira-t-on. Il a bâti son jardin secret qu’il partage maintenant avec nous et cela fait du bien de savoir que des hommes vivent leur rêve dans la réalité quotidienne.
05:03 Publié dans 12. Trouvailles diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : peinture, sculpture, art brut, symbolisme | Imprimer
23/08/2012
L'origan
L’origan ou marjolaine sauvage est un condiment très utilisé dans les pizzas, à défaut de véritable marjolaine cultivée. Et l’on en voit partout. Rien ne vous coûte de le ramasser au bord des chemins un peu partout en France. Il forme de gros bouquets verts aux fleurs rouges-rosés, avec un duvet presque blanc. On a envie de les caresser parce que leur contact a la douceur de la peau des enfants. Et pourtant, dès que les fleurs commencent à vieillir et sécher, elles deviennent râpeuses. On ne se lasse pas d’en cueillir pour en saupoudrer les biftecks et d’autres viandes ou même plats de légumes. Certes, l’origan n’a pas l’odeur forte de la marjolaine, mais une senteur diffuse, comme un arrière-goût de la madeleine de Proust, qui ne laisse pas indifférent. L’origan vient des montagnes et en constitue un ornement comme le dit son nom de oros, montagne, et de ganos, éclat. Les feuilles fraîches ou sèches servent dans les potages, les sauces, les plats mijotés, les farces, les grillades, les crudités etc... Elles aromatisent les charcuteries ou les vinaigres.
La marjolaine calme les chagrins, même ceux d’amour. Quelle plante passionnée. En est-il de même de l’origan ? Ce n’est pas colporté. Il calme le système nerveux et a une action antalgique. Si vous avez un torticolis, faites-vous un coussin de fleurs et feuilles d’origan chauffées à la poêle et mettez-le autour du cou. Vous irez mieux et très vite.
Alors lorsque vous vous promenez dans la campagne, cherchez de l’origan, cueillez leurs grandes pousses, laissez-les se déshydrater dans un endroit sec et recueillez dans un bocal fleurs et feuilles séchées dont vous vous servirez pour agrémenter vos plats d’un goût subtil, ténu, qui vous rappellera les chaudes nuits d’été et les matins heureux, heure la plus favorable à sa cueillaison.
L’art des simples est un art subtil, fait de savoir-faire et de soins, mais combien il est gratifiant de partir en cueillette, le panier à la main, et ramasser les herbes le long des chemins (jamais le long des routes), de s’arrêter pour regarder dans le livre des plantes de quelle espèce il s’agit, voire d’en goûter une fleur ou une feuille. On peut aussi en mettre quelques-unes dans la salade pour en relever le goût. C’est cela la vraie écologie et non les leçons de prétentions soit disant scientifiques qui viennent de gens qui n’ont jamais vécu à la campagne.
07:51 Publié dans 12. Trouvailles diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : nature, écologie (la vraie), soin, cuisine | Imprimer
18/08/2012
Robert Tatin (2ème partie, voir la première le 6 août)
Entrons maintenant dans le musée.
Mais est-ce un musée, cette bâtisse étrange qui ne semble tenir debout que grâce aux mille sculptures qui l’ornent : colonnes de personnages, chapiteaux de bas-reliefs, langue rouge du dragon avec ses dents en étoile surmonté d’une famille pour laquelle l’enfant est le plus grand et uni les parents. Quelle profusion d’idées, de symboles, d’aspirations !
La porte des géants de la peinture : Rembrandt, Van Gogh, Léonard de Vinci, Goya et Delacroix (pourquoi eux et pas Picasso, par exemple ?). Elle n’ouvre sur rien, mais elle impressionne par ses personnages hiératiques, protégés par leur femme qui semblent prier pour eux. Leurs yeux de voyants regardent l’univers, environnés des songes en bas-relief en creux.
