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16/01/2015

L’attrait des mots

Il est curieux de constater combien les mots emprisonnent dans une vision unique. Est-ce dû aux politiques ou aux communicateurs ? Les deux probablement.

Ainsi le mot république. Depuis deux ans ce mot sert au ralliement de la nation dès qu’une difficulté survient. Depuis huit jours, on l’entend en rafales : les citoyens sont républicains, les républicains doivent être vigilants, la conscience républicaine est au cœur des sentiments des Français, l’école de la république, la laïcité républicaine, etc. Bref, la France n’existe pas hors de la république, mot de ralliement, indispensable au politiquement correct. Comptez le nombre de fois où ce mot, peu usité il y a encore quelques années, est prononcé au cours d’un journal télévisé. Tous l’emploient pour justifier et argumenter leurs points de vue si différents. Il suffit d’un mot pour créer l’unité. Est-ce si vrai ?

De même le mot communauté. Ce mot que nos hommes politiques condamnent en sous-entendant que les citoyens n’ont qu’une vision commune, celle de la république qui s’oppose à tout communautarisme, est sans cesse employé par les mêmes pour fustiger les communautés islamiques, juives, arabes, noires ou de toute autre couleur ou religion. Est-ce logique ?

Enfin le mot liberté d’expression ne doit-il être compris qu’à sens unique ? Pourquoi l’humour pourrait s’attaquer au plus profond des croyances de chacun alors que d’autres sont arrêtés pour un mot qui déplaît. Comment comprendre cet ostracisme !

L’emploi de mots chargés de sens est-il utile pour exprimer des émotions fortes et cette expression doit-elle être récupérée par les mots ?

15/01/2015

Phare

Un phare dans la nuit, un pou dans la soupe
Sa laideur envahie, son charme découpe
Aveuglée et perdue, elle cligne des yeux
Ce phare tant attendu, devient belliqueux
Agressée dans la vue, elle dévoile son cœur
Qui cogne éperdu pour celui de sa sœur
Et le phare aveuglant, dissimule son dédain
En se battant les flancs, dans le noir anodin

13-03-16 Carcercles 60x60cm.jpg

14/01/2015

Circuit

Il se leva, déjà dressé sur sa couche
Il ne se retourna pas, sûr de lui
Elle restait seule dans ce lit
Dormant comme une souche

En route ! Il sortit dans la nuit
Le regard éveillé, tendu
Il distinguait le circuit
Cet anneau aux cercles défendus

Il enfila ses gants de cuir
Fit quelques mouvements subtils
Était-ce suffisant pour conduire ?
Rien ne lui sembla hostile

Il enfourcha la machine
S’équilibra sur la selle
Naturellement courbant l’échine
Pour l’épousaille charnel

Sous ses doigts, le bouton
Petit, rond, attirant le regard
Il pressa l’éclat du laiton
L’orage retentit, braillard

Seul le casque manquait à l’appel
Il choisit le rouge couleur sang
Qui était froid comme un scalpel
Puis, passa la vitesse sereinement

Le premier tour fut raisonnable
Il écoutait le chant clair du moteur
Ce son aimé parce qu’indéfinissable
Enfin, il activa le propulseur

Alors, collé à son engin
Le cœur soulevé, ouvert
Il prit son destin en main
Et partit vers l’univers

Courbé sur le réservoir
L’œil sans une larme
Il se laissa aller sans pouvoir
Interrompre le vacarme

Première courbe enjôleuse
Redresse la bête, la bê…ête
Celle-ci poursuivit, audacieuse
Elle semblait pourtant honnête

Il ne put redresser
Il resta de marbre
Mal embossé
Droit dans l’arbre

Eclatement
Explosion
Exactement
La dérision

Elle dormait toujours
Sans savoir son malheur
Elle rêvait d’amour
En attente de douleur

Dans ses yeux rieurs
La pluie lava la peine
Pas besoin de fossoyeur
Elle fut… La reine, sereine…

 © Loup Francart

13/01/2015

Mystère des nuits

Il entrouvrit la porte de la chambre en essayant de ne pas faire grincer les gonds  qui, depuis quelques temps, se relâchaient. Ne pas oublier d’y mettre un peu d’huile demain matin, se dit-il. Mais cela fait plus de huit jours qu’il se fait cette remarque sans réagir. Brrr… Qu’il fait froid. Il referma lentement la porte. Il frôla la table de nuit, légèrement, en raison des livres qui se tenaient en équilibre instable, sentit son pied contre le sommier. Il se pencha, posa les mains sur la couette légèrement entrouverte et se glissa avec précaution entre celle-ci et le drap,  dans cet espace frais, presque froid, ce trou de noir glacial dans lequel il revenait après un éveil de deux heures passé dans son bureau devant son ordinateur. Il remonta vers son menton la couette, cherchant un peu de chaleur dans cet enroulement des tissus autour de son corps. Peine perdue, il faisait toujours aussi froid.

Alors, avec douceur, il s’approcha de celle qui partageait sa couche. Tout de suite il se sentit mieux. Un délicieux sentiment de bien-être l’envahit. Doucement, il posa sa main gauche sur son épaule. Elle bougea un peu et vint se serrer contre lui. Il fut envahi du feu de ce corps qui se collait à lui et l’enlaçait de ses jambes. Lentement, il laissa errer sa main sur l’infléchissement de sa taille, sur ce lieu où la finesse et la majesté des courbes se rejoignent. Sa paume, du plein de l’éminence du métacarpe du pouce, caressa cette vague brûlante. Elle ouvrit les jambes, glissa celle du dessus sur sa propre jambe et la remonta jusqu’à hauteur de sa hanche. Il glissa la sienne dans la douceur incomparable de l’intérieur des cuisses. Il ne connaissait rien de plus doux, de plus rafraîchissant et de plus brûlant en même temps que ce lieu où les courbes s’évasent et creusent une place de tendresse inénarrable. Elle se rapprocha de lui, tendue dans un même élan, et ils se tenaient ainsi debout-couchés devant l’adversité, affrontant ensemble l’existence, sûrs d’eux-mêmes, liés dans leur destin d’homme et de femme qui savent qu’ils sont un et pourtant deux, et qui puisent dans ce rapprochement des corps la joie d’une existence unique.

C’est le mystère le plus profond de la vie, celui de cet irrésistible attrait de la force et de la douceur, de cette flamme dont la source attirante commence au visage de l’aimé(e) et finit en ce lieu qui devient le centre de son être.

12/01/2015

Le grand saut (2)

Elle se dit alors qu’il était temps de passer au deuxième acte. Elle se releva se pencha par-dessus le parapet, sortit son petit anémomètre. Un peu de brise pouvait la porter et lui permettre de se guider dans le dédale des immeubles, trop de vent l’empêcherait de choisir sa route et pouvait la déporter dans des passages périlleux. C’est bon ! A nouveau elle se figea dans une attitude orante, levant les bras au ciel, le front tourné vers le soleil. Puis, lentement, elle franchit la balustrade, regarda sous elle la foule compacte qui s’était figée en la voyant prête à sauter. Elle sauta donc, ou plutôt se propulsa vers l’avant, étendant les bras et les jambes. Elle se sentit aspirée par le sol, se pencha en avant pour prendre de la vitesse, puis se laissa porter vers l’horizon, semblant planer dans les airs. La foule hurla, elle passa au-dessus de ces têtes rondes, petites comme des billes, les yeux exorbités, la bouche ouverte, qui se tournèrent d’un seul mouvement lorsqu’elle fila entre les immeubles. Pas un bruit, seul le sifflement du vent dans les oreilles lui faisait dire qu’elle était en vol. Elle s’était stabilisée, glissant sur la mince couche d’air qui stagnait au-dessus du sol. Elle contrôlait sa trajectoire, l’ayant auparavant étudiée, ayant visualisé les photos sur Internet, ayant calculé les temps nécessaire pour passer d’un pâté d’immeubles à un autre, se faufilant le long d’une avenue suffisamment large pour pouvoir s’y couler sans risque.

