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30/09/2012

Pierre-César Lagage, galerie Pierre Lévy (1ère partie)

D’abord figuratif, peignant la baie de Somme et les paysages du Nord, son pays natal (il est né en 1911), Pierre-César Lagage s’intéresse à la peinture abstraite dès 1945. Vivant à Montmartre, il ne fait partie d’aucun courant.

Pierre-César Lagage est un homme intérieur. Il peint pour manifester sa vision du monde dans laquelle il aspire à une certaine transcendance. Regardons certaines de ses œuvres figuratives. « La procession » dénote déjà une certaine abstraction. Très dénudée, elle se fond dans le paysage. Elle semble en sortir, comme un fleuve débordant, comme une coulée de lave sortant de terre. On passe de l’abstrait à une réalité quasi mystique avec les visages du premier plan. Très vite ils se fondent dans la masse. Seul le premier a les yeux ouverts vers le ciel, l’air apeuré, mais confiant.

 

La procession 1935.jpg

Regardons aussi « l’adoration des bergers », toile à la fois très enfantine, mais emplie de puissance intérieure. On ne voit pas leurs regards. Les personnages sont concentrés sur eux-mêmes avec l’enfant au centre. Sa couverture rouge, seule tache de cette couleur, met en évidence la source cette intense tension intérieure. Chaque personnage est seul face à l’incompréhensible mystère de cet être qui vient de naître.

 

Adoration des bergers 1937.jpg

 

Nous verrons que ceci le conduit vers d'autres formes de peintures, très différentes.

 

29/09/2012

Vox Balaenae, de George Crumb

 

http://www.youtube.com/watch?v=e6IWoHguF4o&feature=relmfu

http://www.youtube.com/watch?v=TvNfjyWHXLA&feature=relmfu

http://www.youtube.com/watch?v=HmBldH5lD8I&feature=relmfu

ou cette interprétation, plus visible, ce qui aide à écouter :

http://www.youtube.com/watch?v=qj29FFqg-Iw&feature=related

 

Nous avons déjà entendu la musique de George Crumb (voir le 21 juin 2012 : Dream Images).

Mais qui aurait imaginé entendre les baleines sur une scène de concert ! Et pourtant, dès les premiers instants, nous sommes saisis : leur chant comme si vous vous trouviez au fond de la mer !

Est-ce beau ? On peut se poser la question. C’est certes une belle performance qui fait courir sur votre peau la chair de poule du plongeur baignant dans ces sons insolites. Mais est-il vraiment nécessaire de parler de beauté ?

On se laisse progressivement envahir à la fois par la masse d’eau, sa transparence et le jeu des baleines, qui trouble avec bonheur cette atmosphère sans repère. On flotte, on est porté par l’onde, on descend au fond de nous-mêmes, c’est une méditation insolite. Va-t-on franchir la frontière entre l’air et l’eau ?

 

« Le chant de la baleine à bosse se compose d'une structure globale déterminée et prévisible, elle-même composée d'une série d'unités sonores. Un chant typique comporte de 5 à 7 thèmes différents, qui sont habituellement repris selon un ordre séquentiel. Sa durée moyenne est de 8 à 15 minutes, mais peut atteindre 30 minutes. Répétés encore et encore, chaque session de chant peut se prolonger plusieurs heures.

Les sons utilisés vont des couinements suraigus jusqu'aux grondements infrasoniques et aux cliquètements variés. Une caractéristique frappante de ce chant est qu'il ne cesse d'évoluer au cours du temps. Chaque année, des sons différents et des arrangements orignaux suscitent la création de nouvelles phrases et de nouveaux thèmes. Ces changements sont peu à peu incorporés dans le chant, tandis que d'autres éléments plus anciens disparaissent complètement. De telles modifications surviennent de façon collective  au sein de toute la population. Au terme de quelques années, le chant initial devient totalement différent de la version originale. »

(From : http://www.dauphinlibre.be/chant-des-baleines.htm)

 

28/09/2012

Cloitre de l’abbaye de Cadouin

Etonnant ce cloître de style gothique flamboyant alors que l’abbatiale est de style roman. « De fonds roman, il a été décoré du XVe au XVIe siècle. Des colonnes richement sculptées supportent des voûtes compliquées. Dans la galerie nord, on trouve un magnifique siège abbatial en pierre. Aux angles se trouvent de belles portes flamboyantes du XVe et portes Renaissance du XVIe siècle. Il fut restauré au XXème siècle. »

Les galeries donnent sur le préau (ou jardin) par des baies à claire-voie. Au premier abord on les imagine toutes semblables. Puis, à force de tourner, on s’aperçoit que certaines baies contiennent une colonne centrale, d’autres deux.

religion,architecture,gothiquereligion,architecture,gothique 

 

 

 

  

 

 

Intrigué, on les regarde de plus près et on découvre leur variété.

En voici deux semblables avec leurs fleurs de lys au sommet dont le centre est un cœur.

1B baie.JPGreligion,architecture,gothique

 

 

 

 

 

 

 

 

Elles sont pour la plupart différentes, parfois de manière minime.

Ici le nombre de piliers passe de un à deux :

1Coeur.jpg2Coeur.jpg

 

 

 

 

 

 

 Là ils varient si peu qu’il faut chercher les différences : la baie de droite n’est pas totalement sculptée (pignon de droite encore en bloc de pierre) et les éléments des deux cœurs du haut se rejoignent alors qu’ils sont séparés sur la baie de gauche.

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 Celui-ci est seul de son espèce, sans pendant en deux piliers :1sP9170100.JPG

En voici deux autres, superbes :

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Et tout ceci fait à la main, la prière en tête !

 

27/09/2012

La plaine

L’espace ouvert à perte de vue, sans obstacle
Le temps s’arrête dans cet horrible désert
Pourtant c’est là que se tient la richesse
Là où poussent les plantes nourricières

Parfois s’incrustent un fil d’argent
Dans ses profondeurs veloutées
Il courre en lacets au gré de l’invisible
Comme un couteau ouvrant la peau
Et ses flots sont la respiration
De ces terres, poussière ou limon

Parfois noyée, la plaine est abyssale
Et s’enfonce dans les mers
Lorsque les eaux sont au plain
Les vaisseaux les labourent
Visibles au seul plain de la poupe

De plain-pied dans ce malentendu
La plaine s’oppose à la montagne
Sur les bancs de la Convention
Et vote à l’opposé les lois de la république

Morne est la plaine de la défaite
Wellington serait-il vainqueur ?
Pourquoi tous ces coups échangés
Pour finir en exil, sans un regard d’envie

Dans l’espace du plain-chant
Rien n’émerge de cette monotonie
L’unisson y est la règle stricte
Les autres chants seraient-ils vides ?

