07/06/2018
Grandeur et fragilité de l'homme
Ce n’est que lorsque l’homme a pris conscience de sa vulnérabilité qu’il peut concevoir la fragilité des autres et ressentir de l’amour pour eux. Ayant découvert l’universelle fragilité du monde intérieur, il prend conscience de son appartenance à l’humanité et reconnaît en autrui un autre soi-même. Vulnérable comme lui à la dégradation, à l’inaction, au temps qui coule et se disperse, l’autre devient un égal, un proche à aimer. On n’aime que les gens dont on a pu mettre à jour la fragilité. L'homme qui nous semble invulnérable est craint, peut-être idolâtré, mais n’est pas l’objet d’un amour humain.
C’est à travers cette fragilité maladive de l’homme que se conçoit sa grandeur et si sa fragilité n’est qu’une menace, sa grandeur n’est qu’une promesse qui reste à réaliser. L’amour est la force intérieure qui nous aide à tendre vers ce but.
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06/06/2018
Le temps politique (5)
L’usage du temps n’est pas seulement social et culturel, il est aussi, dès l’origine, politique.
1. Le temps comme facteur de légitimation du pouvoir
La maîtrise du temps revêt indéniablement quelque chose de démiurgique. A l’origine, le temps est lié au divin, que ce soit pour sa création (mythe fondateur, création du monde) ou pour la mesure du temps (souvent en lien avec les fêtes religieuses). En Mésopotamie, seul le roi pouvait décréter l’ajout d’un mois supplémentaire. Mircea Eliade explique ainsi le caractère sacré du temps : « Le mythe est donc un bref récit fictif qui, mettant en scène des créatures surnaturelles, renvoie à un Temps originel, celui de la Fondation de la communauté, un Temps Sacré : le mythe est censé exprimer la vérité absolue, parce qu’il raconte une histoire sacrée, c’est-à-dire une révolution transhumaine qui a lieu à l’aube du grand temps, dans le temps sacré des commencements. Étant sacré et réel, ce mythe devient exemplaire et par conséquent répétable, car il sert de modèle et conjointement de justification à tous les autres humains[1] ».
Très souvent, la motivation d’entrée en conflit est liée aux mythes, c’est-à-dire à une vision plus ou moins idéologique de la réalité. Un des objectifs du politique sera donc la démystification de l’idéologie adverse. Cette démystification demande du temps, des moyens, et une volonté. La démystification peut se faire de manière brutale, dans le cadre d’engagements en coercition (le mythe du démiurge tombe brutalement dans l’esprit de ses partisans) mais inversement, dans le cadre d’opérations de stabilisation, seul le temps permet l’évolution des esprits et l’évacuation du mythe.
Tout système dynastique fonde sa légitimité sur la durée.
Désormais, la légitimité est plus complexe, car le changement est aussi perçu comme positif. Le pouvoir peut donc se prévaloir du changement, de la rupture, comme facteur de légitimité. La philosophie des Lumières a particulièrement contribué à véhiculer l’idée de progrès, que la Seconde Guerre mondiale et la barbarie du nazisme, en particulier, ont fait voler en éclat[2].
Les sociétés modernes sont donc sans cesse traversées par la dialectique rupture / continuité. En France, les débats autour du passage du septennat au quinquennat ont illustré ces deux légitimités possibles. Comme le décrivait Raoul Girardet[3], on peut désormais lire la vie politique comme une opposition permanente entre les « héros de la normalité » et les « héros de l’exception ».
2. La rupture : le temps du changement
Le temps des médias est un temps du changement permanent et de l’urgence : en effet, il est plus facile de retenir l’attention des lecteurs en traitant de ruptures qu’en parlant de continuités. Rony Brauman, ancien Président de Médecins Sans Frontières, constatait ainsi que la connivence existant entre médias et acteurs de l’humanitaire d’urgence pouvait s’expliquer par une similitude de tempo.
Il est intéressant de noter que la fonction du politique aujourd’hui diffère grandement des fonctions coutumières du pouvoir. En effet, dans la plupart des civilisations anciennes et même récentes, la fonction du politique est de préserver la stabilité. La Chine se pense par exemple sur ce mode et ne commencera à en changer qu’avec la révolution maoïste.
C’est que le changement court le risque de la trahison : si l’avenir ne ressemble pas au passé, la société est en danger. Préserver la tradition, c’est préserver le message et l’ordre voulu par les Dieux. Le passé est l’exemple.
A contrario, dans les sociétés modernes, le changement est perçu comme une qualité en soi. Le rapport au temps, qui a à la fois perdu son lien avec le sacré et avec la nature (il est dé-naturé, au sens propre), est un rapport de propriétaire et maître (« j’ai du temps », « du temps libre »). Que le temps des saisons ou que le temps des autres, vécu sur un rythme plus lent, viennent interférer avec le temps tel que nous l’avons planifié, et cela est vécu comme une ingérence insupportable dans le quotidien si maîtrisé, à tel point qu’on en appelle au politique au plus haut niveau pour résoudre les contrariétés résultant des effets de la nature (neige, grêle, inondations, etc.). On parle d’ailleurs de « caprices » météorologiques, comme si les saisons, ne respectant pas les besoins humains, s’obstinaient à les contrarier…
- La crise peut ainsi être due soit à la nécessité d’un changement et, dans ce cas, elle semble légitime, soit à des troubles extérieurs qui risquent de dérégler le système qui a besoin en réalité de stabilité.
- Le rôle des forces (armées ou de sécurité) peut donc être soit d’assurer la stabilité face à des acteurs de violence, soit, par la coercition, d’introduire le changement dans un système politique en crise.
[1] ELIADE, Mircea. Mythes, Rêves et Mystères. Paris, Gallimard, 1957.
[2] STEINER, Georges. Dans le château de Barbe-Bleue. Gallimard, 1986.
[3] GIRARDET, Raoul. Mythes et mythologies politiques. Seuil, 190.
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05/06/2018
La fine pellicule du temps
La fine pellicule du temps engendre l’inconstance
A cet instant, là où je suis, où aller ?
En haut, en bas, à droite, à gauche
Droit dans le mur ou contournant les monts ?
A chacun sa stratégie
Il en est qui se lient au destin des autres
Tirant à eux leurs désirs et rancœurs
D’autres naviguent seuls dans leur bateau
Et voguent sur l’eau au gré des vagues
Ils abordent les îles lointaines
Et chantent leurs amours à la lune
D’autres encore, la tête dans la terre
Préfèrent ne pas savoir où ils vont
Ils marchent ou se laissent aller
Tâtant du bout des pieds l’incertitude
D’un avenir inconnu et inenvisageable
J’ai connu ceux qui vont droit devant
Sans se poser de questions
Ils vont, viennent et reviennent
Tournant en rond sans avancer
Croyant avoir fait le tour du monde
Les yeux clos, ils se promènent
Dans l’avenir incertain du brouillard
Il y a aussi ceux qui savent
Ceux-là sont dangereux, voire malsains
Ils expliquent à tous où se trouve le chemin
Mais se gardent bien de l’emprunter eux-mêmes
Ils amassent leur magot et se moquent
Des benêts qui les suivent, haletants
Les pauvres diables sans aide
A qui il manque un sens
Ne s’orientent qu’avec d’autres
Se tenant par la main droite
Et cherchant de l’autre le vide
D’un calvaire qu’ils sont seuls à porter
Il arrive parfois qu’au détour d’un chemin
On trouve l’esthète aux cheveux roux
Qui ronronne de douceur et d’amour
Mais qui ne découvre que l’absence
D’émotions et sentiments
Rendant son cœur sans consistance
Et le laissant sans voix ni contentement
Où donc aller sur ce chemin sans faille
Qui ne conduit qu’à la fin des temps
Quand tout sera consommé, y compris la mort
Que verra-t-on alors au bout de la peine ?