Cela dura peu, la vitesse ne l’empêchait pas de perdre de l’altitude. Arrivée au-dessus du jardin de l’oratoire, elle ralentit en se relevant vers les nuages et ouvrit son parachute. Il ne lui restait que peu de plafond pour qu’il s’ouvre et l’amène à terre sans trop de risque. Elle se sentit tirée vers le haut, entendit le flop du tissu qui se gonfle, chercha aussitôt où elle pourrait atterrir. Elle vit le lac au milieu des arbres et se dirigea vers ce havre plat et lisse. Le vent avait un peu forci sans qu’elle ait pu s’en rendre compte. Elle vit qu’elle ne pourrait pas se poser sur les eaux calmes et s’apprêta à s’enfoncer dans la végétation et les grosses branches des chênes. Elle se mit en boule, tenant ses jambes serrées, tendues en avant, la tête enfouie dans son petit ventral qui pourrait la protéger de la feuillaison. Elle ferma les yeux, attendant la secousse. Elle fut moins violente qu’elle ne l’avait imaginée. Un de ses coudes fut frappé par une branche, mais il avait l’air en bon état. Elle était suspendue à dix mètres du sol, entourée d’un silence étonnant. Le monde était encore là. Elle ouvrit les yeux, sentit les larmes qui jaillissaient, les laissa couler, souriante, vide de toute pensée. Elle resta ainsi quelques minutes, jouissant de ce repos après sa folle équipée. Puis, elle songea à descendre. Elle ouvrit son ventral, laissant la toile se dévider, puis les suspentes, tentant de laisser ce paquet se glisser entre les branches plus fortes qui se trouvaient sous elle. Elle parvint à le laisser atteindre le sol. Elle se livra à une véritable gymnastique pour sortir du harnais du parachute toujours tendu au-dessus d’elle tout en prenant garde à bien le solidariser avec le ventral. Elle put alors entamer sa descente, se glissant entre les branches. Ouf ! J’y suis, se dit-elle quand elle eut mis un pied à terre. Elle put se livrer à sa joie, criant et dansant, seule dans ce bois qui l’accueillait, elle, qui avait vaincu la pesanteur.

Le lendemain, en traversant la rue, elle se fit écraser par une voiture qui finit sa course sur le trottoir. Sa dernière pensée : prends de la hauteur et vide-toi de toi-même.

11/01/2015

Les mots parleurs

Une leçon : "traducteur et passeur, les Mots parleurs révèlent l’écriture, son rythme, son intensité pour nous restituer, en quelque sorte, la gourmandise de l’écrit. (…) Le corps et la voix pour passer l’énergie de l’écriture, représenter l’écrit, sa structure, ses signes, sa syntaxe, sa forme grammaticale, ses silences, sa ponctuation, sa typographie ; pour faire résonner le texte et en libérer le sens." (From : http://www.motsparleurs.org/)

Deux femmes emplies de souffle, le souffle de l’esprit, qui disent le livre pendant presqu’une heure. On entend la parole, le silence, les sourires parfois, et rien d’autre. Elles parlent comme une corde tendue sur la vie qu’elles caressent de leur archet  qui se promène tantôt rapidement, tantôt avec une douceur ineffable, tantôt en dansant sur les mots. Pas un bruit autre. Un calme absolu, une tension détendue, celle de l’esprit, pas du corps qui s’enfonce dans sa chaise et laisse en paix l’esprit qui s’envole et qui vous emporte au loin sur une autre terre, celle de l’enchantement.

Deux femmes : Valérie Delbore, comédienne, fondatrice et lectrice des Mots Parleurs, qui s’anime et plane au-dessus des mots, avec gentillesse ou rage, et Carole Bergen, plus jeune, aérienne, intérieure, à la voix enjôleuse. Un duo inséparable, qui se passe la parole comme un jeu de tennis ; mais la balle vagabonde, reste dans un camp plus longtemps que prévu, puis passe dans l’autre en un soupir. Et ce jeu vous enchante et vous sort de vous-même.

Hier soir, elles dirent le livre de France Billand, Dans le noir du paradis, aux éditions Tituli, 142 rue de Rennes. Un récit magnifiquement écrit qui mêle une histoire vécue aux souvenirs d’enfance. Une grand-mère extraordinaire, Madame Faglia, tient la main de sa petite fille qui se souvient de ces instants qu’elle ne comprenait pas, mais qu’elle vécut avec toute la fibre de son être.

"Il y avait dans sa vie une décennie incertaine, une sorte de lac dormant d’où émanait sa personnalité indéchiffrable et dont la surface lisse, avec la précision aiguë d’un miroir, ne reflétait jamais que l’instant présent. À ceci près que, parfois, ridant le miroir, une légère discontinuité du temps laissait entrevoir la véritable Anne Faglia, celle qui fut jeune et houleuse. Après sa mort, quand j’ai découvert le carnage qu’elle s’était acharnée à me taire, j’ai déclaré à tout va que, non, rien ne m’étonnait ; que je la comprenais et l’absolvais. La tenir pour un monstre, comme certains l’ont fait, c’eût été l’abandonner, même morte. Je ne pouvais m’y résoudre. Au début, je pensais écrire sa défense. Il n’y avait qu’à suivre le fil chronologique qui courait droit devant lui, d’une Grande guerre à l’autre, jusqu’aux années 80."

Prochaine lecture : le jeudi 15 janvier 2015 à 19h à l'Hôtel Pont Royal
Carole Bergen et Valérie Delbore liront Les Absents de Georgia Makhlouf, aux Editions Payot & Rivages, prix Leopold Sedar Senghor du premier roman francophone et francophile 2014.
Renseignements: motsparleurs@wanadoo.fr - 06 12 08 66 6
Adresse: Hôtel Pont Royal : 5-7 rue de Montalembert 75007 Paris

Allez-y, vous monterez sur le cheval ailé des mots et galoperez pendant un moment magique sans espace ni temps.

10/01/2015

Fugue de mots

Une mèche de cheveux
Une flèche de camaïeu
Surtout ne dis pas
Le fourretout du repas

La bobèche des adieux
Empêche l’invincible insidieux
D'être dissout par l'épiscopat
Partout où règnent les béats

Reviens, ne t‘enfuit pas
Les Troyens ont leurs appâts
Qui les mènent jusqu’aux cieux

Plus rien ne t’interrogea
Au sein du conglomérat
Tu te promènes avec les dieux

© Loup Francart

09/01/2015

Notre père, musique d’Arvo Pärt

https://www.youtube.com/watch?v=x9Xm_nR4310 


 

D’une autre tenue que le précédent Notre Père, la musique de celui-ci a été écrite par Arvo Pärt. Il est chanté par un soliste de l’école de Montserrat à côté de Barcelone.

On retrouve la musique si particulière d’Arvo Pärt, musique minimaliste :

Né en 1935 en Estonie, Arvo Pärt fait ses études au conservatoire de Talinn avec Heino Eller. En parallèle de ses études musicales, il est ingénieur du son et compositeur de musique pour la télévision et le cinéma estonien, activité qu’il ne cessera pas d’exercer. En 1962, il obtient un premier prix de composition à Moscou, prélude à une alternance d’honneurs officiels et de censures provoquées par le caractère mystique de ses œuvres. Sa musique participe alors de l’esthétique du sérialisme et du collage. Il s’arrête de composer pendant plusieurs années afin de se consacrer à l’étude de la musique chorale française et franco-flamande des XIVè, XVè et XVIè siècles.

A partir de 1976, Arvo Pärt inaugure une nouvelle démarche tournée vers l’intemporalité, son écriture devient postmoderne, en témoigne ces œuvres les plus célèbres : Für Alina, Cantus in Memoriam Benjamin Britten, Fratres. Arvo Pärt appelle ce style tintinnabuli (« petites cloches » en latin). Dans les années 80 il part s’installer à Vienne où il prend la nationalité Autrichienne avant de se fixer à Berlin-ouest. A partir de cette période Arvo Pärt privilégiera les œuvres religieuses vocales et met en musique des liturgies en allemand, anglais et russe dont Passion selon Saint Jean, 1982 ; Miserere, 1989 ; Missa brevis, 2009 ; il retravaille souvent ses œuvres, il existe de nombreuses versions et orchestrations de Fratres de 1977 à 2008. (From http://www.francemusique.fr/personne/arvo-part)

L’école de Montserrat a été créée au XIIème siècle et s’est perpétuée jusqu’à nos jours. Elle comprend une cinquantaine de garçons qui jouent tous d’un instrument et qui s’accompagnent eux-mêmes.