Le plain est sans obstacle
Lisse de laine tissée
Quelle contradiction avec le plein
Qui suggère la hauteur et la profondeur
Empli d’une multitude de tout

 

26/09/2012

La danse de l'esquive

Pilate leur dit : « Que ferai-je donc de Iéshoua, dit le messie ? »
Ils disent tous : « Il sera crucifié ! »
Mais il dit : « Quel mal a-t-il donc fait ? »
Alors ils crient très fort et disent : » Il sera crucifié ! »
Pilate voit que rien ne sert  mais que le tumulte grandit.
Il prend de l’eau, se lave les mains face à la foule et dit :
« Je suis innocent de ce sang. A vous de voir ! »
(La Bible traduite par André Chouraqui, Matyah 27,22-24)

L’homme danse devant la question précise
Il l’esquive et s’aveugle de sa propre vision
De même Pilate, qui sait l’innocence de Jésus
Esquive  sa responsabilité devant la foule
Et reporte cette innocence sur lui-même
Le fils de l’homme est face à l’homme

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Brûlure d’un soleil noir
Dans le désert de la conscience
Et ce désert est celui de la tentation
« Dis que ces pierres deviennent des pains. »

Dessin fait à l’encre de Chine.

25/09/2012

L'actualité

L’actualité existe-t-elle ? Elle est du jour et meurt à peine née. Sa nature est éphémère. Son caractère est de passer vite. Son essence est d’être inactuelle dans la minute qui la suit. Rien de plus arbitraire également : elle est composée de faits triés par les journaux. Sans eux elle n’existerait pas. Et les journaux ne peuvent rendre compte, pour cent raisons, que d’une partie infinitésimale de tout ce qui arrive : ils ont laissé passer (quel oubli !) la naissance de Napoléon. L’actualité la plus répandue est celle dont il parle le moins : le solstice, la neige, la Saint Sylvestre, les saisons, la première fleur, la dernière feuille. Où est le journal qui parle de l’aube ? L’aube, suprême curiosité de l’homme. Car, ils l’ont bien compris (la Bible aussi, relisez la Genèse, relisez l’histoire du pommier), l’homme vit surtout de curiosité. C’est le dernier vice qui lui reste. Toutes ses curiosités blasées, il garde celle de son décor. Il a vu le jour. Il ne cesse de le vouloir. Au bout du compte l’homme de la grande actualité, ce n’est peut-être pas le journaliste, mais le poète. Son actualité ne se fane pas.   (Alexandre Vialatte, La porte de Bath-Rabbim, Presses Pocket, Julliard, 1986, Chroniques des longues actualités, p. 43)

 

Ephémère ? Dans la plupart des cas, oui. Mais l’actualité est-elle éphémère lorsqu’on assite en direct à la chute du mur de Berlin, à l’explosion d’AZF ou aux premiers pas sur la lune. Certainement non ! Comment faire le tri entre l’éphémère et l’évolution du monde (qui n’est pas à confondre avec le progrès) ? Ephémère toujours ou presque, les émotions. Et pourtant elles font la une de l’actualité. Ephémère également la politique politicienne. Le Français préfèrerait de l’action efficace plutôt que de la communication qui ne communique rien. Ephémère enfin, les faits divers.

Arbitraire ? Oui, certainement. D’autant plus arbitraire que maintenant les journalistes de télévision sont soumis à la dictature de l’image. Sans image, rien à dire, ou presque. Donc on peut passer beaucoup de temps sur une affaire sans intérêt et très peu sur quelque chose qui annonce un changement stratégique, mais sur laquelle on n’a pas de prise de vue.

Mais le plus souvent les deux qualificatifs se rejoignent. Politique politicienne et choix journalistique. Ainsi, écouler 10mn d’interview de Cécile Duflot pour la forcer à dire qu’elle devrait démissionner (en raison de la position des verts sur le traité européen) est d’un ridicule qui malheureusement ne tue pas le journaliste.

Mais qu’est-ce que la curiosité ? Bernard Pivot nous dit que le journaliste est un interprète de la curiosité publique. Il est évident que lorsqu’on parle de la curiosité publique on ne parle pas de l’envie de connaître, de créer ou de s’enrichir l’esprit. On parle d’une curiosité indiscrète, insolente, voire maladive. Et plus l’on est en groupe plus la curiosité devient un impératif nuisible. Certes, certains hommes (ou femmes, bien sûr) sont plus curieux que d’autres. Mais dans tous les cas, plusieurs hommes ou plusieurs femmes sont toujours plus curieux qu’un seul. Que dire alors lorsqu’il s’agit d’une caméra dont l’objet est l’actualité !

 

24/09/2012

Eglise fantôme à Saint Jean d’Angély

 

Quelle fierté ! Ses deux tours dominent la ville. Elle vous regarde de ses quatre yeux noirs. Le dernier, troisième œil, jette un regard d’aveugle sur l’infini du ciel. Les portes sont closes, on ne regarde pas à l’intérieur d’un fantôme !

Cette façade est-elle un chef d’œuvre ou un décor de cinéma ?  

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La majesté du fronton (le plus classique qui soit) au premier étage cache bien l’absence des sculptures accompagnant logiquement un tel édifice. La pierre y reste brute, taillée d’un bloc, en attente du burin.

 

 

 Et lorsqu’on se déplace de quelques pas, elle est vide. Non pas vide à l’intérieur, mais vide d’intérieur. L’espace illimité derrière la façade est sa seule existence, comme une planète lancée dans l’univers, un OVNI réel, mais sans existence.

Au loin une autre église, réplique d’un imaginaire autrement plus charmeur.

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Tournez autour du monument tel un satellite autour de son astre, vous découvrirez l’envers du décor, attristant comme un moule dans le tiroir d’une cuisine en attente de bonnes choses.

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 Et pour finir, un peu d’histoire, pour satisfaire votre curiosité si vous ne connaissez pas.

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23/09/2012

Un instant

Qu’est-ce qu’un instant ?