Le sais-tu toi qui contemple chaque jour
Les humains qui se démènent et s’invectivent
Ou encore qui s’entraident et se bénissent
Apportant lumière ou obscurité
Dans la pâle lueur du jour qui se lève
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04/06/2018
Paradoxe
Chacun porte en lui la contradiction du désir de solitude et de la soif de partage.
Partage de la solitude, ce pourrait être le titre d’un livre, l’ébauche d’un rêve,
Mais est-ce possible dans la réalité quotidienne ?
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03/06/2018
Les approches culturelles du temps (4)
1. Trois conceptions du temps
* Le temps sinusoïdal
La première représentation du temps connue est celle produite par les Mésopotamiens. Cette conception est proche de celle du temps cyclique, à la différence que les « cercles » du cycle ne sont pas fermés. Les cycles se succèdent dans le temps, et parfois même, se chevauchent, car un cycle peut commencer avant la fin du précédent. Ce n’est donc pas exactement un nouveau monde qui se crée à la fin d’un cycle.
* Le temps cyclique
Il est immédiatement perceptible aux sens. C’est le temps biologique qui est lié au temps astronomique. Il se découpe en :
- Jour-nuit ;
- Saison ;
- Age de la vie ;
- Cycle de vie selon les espèces ;
- Cycle de vie des cultures et des civilisations ;
- Cycle de vie des planètes.L’homme ne peut qu’harmoniser son action dans ces cycles pour la rendre plus efficace.
La conception du temps cyclique impose souvent de penser le temps très long, souvent en lien avec des mythes. La plus ancienne des conceptions cycliques, celle des Védas (et dont héritèrent par la suite le brahmanisme, l’hindouisme et le bouddhisme) fonctionne ainsi sur les cycles de 12 000 ans. Mais cette conception d’un temps cyclique se retrouve aussi à l’échelle de l’homme, lequel serait condamné à se réincarner (ou à transmigrer d’une façon plus générale).
La cyclologie se retrouve dans nombre de sociétés archaïques, voire plus modernes. Dans cette théorie du temps cyclique, l'écoulement du temps n'est pas linéaire. L’histoire est conçue en cycles immuables pour ramener l’humanité face aux mêmes situations. La durée de ces cycles varie selon les traditions. La philosophie holiste dérive plus ou moins de la cyclologie. Elle explique les parties à partir du tout et devient synonyme d’approche systémique, de pensée complexe, et, de manière dérivée, d’approche globale. C’est un système de pensée pour lequel les caractéristiques d'un être ou d'un ensemble ne peuvent être connues que lorsqu'on le considère et l'appréhende dans son ensemble, dans sa totalité, et non pas quand on en étudie chaque partie séparément.
* Le temps linéaire
Le christianisme a véhiculé une conception linéaire du temps, qui va de la Création à l’Apocalypse. Avant la Création, le temps n’existe pas : Dieu crée le temps pour l’usage de l’homme. Le temps est à la fois linéaire et fini, et l’histoire se dirige vers une fin, ou au moins, une finalité. Cette conception du temps finira par l’imposer, au moins de ne même plus prêter à discussion. Elle sera ainsi reprise par des penseurs aussi divers que Condorcet (idée d’un avènement de la raison), Hegel (avènement de l’Etat comme manifestation suprême de l’Esprit et idée d’un progrès de l’Histoire), Marx (progrès à travers la lutte des classes et avancée vers la suppression des classes).
Cette conception du temps s’est accompagnée d’une vive dépréciation du « temps cyclique », considéré comme archaïque, anti-scientifique, opposé au progrès et politiquement réactionnaire.
2. Le temps calendaire et mathématique
Le temps calendaire est mesuré par division : siècle, décennie, année, mois, semaine, jour, heure, minute, seconde, nanoseconde. Les disciplines diverses se réfèrent généralement à l’une de ces mesures, avec des visions cycliques différentes qu’il appartient au politique et à toute autorité d’homogénéiser.
Cette division du temps en unités d’égales valeurs remonte aux origines de l’histoire de l’humanité. Ainsi, les premières civilisations connues de Mésopotamie utilisaient-elles un calendrier de type luni-solaire de 12 mois et des semaines de 7 jours pour marquer le décompte de la durée, comme son étymologie l’indique (« calendrier » est issu du latin calendarium, « livre de compte »). Dans toutes les civilisations, la mesure du temps se base sur des phénomènes naturels observables : la lune (calendriers lunaires), le soleil (calendriers solaires) ou une combinaison des deux (calendriers luni-solaires).
Le temps calendaire n’est incompatible avec aucune des représentations du temps évoquée plus haut (cyclique, linéaire et sinusoïdal) : il est cyclique au départ puisqu’il se base sur les cycles de la nature (cycles solaires et lunaires), il est aussi linéaire dans le comptage des années, et il peut même être sinusoïdal lorsqu’il doit être aménagé pour mettre en adéquation les cycles solaires et lunaires (rajout d’un jour tous les quatre ans dans notre société, d’un mois tous les trois ans environ en Mésopotamie et en Chine).
De ces décomptes du temps naissent la conception mathématique du temps, conception défendue par Newton. Il envisage le temps comme un absolu mathématique, homogène, indépendant et linéaire. Aristote se demandait déjà si le temps dépendait de la conscience humaine ou s’il était indépendant. Le mouvement des choses, qui marque leur changement et leur corruption, est la preuve de l’écoulement du temps même en l’absence d’une conscience humaine pour l’observer.
3. Le temps comme intuition et durée
Pour Bergson, cette conception mathématique qui découpe le temps en séquences identiques et séparées les unes des autres, est une conception strictement quantitative qui est trop limitée.
La perception du temps n’est en effet pas une évidence. Par exemple, si la plupart des civilisations se représentent l’avenir devant eux et le passé derrière, c’est l’inverse pour les Mésopotamiens comme pour certaines populations d’Amérique Latine (Aymaras en Bolivie, Quechuas) ou les Polynésiens. En effet, pour les premiers, la perception du temps à l’aulne de l’espace transparait à travers l’usage des adverbes ou prépositions : devant et avant sont liés, de même que derrière et après. Quand vous êtes devant quelqu’un, il est avant vous, quand vous êtes derrière quelqu’un, il est après vous. L’avenir étant après vous, il est derrière vous. L’alignement des notions d’espace et de temps est inversé. La manière de parcourir le connu et l’inconnu diffère donc grandement, puisque dans cette conception, on tourne le dos à l’avenir, parce qu’on sait le passé et qu’on peut le voir, alors qu’il est beaucoup plus difficile de concevoir et de visualiser l’avenir.
Il n’empêche, dans toutes les civilisations, le temps reste orienté, allant du passé vers le futur.
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02/06/2018
Rêve vide
Quelle est cette part de rêve qui te prend comme la mort ?
Transpercé d’inconnus, j’erre dans un vide sans fin.
Il est certes plaisant, cet espace sans tort.