Mais écoutons plutôt ce Notre Père, écrit par un musicien dont le sens mystique est particulièrement développé.

08/01/2015

Entre deux

Une construction irréelle et enchevêtrée sortie d’un cerveau embué. Elle permet de rêver à d’autres mondes où la géométrie a des limites différentes des nôtres. Le noir le blanc et leurs intermédiaires en font un univers insolite où la fiction est plus forte que la réalité.

 

 

07/01/2015

Le rendez-vous des poètes

Hier, je suis allé au rendez-vous des poètes. Je ne le savais pas, mais ils sont nombreux les poètes d’un soir, les auteurs d’un matin qui se réveillent versificateurs avant de partir au travail. Ils sont très divers : des petits bonhommes discrets au regard tendre, parlant d’une voix feutrée et susurrant leurs mots comme on suce un bonbon ; des hommes mâles à la voix rocailleuse, au regard enjoué, cherchant à séduire avant même de vous connaître ; des femmes parlantes, séduisantes de flots de mots chatoyants, enjôleurs et pédants ; d’autres femmes plus câlines, moins va-t’en guerre, mais cherchant encore et malgré tout à séduire.

Après plusieurs minutes d’attente apparaît l’élu : un homme d’environ soixante ans, faisant penser à un acteur connu, la voix ronde, le sourire parfois espiègle et toujours aguicheur, d’une bonhommie sympathique lorsqu’il parle de ses livres. Ils sont trois ou quatre, étalés sur la table devant lui, fluets et bon-enfant, comme des jouets à regarder et à ouvrir. Ils sont couverts de feuillets marque-pages. C’est pour le lecteur, un homme également, fort, sûr de lui, sans complexe. Il se tient devant l’éclairage très, trop lumineux, qui aveugle les spectateurs et lui donne l’air d’un spectre. Enfin, le troisième acolyte est une femme, également la soixantaine, petite, la bouche mobile. Oui, elle ouvre la séance pour le présenter, lui, l’écrivain : « Il n’est pas nécessaire de présenter XY… » Eh bien, si ! Il est psychologue. Il écrit des livres professionnels sur l’art de comprendre et réparer les nœuds du cerveau, des souvenirs, des malheurs, du sexe, des regrets et de la peur de l’avenir. Elle parle, elle parle et je vois trois feuillets devant elle. Elle n’en est toujours qu’au premier paragraphe. Combien de temps va durer cette présentation chewing-gum ?

Mais l’auteur, sentant déjà l’ennui dans les yeux du public béat, reprend l’initiative en laissant la parole au lecteur. Histoire d’un suicide : un sujet épineux, d’autant plus que c’est celui de sa mère. Il parle rapidement, accélérant la sortie des mots volontairement comme pour donner cette impression d’en finir avec la vie, les mots, le verbe. Parfois il fait une pause, la diction s’enroule autour d’elle-même, apaisée. Mais très vite la fièvre le reprend. Il faut en finir. Elle boit la mixture, nous regarde une dernière fois, puis ferme les yeux et se laisse mourir. Glacial ! Mais le public semble apprécier. C’est nouveau et original. C’est une forme nouvelle de récit semble-t-il dire. Il exprime les côtés inconnus de l’humanité, du parler vrai en quelque sorte. La présentatrice reprend son rôle de Monsieur Loyal, tutoyant l’auteur, le poussant dans ses retranchements, pas très fort pour éviter qu’il ne tombe. Il ne se démonte pas, toujours souriant, pas m’as-tu vu, répondant modestement avant, parfois, de glisser une confidence ou une anecdote qui amène un sourire exquis sur les lèvres des femmes présentes.

Le deuxième acte, ou plutôt la seconde lecture, est d’un tout autre style. On part en rêvant sur les bords de la Seine, dans l’herbe haute des recoins perdus, pour découvrir l’amour, un amour caché aux yeux du monde, resté enfoui sur la terre meuble de ces bords de rivière. Parfois, il pleut, raconte-t-il. Alors on se fouille sous les imperméables, l’un dessous, l’autre dessus, on déboutonne les vêtements subrepticement, sans jamais laisser traîner une jambe ou un bras hors de la tente improvisée, tout cela dans l’odeur du foin et de l’exaltation de l’amour. C’est sans doute un peu trop descriptif, parfois un peu voyeur, mais cela a une certaine tenue malgré tout. Un bon point pour l’auteur. Evidemment Monsieur Loyal en rajoute, expliquant d’une voix sucrée les origines psychologiques de ces moments sublimes. Il avait quinze ans, il découvrait l’amour et celui-ci le lui rendait bien. Embrayant derrière ces explications, une femme prit la parole, s’éternisant dans des explications impatientes, mais sûres de leur profondeur, en rajoutant, plongeant plus profondément dans l’inconscient de l’écrivain, fouillant avec vigueur dans ce bric-à-brac sensuel.

Nouvelle lecture. De quoi ? Je ne me souviens plus. Je m’intéressais au public, deux jeunes femmes, trois couples d’une cinquantaine, des personnes seules, en mal de société, mais également des passionnés de l’écriture dont elles parlent avec un sanglot dans la voix. Je retrouvais, toute proportion gardée, la même passion que celle des sportifs de haut niveau : introspection et confession pour progresser encore et toujours. Seule la vérité compte, vaut la peine d’être analysée, disséquée et regardée à la loupe.

Quelle soirée ! Des gens curieux, mais sympathiques, se liant facilement, l’œil vif et la tête bien pleine, modestes de plus, se considérant loin des grands auteurs qui atteignent les sommets de la gloire, puisqu’écrivant pour les autres, ils laissent de côté la joie de l’improvisation.

« On n’écrit bien que lorsqu’on écrit pour soi ! » « Oui, mais on écrit également pour être lu, donc pour les autres ! » Quel dilemme !

06/01/2015

Quelques souvenirs de plus

Quelques souvenirs de plus
Quelques regrets en moins
De quoi nous parles-tu
Toi que rien ne touche ni ne broie ?

Hier tu m’as donné la leçon de vie
Aujourd’hui tu regardes l’effet
Rien n’est issu du tout
Il n’y a que le juste milieu

Quelques souvenirs de plus
Quelques regrets en moins
Tu rêves en caleçon long
Perché sur ton trois mâts

Demain, que sera-t-il ?
Nul ne le sait si ce n’est
Celui qui parle pour ne rien dire
Ou qui se tait pour toujours

Quelques souvenirs de plus
Quelques regrets en moins
Pourquoi te dessaisir
De quelques minutes de vie ?

Aujourd’hui tu n’es plus
Le temps et l’espace sont brouillés
Quand était-ce ce charivari ?
Où se trouve celui qui pense ?

Quelques souvenirs de plus
Quelques regrets en moins
Il est parti dans ce lointain pays
Où plus rien n’occupe la pensée

 

© Loup Francart

05/01/2015

La frontière

Brise cette frontière qui t’empêche d’être. Laisse tomber les formes et la forme. Tu n’es plus et tu es tout. Sens cette chaleur en toi qui te pousse à oublier. Ne sois que ce filet d’air qui glisse entre tes narines et caresse ton cerveau.  Passe de ce rouge obsédant au noir de l’absence. Et quand tu verras poindre le blanc, surtout ne bouge pas, ne manifeste rien, laisse-toi aller, immobile, incertain, en attente.