Pour beaucoup, ce n’est qu’un petit espace de temps
Mais pourquoi nous parler d’espace lorsqu’il s’agit du temps
Serait-ce un petit coin de paradis, ou d’enfer parfois
Un papillon qui s’envole dans l’espace à partir d’un toit ?

D’autres le voit plus long, ils le situent dans la durée
Mais cette continuité infinie du devenir appartient au passé
Comment concilier cette anomalie précaire
D’une définition juste bonne à un bibliothécaire ?

Un instant, c’est aujourd’hui, c’est maintenant
C’est le t que j’écris et il est déjà passé pourtant
Dans cette course du temps, ne nous arrêtons pas à cela

L’instant, c’est l’éclair d’un sentiment ou d’une impression
C’est une note de musique sur la vague des émotions
C’est le moment crucial où tout s’arrête, là

22/09/2012

Puissance du trait

Le trait possède des propriétés insoupçonnées. Qui eut cru que de simples traits parallèles pouvaient avoir une puissance émotionnelle, voire sentimentale. Certes, la couleur joue également. C’est ce mariage entre traits et couleurs qui donnent autant d’élégance à ce tableau.

 

 

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21/09/2012

Fontaines en Périgord

L’eau, source de vie, rassemblée, condensée, qui s’écoule d’un tuyau à profusion, pour le plaisir des yeux, le rafraichissement du visage, la satisfaction de la soif. Presque chaque village a sa fontaine, de la plus simple à la plus monumentale :

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Mais que font là ce robinet et ce seau rouillé. Est-ce pour nettoyer les pinceaux du décorateur de ces lieux ? Est-ce par dérision que les habitants conservent une telle fontaine ? Elle est modeste, on ne la remarque pas, et cela vaut mieux !

 

 

 

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On dirait un monument funéraire, quel classicisme. Mais la symétrie lui donne une beauté certaine. Accolée à une maison, à quoi pouvait-elle servir : à mettre en évidence la richesse du propriétaire, à rafraîchir ses habitants, à ravitailler le quartier ? Peut-être manque-t-il une statue dans l’évidement central ? Imaginons une nymphe laissant couler la vie de son amphore. Les fleurs la remplacent et caressent d’autres sens.

 

De tous temps, les hommes ont été fascinés par le mystère des eaux qui sourdent des profondeurs de la terre. Force de fécondité, de fertilité, de purification, l'eau était vénérée par les Celtes, comme les arbres ou les pierres. On attribue aux eaux des vertus bienfaisantes.

L'Eglise, après avoir essayé en vain d'interdire les cultes païens, christianise ces lieux en les plaçant sous le nom d'un saint. A Sarlat, il y a plus qu’une fontaine, un véritable bassin. Non, ce n’était pas un lavoir ! C’est la fontaine Sainte Marie, située en plein centre-ville, dans une grotte naturelle aménagée au XIIe siècle. Polluée au XIXe siècle, elle fut murée. Ce n’est que depuis 1970 qu’elle fut de nouveau accessible au public.

 

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Périgueux : au pied de la cathédrale, une fontaine dédiée aux pèlerins de Compostelle. Elle orne bien ce petit jardin qui donne accès à l’Isle.

 

 

 

 

La fontaine Médicis de Brantôme coule dans l’ancien jardin privéP9190157.JPG des Abbés sous la façade de leur château abbatial. On y voit l'Abbé Pierre de Bourdeille, mieux connu sous son nom de "Brantôme", homme d'épée, Abbé commendataire de 1558 à 1614, chroniqueur (auteur entre autres des célèbres Dames Galantes). Il sauva sa ville des guerres de religion. En fait, son buste n’a été inauguré qu’en 1895 sur cette fontaine du XVIIème siècle.

Elle paraît incongrue sous les parois de la falaise. Mais elle apporte une note de frivolité dans ce cadre à la fois austère et grandiose.

 

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P9190163.JPGEnfin, toujours à Brantôme, cette petite vasque décorative, au pied de l’église. Elle réjouit les fidèles à la sortie de la messe dans les chaleurs d’été et leur rappelle que Brantôme est aussi appelé la Venise du Périgord, appellation exagérée, mais sympathique.

 

 

 

20/09/2012

La vérité affective

 

Dans Ultime dialogue entre Jorge Luis Borges et Osvaldo Ferrari (Editions Zoé/éditions de l’aube, 1988), Osvaldo Ferrari parle de vérité affective et Borges lui répond :

– La vérité affective ? Oui. En d’autres termes, j’invente une histoire, je sais que cette histoire est fausse ; c’est une histoire fantastique ou une histoire policière (un autre aspect de la littérature fantastique), mais tout le temps que j’écris, je dois y croire. En cela je coïncide avec Coleridge, pour qui la foi poétique est la suspension momentanée de l’incrédulité.

Ces considérations sont à rapprocher de celles d’Alexandre Vialatte, dans « La porte de Bath-Rabbim » :

Tout ce qu’on invente est vrai, a dit Gustave Flaubert. (…) C’est le bon sens même. Il y a une vérité de la vie et une vérité littéraire. La vérité de la vie est vraie avant même qu’on la raconte, et elle reste vraie après ; elle est vraie avant, pendant, après. La vérité littéraire n’en demande pas tant. C’est pourtant elle qui survit aux faits ; on se rappelle les mots historiques qui sont presque tous apocryphes, mieux que l’histoire de ceux qui les ont prononcés. Qui ne se souvient du vase de Soissons ? (…) « Tout ce qu’on invente est vrai. » (Alexandre Vialatte, La porte de Bath-Rabbim, Presses Pocket, Julliard, 1986, Fictions et réalités, p. 33-34).

Au-delà de ces considérations sur la vérité de la littérature, dont la réalité tient à l’angle d’attaque que l’on se donne, il est sûr que l’écrivain doit croire à ce qu’il écrit. Qui pourrait y croire si lui-même n’y croit pas.

Mais croire à quoi ? Croire à sa fiction ? Croire qu’elle va devenir vraie parce qu’il aura des lecteurs ? Croire enfin qu’il est vrai parce qu’il a écrit cette fiction ? C’est sans doute la dernière assertion qui transforme la fiction en réalité. L’écrivain, comme tout artiste, doit ressortir transformé par son œuvre, devenir plus détaché. Sinon, il reproduira sans cesse ce premier écrit et ne saura se renouveler. Il doit croire à sa possibilité de se renouveler.