Peut-on imaginer un néant aussi plein ?
Le réveil est glacé, où va donc ton esprit ?
Il est parti si tôt, que fait-il entretemps ?
C’est donc cette part de rêve qui comble tes nuits
Et t’empêche de vivre le jour plein ?
Aussi demain c’est promis, je ne viendrai plus
Tourmenter tes journées de rêves insensés ;
Je resterai bien calme sans oser ces abus
Qui ont comblé mes nuits et mes jours enchanté.
© Loup Francart
08:49 Publié dans 42. Créations poèmes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poème, éccriture, poésie, littérature | Imprimer
01/06/2018
Des étoiles, livre de Jeanne Guizard
C’est bien une lettre ouverte à la mère de l’auteur, tellement intime qu’on est parfois gêné de la lire. Elle débute par trois coups de crayon. On entre tout de suite dans le sujet : toi, ma mère, celle qui m’a mise au monde. On s’attend à une certaine gaité, tout au moins de chaleur, dans cette description. Mais on ne nous parle que de ses peines : Toi, Maman, qui as eu mal toute ta vie sans savoir pourquoi. L’amour gouverne sa vie, mais cet amour ne l’a pas rendu heureuse. Une enfance triste, un mariage sans joie, des hommes égoïstes, le père, le mari, le fils. Tu fais partie de l’immense majorité des femmes qui ont été sacrifiées, qui ont vécu sans qu’on les voit. Ces femmes sont l’ombre des hommes, elles sont leur faire valoir. Enfin, elle revient. Elle a mis beaucoup de temps pour atteindre son but : l’amour qui vise le bonheur de ceux qu’on aime.
Le chapitre 2 traite de son père (le grand-père de la narratrice). Un homme de rigueur, et même rigoriste. Il décide et ne veut que la paix. Tu étais jolie, il était fier et heureux de marcher à tes côtés. C’est tout ce qu’il demandait. L’auteur place là son aversion pour la conception de la femme du début du XXe siècle : soumise et triste, rassurant modèle pour un home craignant de perdre ses prérogatives de mâle.
Son mari (chapitre 3) est le même homme : trop à faire pour pouvoir s’occuper des autres. Aucune tendresse, aucune douceur. Il t’a transformé en objet. Elle le choisi contre l’avis de ses parents, parce qu’elle porte le même malheur que lui au fond d’elle-même. Elle a lâché prise, elle est devenue triste, mais elle n'a pas perdu son âme. Il la terrorise, mais maintenant ne peut plus se passer d’elle.
Son fils maintenant (chapitre 4), attendu onze ans après elle, la narratrice. Elle le bichonne, le couve, sans que son père s’en occupe un seul instant. Il n’assure pas la relève de la mère. Pourtant l’enfant doit se sentir le fruit d’un projet à deux. En conséquence, ce fils n’eut pas d’enfant. Il n’en voulait pas.
Toi, l’étoile qui me fait rêver enfin (chapitre 5) qui veille et qui n’existe que par l’attente et la passivité, infirme de trop d’amour. Tu es de ces mères qui donnent tout, même ce que tu n’as pas reçu et tu essayes de faire mieux, toujours. Un mal profond t’empêche d’être vraiment dans le bonheur. Souffrante, tu es cette force qu’on a fait taire.
Le long des jours (chapitre 6), tu sais que tu as fait ce que tu avais à faire. Comment la souffrance t’atteindrait-elle encore ? La colère a disparu, tu ne souffres plus dans ton cœur. Tu n’as pas peur de la mort. Mais tu t’occupes de ton mari, tu le transforme et il t’offre sa vie. Tu le sauves et tu donnes sens à ton mariage.
Vous allez ainsi vers une autre vie (chapitre 7), parlant une nouvelle langue, celle de l’amour. Tu as réalisé ton rêve, tu as réussi à lui donner tout cet amour dont il a manqué. Mais la fin reste pessimiste. Ils se tiennent les mains : les tenir ainsi jusqu’à la fin finale, les serrer, ensemble, jusqu’au froid, le froid final.
Que dire ? Peut-on parler d’une telle lettre, dite dans l’intimité familiale, avec ses non-dits et ses trop-dits ? C’est avant tout une belle confession de la part de l’auteur. Se mettre à nu devant tous et oser dire ce que l’on garde dans son cœur jusqu’à la fin parce qu’on n’a pas su ou voulu l’exprimer. C’est un acte d’amour sans nul doute.
Mais cet amour concerne-t-il ceux qui lisent ce recueil ? Peuvent-ils accéder et adhérer à cette description acerbe qui devient plaidoyer pour les femmes et attaque de la société patriarcale du XIXe et première moitié du XXe siècle ? Oui, sans doute. Mais n’existe-t-il pas, au moins en parallèle, une vie autre, un refuge qui donne à ce passage sur terre un souffle de libération malgré les embûches et les contraintes de la vie en société ? N’y a-t-il pas eu en cette femme des moments de joie intense, d’exaltation bienheureuse, des instants où elle sut sortir d’elle-même et s’élever en pleurant de bonheur ?
Le style est beau, parfois poétique : L’automne est arrivé, c’est la saison que tu préfères. Les jaunes, les rouilles, les rouges fleurissent et commencent à descendre vers le sol dans un ait légèrement frais. C’est un festival de couleurs qui lâchent prise, qui s’effondrent. Le ton peut aussi être revendicatif, principalement envers les hommes. Il y a deux mondes : celui de la vie publique, celui des hommes, et celui du cœur qui appartient aux femmes. Peut-être un peu manichéen, malgré tout. Les êtres vrais participent aux deux par transformation progressive d’eux-mêmes.
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31/05/2018
Paradoxe
Voir et entendre :
La vue et l’ouïe sont les sens de la contemplation,
Sens que l’on remarque plus développés chez l’animal que chez l’homme.
07:12 Publié dans 45. Maximes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : maxime, sentence, méditation, paradoxe, adage, aphorisme, apophtegme, précepte | Imprimer
30/05/2018
Les concepts constitutifs au temps (3)
La mémoire dans la perception du temps
Prenons conscience que nous ne percevons le Chronos, c’est-à-dire le temps, que grâce à la mémoire. Sans mémoire, l’ordre temporel n’existe pas. L’on perçoit la simultanéité des évènements, mais leur succession est déjà difficile selon le type de perte de mémoire et les notions d’instant et de durée sont confondues dans un magma difficile à démêler.
Au-delà de la mémoire, la perception du temps est liée à la vision du monde que lui donne la compréhension des données accumulées dans la mémoire. Cette perception est donc culturelle, et, même si, de nos jours, l’adhésion à la culture scientifique fait que progressivement les perceptions se rejoignent, elles restent encore assez différentes selon les continents et les cultures.
L’expérience humaine du temps
La réflexion sur la notion de temps ramène donc l'homme à son expérience intime. Le temps n'est pas une chose qu'on peut saisir dans l'espace, c'est au contraire une sorte d'espace mental où se déroulent les choses. Cette expérience se déroule à plusieurs niveaux :
* Le niveau des rythmes biologiques et des réflexes. Mis en évidence par Michel Siffre, on constate que l’expérience consciente du temps est encadrée par notre fondement organique structuré autant temporellement que spatialement.
* Le niveau du présent psychique, où les relations de durée, de succession et de simultanéité ne sont pas seulement pensées, mais éprouvées et vérifiées.