Le mystère s’ouvre pour toi. Respire cet air purifié qui passe entre les grilles de la séparation. Retourne-toi, que l’extérieur devienne l’intérieur, que l’intérieur devienne l’extérieur. Mais cet extérieur est semblable à l’intérieur. La frontière s’estompe.  L’ivresse de l’espace t’envahit. Fais monter en toi l’absence, Que le blanc devienne le noir et inversement. Prend de l’ampleur dans ce passage. La virginité t’épanouit, elle ouvre l’horizon, te prend dans ses bras. Touche ton corps frêle et laisse le partir loin de toi.

Oui, tu es en toute conscience, là où rien ne te limite. Caresse l’envers de toi-même, explore cette peau transparente et laisse tourner ton cœur. Pousse le cri de la déraison et monte dans le wagon.

Mais tout de même, ne pars pas trop longtemps !

04/01/2015

Zen

J’ai découvert qu’il est nécessaire, absolument nécessaire, de ne croire en rien. C’est-à-dire : nous devons croire en quelque chose qui n’a ni forme ni couleur – quelque chose qui existe avant l’apparition de toute forme et de toute couleur.

Shunryu Suzuki, Esprit zen, esprit neuf, Le Seuil, 1977

 

Pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que rien ?

Stephen Hawking, Y a-t-il un grand architecte dans l’univers ? Odile Jacob, 2010.

 

Les mêmes interrogations dans deux personnalités franchement différentes. Mais, me direz-vous, ces deux propos n’ont rien à voir entre eux ! L’un nous dit de ne croire en rien ce qui ne veut pas dire qu’il ne faut pas croire. Trouvez ce qu’il y a au-delà de tout. Quel programme !

Stephen Hawking prend le problème à l’envers : pourquoi y a-t-il quelque chose. Et que nous dit-il ? La gravitation déformant l’espace et le temps, elle autorise l’espace-temps à être localement stable mais globalement instable. À l’échelle de l’Univers entier, l’énergie positive de la matière peut être compensée par l’énergie négative gravitationnelle, ce qui ôte toute restriction à la création d’univers entiers. Parce qu’une loi comme la gravitation existe, l’Univers peut se créer et se créera spontanément à partir de rien. La création spontanée est la raison pour laquelle il existe quelque chose plutôt que rien, pourquoi l’Univers existe, pourquoi nous existons. Il n’est nul besoin d’invoquer Dieu pour qu’il allume la mèche et fasse naître l’Univers. L’univers serait donc né du néant et retournerait au néant.

Dans les deux cas la vie est éphémère. Mais pour l’un il y a quelque chose au-delà du tout, alors que pour l’autre il n’y a rien. Et nous en sommes réduits au mystère de l'avant Big bang : qu'y a-t-il derrière le mur de Plank, interrogation virtuelle sur l’information. Dieu serait information, un mathématicien de génie, qui par la puissance de sa pensée a créé l’univers. On commence à rejoindre la bible : une étincelle et le monde est créé, Que la lumière soit et la lumière fut. Mais la bible nous dit qu’au commencement Dieu créa les cieux et la terre, c’est-à-dire un monde visible et un monde invisible ou encore un monde immatériel et un monde matériel, avant même l’étincelle de la première lumière. Et le monde invisible se mouvait au-dessus du monde visible qui était informe et vide, c’est-à-dire à l’état d’informations, un monde virtuel qui naîtra avec le Big bang.

Toujours la même question : l’univers est-il ou non né de rien, c’est-à-dire du néant. Mais on peut poursuivre l’interrogation : qu’est-ce que le néant ? Nul ne le sait. Ce qui est sûr c’est que ce monde ne peut connaître que ce qu’il conçoit et que concevoir le néant et l’au-delà du néant est une tâche impossible à qui vit dans le monde.

Alors poursuivons avec détermination notre quête, tout en acceptant notre sort.

Le téléphone

Un téléphone : vous venez de recevoir ce petit boitier plat que vous promenez maintenant avec vous, dans la poche de votre veston, comme une relique. Il repose sur le cœur, il bat au rythme des appels, alertes, avertissements, etc.

Il est vivant ! Si vivant que le monde entier vous parle sans cesse. C’est une sorte de cloche de résonance des ébats du monde : avion disparu, tremblement de terre, froid intense, cambriolage place Vendôme, chien du président, bref, le village à votre portée, sans effort, juste un petit coup de doigt et tout vient dans le désordre.

Il est beau, d’une beauté sévère, impeccable, comme le valet de pied d’un livre d’autrefois. Sa dignité n’en est que renforcée. Noir devant, en attente d’utilisation, acier brossé derrière. Une pomme croquée se pavane au milieu, plus foncée, sa virgule dressée, en pleine forme malgré son manque. Ne suis-je pas belle, semble-t-elle dire. Mais elle reste modeste, sans bouger de sa place de reine, semblant tenir en suspension, comme un vrai lévitant.

Qu’il est agréable de toucher le boitier… Une véritable sculpture. Il tient dans la main offerte, il se recroqueville au fond des doigts pour permettre au pouce de ronronner sur le clavier avec aisance. Mieux vaut dans cette posture des doigts de femme qui caressent voluptueusement chaque touche ronde, délicate, munie d’un chiffre qui donne tous les aspects de la vie : l’unité, le couple, la trinité, l’amitié, le groupe, l’harmonie, la singularité, la manipulation et l’altruisme. L’infini, le tout, règne en bas au centre comme un roi, au-dessus d’un point vert où l’on appuie avec délectation. Sonnerie… Silence… Allo : le bavardage reprend, s’amplifie, se décuple, s’entortille. Le sang vous monte à la tête. Le monde vous invite à sa fête. Vous pouvez danser avec les autres, hurler avec les loups, chanter la ronde de l’information et communiquer avec Toi, Qui que Tu Sois.

Il dort dans une pochette qui fut choisie couleur cuir de Cordoue, délice pour le cœur, enchantement pour les yeux. Posé n’importe où, on ne peut faire autrement que de le regarder. Il trône de sa couleur orange sucrée comme un phare en Méditerranée. Les eaux de la concupiscence se pressent autour de lui, les regards deviennent flous, les battements du cœur s’accélèrent, vous ne pouvez vous empêcher de le tripoter et de l’ouvrir. L’ouvre-t-on vraiment ? Non, on le sort de sa coque de cuir comme un enfant que l’on sort du berceau avec précaution en espérant qu’il ne va pas pleurer. Il ne dit rien. Il est obéissant. Ah, oui, il faut le mettre en route, allumer son cœur artificiel, appuyer avec détermination sur le bouton en haut à droite. Un tout petit bouton. On ne le voit pratiquement pas, mais on le sent, il est là sous le doigt, il émet un son  profond et doux et s’allume après une seconde de réflexion. Zut, il s’éteint. Il était pourtant beau, dévoilant sa photo, une constellation d’étoiles. Je sais quelle heure il est, à la minute près. C’est important de nos jours, le soleil étant caché par les immeubles plus hauts que nature. Ah, c’est vrai, notre monde est un monde pressé. Il s’est éteint. Ne pas oublier de mettre un doigt ou un pouce sur l’incurvation arrondie qui ausculte vos profondeurs et vous dit si vous êtes bien toujours vous-même. Oui, c’est bien moi ! Alors, lumière et sapin de Noël.

Une profusion de carrés aux angles arrondis, contenant des signes colorés, tous différents, d’une beauté éblouissante sur lesquels on a envie immédiatement de passer un doigt inquisiteur. Non ! Légèrement… Avec la délicatesse des princesses qui touche la joue de leur prince charmant. Effeuiller les fleurs de cette plaquette magique et vous serez récompensé hautement de votre curiosité. En voici un qui s’ouvre. Quoi ? Il calcule le nombre de pas que vous faites dans la journée. Ça donne de drôle de courbes, mais c’est la vie que l’on mange à pleines dents. Pas encore de prévision, mais cela ne saurait tarder, vous contraignant à effectuer le nombre de pas réglementaires qui montre votre soif de vivre, d’entreprendre, de réussir. Et il faut que vous l’emmeniez quand vous allez courir. On est moderne ou on ne l’est pas !