 

19/09/2012

Passion

Passionné je suis, pour tout et tous.
En même temps, indifférent et solitaire,
Aux autres et à moi-même.
Je préfère voler dans le ciel pur !

Fruit de la passion : l’achèvement de l’œuvre.
Alors vous la laisser partir, mener sa vie
Propre, sur sa barque enchantée,
Et vous contemplez ce désir qui fuit.

Plus rien ne vous rattache à l’objet
De vos attentions longues, hésitantes.
Il s’en va solitaire et vous laisse seul,
Face à une nouvelle inspiration, en ébullition.

L’énergie de la vie et de la mort.
Quelle émotion ! Je bous, je tremble.
Plus rien d’autre ne m’attire.
Ce nouveau mirage est mon unique bien.

Si cette passion devient amour, libre à toi
Le mirage se transforme en paradis
Et vous montez, bulle d’air
Au plus haut des cimes de votre exaltation

Mais passion signifie aussi mort cruelle
Asservissement au destin des grands hommes
Ou de l’inconnu ignoré et découvert
Lorsqu’enfin son corps repose, détendu

Quel mystère, un si grand bonheur
De telles peines encouragées et joyeuses
Comme le fil ténu à tirer sans cesse
Jusqu’à l’instant ailé du mot fin

18/09/2012

Le Talisman, nouvelles de Vaikom Muhammad Basheer (Zulma, 2012)

« Vaikom Muhammad Basheer (1908-1994) est né à Vaikom, au Kerala (côte sud-ouest de l'Inde). À l'adolescence, il s'échappe de chez ses parents afin de participer au mouvement de lutte pour l'Indépendance de l'Inde. Il connaît la prison pour ses positions et activités politiques, puis passe de nombreuses années à voyager à travers toute l'Inde, côtoyant sages hindous et mystiques soufis. Il est l'un des écrivains les plus importants de la littérature malayalam contemporaine. Et l'auteur de très nombreuses nouvelles et plusieurs romans courts. Le gouvernement indien lui a attribué le prestigieux prix Padmashri en 1982. »

(from : http://www.zulma.fr/auteur-vaikom-muhammad-basheer-281.html )

Surnommé le Maupassant indien, Basheer nous entraîne dans la vie quotidienne, mais poétique de son Kerala natal. Avec simplicité, il nous conte de courtes et fraiches histoires d’amour (L’empreinte, La maison vide, La faim, Les cœurs accordés) et met en valeur l’intelligence des femmes et leur discrétion. Autre thème : les luttes raciales et les systèmes ancestraux (Par une nuit de lune, Les cœurs accordés). Mais tout ceci est dit de manière drôle, vivante, tendre.

Il termine quelques nouvelles par ces mots :

– Que la chance vous sourit.

– Que tous les bonheurs vous sourient.

Et c’est une invitation à la poésie et l’élégance du vivant, dont le symbole est La Femme.

 

17/09/2012

Rencontre

Rose pâle d’un ciel du soir
Lorsque l’ombre gagne les clairières
Et envahit le mur encore chaud
Arrivée dans cette atmosphère
Où rien ne trouve l’équilibre
Et se trouver apaisés, allégés
Par l’étendue des voiles du cèdre
Qui volent au-dessus du moulin
Et s’enfoncent dans le miroir de l’eau
Elle coule avec parcimonie
Mais respire la quiétude éternelle
L’envie soudaine de s’y plonger
Dominés par les murs rafraichis
De ce rose tenace et bienvenu
Nous contemplons le vide
Prêt à prendre notre élan
Pour sauter à pieds joints
Dans le salon gris
Ouvrant sur ce paradis

16/09/2012

La maladie des normes

La France est un pays extrêmement productif en ce qui concerne les normes de toutes sortes et de tous genres ; directives, lois, décrets, arrêtés, règlements, etc. A vous décourager de tenter quelque chose.

« Dans une société inquiète, voire angoissée, à la recherche du “zéro risque absolu”, la norme a vite colonisé tous les secteurs de la sphère publique », expose le sénateur Claude Belot. Mais tout ceci augmente nos dépenses de manière forcenée. En chiffres, cela donne 287 projets de textes réglementaires examinés par la CCEN (Commission consultative d’évaluation des normes) en 2011. Facture pour les collectivités : 728 millions d’euros, alors que ce chiffre n’était que de 500 millions d’euros les années passées.

Certes, il convient d’imposer des règles permettant aux citoyens de s’y retrouver dans la profusion des propositions et publicités des entrepreneurs ou de progresser sur la sécurité. Mais est-il nécessaire de tout réglementer ? Actuellement 400.000 textes réglementent les activités des maires de France. Et nul n’est censé ignorer la loi !

 Dans tous les cas, le nombre de fonctionnaires dont nous disposons n’incite certainement à diminuer ce triste record. Il faut bien qu’ils se montrent actifs et entreprenants eux aussi !

 

15/09/2012

Cocteau ou le poète inexpérimenté

Pour Cocteau, l’idée, dans l’écriture, compte avant tout. La manière de l’écrire vient certes ensuite, mais elle vient sans effort, d’elle-même. Comme le disait Radiguet, il s’agit d’oublier qu’on est poète et laisser le phénomène s’accomplir à son insu. Cocteau a peur de l’habitude : je me veux libre de technique, d’expériences, maladroit.

Mais comment déterminer la limite entre l’attente et le laisser-aller ? En changeant de registre dans l'exercice de ce que l'on a à dire, en passant de l'écriture au cinéma, au dessin, à la poésie, puis à la musique par exemple. La variété des créations est toujours profitable, même si elle semble faire perdre du temps. Elle aiguise la sensibilité et redonne le goût du travail, même si d’autres pensent autrement.

Cocteau écrit : Ce qu’on te reproche, cultive-le, c’est toi. Montherlant ajoutait même : Notre œuvre préexiste en nous. Le problème consiste à la découvrir. 

 

14/09/2012

Les barricades mystérieuses, de François Couperin

1. Interprétation au clavecin :

Ecoutons d’abord la pièce jouée au clavecin. Le clavecin a une sonorité aigre très différente du piano. En réalité, le caractère du clavecin se rapproche plus de celui de l’orgue que de celui du piano. Camille Saint Saëns nous dit que la musique écrite pour le clavecin est délicate et que son charme ne résiste pas à une exécution brutale. Les nuances sont inconnues dans le monde du clavecin. Seul l’emploi des registres peut faire varier la puissance de la sonorité (si l’instrument en possède plusieurs).