Alors on se laisse guider, absorber à l’intérieur. C’est petit, cela ne fait pas musée, mais cour intimiste pour illuminés qui méditent sur le monde et l’homme. Les portes se reflètent dans l’eau du bassin, vertes, immobiles, immortelles. On entre dans le jardin des méditations. Disons qu’il s’agit plutôt d’un jardin de la rêverie et de l’imagination. Il faut se laisser guider par les images de pierre, les volumes enchantés de personnages ubuesques. C’est une sorte de cloître : « Au nord s'élève une statue haute de 6 m 50, appelée "Notre-Dame-Tout-Le-Monde", lien entre le ciel et la terre. Son socle plonge ses racines dans l'eau du bassin source de vie » (guide du musée)
A l’est, la "Porte du Soleil", se reflétant dans le bassin, est formée de deux statues-colonnes, qui évoquent l'union de l'homme et de la femme selon le Tao : le Yin et le Yang. « Les deux géants Yin et Yang (Féminin et Masculin) supportent le ciel où tourne la roue du destin, entre les cornes de l'Imagination et de la Raison. Yang, à droite, porte la fille du Monde sur ses genoux, tandis qu'à gauche, un garçon est assis sur ceux de Yin ». Le pilier central représente l'unité Adam-Eve, Eve-Adam. « Ici, il n'y a plus de dualisme entre la femme d'un côté, l'homme de l'autre (...) On est dans l'unité. » Sur le tympan, « le disque solaire se partage et se donne en rayons brillants et dispense son énergie de Yang pur en pleines noces de Yin-Yang. »
La « Porte de la lune » représente la Muse de l’Unité "mèrant" le Monde, qui appuie le pied droit sur le cube de la Raison et le gauche sur le croissant de l'Imagination. Assis sur les genoux de la Muse, un garçon et une fille se nourrissent aux sources de la vitalité créatrice. Robert Tatin dit : « J'essaie de retrouver les racines de la langue... Là, nous sommes dans les racines, pas dans les composantes. Les racines, c'est comme nourrir l'arbre, c'est comme nourrir l'Homme... mais les latins, à force de tirer sur la mamelle, un jour ils l'ont vidée. Alors il faudrait retrouver la Femme, il faudrait retrouver la Muse, la Mère mèrante ... ».
S’ouvre dans cet enchevêtrement les portes donnant accès au musée de peintures, céramiques et autres créations de Robert Tatin. Nous en parlerons une autre fois.
07:06 Publié dans 12. Trouvailles diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art brut, société, fantastique, peinture, poésie | Imprimer
06/08/2012
Robert Tatin, le pape du paradoxe (1ère partie)
http://www.musee-robert-tatin.fr/
Robert Tatin, le pape du paradoxe. Oui, je pense qu’on peut le définir ainsi. Qu’est-ce qu’un paradoxe ? Un raisonnement dont la conclusion contredit les prémisses, ou qui justifie deux conclusions contradictoires, et qui est le plus souvent porteur de vérité (Encyclopédie Philosophique Universelle, PUF, Paris, 1990, p.1848). Ce n’est ni un véritable artiste, ni un véritable artisan. Il se moque des catégories et voit le monde à son image, échevelé et créatif.
Son art : nous révéler la complexité inattendue de la réalité. Il met en évidence la fonction paradoxale du sculpteur : celui-ci détache-t-il au ciseau tout ce qui ne ressemble pas à son sujet ou s’attache-t-il à faire apparaître ce qui sera son sujet ? Il ne s’agit pas de sophisme, Robert Tatin n’est pas un manipulateur, il n’a pas de raisonnement trompeur. Il raisonne comme il l’entend, que cela plaise ou non à ceux qui l’écoute et regarde ses œuvres. Sous des dehors enfantins parfois, toujours prolixes, il met en évidence la singularité du monde, à la fois palpable dans sa réalité physique et gonflé d’une vérité mystique qu’il faut toujours deviner sans jamais la trouver.
Je ne vous raconterai pas sa vie, ni toute son œuvre, considérable. Ce qui est intéressant, c’est le cadre, l’espace de sa réflexion concentrée sur son lieu de travail pendant ses vingt dernières années. L’entrée de ce lieu est la grille qui donne sur la route et que l’on n’emprunte pas, malheureusement, puisqu’il faut « passer par la caisse ». Elle ouvre sur un chemin pavée bordée de statues prolifiques. Comme l’explique le site Internet consacré au musée de Cossé-le-Viven : « Ces premiers géants de ciment coloré nous plongent dans l'aventure humaine des premiers temps de l'Histoire, avec Vercingétorix, jusqu'aux héros légendaires dépassant les limites terrestres imaginés par Jules Verne. De nombreux artistes y sont également représentés, non seulement pour leur engagement déterminant dans l'Histoire de l'art, mais également comme les représentants de l'extraordinaire génie des hommes toujours en quête d'un idéal de perfection. »
Ces statues représentent les différentes époques de la vie de l'artiste. Devant les statues de Jeanne d'Arc et de Vercingétorix, on entre dans l'univers d'un enfant de 10 ans qui fait connaissance avec l'histoire de France.