* Le niveau de la réflexion qui double l'expérience du « présent » par la représentation objective du passé et de l'avenir et par l'estimation relative et quantitative de ces portions de temps reconnues comme absentes.
La subjectivité du passé
Dans le présent, grâce à la mémoire, puis la réflexion, je peux penser une réalité passée. Mais le souvenir ne correspond jamais exactement à l’événement tel que je l’ai vécu. Nos souvenirs sont toujours des interprétations, des reconstructions.
Ce qui importe dans le souvenir, ce n’est pas de se souvenir exactement d’un événement, mais plutôt de lui donner un sens selon ce que la vie a fait de nous. Évoquer le passé, c’est donc toujours lui donner un sens. Évidemment, le passé en soi ne change pas, c’est l’interprétation que nous en faisons qui peut évoluer en fonction de notre présent, de notre futur. Cela montre bien l’unité de notre existence : je pense mon présent comme résultant de mon passé et s’ouvrant sur mon futur. Il y a donc bien un lien entre l’existence et le temps.
Nous nous construisons par la mémoire : nous ne pouvons faire table rase de notre passé. En revanche, l’homme est libre en ce qu’il interprète librement son passé. Il peut toujours décider d’en faire un appui positif. Cette conservation du passé par la mémoire, aussi subjective soit-elle, nous constitue. Cela signifie aussi accepter la complexité de la vie : il n’existe pas de vérité une et stable, la valeur d’un événement, le sens qu’il prend peuvent évoluer au cours de notre vie.
Le futur
Le passé est l’accumulation des temps antérieurs, selon des rapports chronologiques (succession) et chronométriques (les durées relatives). L’instant physique n’existe à vrai dire pas, puisqu’il se réduit à une durée nulle. Chaque instant se résume à un passé dès le moment où l’on y pense. Par contre, l’instant psychologique a une durée propre qui dépend de l’état d’esprit de celui qui le perçoit. Le futur est l’ensemble des présents à venir. Seuls les contenus à venir, les événements futurs, sont susceptibles d’être encore modifiés. C’est ce qui fait que l’avenir n’est pas encore.
Le propre de la conscience humaine est de se projeter vers le futur. Or, la conscience de notre mortalité se pose comme une limite à nos projections dans le futur. La conséquence de cette prise de conscience, selon Heidegger, c’est le souci, autrement dit la préoccupation quant au sens que je vais donner à mon existence. C’est ce souci qui nous fait pleinement humains (les animaux n’ont pas ce souci du sens qu’ils vont donner à leur existence).
Se pose alors la question existentielle : C’est le grand sujet d’ordre politique. Peut-on agir sur le futur par des actions dans le présent ?
D’emblée répondons "oui", il est possible d’agir sur le futur et d’influencer le présent pour qu’il conduise à un avenir envié. Depuis peu, la recherche opérationnelle s’organise autour de ces problèmes. Il s’agit de maîtriser les éléments de la décision pour la rendre la plus efficace possible. En amont de la décision, on trouve différentes étapes : recueil de l’information, capitalisation du savoir, enrichissement par la connaissance, puis la démarche d’anticipation par la prospective. La décision s’exprime par la définition de ce que l’on veut, pourquoi on le veut, vers quoi cela va nous mener, les scénarios possibles dans le contexte et les actions à conduire pour l’atteindre. La difficulté est de disposer d’une vision globale du problème et des volontés opposées. C’est le propre de la stratégie, du grec stratos qui signifie « armée » et ageîn qui signifie « conduire ». La stratégie consiste à la définition d'actions cohérentes intervenant selon une logique séquentielle pour réaliser ou pour atteindre un ou des objectifs. Elle se traduit ensuite, au niveau opérationnel en plans d'actions par domaines et par périodes, y compris éventuellement des plans alternatifs utilisables en cas d'évènements changeant fortement la situation.
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29/05/2018
Prière
A quoi crois-tu ?
A la lumière qui est en moi.
Elle n’est pas de moi.
Elle était avant que je sois.
Lorsque je ne suis plus, elle est.
Je ne peux la retenir.
Mais si je ne cherche rien,
Elle éclaire le néant.
Elle me consume,
Elle éclaire ma nuit,
Mais n’apparaît sans défaillance
Que dans l’anéantissement.
Alors prend-moi !
Éclaire ce vide immense
Qui s’ouvre au fond de moi
Et que ton feu réchauffe mon être !
© Loup Francart
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28/05/2018
7 façons d'être heureux (2)
Luc Ferry explicite alors ces 7 façons d’être heureux dans le monde contemporain. En réalité, il me semble que la première façon qu’il décrit n’est que l’explicitation de ce qui a été développé au cours de l’avant-propos, à savoir qu’il existe deux façons antinomiques d’envisager le bonheur. La première est que le bonheur ne dépend pas des autres ni de l’état du monde, mais de notre capacité à nous mettre en harmonie avec notre moi profond. La seconde est que le bonheur dépend inversement de l’état du monde extérieur et du sort des autres, en particulier de ceux que nous aimons. C’est donc un état fragile, provisoire et inaccessible à tous durablement par soi seul. Ces deux thèses s’opposent fondamentalement, pire même, la première, si elle devient obsessionnelle, rend malheureux et enferme l’individu dans une déconnexion du monde et des autres. C’est principalement pour cette raison que l’auteur préfèr nettement la seconde : identifier autant que faire se peut, ce qui nous rend heureu dan la lucidité et viser les joies les plus simples plus qu’un bonheur individuel nécessairement fictif. Luc Ferry livre alors ses 6 et non sept façons d’être heureux : aimer, admire, s’émanciper, élargir l’horizon, apprendre et créer, agir.
* Aimer
Deux extrêmes dans l’amour : l’amour individualiste et érotique de Don Juan, ou l’amour courtois et mystique de Tristan et Iseult qui exige la sortie de soi et la mise entre parenthèses de l’égo érotique. Le premier rejoint le partenaire par la possession, le second par l’annulation de son moi. Dans ce chapitre, Luc Ferry fait une excellente analyse de la finalité du mariage dans la théologie chrétienne. Son objet n’est pas la transmission de la vie, mais de sauver les relations entre mortels, de les penser de manière durable sur fond de bonheur. Le mariage permet de dépasser la nature de l’éros, d’unifier le corps et l’âme et de les fondre en un tout qui permet à l’homme de devenir pleinement lui-même.
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27/05/2018
Les concepts constitutifs au temps
Ne pouvant définir le temps en lui-même, il importe de se poser la question des concepts qui permettent son approche. Ils sont nombreux et donnent une vision élargie de la temporalité.
La notion de chronos
Le Chronos est le tout du temps, relatif au présent : « Hier était le jour précédent et demain sera le jour suivant parce que je suis aujourd’hui. ». Il est un point mouvant sur la flèche du temps qui définit les infinis à ses deux bornes.
Le chronos, ou temps historique, découpe le temps en trois périodes :
- Le passé qui désigne l’espace du réel qui n’est plus, avant le présent ;
- Le présent qui désigne l’espace du réel, entre le passé qui n’est plus, et le futur qui n’est pas encore ;
- Le futur qui désigne l’espace du réel qui n’est pas encore, après le présent.
Les conséquences de la notion de chronos :
- Compréhension de l’irréversibilité du temps : ce qui est vécu, est vécu.