Haendel, dit Camille Saint Saëns, nous montre que pour goûter la musique des siècles passés, il faut, comme lorsqu’on regarde les peintures des Primitifs, se défendre de chercher, dans les œuvres d’art d’un âge différent du nôtre, des effets et des expressions de sentiment qui ne sauraient s’y trouver, faire table rase, autant que possible, de ses habitudes journalières et se laisser aller naïvement à l’impression produite par le contact avec des formes inusitées.

 

Scott Ross :

http://www.youtube.com/watch?v=sf-LMHrslHw&feature=related

Belle interprétation de Scott Ross, dans l’esprit du jeu du clavecin, avec un jeu fait de légers ralentissements et accélérations. Il est dans la juste mesure, et la musique en sort raffermie.

Bruno Procopio :

http://www.youtube.com/watch?v=8O_oeMTnn84&feature=related

Quel rythme ! Y a-t-il une âme derrière cela ? Oui sans doute, mais la technique prime. C’est ennuyeux, car cela n’a pas la rondeur du précédent interprète.

Russel Piti :

http://www.youtube.com/watch?feature=endscreen&NR=1&v=md0nW7bL2vI

C’est plus lent, sans doute un peu trop. Où se trouve le mystère ? C’est également ennuyeux.

 

2. Interprétation au piano

Le piano apporte une profondeur qui n’existe pas au clavecin. La pièce prend du volume et du sentiment. Le son, la sonorité et les émotions soulevées sont vraiment différents. 

Georges Cziffra :

http://www.youtube.com/watch?v=1lvBZhXEJXY&feature=ymg

Un jeu assez proche du jeu du clavecin, très classique. Un bon rythme qui permet de faire ressortir les nuances et le charme de ce morceau.

Sylviane Deferne :

http://www.youtube.com/watch?v=JeJClooBYqY&feature=related

Quelle chaude sonorité et quelle nuance ! Une leçon de musique dans la douceur et la subtilité de la féminité. Très belle interprétation  dans un rythme parfois peut-être un peu lent vers la fin, mais un jeu si profond que cela s’oublie.

Alexandre Tharaud :

http://www.youtube.com/watch?v=IDavx0eyjUY&playnext=1&list=PLAFCB0C4B28BD5242&feature=results_video

Est-ce une course ? Ce n’est plus le même morceau. Une page virtuose qui n’a pas grand-chose à voir avec le sens initial et l’écriture pour clavecin. Il y a cependant des nuances et une certaine douceur qui laisse deviner une certaine sensibilité. Cela berce le mystère et reste une interprétation intéressante, mais hors norme.

3. La pièce

 Empruntons au blog  de Viviane Lamarlère, que nous remercions, cette bonne analyse de la pièce de Couperin :

Le titre lui-même ne laisse pas d'interroger et pourtant, il suffit de regarder la partition pour comprendre qu'entre la main droite et la main gauche se tissent des lignes verticales et horizontales qui évoquent bien figurativement une barricade.
Mystérieuse pourquoi? Tout simplement parce que la ligne mélodique va être très judicieusement répartie, dans cet inextricable treillis, entre main droite et main gauche, demandant à l'interprète de peser sur certaines notes, d'en alléger d'autres, le tout sur chacune des deux mains et en permanence à contretemps...
La basse (ce que joue la main gauche) est écrite dans un registre très grave pour l'époque. Elle se répète à l'identique tout du long du morceau, constituant ce qu'on nomme un ostinato.

Cette répétition va conférer à l'œuvre une forme circulaire hypnotisante dans laquelle le refrain vient jusqu'au bout, avec ses ornements légers, contredire les couplets plus interrogatifs.

On a l'impression que c'est la main droite qui tient la mélodie, que nenni, par le jeu des registres ce sera parfois la main gauche qui fera entendre la fin d'un trait ou d'une phrase...

(http://www.vlamarlere.com/article-10825431.html , le lundi 11 juin 2007)

 

13/09/2012

Nuit

Plus rien !
Le vide,
L’absence,
Un désert inexistant,
Une coque sans fond,
Et résonne dans le crâne
La présence du trou
Mais comment le cueillir
Puisqu’il n’est rien ?

Je le sais…
Ce rien devient le tout
Lorsque vous vous oubliez

Parti le chatoiement des pensées
Partie la tendre ficelle du raisonnement
Partie encore la solide résurgence
D’une mémoire qui s’éveille
Vous reposez, ignare de votre savoir
Et vous laissez votre main
Dans la sienne, petite, accueillante
Votre sourire vaut de l’or
Mais vous ne savez pas votre richesse
Elle s’échappe en volutes colorées
Et prend son autonomie
Pressée d’en finir avec vous

Oui, perdu dans l’obscurité,
Sur vos yeux fermés au monde
Vous respirez encore, petitement
Du bout des lèvres roses
Dans le tremblement du drap
Vous êtes revenu à l’enfance
Avant même cette origine connue
Dans le calme défi des matins d’hiver
Pelotonné sous les monceaux
D’images qui surgissent, prenantes
Et vous font perdre les repères
Que donnent le jour et l’éveil

Fraicheur du souffle de la nuit
Quand l’air s’encombre de verdeur
Vous entendez le cri des nocturnes
Et Chopin entre dans votre rêverie
Un pas ou deux, une valse lente
Des hésitations d’un jour
Jusqu’à l’endormissement

La vie pourtant subsiste
La couleur des déplacements
Comme des ombres noires
Qui défilent devant le blanc
L’odeur tiède du foin
Qui sèche sur la terre mouillée
Le goût sans faim, acidulé
Du vol de la chauve-souris
Dans l’espace restreint de la chambre
Et la caresse inconsciente
Des mains unies de l’amour
Qui vous porte chaque nuit
Sur les monts de la reconstruction

12/09/2012

Denis Frémond

Denis Frémond est peintre, humoriste et écrivain sans doute.

Pour sa biographie, reprenons cette interview que l’on trouve sur son site :

« Votre père était un célèbre poète espagnol, je crois.

Oh non, il était matador de taureaux dans une entreprise de consulting sur le port de Hambourg.
 

Très bien... Hambourg, donc, je le note. Bien. Votre mère est une véliplanchiste originaire d'une ethnie d'Asie centrale...