Puis, sont représentés les questionnements de l’adolescence au travers des verbes Etre et Avoir.
Suivent alors Ste Anne et la Vierge de l'Epine, références à la mystique et à la métaphysique qui prolongent cette période de l'adolescence avec les trois interrogations : d'où venons-nous? Que faisons-nous? Où allons-nous ?
Le regard du visiteur sur la statue suivante, le Maître Compagnon, évoque la voie empruntée par Robert Tatin : celle des constructeurs de cathédrales symbolisant l’initiation et la quête de perfection.
C’est ensuite l’hommage au monde de l’art des XIX et XXème siècles. André Breton, Le Douanier Rousseau, Gauguin, Seurat, Auguste Rodin, Léonor Fini, Alfred Jarry, Ubu Roi, Toulouse Lautrec, Valadon-Utrillo, Pablo Picasso et Jules Verne sont autant de points de repère pour "l'oeuvrier" Robert Tatin, partagé entre les créations artistiques et artisanales.
Alors devant le visiteur ébahi, s’élève le musée, vision onirique de Robert Tain qui exprime sa compréhension paradoxale de la vie et du monde.
Nous en reparlerons.
07:43 Publié dans 12. Trouvailles diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art brut, société, fantastique, peinture, poésie | Imprimer
10/07/2012
Drôles de machines !
http://www.youtube.com/watch?v=b694exl_oZo&feature=relmfu
Quelques tubes de plastique qui prennent vie, qui marchent comme un insecte. On est dans un autre monde, celui de l’imagination, de la sensation, de l’équilibre. On dirait des dromadaires, des éléphants, mais aussi des cerfs-volants ou des araignées.
Théo Jansen, l’inventeur de ces insectes tubulaires, est néerlandais et pratique l’art cinétique. Le moteur en est le vent.
« La locomotion est assurée par un « système de ventre à vent » mis spécialement au point par Jansen : de l’air comprimé — le carburant — emmagasiné dans des bouteilles, est ventilé par le truchement de simples clapets dans de petits tubes qui s’enfilent les uns dans les autres ; l’actionnement des pistons amorce la mise en marche des arthropodes géants. Pour calculer avec exactitude la longueur des différents tubes de plastique nécessaire dans cette mécanique, Jansen a utilisé des programmes de simulation extrêmement complexes – ses « squelettes préhistoriques » aux formes anachroniques en revanche ne nécessitent ni électricité ni assistance informatique.
Jansen a créé à ce jour sept générations d’animaux de plage, de l’insecte au mastodonte. La première était représentée par un organisme très simple qui s’est complexifié au fil du temps. L’actuelle est composée de géants polymorphes qui, malgré leur masse de plusieurs tonnes, ont gardé le pied léger. Ces créatures sont le résultat d’une fusion de l’art de l’ingénieur et des principes de la biologie. Et elles nous font rêver : ne proposent-elles pas pour l’avenir un concept alternatif de locomotion ? » (Arte)
Quelle poésie dans ces drôles de machines. Je vous laisse regarder et découvrir dans les autres vidéos ces monstres aussi amusants que ceux qui sont présentés ici :
http://www.youtube.com/watch?v=Di91H_Twqww&feature=related
http://www.youtube.com/watch?v=xjOJPBDwyxM&feature=related
07:49 Publié dans 12. Trouvailles diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : art, culture, technologie | Imprimer
15/06/2012
"Symbiosis", par le ballet Pilobus
http://www.youtube.com/watch?v=FOZ6KnVPvIU
Etrange, très étrange. S’agit-il de danse, d’humains, d’animaux, voire de plantes, sont-ils un ou deux, peut-être plus ?
On peut penser aux crabes, aux insectes, s’ébattant dans le sable ou la boue. Ils sont mécaniques, primaires, mais aussi, parfois, tendres, envoûtants, extatiques. Mais ils sont toujours insolites, inattendus. Un équilibre… sur le fil du rasoir.
Et ce spectacle sur une musique minimaliste : Arvo Part, George Crumb, de grands noms de compositeurs américains.