- L’amélioration des sociétés et de l’humanité se prépare dans l’avenir et se joue dans le présent. On ne peut revenir sur ce qui a existé.
Temps et espace
Cette représentation du temps est assez proche d’une représentation de l’espace en deux dimensions. Mais si dans l’espace, on peut se mouvoir dans les deux sens, sur l’ensemble de la droite, dans le temps, une seule direction est possible. Il n’y a pas de retour en arrière, ni même d’arrêt sur la droite. Temps et espace sont indissolublement liés dans notre monde.
Le rapport temps-espace se vérifie dans le mouvement. Celui-ci n’est pas seulement dépendant d’un espace défini, mais il ne peut se dérouler que dans un temps donné. Ainsi l’on mesure un déplacement soit en fonction de l’espace (kilométrage), soit en fonction du temps (durée). Le mouvement se fait donc dans la durée et si le temps venait à s’arrêter plus rien ne bougerait. Ce qui signifie que le temps suppose le changement.
L’homme moderne s’est donné comme objectif de maîtriser le temps des déplacements dans l’espace grâce à la vitesse. Il ne s’agit plus seulement de maîtriser les déplacements physiques de personnes ou de marchandises, mais également les déplacements de données, d’informations, qui doivent dorénavant suivre l’actualité en temps réel.
Changement et permanence
Le commun des mortels a bien conscience de ces changements subtils ou brutaux qui affectent notre monde : les objets et le vivant sont altérés par des évènements et ce processus s’intègre dans un temps partagé par tous ceux qui ont conscience de son cours. Mais, en parallèle, ces objets demeurent semblables, numériquement, malgré les changements qu’ils subissent. Le temps semble donc supposer à la fois changement et permanence. Un des grands rêves de l’homme est de pouvoir imprimer sa volonté sur ces deux facettes du temps : accéder à la permanence, c’est-à-dire la stabilité en maîtrisant le changement. C’est le rêve, le mythe ou peut-être la réalité du paradis, un monde sans changement, donc sans temps, qui signifie dans l’esprit de chacun un monde sans problèmes, dont un monde de parfait bonheur.
Simultanéité-succession, instant-durée
Le terme de simultanéité signifie qu’à un même moment se déroule conjointement de nombreux évènements en rapport ou sans rapport entre eux. En corrélation, si deux évènements ne sont pas simultanés, ils sont successifs et se suivent dans le déroulement du temps. Le concept de chronos se double d’une troisième dimension, la simultanéité le long de la droite du temps qui la transforme en espace temporel, dans laquelle les évènements se déroulent éparpillés, mais dans un ordre immuable celui de l’antériorité, de la postériorité et de l’en-même temps.
De ces notions on ne peut déduire l’instant, c’est-à-dire le moment du changement, du passage de la postériorité à l’antériorité, qui peut être, selon les évènements que l’on considère, un instant ou une durée, très variable en fonction des perceptions et de l’attente de chacun. Le philosophe Bergson oppose la durée pure, qui est le temps vécu, à la variable numérique T, qui est le temps spatialisé. Pour Bergson, la conscience, qui s'accroît sans cesse, ne sépare pas ces continuelles acquisitions. Or, c'est à elle qu'il faut demander l'origine de l'idée de succession, qui suppose la mémoire et qui ne correspond à rien de matériel ; il faut donc penser la succession sans distinction : c'est en cela que consiste l'intuition de la durée pure.
07:49 Publié dans 11. Considérations diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : temps, espace, instant, durée | | Imprimer
26/05/2018
Maxime
Le sens cosmique, c'est le sens de l'affinité des éléments entre eux dans et par le logos.
C'est le sens de l'amour universel
A travers l'amour des particuliers
07:05 Publié dans 45. Maximes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : maxime, sentence, méditation, paradoxe, adage, aphorisme, apophtegme, précepte | Imprimer
25/05/2018
7 façons d’être heureux, de Luc Ferry (1)
Dans son excellent livre intitulé 7 façons d’être heureux ou les paradoxes du bonheur, Luc Ferry livre sept visions d’envisager les rapports entre l’homme et le monde pour être heureux, constatant qu’actuellement la mode est à la recherche du bonheur sous toutes ses formes.
Il fait un constat initial : nous cherchons tous désespérément le bonheur, mais cette quête est illusion, car tout ce qui nous rend heureux est aussi ce qui peut nous rendre le plus malheureux. Il constate que dans la plupart des sagesses anciennes, l’idée de bonheur occupe une place centrale dans la réflexion sur le sens de l’existence. Or le catholicisme bouleverse cette vision. Dans l’ici et maintenant, ce sont les maux inhérents à l’existence humaine qui nous donne l’occasion de nous y préparer, de trouver notre voie vers le salut. L’église aurait ainsi élaboré au fil des siècles une véritable philosophie du malheur qui souligne les vertus potentiellement rédemptrices de la misère. Pour surmonter ces épreuves, il faut espérer en une autre vie et faire mourir la mort. Pour que la bonne nouvelle puisse enchanter le monde, il faut y croire, c’est-à-dire avoir la foi.
Ce n’est qu’à l’époque moderne que cette vision évolue. On passe d’une éthique catholique à une étique républicaine qui consiste, dans le sillage de la parabole des talents, à lier la notion de mérite à celle du travail et à la pénibilité, sécularisant ainsi les formes de dépassement de soi du christianisme. Ainsi, la valorisation catholico-républicaine de l’effort et du mérite lié à la pénibilité du travail marque donc une rupture totale avec les visions morales du monde à la fois aristocratiques et eudémonistes qui caractérisaient la pensée antique. C’est donc deux visions différentes qui vont se développer au XXe siècle et qui s’opposent en ce qui concerne le bonheur : la vision républicaine pour qui le bonheur ne vient que grâce aux produits du travail et la vision utilitariste anglo-saxonne de Jeremy Bentham qui développe une morale du bien-être et, au-delà, une morale de la liberté. Cette éclatante version met en évidence l’eudémonisme, vision dans laquelle les humains sont d’abord définis comme des êtres qui ont un intérêt fondamental, prioritaire et indiscutable, au bonheur.
Ces deux versions peuvent être complétées par une troisième thèse définie par André Comte-Sponville : le sage est celui qui parvient à regretter un peu moins, à espérer un peu moins, à aimer un peu plus. Aimer ce que nous avons ici et maintenant, plutôt que de désirer sans cesse ce que nous n’avons pas, voilà le secret !
08:45 Publié dans 41. Impressions littéraires | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : bonheur, malheur, religion, morale, désir | Imprimer
24/05/2018
La notion de temps (1)
Le mot « temps » provient du latin tempus, de la même racine que grec temnein, couper, qui fait référence à une division du flot du temps en éléments finis. Il est à noter que temples (templum) dérive également de cette racine et en est la correspondance spatiale (le templum initial est la division de l’espace du ciel ou du sol en secteurs par les augures). Enfin, « atome » (insécable) dérive également de la même racine.
Dans la vie courante, le terme a plusieurs acceptions :
- Durée dans laquelle se succèdent les évènements, les jours, les nuits… Ex : Le temps passe et rien ne change ;
- Durée mesurable (Synonyme : période) Ex : Combien de temps partez-vous en vacances ?
- Délai. Ex : Donnez-lui du temps pour payer ;
- État de l'atmosphère (Synonyme météorologie). E x : Quel beau temps !
- Moment propice, occasion. Ex : Le temps de la révolte a sonné.