Paix à son âme... mais si vous voulez, je ne suis pas contrariant, vous savez. Vous avez raison de plaisanter, ces biographies sont inutiles et le plus souvent ennuyeuses, convenues. Nous sommes des gens si sérieux, nous les peintres, avec nos litanies d'expositions, de salons, de collections privées. Mais les gens souhaitent malgré tout connaître le peintre, ses origines, son cheminement, ses sources d'inspiration... Mettez : extraction bourgeoise.

Parfait. Comment êtes-vous venu à la peinture?

Par élimination... En sortant de l'Ecole Polytechnique j'ai intégré l'équipe de lads d'un haras de Basse-Normandie, mais au fond je ne savais pas où j'allais, j'ai ensuite animé pendant une saison une revue du Casino de Paris, puis dirigé pendant quatre ans une petite fabrique de tabourets, pour finalement embarquer à bord de la Jeanne-d'Arc comme clairon. »

 

 Comme écrivain, il s’est penché sur la bande dessinée. Mais on peut dire que c’est dans la peinture qu’il s’exprime sans tricher.

Il aime peindre des extérieurs : errances de ville en station d’hélicoptère. Un seul personnage, mystérieux, indifférent aux regards que nous posons sur lui, seul face au monde familier et si peu connu.

 

 

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Mais il peint également des intérieurs : grande pièce au parquet lustré, aux baies vitrées ouvrant sur la ville, avec encore ce même personnage jouant de la clarinette. Idiot, direz-vous, que cette divergence des genres. Mais tentez de faire la même chose. Vous échouerez à coup sûr. Il joue sur la lumière et l’ombre, sur les reflets qui par leur accentuation troublent la vision. Il semble ne donner à voir que la réalité, qui elle-même est trop léchée pour être réelle. Ce n’est jamais une pièce entière, mais la moitié d’un salon, d’un bistrot, laissant l’imagination construire l’autre moitié.

 

 

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11/09/2012

Complexification

Vue d’avion : paysage aux champs morcelés et un fleuve débordant, qui ouvre l’imagination.

Idéogramme chinois : le tracé du caractère est simple, mais derrière se cache la complexité, intraduisible, de la pensée.

Plaisir de l’œil et de la main qui équilibre l’intemporalité de la nervure avec la multitude d’événements qui encombre l’espace.

Oui, c’est un jeu, le jeu de l’abstrait qui ouvre à toute interprétation.

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 Gravure effectuée il y a longtemps, mais qui reste aussi énigmatique.

10/09/2012

L'amitié exclusive

 

« La relation amoureuse est une relation vulnérable. Elle requiert des confirmations continuelles. Par contre, on peut passer une année dans rien savoir d’un ami et cela n’a aucune importance. L’amitié n’exige pas de confidences mais l’amour, oui. Et l’amour est un état de suspicion ; il est assez inconfortable, hein ? Assez alarmant. L’amitié, elle, est un état serein : on peut voir ou ne pas voir, on peut savoir ou ne pas savoir ce que fait l’autre. Sans doute certaines personnes sont-elles jalouses en amitié, mais moi, non. Beaucoup de gens considèrent l’amitié comme on considère l’amour, et même, désirent être l’unique amitié de l’autre personne. » (Jorge Luis Borges, Ultime dialogues, éditions Zoé / éditions de l’aube, 1988, p.120)

 

Qui n’a jamais connu de ces êtres qui s’attachent à vous et vous lient à leur devenir. Sans vous plus rien ne leur semble possible. Cette amitié exclusive les rassure. Leur vie leur semble tracée et certaine. Ils s’enferment dans ce cocon qui les protège de la vraie vie, faite de nouveautés, de coupures, de déceptions et d’ironie. Et pour un peu que l’on ne soit pas disponible, ils se sentent abandonnés, rejetés, voire trahis.

Comment rompre ? Ils ne comprennent pas leur emprise sur vous-même. Ils ne veulent pas savoir votre besoin de liberté et d’indépendance. Ils ne peuvent comprendre votre sentiment d’être prisonnier de cette relation.

Il ne vous reste plus qu’à rompre, sans autre forme de procès.

 

09/09/2012

Réminiscence

Je suis, j’étais…

Quelle distance entre les deux
Combien de jours et d’années

Et revivre cet instant
Où dans l’étroit fil du temps
On saute à pieds joints en arrière

Sons et parfums de notre enfance
Qui s’imposent au présent, absurdement
Au détour d’un regard, d’un geste
Et frissonne d’une image du passé

Cette cloche qui résonne dans ma mémoire
Et fait naître un moment de connivence
Avec celui qui était, il y a loin, longtemps
Et qui revient un moment, ténu
Fil d’araignée qui tinte dans la tête

Perdu cet instant du passé ressurgi
Reprendre la quête du souvenir
Revenir à la seconde de l’étincelle
Quand émerge du coton des souvenances
La peau de pêche des fauteuils du salon
Ou le grincement aigu de la porte de la cave

C’est parfois un visage qui mène la danse
Et tourne le manège des êtres et des choses
J’entends ses rires dans la fraicheur
Ils chatouillent ma peau d’enfant
Et le poil hérissé devient duvet
Qui chante la musique du passé
Le temps d’un coup de vent

Lisse ton histoire entre hier et demain !

08/09/2012

Labyrinth, de Philippe Glass

 

http://www.youtube.com/watch?v=IT_vMQBWf4s&feature=related

 

Le labyrinthe a toujours fasciné les hommes. Il est symbole de leur appétit de connaissance et de la difficulté à en faire le tour.

Généralement le labyrinthe est objet matériel, invention de l’homme qui se cherche ou qui cherche de nouvelles connaissances. Il est également dessiné, sous diverses formes : rondeur, angles, fractal. Il est souvent évoqué dans la littérature ésotérique ou même la littérature tout court, à l’instar de Borgès. Pour la musique, Bach, dans ses fugues, constitue des labyrinthes sonores, organisés pour charmer et tromper l’auditeur.

Ici, Philippe Glass ne cherche pas à construire un labyrinthe. Son but est plutôt d’ordre psychologique : que ressent-on lorsqu’on parcourt un labyrinthe ? D’abord l’excitation, mais une excitation calme, qui monte et descend selon la distance du but. Puis la régularité qui est donné par  le rythme de deux notes. La monotonie du chemin, dont on ne voit ni le cheminement, ni la fin, est rendue par les voix qui, dans le même temps, englobe cette monotonie de mystère. Musique descriptive, proche de la musique de film. Est-elle belle ? Pas au sens habituel où l’important est d’être bouleversé. Ce n’est qu’une musique d’ambiance qui permet à l’auditeur d’entrer dans le mécanisme psychologique du labyrinthe.