Vous appuyez sur un autre carré coloré. Tiens ! Il remplace vos yeux et vous montre ce que vous voyez. Comme c’est formidable ces appareils qui vous dédouble le corps. Ils voient à votre place et vous retransmettent l’information sagement en l’agrandissant. Cela peut même servir de rétroviseur. Vous voyez derrière vous sans bouger la tête, n’est-ce pas merveilleux ! Clic, vous effleurez une touche ; clic, clic, clic, clic, clic, etc. Quelle rafale, on dirait un orage. Mais il faut retirer son doigt, s’exclame mon maître en téléphone, un enfant de dix ans qui maîtrise la bête avec un sérieux imperturbable. Du coup, vous le prenez en photo, le visage déformé par la proximité, l’air anxieux, la bouche tordue d’inquiétude. Ah non ! Je ne suis pas beau ! Il l’efface d’un coup de doigt. L’enfance est susceptible quand à l’apparence et elle a raison. Communiquer, c’est paraître. Paraître, c’est être soi-même. Alors vous vous prenez également en photo, vous pouvez même vous éloigner du trésor pour paraître plus grand, plus avenant, plus communiquant. Bravo ! Belle prestation, vous dit-il. Mon Dieu ! Vous vous dédoublez des centaines de fois avec un sourire figé dans la glace. Vous vous regardez vous observez. Quel jeu bizarre !

Ce matin, je suis parti courir dans la campagne, bien sûr accompagné de mon téléphone. On m’a dit qu’il suffisait de le connecter et qu’il vous calculait tout : le nombre de foulées, le kilométrage parcouru, la vitesse, les pulsions cardiaques, à quel moment vous désirez marcher un peu, quand il faut repartir, bref tout. Les initiatives sont plutôt limitées. Certes, vous avez le droit d’éternuer, mais ce n’est pas bon si cela fait baisser la moyenne ! J’ai eu un moment de liberté quand la connexion a disparu. La courbe est devenue plate comme un élastique tendue. Cela m’a fait l’effet inverse : une détente doucereuse et maligne qui vous dit gentiment : « Ne te laisse pas faire par cette machine barbare. » Mais comme je n’avais pas arrêté de courir elle reprit sans difficulté ses mesures, donnant un maximum d’informations sur rien. Car lorsque vous courez, il ne se passe rien, si ce n’est l’expression heureuse de celui qui se laisse aller pour recharger sa batterie.

Un peu épuisé par ces nouveautés, vous désirez faire une pause. Sans même le lui dire, il s’endort gentiment après une brève période de semi-somnolence, les yeux à demi-fermés. Vous le remettez dans sa pochette toujours aussi belle, aguichante et réelle. Vous avez un téléphone et bien d’autres choses encore. C’est votre deuxième cervelle. Un coup de doigt et vous voilà connecté à vos neurones et au monde dans une gigantesque danse autour de vous, en vous.

Mais… Où suis-je dans tout cela ?

02/01/2015

Heure

Je n’ai pas une heure à moi, s’exclame-t-elle
Et pourtant que de temps elle passe à rêver
Aux jours heureux où elle allait seule
Se promener au village, la jupe courte
Retroussée sur ses genoux dorés
Tous l’admiraient avant qu’elle disparaisse
Un jour de pluie, fondue comme neige au soleil

Depuis les hommes courent à sa recherche
Et ne trouvent que le vide sidéral
Qui recouvre sa vie désespérée
Rien ne viendra d’elle-même. Ni le lys
Ni la rose ne peuvent la sauver
Elle était pourtant belle comme la main
Qui caresse le ventre des phoques
Ou comme la joue odorante et câline
Des femmes en mal d’être et de vie

Mais l’heure est achevée, trompeuse
Elle a tourné la tête du patient
Et comme la mécanique céleste
A déposé l’annonce à la chambrée
Qui sonna cette cinquième partie du jour
Une heure, c’est soixante minutes
Une minute, c’est soixante secondes
En êtes-vous si sûr ?

Elle vivait les heures comme en suçant
Un bonbon à la guimauve
Elle pouvait s’allonger en ver de terre
Elle pouvait rapetisser en gnome
Chaque heure devenait la dernière
Au-delà de la seconde rien que le vide

D’ailleurs on constatait qu’elle errait  
Ignorante de son savoir à venir
Il lui venait d’un coup, comme une pioche
Qui cogne sur le sel et le rend mesurable
Elle n’était payée que cent sous de l’heure
Pour une œuvre de salut public
Regarder l’horloge et annoncer son écoulement
Dans un temps devenu brouillard

Il lui arrivait de passer un mauvais quart d’heure
Arcboutée sur la petite aiguille
Pour l’empêcher de franchir
Le cap fatidique d’une journée
Elle rentrait épuisée de ces séances
Où le froid et l’effort se conjuguaient
Et l’entraînaient dans la folie
Les heures devenaient mortelles
Elles ne s’écoulaient plus
Et rampaient sous ses pieds malhabiles
La faisant choir du haut de ses vingt ans

Elle connut l’amour sans le vivre
Elle mourut à vingt ans et une heure
Vécue son dernier quart d’heure
Lovée sur elle-même, en prière
La prière de quarante heures

De son corps on ne sait rien
Il s’est évanoui le lendemain
Lorsqu’on ouvrit la salle
Où elle reposait, seule et vierge…

Depuis la vie est un désert !

 

© Loup Francart

 

01/01/2015

Nouvel an

Le nouvel an, c’est une valise ouverte sur l’avenir. On y voit le quotidien, mais aussi l’accessoire, l’extraordinaire et, hélas, tout ce que nous ne vivrons plus. Un véritable bric à brac émotionnel, comme un feu de paille qui couve doucement pour exploser ce jour-là par hasard.

Mais ne l'oublions pas, il y a toujours d’autres êtres à connaître, d’autres choses à découvrir, d’autres idées à inventorier. Et chacun de nous garde, dans le secret de son avenir, une infinie possibilité de création.

Alors, tous, n’hésitons pas, plongeons-nous dans cette nouvelle année et, selon les tempéraments, à la brasse ou en nageant le crawl, poursuivons notre aventure le cœur léger.

 

Bon premier de l’an et bonne année 2015 !

 

31/12/2014

Le grand saut (1)

Elle sortit, ferma la porte à clef, jeta son trousseau dans l’herbe de l’allée et s’en alla sans même tourner la tête une dernière fois. Son destin allait se jouer, irrémédiablement en ces quelques heures. Il n’était plus question de regarder en arrière. Tout lui disait : va et ne te retourne pas. Elle n’emportait avec elle qu’un petit sac ne contenant qu’une chemise de nuit, sa brosse à dents et ses pilules pour les maux de ventre qu’elle avait parfois sans prévenir. Elle sourit intérieurement, ne laissant apparaître aux passants qu’une vague lueur de contentement. Elle ne savait pas où elle allait, mais elle partit d’un pas léger et décontracté, dans une ville qu’elle ne connaissait pas encore hier. Elle était arrivée au soir, avait ouvert la porte qui grinçait un peu, avait bu un verre d’eau et s’était couchée dans le grand lit, blotti sous la couette chaude.