Le temps est un concept plus qu’une réalité. Mais, simultanément, c’est la réalité qui nous donne notre conception personnelle du temps. Le concept permet de nous représenter la variation du monde : nous savons par expérience que l'univers n'est pas figé, il se compose d’éléments qui bougent, se transforment et évoluent pour l'observateur qu'est l'homme qui, lui-même est changeant.
On pourrait donc définir le temps comme un milieu indéfini où paraissent se dérouler, irréversiblement, les existences dans leurs changements, les évènements et les phénomènes dans leur succession.
Mais quelle est la nature intime du temps : est-ce une propriété fondamentale de notre univers, ou plus simplement le produit de notre observation intellectuelle, de notre perception ? Deux conceptions qui s’opposent sans que l’on puisse actuellement trancher.
C’est en ce sens que Saint Augustin écrit dans ses Confessions (XI, 14, 17) : « Ce mot, quand nous le prononçons, nous en avons, à coup sûr, l’intelligence et de même quand nous l’entendons prononcer par d’autres. Qu'est-ce donc que le temps ? Si personne ne m'interroge, je le sais ; si je veux répondre à cette demande, je l'ignore. » Bien que l’intuition du cours du temps soit universelle, définir le temps en lui-même semble au-delà de nos capacités. D’ailleurs, conscient de cette difficulté propre à toutes les notions premières, Pascal estimait que le temps est de ces choses qu'il est impossible et même inutile de définir : « Le temps est de cette sorte. Qui le pourra définir ? Et pourquoi l'entreprendre, puisque tous les hommes conçoivent ce qu'on veut dire en parlant de temps, sans qu'on le désigne davantage ? » (De l'esprit géométrique).
08:54 Publié dans 11. Considérations diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : temps, espace, instant, durée | Imprimer
23/05/2018
Solo de Vincent Peirani à l’accordéon
https://www.youtube.com/watch?v=Z9SYcd9kfIQ
Est-ce de la musique ou même des bruits. On ne peut les catégoriser. Ces bribes de sons sont pourtant attirantes, mais on ne peut dire enchanteresses.
Il n'empêche, il faut être virtuose pour les déclamer sur l'accordéon.
08:35 Publié dans 51. Impressions musicales | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : accordéon, musique moderne, voix et sons | Imprimer
22/05/2018
Paradis ou enfer
L’enfer est pavé de bonnes intentions,
A constaté Bernard de Clairvaux.
A-t-on entendu dire que la route du ciel
Est pavé de mauvaises intentions ?
Si le chemin de l’enfer est pavé d’intentions
Pour mieux conduire à l’ébullition,
La route du ciel serait-elle plus belle
Parce qu’elle est faite d’interventions ?
Le paradis n’a pas de route,
Juste un petit chemin sans tension
Ni même pavés lourds comme un cœur.
On n’y monte pas en droite ligne,
Mais en s’égarant autour de soi.
Certains même, sans y penser, redescendent
Pour aider les inconnus à choisir
La route buissonnière et l’éclat de l'affection.
Le chemin du paradis serait-il pavé
D’aimables et légères attentions ?
© Loup Francart
08:46 Publié dans 42. Créations poèmes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poème, littérature, poésie, écriture | Imprimer
21/05/2018
Apophtegme
Étrange comme le désir assouvit sans amour paraît à l’homme une bassesse.
Sublimé par l’amour,
Il devient une révélation de soi, un agrandissement de l’être.
07:05 Publié dans 45. Maximes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : maxime, sentence, méditation, paradoxe, adage, aphorisme, apophtegme, précepte | Imprimer
20/05/2018
Vertige
Ton coeur vacille
Tu te vides de toi-même
Et ton âme, est-elle ?
07:11 Publié dans 31. Pictoème | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : optique art, recherche, espérance, haïku | Imprimer
19/05/2018
L'amour
L’amour, c’est la vie en chœur
Perçue de tous les pores de ta peau
De tous les battements de ton cœur
De tous les lobes de ton cerveau
L’amour révèle l’invisible de l’être
Il est trou d’air sans parachute
Mais fait grimper l’altimètre
Et te transforme en cocotte-minute
C’est un personnage discret
Il arrive sans crier gare
Il se révèle toujours prêt
À assaillir les plus barbares
Alors le nuage d’inconnaissance
T’empoigne sous tes ailes
Et te renvoie à l’adolescence
À cheval sur un morceau de ciel
L’être aimé devient lumière
Qui éclaire la marche de la vie
De tes aspirations devenues sanctuaire
Il devient ton unique liturgie
Et dans ton exclusive église
Tu pries à genoux devant l’être
Qui t’incline à la prêtrise
Et à toi-même te fait naître
L’amour est le mystère dévoilé
Par la déchirure du quotidien
D’un geste brusque du désarmé
Devant le féminin ou le masculin
Mais l’amour reste un mystère
Car lorsque le mystère meurt
L’amour devient cimeterre
Et s’enfuit, emportant le bonheur
© Loup Francart
07:41 Publié dans 42. Créations poèmes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poésie, écriture, poème, littérature | Imprimer
18/05/2018
L'officier du XXI° siècle (4/4)
La formation :
La formation de cet officier impose au départ des hommes et des femmes qui disposent déjà d’un héritage culturel et technique acquis au cours de leurs études. Cette formation universitaire n’est pas le propos des écoles militaires. En revanche, les qualités énumérées doivent être inculquées dans les grandes écoles militaires avec une pédagogie bien différente de l’enseignement didactique qui constitue la majorité des cours actuels. Ce serait une pédagogie de confrontation avec la réalité, à base de mise en situation, de réflexions personnelles et d’efforts en équipe. Elle doit mettre en concurrence les officiers avec les autres écoles de formation de la nation : politique et affaires étrangères, commerce et management, magistrature et police, journalisme, technologies de l’information, etc.
Pour être bref, cette formation doit développer chez l’officier trois grandes capacités qui sont complémentaires et indispensables pour faire face au monde du XXI° siècle :
. Capacité à penser l’évolution du monde, des sociétés, des faits : penser la pensée et non puiser dans l’appris en utilisant des concepts tout faits ;
. Capacité à utiliser des méthodes et à les réviser en permanence pour appréhender le nouveau : l’analyse et la logique sont les disciplines premières de tout décideur, y compris pour comprendre l’irrationnel ;
. Capacité à utiliser, créer, adapter les outils pour mieux connaître, comprendre, anticiper et s’organiser.
La liste pourrait être poursuivie, au risque de perdre sa pertinence. Certes, le lecteur va penser que ce tableau de l’officier de demain n’est pas différent de celui d’un chef d’entreprise, d’un chef d’expédition ou même d’un haut fonctionnaire. Oui, c’est exact, mais c’est aussi parce que l’officier de demain sera engagé dans ses décisions avec des aventuriers, des décideurs de L’État, des décideurs économiques, des patrons d’ONG, des magistrats. Ces mondes professionnels, impliqués dans toute crise ou conflit, ne peuvent plus travailler séparément, mais doivent unir leurs efforts pour apporter un monde meilleur.