Le labyrinthe est un chemin de sagesse, comme l’écrit Jacques Attali dans son traité du labyrinthe (Fayard, 1996, p.209). Quoi qu’il en soit, traverser, ne serait-ce qu’une fois, un labyrinthe, transforme la conscience pour toujours. Après s’être perdu, on a ouvert toutes les portes de soi-même, on s’est exploré. Voyageur traqué, on n’a pas trouvé la vérité, mais un chemin vers une question plus difficile. Dès lors qu’il a rencontré la réalité de l’expérience, l’homme (…) débouche en fait sur un chemin menant vers un autre labyrinthe. Tel est le grand secret du labyrinthe…

 

07/09/2012

Robert Tatin : la Frénouse (voir les 6 et 18 août)

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"Ainsi que tous les jeunes gens de mon âge je m'inquiète de la Religion, de la Mort, de la maladie, de la santé, de la guerre, de la misère... Je m'inquiète surtout du bonheur du malheur - mais considère toutes ces choses très loin - pour plus tard - pour demain ?... J'ai même besoin d'oublier toute cette agitation du monde afin de me faire, premièrement, un corps sain, un esprit clair et un Cœur Humain. J'ai même Peur de ce trop grand Idéal que d'aucune philosophie m'apporte avec l'intention de m'Eclairer. Pourtant une LUMIÈRE insolite me visite, me visite et me laisse une lueur... Véritable "Conscience" Véritable responsabilité d'où répondre... la réponse... l'écho... D'où faire ART... afin de communier avec tous les enfants du monde..."   (Robert TATIN)

 

Papin avait l’âme d’un créateur. Il aimait tout faire et n’était pas comme ces artistes qui donnent des directives à une poignée de petites mains qui sont ses exécuteurs de « chefs-d’œuvre ».

 

Il a été architecte :

Tatin architecte.jpg"Nous sommes en présence d'un module architectural imaginé en fonction de la Nature environnante, par essence non finie. Une initiative, comme celle entreprise par cet Artiste, peut entraîner une continuité architecturale. L'esprit de cet ensemble comporte d'ailleurs en lui-même un exemple à suivre quant à l'Adaptation de la Nature, apportant un élément nouveau pour les Urbanistes et les Architectes, recherchant depuis le début de ce siècle, la forme, le volume et les caractéristiques d'édifices pouvant s'allier avec l'environnement Naturel..."  (Lise TATIN)

 

 

 

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Il a été céramiste :

TATIN qui était depuis longtemps sur la piste d'un matériau nouveau est arrivé à constituer ce matériau avec de la terre mêlée de colorants qu'il "tape" sur des poteries et qu'il travaille alors comme une vraie peinture au pinceau, au couteau, au doigt. La cuisson rend la peinture inaltérable. TATIN s'enorgueillit d'être à présent, non seulement "sculpteur de terre" mais "peintre de terre". Il y a là, en effet, une vraie révolution dans la céramique.  (Pierre GUÉGUEN, 1954)

 

 

 

 Mais il a surtout été peintre :

"...Il n'y aurait qu'à regarder et à voir, si tu peux regarder et voir tes propres yeux: tu sais peindre. Il n'y a pas à savoir dessiner, tu vois bien, alors tu trouves les moyens de dessiner à ta mode. Il s'agit de trouver par toi-même tes propres signes, il s'agit encore de signifier tes propres signes, avec foi, avec violence, avec la paix, avec tendresse et autres et autres. Il s'agit de peinturer en se souvenant de la parole de Chesterson : "tout enchaînement d'idées peut conduire à l'extase, tous les chemins mènent au royaume des fées". "Le progrès en peinture n'a rien à voir avec ce que la T.S.F. appelle progrès, trop de traités de peinture tous emplis de grandes bonnes volontés se montrent trop épris d'un art X ou Y et pas assez de l'art sans adjectif sauf celui de RÉEL. Voir c'est être présent, opter c'est voir, voir serait confortable avec choisir ou opter, optimisme alors...Peut-être". (Robert TATIN)

 

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Le sculpteur :

dessin_1_encre_chine_face_valadonutrillo.jpgRobert Tatin a utilisé deux manières : la statue et le bas-relief. Il travaillait d’abord l’idée, puis la technique. L’idée, c’était sa conception du monde, des relations entre l’homme et l’univers, entre l’homme et l’image que l’homme se fait de lui-même, entre les hommes eux-mêmes et plus profondément entre l’homme et Dieu. La sculpture n’avait rien de représentative des attitudes ou expressions. Elle s’efforçait de donner sur un bloc l’essentiel de ce qu’avait été celui qui était représenté. Les bas-reliefsDragon.jpg sont encore plus symboliques, il ne représente que des idées. Ils sont l’expression de la conception du monde de Robert Tatin. Ses voyages lui ont permis de progressivement atteindre une connaissance des cultures et d’en faire une synthèse personnelle. Ses bas-reliefs en donnent des flashs. Comment définir ce personnage à cheval, à la fois chevalier, roi mage, prince hindou ou sorcier africain ? Le rêve et la réalité confondus dans des scènes multiples et oniriques.

 

 

Robert Tatin mérite notre respect. Il a vécu sa vie comme il l’entendait, se moquant des racontars et du qu’en dira-t-on. Il a bâti son jardin secret qu’il partage maintenant avec nous et cela fait du bien de savoir que des hommes vivent leur rêve dans la réalité quotidienne.