Dépaysement, exploration de mondes nouveaux, normalité ou anormalité ? On ne sait plus, on se laisse bercer, captiver, séduire par cette danse qui n’en est pas une et qu’on ne peut nommer.
07:19 Publié dans 12. Trouvailles diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : danse, musique | Imprimer
24/05/2012
L’art urbain ou street art : quai de l’Aisne (3ème partie)
Rappelons que l’art urbain est apparu en France à partir de mai 68 et c’est dans les années 80 que Jack Lang, ministre de la culture, lui a donné ses lettres de noblesse, si l’on peut dire. C’est vrai, je vous l’accorde, s’agit-il réellement de beauté lorsqu’on voit ces signatures torturées envahir nos bâtiments, dénaturant leur beauté occidentale de symétrie et de richesse. Mais est-on réellement à Paris et non sur d’autres continents devant ce bâtiment désaffecté, vestige d’une industrialisation à outrance de la banlieue, puis abandonné aux passants de nulle part qui y trouvent de quoi épancher leur passion pour le tag ou le graffiti. Seul reste le ciment brut qui sert de toiles à ceux qui n’ont pas les moyens de s’en payer et qui peuvent ainsi montrer au monde leur rage et leur art, s’ils en ont. Car, il faut l’avouer, comparer ces gribouillis et les peintures préalablement montrées est une tromperie certaine.
Alors pour finir, regardons cette maison de Pantin, sur le canal, quel bonheur ! Un éclatement de génie journalistique au-dessus de la fenêtre du restaurant.
Oui, admirons-la en grand ! C’est l’œuvre d’un professionnel. C’est moins onirique, mais c’est un rappel des bandes dessinées de notre enfance.
07:58 Publié dans 12. Trouvailles diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : société, art urbain, street art, tag, trompe l'oeil | Imprimer
11/05/2012
Le cent-quatre (104 Rue d'Aubervilliers 75019 Paris)
Le cent quatre, c’est à la fois une usine, une grotte, un endroit fou, un cirque, une détente, une spontanéité, bref un lieu à nul autre semblable !
On y pratique toute sorte d’arts ou d’artisanats, voire d’artifices ou même d’artefacts. Ce ne sont pas des artistes professionnels installés dans la vie, de simples amateurs, déjà avancés, un peu perdus, la tête dans les nuages, les pieds pas forcément sur terre, mais avec un cœur qui s’évade par les verrières. Ils pratiquent la musique, la danse, le théâtre, les arts visuels, la magie. Ils sont résidents dans les bâtiments (ils ont bien de la chance !). A côté d’eux, et c’est étonnant cette promiscuité insolite, des entrepreneurs, chercheurs, regroupés dans un incubateur (les poussins sortent sur leurs pieds, un peu ahuris de se trouver là !).
Le bâtiment fut édifié par le diocèse, mais repris par l’Etat et transformé en Service municipal des pompes funèbres : tous avaient enfin droit à un service funéraire. En 2008, il ouvre au public avec une toute autre vision, en faire un espace de création, d’expériences et d’innovations dans le monde contemporain.
Il y a beaucoup de délire créatif, se contentant souvent de créatique (techniques de stimulation de la créativité), de mouvements pas forcément ordonnés, de singeries, parfois drôles, de contorsions « époumonantes ». On y trouve aussi un chef étoilé qui pratique la cuisine du quotidien et de l’extraordinaire, dont la carte se veut, est-il indiqué, éthique. Il y a bien sûr une librairie, dite du merle moqueur, bien achalandée, de livres intéressants, mis sur le marché par de petits éditeurs, emplis de poèmes fous et d’histoires désopilantes, côtoyant des monuments de pensées turbulentes.
Lieu insolite, décoiffant, peuplé de toutes sortes d’individus, vêtus parfois bizarrement, ou d’animaux, à poil et à plume. Le ciel se montre au-delà des verrières, serein, tiédasse, grisou ( ?), comme d’une humeur interrogative. Jusqu’où va-t-on ou jusqu’où peut-on aller ? Mais ce grenier caché est un trésor, malgré tout bien ordonné par des employés municipaux qui sont pléthores.
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30/04/2012
L’art urbain ou street art : passage Brady (1ère partie)
Dans le passage Brady (Passage situé entre la Rue du Faubourg St Denis et la Rue du Faubourg St Martin, Paris 10), il y a une cour intérieure, moche, mais avec une peinture extraordinaire d’imagination et de délire pictural.