Le soleil se levait, l’air était encore frais, mais elle avait besoin d’un certain piquant pour entreprendre ce qu’elle avait décidé sur un coup de tête. Elle devait auparavant récupérer à la gare son sac professionnel. Elle prit ensuite la direction du centre-ville, plus particulièrement de la tour construite en face de la mairie. Arrivé à ses pieds, elle la contempla, impassible, cherchant déjà comment l’aborder. Elle commençait toujours par le haut contrairement à la plupart de ses coreligionnaires. Tout en continuant à chercher la meilleure face, elle trouva un petit jardin empli de végétaux qui lui permettrait de se changer sans être vu par la multitude de passants. Il était important de ne pas se faire remarquer avant de passer à l’action. On risquait d’être environné de curieux dont un, à un moment ou un autre, appellerait le service de police. Elle se changea dans un buisson épais. Elle enfila sa combinaison rouge fluo, ses chaussons, laça ses cheveux d’un mince fil de soie, accrocha son sac de colophane, se recueillit pendant une minute, puis, d’un pas décidé, se rendit au pied de la tour. Elle enfila alors son mince parachute. Il ne la gênait pas, léger et discret, collé au dos. Elle avait choisi de partir à gauche de la porte d’entrée, là où la maçonnerie imitait la pierre avec de larges encoches qui permettait un départ rapide et aisé avant que les passants ou même la police ne tente d’arrêter son initiative. En une minute elle fut hors de portée de tout empêcheur de tourner en rond. Désormais elle ne pouvait se fier qu’à elle-même dans le silence d’une tête bien faite, mais pas encore sûre d’elle. Très vite elle n’entendit plus le bruit de la circulation, juste un léger bourdonnement ininterrompu. Elle avançait à son rythme, ni trop vite pour être sûre d’atteindre le haut, ni trop lentement pour ne pas se lasser ou être surprise par la chaleur de midi. Mécaniquement elle montait d’un bras, d’une jambe, puis de l’autre bras et de la jambe opposée. Parfois elle croisait le regard d’une personne effarée qui, dans son bureau, la voyait passer comme une araignée. Les fenêtres étant fixes, la climatisation étant assurée automatiquement, elle ne risquait aucune ouverture intempestive. Arrivé au 46ème étage, elle eut un coup de barre et dut s’arrêter quelques minutes bien assuré sur un contrehaut de construction. Elle regarda vers le bas. Un certain nombre de spectateurs regardait vers le haut. Une voiture de police se tenait près d’eux, mais les deux policiers étaient intéressés par son ascension et ne semblait pas chercher à l’empêcher de poursuivre. Elle se remit en route, plus lentement, assurant ses prises, restant décontractée, mais vigilante. Ah ! Sa main a glissé sur une prise. S’était déposée là une fiente de pigeon. Elle s’essuya dans son pantalon de combinaison, repris un peu de colophane, et repartit. D’en bas les gens ne sont doutés de rien. Elle avait eu peur tout d’un coup et elle sentit comme un grand vide en elle. Elle respira fort, soufflant jusqu’au fond des bronches l’air de la peur. Elle fit le vide en elle, ne pensant qu’à sa respiration, jusqu’à ce qu’elle retrouve son équilibre mental. Alors elle repartit, avec attention. Arrivée au 67ème étage, elle fit une courte pause, regardant au loin les faubourgs de la ville, oubliant totalement ceux qui se trouvait sous elle. Elle leva la tête et sans trop se détacher de la paroi, compta le nombre d’étages restant à gravir. Une quarantaine encore. La matinée était bien avancée, le soleil commençait à taper sur les vitres réchauffant les montants d’aluminium sans toutefois les rendre brûlants. Elle but un peu d’eau, se remit un peu de colophane sur le bout des doigts et elle repartit avec la même assurance, songeant à rester décontractée et à ne penser à rien d’autre qu’aux prises qu’elle enchaînait sans discontinuer. Peu après, combien de temps elle ne sait pas, elle atteignit le 100ème étage. L’architecte avait construit 102 étages, comme s’il se mettait un défi en tête : dépasser les 100 niveaux, peu importe la suite. Elle attrapa les barreaux de la rampe entourant le sommet de l’immeuble, se glissa entre eux et se laissa aller, heureuse d’avoir fini cette première partie de l’épreuve. Elle pensa à ses débuts, quand avec son père elle escaladait la maison qu’ils habitaient. Il la conseillait sur les prises possibles, lui apprenant à gravir avec sûreté, sans penser à rien. Le mental était si important qu’il l’obligeait à faire quelques postures de yoga avant de commencer à grimper. Elle partait l’esprit libre et tranquille, certaine d’arriver au bout de son effort de concentration physique et mental. Aujourd’hui encore, elle se modèle l’esprit avant toute ascension. Elle sait le moment où elle est prête et peut entrer en mouvement sans problème. Après quelques instants de repos, elle se releva et, s’avançant vers le parapet, fit un signe aux spectateurs qui se tenaient encore en bas. Une grande rumeur lui répondit. Quelques larmes lui montèrent aux yeux. Elle avait vaincu et elle se sentait bien.

30/12/2014

Le liseur du 6h27, roman de Jean-Paul Didierlaurent

Guilain Vignolles prend chaque jour le RER pour se rendre au travail. Et chaque jour, il devient le liseur, ce type étrange qui, tous les jours de la semaine, parcourait à haute et intelligible voix les quelques pages tirés de sa serviette. (…). Et à chaque fois, la magie s’opérait. Les mots en quittant ses lèvres emportaient avec eux un peu de cet écœurement qui l’étouffait à l’approche de l’usine.

Guilain est en charge d’une broyeuse de livres invendus, la Zerstor Fünf Hundert 500, un redoutable engin qui transforme sans pitié les pages en boue gluante. Il lui arrive de récupérer quelques feuilles volantes, jamais un livre complet, ni même un chapitre. Et il les lit dans le RER. Tous attendent cet instant qu’ils passent en rêvant. Arrivé à l’usine, Guilain rencontre le gardien à l’entrée, Yvon Grimbert, un "alexandrophile", qui lui déclame deux vers de sa composition :

« L’averse se précipite, soudaine et mystérieuse,
Cognant sur ma guérite en une grêle nerveuse. »

Pour se distraire et échapper à l’atmosphère pesante, il va voir fréquemment son ami Giuseppe qui s’est fait broyer les jambes par la machine. C’est lui qui le délivrera de cette vie ratée en trouvant le centre commercial où une jeune fille est dame pipi. L’épousera-t-elle ? On ne sait, mais cela semble bien parti.

Il est un jour invité par une vieille dame charmante à faire la lecture dans une pension appelée les Glycines, face à des vieillards qui se délectent de cet instant de plaisir. Jusqu’au jour où il amène avec lui Yvon, rasé de près, l’air plus guilleret que jamais, qui emporte l’adhésion et le relègue dans un rôle de valet de pied. Yvon séduit en un tour de main l’assemblée par quelques vers bien sentis :

« Dieu que ce hall est grand, comme il est imposant.
Nulle entrée ne peut être plus proche du firmament.
Heureux ses occupants, qu’ils savourent leur chance,
D’avoir si bel endroit pour terminer leur danse. »

Un livre à l’histoire loufoque, avec des personnages truculents. On se lasse cependant du récit qui traîne un peu en longueur. Il faut bien faire un roman. L’existence maussade et quelque peu solitaire du personnage principal déteint sur le lecteur. Mais le livre fait malgré tout rêver. Sa cocasserie est exemplaire et parfaitement réaliste. On a l’impression de passer entre les deux feuilles d’un livre à détruire et d’y laisser un peu de soi-même.

29/12/2014

Etonnement

L'étonnement ouvre le corps à l'inconnu et le sort de sa stature habituelle, mais plus encore c'est également l'esprit qui se montre dérouté. La mécanique ne tourne plus, les signes d'anormalité, sous des dehors policés, mettent en évidence l'étrangeté de la situation.

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28/12/2014

Vous arrive-t-il de danser dans la nuit ?

Vous arrive-t-il parfois
En une nuit froide et verte
De courir à la pluie et danser
Nu dans le jardin du père

Vous lancez vos grands rires
Aux étoiles fraichement abattues
Et monte en vous l’ombre
Et le bruit du déhanchement

Du fond de votre boiterie
Vous laissez votre indifférence
Et pleurez en une fois
Sur vos illusions perdues

Mais ce néant qui vous entoure
Vous fait plus fort encore
Que le buis odorant et vieilli

Vous contemplez les eaux usées
Qui s’écoulent en silence
Et y jetez le caillou rageur
Pour emplir votre solitude
D’un plouf retentissant

Où vas-tu ainsi, criez-vous
A votre ombre mouvante
Qui vous entraîne vers le large

Vous ne pouvez résister
Et plongez dans l’eau noire
Irréel vous naissez dans la nuit
Seule une lumière vous guide
Vers la tranche des livres
Vous êtes derrière la bibliothèque
Et feuilletez le décor de la vie
Sans savoir ce qui s’y passe

Et les pages s’égrainent solitaires
Entre les gouttes de pluie
Et la chaleur exubérante
Des fous qui vous entourent

Mais sans doute est-ce vous-même
Qui divaguez dans votre cube
Même en levant les bras
Vous n’arrivez pas à sortir
De ce songe endiablé

Enfin naît le jour attendu
Vous retrouvez vos esprits

Envolée la peur de l’avenir
S’ouvre à nouveau l’espérance
D’une vie nouvelle et tendre
Auprès de celle que vous choyez
Parce qu’elle est le nord
Et le sud et l’est, et même l’ouest
De votre intuition ailée
 

© Loup Francart

27/12/2014

Un cadeau pas comme les autres

Il est sorti de presse. Un dictionnaire appelé à s’agrandir de tous les mots de l’inspiration. Pour l’instant il n’en renferme qu’un peu plus de 73.