07:32 Publié dans 11. Considérations diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : buts de vie, qualités, aspiration, idéal | Imprimer
17/05/2018
L'officier du XXI° siècle (3)
Les qualités morales d’un officier :
- Être prêt à faire face à l’imprévu, voire l’imprévisible, dans des domaines autres que son champ de compétence et dans le même temps pouvoir utiliser le quotidien pour faire évoluer les choses ;
- résister : à l’épreuve, à l’échec, à la critique, à l’ambiance, au découragement, au conformisme, tout en étant capable de s’adapter au milieu (organisation, personnes, manque de moyens, opposition, etc.) ;
- croire en soi tout en se remettant en cause en permanence ;
- être ouvert et en recherche du monde, sans cependant céder à la mode du moment.
Les qualités professionnelles :
- Aptitude à convaincre : Être capable d’expliquer le pourquoi et le quoi de ce qu’il fait et fait faire, donc d’emporter l’adhésion dans un monde d’incertitude où tous se cherchent, où les réponses ne peuvent être toutes faites, mais doivent être crédibles, morales et efficaces.
- Aptitude à entraîner les autres sans pression : Définir des buts clairs, précis, inattaquables et les objectifs qui permettront de les atteindre ; les expliciter ; entretenir l’intérêt et la conviction.
- Aptitude à comprendre l’autre, adversaire en particulier : savoir dialoguer en oubliant ses points de vue, opinions, attitudes ; mais aussi savoir ne pas céder au consensus mou et au dialogue improductif, dans lequel la décision et la volonté de faire avancer les choses sont absentes.
- Aptitude à négocier : comprendre sans perdre de vue ses propres objectifs et en étant suffisamment créatif pour trouver des voies et des solutions conciliant les objectifs des parties en présence.
- Aptitude à contourner l’adversaire quel qu’il soit sans s’affronter avec lui : le mettre en situation d’accepter l’évidence qu’il refusait jusque là.
- Aptitude aux situations d’urgence dans le chaos et l’imprévu, face à des dangers non identifiés.
07:19 Publié dans 11. Considérations diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : buts de vie, qualités, aspiration, idéal | Imprimer
16/05/2018
L'officier du XXI° siècle (2)
L’environnement de son action :
- Un monde où personne ne veut être pareil, mais où tous pensent de la même façon : penser autrement les problèmes ;
- Une société qui refuse l’imprévu et s’accroche à des visions souvent dépassées : sans cesse revoir sa vision du monde ;
- Des dirigeants sans projet ni stratégie qui gèrent le conformisme et l’utilisent pour se maintenir au pouvoir : convaincre et à petits pas changer leurs habitudes ;
- Des cultures où se côtoient le pire et le meilleur, mais dans lesquelles le réalisme est synonyme de voyeurisme : c’est par la beauté que les mondes se rencontreront ;
- Des hommes extraordinairement créateurs, productifs et visionnaires qui sont rejetés par les systèmes en place : savoir les faire participer aux projets tout en respectant leur épanouissement ;
- Des situations de crise qui se caractérisent par la rupture avec le connu, le chaos et l’imprévisible, l’urgence des décisions à prendre, l’apparition de dangers non identifiés, des risques importants dans l’action ou l’inaction, des conséquences lourdes et difficiles à assumer.
07:10 Publié dans 11. Considérations diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : buts de vie, qualités, aspiration, idéal | Imprimer
15/05/2018
L'officier du XXI° siècle (1)
On m’a demandé un article sur l’officier du XXI° siècle. Sachant que ce sujet a déjà été traité maintes fois, ma réponse ne reprendra pas l’ensemble des réflexions déjà énoncées, mais s’efforcera de présenter ce que je considère comme essentiel et insuffisamment exprimé.
Cette réponse est volontairement lapidaire, au risque de contrarier les amateurs de belles phrases. Elle est volontairement provocatrice, au risque de mécontenter les « militairement correct ». Elle est volontairement brève au risque d’être incompris. Elle constitue certes un idéal inatteignable, mais ne pas le fixer reviendrait à ne pas croire en l’homme et à ne pas savoir quoi viser. La barre est haute, mais que faire de sa vie si sans cesse on ne tente pas d’en tirer le meilleur pour les autres et le monde.
L’officier de demain :
- Un chef qui attire le respect sans jamais chercher à être approuvé au détriment de l’efficacité ;
- Un décideur qui sait expliquer pourquoi il choisit telle solution ;
- Un manager qui fixe des objectifs à son équipe, mais qui n’interfère pas dans les responsabilités définies, sauf au bilan pour juger ;
- Un créateur qui cherche des solutions inédites aux problèmes ;
- Un communicateur qui convainc ;
- Un praticien qui combine réflexion, décision et action physique ;
- Un stratège qui manœuvre ;
- Un ascète qui sait profiter de la vie et se contenter de peu ;
- Un esthète qui s’intéresse à d’autres domaines que sa spécialité ;
- Une personne qui fait confiance à d’autres personnes ;
- Un humaniste (a Renaissance Man, comme le disent nos amis américains) qui élabore sa propre vision du monde et la révise en permanence.
(A suivre)
07:37 Publié dans 11. Considérations diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : buts de vie, qualités, aspiration, idéal | Imprimer
14/05/2018
Mozart-Beethoven, le dialogue imaginaire, pièce en un acte d’Alain Aubert
En guise d’introduction :
L’action se déroule le 26 mars 1827. Mozart, délivré depuis plus de trente ans de ses difficultés terrestres, bénéficie d’un repos au panthéon réservé aux artistes ayant bien mérité de l’humanité. L’annonce est faite de la mort de Beethoven. Mozart, qui sait quel musicien Beethoven a été, demande à le rencontrer. Beethoven refuse… Mais la rencontre aura lieu.
Cela commence par un marivaudage qui dure très et même trop longtemps, chacun des deux compositeurs se lançant de méchantes gentillesses à la manière des préciosités du XVIIIe siècle. Beethoven raconte son entrevue avec Mozart, alors au sommet. Il en conserve un souvenir douloureux. Il cherchait un véritable maître aux qualités d’écoute et de respect, il ne rencontre qu'un homme débordé et perd sa confiance en lui alors qu'il venait chercher un réconfort.
En fait, on ne commence à parler de musique qu’à presque la moitié de la pièce, en évoquant Haydn et Kant, les Italiens et des princes qui accordent ou non leur faveur. Le ton devient alors plus amène, les angles s’arrondissent et l’on commence à disposer de dialogues intéressants. Beethoven parle de la difficulté d’innover, de l’impératif pour l'artiste de trouver une expression personnelle dans sa discipline, d’être un visionnaire qui transpose la perception de l’environnement en une proposition sans cesse renouvelée. Mozart, vieux jeu, s’attache à moderniser l’écriture classique en composant la musique dont il pensait qu’elle plairait dans cet environnement. Quelle erreur ! lui réplique Beethoven. Il vous fallait composer pour vous, en vous imposant, en laissant libre cours à vos idées, à votre imagination, à vos sentiments, en exprimant ce que vous aviez au plus profond de vous, et, j’ajouterais…oui j’ajouterais, en prenant le risque de déplaire. (…) Votre musique est belle… seulement belle. On reproche à Beethoven d’avoir sacrifié le mode de la répétition prévisible des formes et modèles gracieux, par des éléments transcendants et dramatiques. Il est convaincu que cet art vivra la révolution qu’il s’est attaché à provoquer dans l’univers musical.