D’abord, sur la droite, ce singe qui tient une truite. Ce n’est pas seulement un singe, c’est un avatar. Il est vieux, aux poils blancs, il est revêtu d’une sorte de couronne sacerdotale et semble offrir à son dieu le poisson. De plus, il paraît sortir de l’eau, comme une apparition bizarre à un plongeur qui fait un cauchemar !
L’autre peinture est encore plus délirante. Une sorte de dieu, Vishnou le protecteur, tient dans ses mains multiples un certain nombre d’attributs qui sont ceux de la divinité : la conque, expression de la création, le lotus qui symbolise la pureté, le disque Sudarshana mettant en évidence la puissance de l’esprit, l’arc, la massue. Il porte la couronne qui représente la réalité incontournable. Mais ce dieu n’a pas la tête sereine des vishnou(s) habituels. C’est une nouvelle incarnation à la mode de l’an 2000 dans une ville occidentale, peinte par un artiste délirant. Il a la tête d’un africain du 10ème arrondissement et chevauche un tigre.
Sur sa droite, sautant l’arbuste qui pousse entre les pavés, un Lucky Luck mortel (ou immortel ?), à cheval sur un animal mythique, sorte de dragon dont on ne voit pas la tête, revêtu d’une couverture amérindienne, mais mettant en valeur les gratte-ciels newyorkais.
Le Dieu terrible et la mort montée sur son cheval ailé. Quel programme !
06:17 Publié dans 12. Trouvailles diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : regarder, photo, poésie, paris | Imprimer
27/03/2012
Le jardin du Panthéon bouddhique
Il se situe avenue d’Iéna, à deux pas du musée Guimet dont l’immeuble est une annexe.
C’est bruyant. Il y a deux écoles à côté et c’est l’heure de la sortie des classes. Mais dans ce jardin minuscule, au plus 25 x 25 m, quelle paix. On est dans un autre monde, et ce monde, je l’ai pour moi tout seul. Après un premier tour de reconnaissance, je m’assieds au pied des marches du perron. Il y a là une colline, toute petite, une bosse au plus, sur laquelle se tient le salon de thé, un simple pavillon de style japonais. Il tient au moins un tiers du jardin. On y monte par des dalles de pierre disjointes, de simples rochers formant des marches.
Dans l’autre partie l’eau coule par escaliers, entre les rochers, les ponts de bois, parmi les îlots de verdure, dont, bien sûr, les bambous ramassés en petites, très petites, forêts.
Le jardin contient tout ce que contient normalement un jardin japonais : la lanterne traditionnellement en pierre, de petits arbustes, les rochers évidemment, choisis avec soin pour leur forme et leur taille, de petits chemin de terre avec des passe-pieds en pierre, le bassin d’eau recouvert de pierre de gué, sorte de pas dans la partie supérieure, les galets entassés, et de ponts de bois enchevêtrés avant l’étendue lisse d’une mare qui ne fait pas deux mètres sur deux. Les arbres sont en partie taillés pour laisser passer le regard et donner une impression de légèreté authentique. Il manque cependant une chose, le sable ou le gravier parfaitement ratissé en arrondis savants et reposant pour l’œil.
Contrairement au jardin occidentaux et en particulier français, le principe d’asymétrie domine. Il donne des points de vue différents selon la place du spectateur, augmentant ainsi l’espace. Les jardins japonais idéalisent la nature en la miniaturisant. Heureusement d’ailleurs, par ce que celui-ci est un jardin de poche. Mais n’est-ce pas merveilleux déjà de disposer d’un tel lieu dans Paris ?
De l’intérieur du musée, bouddha, dans sa majesté, médite et veille sur le jardin, assis sur sa fleur de lotus.
06:58 Publié dans 12. Trouvailles diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : nature, jardin, bouddhisme, spiritualité | Imprimer
15/12/2011
Deyrolle : mystérieux magasin, musée, librairie…
La maison Deyrolle possède le mystère des cabinets de curiosité. Elle est située rue du Bac, au 46. Le magasin semble au premier abord petit. C’est la boutique du Prince jardinier, créée par Louis Albert de Broglie, « nature et découverte » en plus beau, au rez-de-chaussée. On y trouve de très beaux cache-pots, des outils pour le jardinage, etc.