A partir d’un terme, laisser dériver son imagination et envisager les différents sens du terme entre la réalité, le virtuel et la fiction.

Oui, cela forme un poème qui se met à vivre et qui dérive loin de son auteur.

C'est un petit livre qui fait un petit cadeau pour que le nouvel an soit plus attrayant. Alors n'hésitez pas, donnez-le à tout vent !

 

Prix : 14,30 €

183 pages

Référence :

ISBN 978-2-7547-2626-9

Format :

13x20 Broché

Mots clés :

vie, existence, âme, poésie

 

Les commandes peuvent être passées :

- Sur le site internet : www.editions-pantheon.fr 

- Par courriel adressé à : commande@editions-pantheon.fr  

- Par courrier adressé à : 

Les Editions du Panthéon

12 rue Antoine Bourdelle

75015 Paris 

- Par télécopie au 01 43 71 14 46

- Par téléphone au 01 43 71 14 72 

- Sur Amazon : http://www.amazon.fr/

- A la FNAC : http://livre.fnac.com/

 

Si par hasard vous l’achetiez et qu’il vous plaît, seriez-vous assez aimable pour mettre une appréciation sur les sites de :

Cela me permettrait d’en faire la promotion.

26/12/2014

Lendemain

http://gloria.tv/?media=479543&language=3SsSaAhCEfb

 

Quelle voix magnifique, tendre et ferme. Une caresse sur les poils de l’ignorance et de la vanité.

Certes, la musique est un peu indolente, propre à secouer les cœurs et à faire venir les larmes. Mais c’est comme un grand frémissement qui secoue l’être et le porte à l’attention malgré lui.

N’est-ce pas cela les lendemains de fête...

25/12/2014

Noël, de l'extérieur

Ils courent tous, comme des fourmis, dans les rues et les échoppes, dans le frémissement continuel d’une musique insipide que des haut-parleurs de quatre sous distillent avec des commentaires stupides sur des achats hypothétiques. Telles sont les veilles des « fêtes ». Et il faut bien courir un peu, malgré tout, ne serait-ce que pour ne pas mourir idiot.

Aujourd’hui, c’est fini. La course est achevée. L’ombre de la paix est descendue sur terre et couvre de son manteau les têtes désensorcelées. Le piétinement des fourmis s’est tu. Elles sont chacune sur leur œuf à le dévorer des yeux et des mandibules. Combien de taches blanches dans ce gris mouvant presque noir. Aucune ne daigne regarder autour d'elle. Seuls les « près de la mort » regardent avec détachement cette parodie de fête. Les enfants aussi, les yeux écarquillés, contemplent un autre enfant dans sa crèche et dans leur innocence sentent battre leur cœur en harmonie avec le sien. Ils savent entrer par la porte étroite, en toute liberté, sans un effort. Leur ignorance leur tient lieu de connaissance ultime.

Il ne s’agit pas de jouer la comédie humaine. Il faut être, dans l’instant, le plus vivant possible, par la transparence et l’absence de consistance. Lorsque vous partez en fumée, plus rien ne vous retient. Vous êtes le monde et bien plus. Ou encore rien et bien moins. Mais ce plus et ce moins ont-ils encore du poids ? Vous passez dans la vie comme l’horloge, comptant les heures, les jours, les années, et à un moment, vous ne savez quand, vous découvrez que cet engrenage n’est qu’un stupide comptage de pas qui relève de la manie. Alors, au lieu de tourner autour de la vie, vous la laissez tourner autour de vous. Et elle tourne toute seule. Immobile vous êtes. Quel repos  et quel bonheur !

24/12/2014

Noël, de l'intérieur

 

LE PERE ENGENDRE LE FILS

PAR LA GRÂCE DE L’ESPRIT

EN L’HOMME DEVENU VIERGE.

Le Père, qu’est-il ? Personne ne le sait. Il est non pas au sens de l’existence, mais de l’essence. L’essence est ce qui fonde l’être de la chose, ce par quoi une chose est ce qu’elle est, ce qui fait qu'elle est ce qu'elle est. « L'essence coïncide avec ce qu'il y a de plus intime et de presque secret dans la nature de la chose, bref ce qu'il y a en elle d'essentiel » (É. Gilson : L'Être et l'essence).

Le Fils, nous l’appréhendons mieux. Mais qu’est-il totalement, nul ne le sait. Il est un point en nous où le Christ peut naître, une grotte (la crèche) qui est au fond de nous-même. Nous ne pouvons commencer à le percevoir qu’en devenant vierge de toutes choses. C’est un point douloureux et libérateur. Douloureux parce qu’une fois perçu l’homme le reperd et languit sans cesse de cette clairvoyance perdue. Libérateur, parce qu’il sait qu’en lui il y a plus que lui-même. Ce moment, la re-création, fait passer de la croyance à la connaissance. Je ne crois plus parce qu’on me dit de croire. Je sais parce que je l’ai éprouvé en moi, même si je le perds à tout instant.

L’Esprit, nous l’éprouvons sans le saisir et le comprendre. C’est le mouvement intérieur qui nous pousse à chercher. Impalpable, insaisissable, il est le vent qui sans cesse nous rappelle la promesse : le Père engendre le Fils en l’homme devenu vierge.

L’homme lui-même, nous ne le saisissons pas dans toute sa profondeur. Nous vivons à la surface de nous-même. Il faut devenir vierge pour pénétrer dans ce mystère unique : chaque homme contient le monde en lui, le vit et peut le sanctifier. Il devient dieu parce que « Dieu s’est fait homme pour que l’homme devienne Dieu ».

Alors, laissons nos pensées, pour nous laisser transformer.

23/12/2014

Le mal

Le mal se donne les apparences du bien
Il revêt ses habits sacerdotaux
Pour mieux séduire le passant
Il passe dans les rues illuminées
Et récite ses litanies ronflantes

Tout va mal, proclame-t-il
Vous êtes mal parti !
Il ne dit jamais où le monde va
Il s’engouffre dans sa diatribe
Et se gondole de plaisir malsain

De mal en pis il avance
A visage découvert, tête haute
L’œil égrillard, la jambe poilue 
Il danse une gigue déhanchée
Et sa musique de bastringue
Fait grincer les dents acidulées

Certains se laissent séduire
Ils courent à tout vent, en toute liberté
Ils suivent le danseur qui s’exhibe
Et pavane devant la foule extasiée

La voie du bien est barrée
Impasse peut-on lire difficilement
Elle est noire comme le ciel
Dans une nuit sans lune
Elle décourage les plus motivés
Qui soupirent à moindre frais

Mal vous en a pris
Vous êtes mal en cour
Mal aimé et mal cuit
Vous errez sans mal dans l’univers
Le cerveau enflé, l’œil désœuvré
Çà la fout mal cette scène
Vous vous sentez au plus mal
Diminué et mal entendant

Mais en vous-même, rayonnant
Vous chantez l’ave maria
Des roses sans épines
Vous regardez au loin
L’étoile du berger
Qui revêt sa lumière éblouissante
Et s’éloigne en catimini

Le mal se donne les apparences du bien
Mais le bien n’a pas de vêtement
Il est la vérité nue, discrète
Et embaume ce monde piquant
De subtils élans du cœur

Nettoyé et attendri
Vous repartez, délivré de cet héritage
Qui tourne mal et s’enfonce
Dans les souterrains de l’abandon

Le bien vaut plus, mais qu’il est mal !