Peu à peu chacun comprend mieux l’autre et se complimente mutuellement. Beethoven reste suffoqué par le fait que les partitions originales de Mozart ne comportent aucune correction. Mozart répond : chez moi, l’écriture n’intervenait qu’après une période de maturation intense. C’est là le plus grand bienfait qui m’ait été donné. Mon cerveau s’enflammait, l’invention, l’élaboration… Tout se passait en moi comme dans un rêve. L'oeuvre était achevée dans ma tête et je n’avais plus qu’à coucher sur le papier. Et Beethoven en dernier lieu lui confie : « J’aurais donné toute ma musique symphonique pour écrire un seul de vos opéras. »
07:14 Publié dans 41. Impressions littéraires | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, musique, mozart, beethoven, art musical | Imprimer
13/05/2018
Merci au Très Haut
Tu m’as donné les meilleurs jours
Environné de désespoir, j’errais dans l’ombre
Fantôme détrôné à l’esprit déraciné
Me heurtant aux piliers du qu’en-dira-t-on
Tu es venu tendrement comme un nuage
Et tu m’as pris dans ton haleine vaporeuse
L’odeur de la vie m’a submergé et conquis
Ouvrant béatement le puits sans fond
Où j’ai jeté mon embarras et ma folie
Sais-tu que j’ai gardé longtemps ce parfum
Au creux de mes tempes endolories, muet d’étonnement
Je chevauchais la lune, bordé de garde-fous
L’œil acerbe sur mes propres défaillances
Ressentant au plus profond l’effondrement du personnage
Et le souffle vital du renouvellement
Quelle piste d’envol pour l’enivrement
J’ai tout perdu, fort la vie
J’ai trouvé l’âme, ce nid de plumes
Qui pépie et brûle les doigts
Et j’ai atteint le lieu de transparence
Où le cœur n’a plus ni attaches ni souvenirs
© Loup Francart
07:11 Publié dans 42. Créations poèmes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poésie, écriture, poème, littérature | Imprimer
12/05/2018
Deux en un ou Un en deux
Elyne ne connait pas ce lieu. Non seulement elle n’y est jamais venue, mais elle n’a aucune image qu’elle aurait pu reconnaître. Tout lui semble faux. Non seulement ce qui est considéré comme fixe, c’est-à-dire les objets et le paysage, mais également les êtres vivants, animaux et humains. Une femme passe près d’elle, la regarde sans avoir l’air de la voir, puis continue son chemin comme si de rien n’était. Même le chant des oiseaux lui paraît curieux, une sorte d’étranglement du son comme si l’air n’arrivait à transmettre de manière fluide quoi que ce soit. D’ailleurs elle n’entend pas le son des pas de la femme. Tout se déroule comme sur un nuage épais qui étouffe les sons et voile la vision. Pourtant, ce sont bien, en même temps, le paysage quotidien, les objets qu’elle utilise journellement, les habitants de son village qu’elle connaît de vue et auxquels il lui est arrivé de parler. Elle se demande si elle ne louche pas. Cela arrive parfois le matin, lorsque vous vous réveillez encore dans le souvenir de votre rêve et que vos deux yeux contemplent deux objets brisés par un non ajustement de la vue sur un point unique. Elle se demande comment elle s’est réveillée. Puis n’y pense plus. Ah, là aussi, quelque chose ne semble pas aller. Sa mémoire lui joue des tours, ou plutôt sa perception du temps. Quelle heure peut-il être ? Quand me suis-je levée ?
Elastre fait quelques pas. Elle regarde le ciel, seul lieu inconnu parce que si loin qu’il est au-delà de toute perception. Elle baisse les yeux et regarde son paysage quotidien : une bande de terre aride, parsemée de cailloux et d’herbes folles, puis, plus loin, un creux dans l’écorce terrestre qui s’ouvre et s’enfonce dans le sol, tandis que plus loin encore se dressent des monts rocailleux. Elle marche, respirant l’air frais, foulant du pied une terre desséchée, secouant la poussière accumulée sur ses vêtements. Elle connait bien ce paysage qui l’accable à chaque réveil. Qui la sortira de ce trou ? Qui lui fera franchir ces montagnes sordides ? Son cœur se soulève d’espoir et, bien vite, retombe dans une langueur irrésistible. Qui l’en sortira ?
Et les deux ne font qu’un : Elyne et Elastre sont la même chair. Mais ont-elles la même âme ?
07:35 Publié dans 11. Considérations diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : personne, double, âme et corps, vide et plein | Imprimer
11/05/2018
Bruits
Il se tut. Pourquoi parler encore ?
Elle ne cessait de dire
Qu’elle n’avait rien à dire.
Lui... Que dire ?
Il écoutait chancelant.
Il aurait bien voulu
Dire son désarroi,
Proclamer son originalité.
Mais plus rien ne sortait,
Pas le moindre souffle.
Elle ne cessait de dire
Qu’elle n’avait rien à dire.
Elle affirmait sa certitude.
Quand pourrait-elle
Lui dire ce qu’elle ignorait ?
Où pourrait-elle
Lui chanter son amour ?
Saurait-elle un jour
Dire son innocence ?
Elle ne cessait de dire
Qu’elle n’avait rien à dire.
Ils allaient ainsi dans le monde,
Nus de baisers maladroits,
Avares de paroles inconsidérées.
Désespérés, ils se voyaient
Collés l’un à l’autre,
Froids des pieds à la tête,
Chauds en deçà…
Elle ne cessait de dire
Qu’elle n’avait rien à dire.
Enfin, un jour,
Dans la fraîcheur matinale,
Elle se tut, avare soudainement
De paroles inédites.
Il allait lui dire son amour,
Elle fit "chut" du doigt
Et l’attira à elle.
Alors elle ne cessa de dire
Qu’elle avait à lui dire
Cette flamme insensée
Qui lui prenait la gorge,
Qui la chatouillait en bas,
Qui la poussait au silence
Et la forçait à s’ouvrir
Pour lui donner son amour
Et l’envelopper de baisers.
07:52 Publié dans 42. Créations poèmes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poème, écriture, poésie, littérature | Imprimer
10/05/2018
Maxime
L'intelligence, ce sac à malice que tous voudrait porter,
mais que personne ne se vante de porter,
préférant le mérite du travail.
06:38 Publié dans 45. Maximes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : maxime, sentence, méditation, paradoxe, adage, aphorisme, apophtegme, précepte | Imprimer
09/05/2018
Mélodie hongroise en si mineur, de Franz Schubert, interprétée par David Fray
https://www.youtube.com/watch?v=SVHNKv6KQlI
Lu dans De l’âme de François Cheng (Albin Michel 2016, p.113) :
Coïncidence, je lis un beau livre de Christiane Rancé qui vient juste de paraître, En pleine lumière, et je tombe sur ce passage : "Comment mon âme quittera-t-elle mon corps, et ce qui pourrait faire qu’elle y consente sans trop regimber ?" La question m’a préoccupée longtemps, jusqu’au jour où j’ai écouté la Mélodie hongroise en si mineur de Franz Schubert, mon compositeur préféré avec tous les autres, interprétée par David Fray.
J’avais enfin trouvé mon viatique, le rythme du décollement de l’âme et du corps. Quelques trois minutes de piano qui gonflent l’âme comme un aérostat, sans pathos, ni grandes eaux, ni grande pompe… C’est bien cette mélodie que je demande que les anges musiciens jouent pour m’accompagner dans mon ultime silence.
07:51 Publié dans 51. Impressions musicales | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : âme, séparation du corps, beauté, ultime silence | Imprimer