En fait, il faut monter l’escalier en face de la porte pour arriver dans un petit Versailles des animaux. Un salon vert d’eau, disposant d’un grand lustre, environne une multitude d’animaux empaillés : ours, crocodile, zèbre, fauves, etc.
Vous voici projeté en Afrique, dans les savanes chaudes et ondulées, et vous marchez parmi les rois de l’univers, lorsque les hommes n’étaient encore que de pauvres réfugiés dans des grottes introuvables. Ce n’est pas la beauté de chacun d’entre eux qui retient l’attention. C’est le contraste entre un Paris du XXIème siècle, plein de pétarades d’outils à moteur, et ce salon digne des plus beaux châteaux abritant l’Afrique et d’autres continents avec la sagesse que donne le poids des années. La maison Deyrolle est en effet ouverte depuis 1831. On y entre comme dans un couvent, avec componction et respect. Le premier choc passé, on s’avance et l’on découvre, au premier étage, une enfilade de trois grandes pièces, aussi encombrées les unes que les autres d’animaux de tout horizon, empaillés (du renard des sables au héron cendré en passant par l’antilope ou le buffle), formolés (pour les insectes et papillons), démontés pièce par pièce (pour les crustacées), organisés en bataillon d’envahisseurs des yeux égarés devant tant de débordements animaliers.
L’émerveillement, la stupeur et l’admiration sont vos premières impressions. Vous avancez à pas lents, regardant de tous côtés, vous heurtant à une panthère, lui demandant pardon, manquant de marcher sur les pieds d’un élan, entamant une conversation muette avec un poisson, caressant inconsciemment les coraux exposés.
Vous étouffez de cette profusion admirable et vous dirigez vers la pièce du fond dont vous devinez qu’elle est différente. Consacrée au monde marin et aux insectes, celle-ci est couverte de bibliothèques vitrées emplies de planches où foisonnent mille carapaces, deux mille ailes de toutes couleurs, trois mille gastéropodes marins. Elle renferme également des meubles à tiroirs immenses cachant de nombreuses autres merveilles que seuls les initiés peuvent admirer. Les clients parlent avec douceur, les employés, semblables à des gardiens de musée, manient avec milles précautions ces trésors. On s’attend à les voir avec des gants blancs à l’égal des vendeurs d’une célèbre marque de parfum (mais leur unique gant est noir).
Après la suffocation devant ces multiples détails de la nature, vous allez dans la bibliothèque, sorte de couloir parallèle à la pièce du milieu, et vous découvrez (et oui, encore) une autre spécialité de Deyrolle, les planches pédagogiques utilisées pendant des décennies par tous les instituteurs de France et des colonies. L’éducation par les yeux : qui de nous ne se souvient pas des planches cartonnées suspendues sur les murs de la classe, détaillant le corps humain ou la machine à vapeur. Et cette activité continue, orientée vers la sacro-sainte écologie et le développement durable, sans ostentation cependant.
Enfin, vous achevez ce tour d’horizon dans des livres enchanteurs tels que les « herbiers... oublié… toxique… érotique… fantastique… boisé… voyageur… », les monstres marins, les bestiaires, ou encore les leçons de choses, les cabinets de curiosité, le bestiaire sauvage et bien sûr le calendrier Deyrolle. Quelle évasion de l’esprit. Vous n’avez plus les pieds sur terre, vous planez comme un fantôme sur le monde réel et imaginaire et vos pensées s’envolent dans toutes les directions, comme pourraient le faire, en rêve, les papillons cloutés sur leur cimetière de planche dans la pièce du fond.
Au bout d’un long moment, vous vous réveillez : « Suis-je bien à Paris ? » Alors vous vous décidez à sortir de ce cloître de la mémoire des êtres vivants. Vous redescendez l’escalier, regardant une dernière fois les lions, autruches ou flamands roses, et ressortez en somnambule dans un Paris encombré de voitures et de passants qui ignorent sans doute les trésors entassées à côté d’eux. Que de surprises réserve Paris !
Voir le site internet de la maison Deyrolle, d’où proviennent les photos qui sont interdites dans le magasin :
http://www.deyrolle.fr/magazine/
Mais aussi, pour les assoiffés du développement durable :
http://www.deyrollepourlavenir.com/
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