© Loup Francart

22/12/2014

Le salon des beaux-arts au Carrousel du Louvre

 « Chaque année, le Salon des Beaux-Arts s’expose dans les salles du Carrousel du Louvre. Il présente ses peintres, ses sculpteurs, ses graveurs et ses photographes sous le triangle de la Pyramide. (…) C’est dans ce cadre prestigieux que le Salon des Beaux-Arts présente des invités d’honneur, choisis parmi des artistes confirmés. Leur brillante carrière est évoquée en quelques œuvres majeures. Une dizaine de délégations étrangères : Brésil, Canada, Chine, Corée, Espagne, Hongrie, Japon, Suisse, Turquie… révèlent, au cœur de Paris les activités artistiques de tous les continents. Le long des antiques remparts de Philippe Auguste, le toujours jeune Salon des Beaux-Arts fait la belle. La Société Nationale des Beaux-Arts vous propose ainsi d’être le témoin des évolutions majeures de l’art. »

(From : http://www.salondesbeauxarts.com/infos-pratiques/lieu/)

A côté de tableaux sans grand intérêt, on croise quelques toiles éblouissantes. En voici une d’une artiste qui s'ignorait il y a encore quelques années. Elle expose pour la première fois à Paris, et ses tableaux sont étincelants de lumière. Elle n’a exposé qu’un seul tableau, mais elle aurait mérité beaucoup mieux :

Ce ciel reflété paraît plus vrai que nature et quand on y regarde un peu mieux les reflets sont plus colorés que les vrais feuillages. Ce n’est surement pas ainsi dans le monde de tous les jours, mais cela donne l’impression d’un monde divin derrière la réalité quotidienne.

Je ne peux vous en montrer plus, car les tableaux qu’elle expose sur son site http://www.cath-mottier.odexpo.com/pro_page.asp?page=8343&lg= ne sont pas captables. Alors aller voir sa galerie avec ses paysages, ses marines et beaucoup d’autres encore. Les toiles ne sont pas forcément toutes égales, mais laissez-vous enchanter par celles qui vous plaisent et laissez tomber les autres. Admirez en particulier Abyss et Yellowstone 1 et 2. Elles vous enchanteront l’âme.

Une autre très belle toile d’Elslender, artiste dont je n’ai pu trouver le site Internet :

 

Enfin quelques artistes chinois, très divers, figuratifs ou abstraits, mais toujours avec la touche chinoise pour qui l’amour de la peinture se traduit par un pinceau léger et irréel.

 

Tentez votre chance l’an prochain, allez au salon des beaux-arts. Vous en ressortirez optimiste.

21/12/2014

Les HLM nous trompent

Ce sont des HLM rénovés à Champhol, près de Chartres : 4 immeubles, peints en 4 mois, par 4 femmes par immeuble.

Même les détails sont réussis :

Et les HLM sont devenus aériens. Ils font rêver les hommes et les femmes. Espérons que les habitants respirent la joie.

Quelle initiative intéressante !

 

20/12/2014

Avent

L’Avent, c’est le temps délicieux de l’attente
Quand l’obscurité demeure votre seul recours
Vous plongez en vous-même hors de tout discours
Jusqu’à ce que la vacuité vous tente

En un instant la main de Dieu vous prend, hagard
Et vous immerge dans l’abîme cosmique
Le rien devient le tout, vous régnez sur l’Arctique
Vous êtes ensorcelé par ce divin brouillard

Vierge vous devenez, comme la femme
Ouverte sur le monde sans même un requiem
Transfiguré, vous naissez à l’innocence

L’enfant naîtra en vous de l’esprit apaisé
Vous porterez sur les cimes un regard aisé
L’univers se parera de bienveillance

 © Loup Francart

19/12/2014

L'ogre

Il lui reste au fond de sa mémoire un souvenir douloureux d’enfant perdu dans la campagne. C’était un après-midi d’hiver. Il faisait froid, très froid. Il était parti avec un de ses frères en bicyclette  sur le plateau, de l’autre côté du village. Il avait beaucoup plu les jours précédents et progressivement la boue s’était accumulée entre la roue et le garde-boue, finissant par la bloquer complètement. Impossible de revenir sur les vélos, il n’y avait plus qu’à marcher à pied, en soulevant la roue arrière de la machine bloquée par la terre accumulée. Deux kilomètres : c’était trop, car ils étaient déjà fatigués par l’aller et surtout le froid qui ne cessait de les titiller. Grelottant et pleurant à moitié, ils sonnèrent à la porte de la seule maison, au débouché du chemin de terre et de la route. Elle était peu encourageante, encombrée de tas de ferrailles, avec un jardin en friche, sans volet, faite de ciment brut. Ils s’interrogèrent longtemps avant d’oser frapper à la porte, mais le jour tombait et ils n’avaient plus le choix. Une maigre lueur pointait derrière la vitre de la porte d’entrée, ils frappèrent.

– Qui est là ? demanda une voix d’homme un peu éraillé, d’un ton méchant.

– Nos vélos sont cassés et nous ne pouvons rentrer chez nous. Pourriez-vous nous aider ?

– Qu’est-ce que j’en ai à foutre d’aider des gamins. Foutez le camp, vous n’avez rien à faire ici !

L’homme criait d’une voix forte, un peu comme un ivrogne, sans même ouvrir la porte pour voir ce qui se passait.

Ils eurent tellement peur qu’ils partirent sans demander leur reste, essayant de se réchauffer les doigts en soufflant dessus, poussant leurs bicyclettes avec peine, les roues avant et arrière étant quasiment bloquées. De plus il se mit à neiger, à petits flocons qui descendaient dans le cou, s’imprégnaient dans les vêtements et les refroidissaient plus encore. Ils pensaient à l’homme, cet étrange ogre qu’ils imaginaient, vêtu misérablement, chevelu et barbu, l’œil mauvais. Ils étaient au bord des larmes. A mi-chemin, dans une obscurité quasi complète, ils virent arriver une voiture. C’était leur mère qui, inquiète de ne pas les voir revenir, venait les chercher. Ils montèrent dans la voiture, exténués, transis, émettant de petits sanglots, jusqu’au moment où ils arrivèrent au moulin, dans une pièce bien chaude où ils prirent un thé qui leur revigora les esprits. Quel souvenir ! Ce fut leur première expérience de la méchanceté possible de certaines personnes, ou peut-être, de leur égoïsme. Ne pas aider deux enfants de dix ans ! Et encore, les avaient-ils ? Il ne sait plus. C’est aussi l’expérience de l’abandon, première fois où ils durent aller au bout d’eux-mêmes sans pouvoir se reposer sur un autre, plus fort, plus entreprenant. Ce n’est pas drôle de devenir adulte lorsqu’on est un enfant de dix ans !

18/12/2014

Li Siyun, peintre chinois, au salon des beaux-arts (carrousel du Louvre)

Voici ce qu’en dit Michel King, président de la Société Nationale des Beaux-arts (SNBA : cela fait un peu SNCF !).

« Li Siyun est le poète de la solitude. Il réalise les portraits de ses modèles solitaires avec une application attentive qui élabore un convainquant réalisme. La souplesse, les reprises possibles, les glacis savants de la penture à l’huile permettent à celui qui possède toutes ces qualités techniques d’atteindre cette surprenante réalité.

Li Siyun fait l’éloge de la grâce, de la beauté, de l’élégance de jouvencelles chinoises. Vêtues d’habits traditionnels de soie, ceux-ci parfois à demi-abandonnés, elles arrêtent le temps pour notre délectation. Li Siyun est le poète de la réalité rêvée. »

Ce sont de véritables photographies, peintes à la main, avec une délicatesse assez extraordinaire. Malheureusement les photos sont scannées à partir d’un dépliant, ce qui donne cette mauvaise qualité de la reproduction.

Et pourtant, il n’y a pas une seule reproduction sur Internet, ce qui me semble assez extraordinaire. Mais peut-être y a-t-il beaucoup de peintres semblables en Chine ?