 

06/09/2012

La Centrale, d’Elisabeth Filhol

 

« Trois salariés sont morts au cours des six derniers mois, trois agents statutaires ayant eu chacun une fonction d’encadrement oulittérature, roman, centrale nucléaire de contrôle, qu’il a bien fallu prendre au mot par leur geste, et d’eux qui se connaissaient à peine on parle désormais comme de trois frères d’armes, tous trois victimes de la centrale et tombés sur le même front. »

Ainsi commence La Centrale, un roman consacré aux centrales nucléaires et aux travailleurs saisonniers qui vivent des arrêts de tranche (moment de grand nettoyage d’un réacteur), les DATR pour Directement Affecté aux Travaux sous Rayonnements. On ne s’ennuie pas au cours des cinquante premières pages. Le DATR qui joue le rôle de narrateur a eu un incident au cours d’une séquence de son travail et a pris des doses supplémentaires. On nous décrit les procédures, les impressions, voire les sentiments de l’homme surexposé. On décrit également sa vie quotidienne, en caravane avec quelques copains. Progressivement on se sent englué dans ces rayonnements et la protection qu’il faut porter. « Chair à neutrons. Viande à rem. On double l’effectif pour les trois semaines que dure un arrêt de tranche. Ce que chacun vient vendre c’est ça, vingt millisieverts, la dose maximum d’irradiation autorisée sur douze mois glissants. Et les corps peuvent s’empiler en première ligne, il semble que la réserve soit inépuisable. »

Mais bientôt on se lasse de ces descriptions de procédures, de bouffe dans la caravane, d’incidents sur le circuit primaire, du professionnalisme des uns, du manque de compassion des autres. Page 75, on change de CNPE (une Centrale Nucléaire de Production d’Electricité, pour les initiés). On passe de la centrale de Chinon, à tours réfrigérantes, à la centrale du Blayais : agence d’intérim, formation à la charge de l’embauché, hébergement dans un mobile home, puis la centrale avec explication sur son fonctionnement et un détour par Tchernobyl et les erreurs des opérateurs. Enfin, un des intérimaire pète un plomb, quitte son travail sans l’achever et finit en dépression ou en suicide, on ne sait pas exactement.

Que reste-t-il de cette histoire et est-ce une histoire ? Ce n’est pas un roman au sens où un roman raconte justement une histoire. Il n’y en a pas. Ce sont des impressions, des incidents, des événements, des explications techniques, mais sans suite, sans commencement ni fin. On débute le livre avec intérêt pour un contexte insolite, mais on s’épuise faute de carburant motivant. C’est un pâté constitué d’ingrédients trop divers qui ne vous nourrit pas ou si peu. Certes, on a appris quelque chose sur les centrales nucléaires et la vie des saisonniers. Mais ceci ne permet pas de constituer une intrigue.

 

05/09/2012

Voyage

Aller et retour ou aller simple
Ainsi commence ce chemin que vous prenez
Et qui vous conduit vers l’inconnu
Et vous-même ne savez pas ce que vous faites
Partir et revenir ou fuir pour toujours
Ce quotidien des repas et conversations
Ces rires de convenance et d’ennui
Ce nid bourdonnant de frelons
Prêts à vous défigurer


Un voyage, c’est un bout de lune
Avalé en quartier, acide, à l’odeur forte
Vous détournez la tête d’abord
Pour ensuite la garder levée
Vous humez l’aigre vent du large
Et montez sur le navire enchanté
Qui vous conduit dans d’autres paysages
Vous n’avez plus d’attache
Et vous errez sur le balcon léger
D’où vous vous élancez, éperdu
Pour flotter sur les mâts perpendiculaires

Choisir le cabotage est une manière
De ne pas partir tout en n’étant plus là
Vous restez suspendus à vos habitudes
Et toute nouvelle figure fait encore
Fuir votre propension à vous ouvrir
Mais le voyage au long cours
N’est pas pour les freluquets
Qui ont peur de leur ombre
Laissez-la s’allonger vers le soir
Qu’elle tresse une couronne
Sur votre visage renouvelé

Il arrive qu’un voyage se transforme
En une expédition savante
Vous partez avec armes et bagages
Pour un pays qui ne vous connaît pas
Pour faire connaissance
Vous amenez votre sourire
Mais rien ne vous garantit l’immunité

Mais y a-t-il de plus beaux voyages
Que ceux que l’on fait en esprit ?
Quand de votre chambre
Vous voyagez sans bagage
Dans des pays inconnus de tous
Que vous concevez selon le besoin
Pour flotter sur un matelas
De caresses, de senteurs, de bruits
Inconnus de la population ambiante
Parce que vous le fabriquez
Aux fils de votre imagination
Comme un illusionniste intérieur
Musique de chambre en pantoufles
Vous écoutez la voix du sang
Qui borde de solitude
Vos désirs de paysages nouveaux

 

Voici la fin du voyage
Où es-tu l’ami ?
Au pays des songes
Ou en consistance matérielle ?
Que le voyage soit
Dans le frôlement de l’imagination
Ou le choc du toucher
Et qu’au retour
Enrobé du miel de la félicité
Vous retrouviez votre chambre
Ultime recours
A l’ajustement
De votre équilibre
Précaire

 

04/09/2012

Le changement

Le changement est-il dans la couleur ou dans la forme ? Par combien d’étapes passe-t-il ? Et finalement de quel changement parlons-nous ?

A chacun de deviner ces modifications subtiles et de les comptabiliser. Pourtant lorsqu’on regarde le tableau a-t-on vraiment conscience d’une progression constante entre couleurs et formes.

Le cinétisme a ses mystères qu’il est parfois subtile de pénétrer…

 

 

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03/09/2012

Les rapports entre la poésie, la musique et la peinture

 

Quel rapport entre la poésie et les autres arts, en particulier la musique et la peinture ?

C’est ce que tente de définir Yves Peyré dans le premier chapitre de son livre « Peinture et poésie, le dialogue par le livre » (édition Gallimard, 2001). L’écriture, elle, qu’elle soit prose ou poésie, a rapport avec l’impalpable. Une page se regarde, elle ne néglige pas d’avoir un côté dessin, mais elle se lit (en silence, à voix haute), et là, ce n’est plus le visible qui prédomine, c’est le son (la poésie est assurément une forme exacerbée de musique). Serait-ce en ce sens que s’établissent les rapports entre la poésie et la musique, entre la poésie et l’art pictural ?

Poésie et musique ont en commun le son. Et ce son, par une évocation indéfinissable, devient un chant de l’âme qui exprime l’humain. Cependant, contrairement à ce que dit Yves Peyré, je préfère dire que la musique est une forme exacerbée, accomplie, de poésie. Pourquoi ? Eh bien, tout d’abord parce que la musique est universelle. Point n’est besoin de connaître la langue du musicien. Le poète, lui, se sert de la musicalité de sa langue pour s’exprimer. Ces deux arts se servent du rythme et de son contraire, le silence, pour exprimer le plus profond de l’être. Mais l’un le fait dans un langage que tous comprennent, l’autre dans la particularité de l’expression verbale, marque de naissance du poète. Ils peuvent, chacun, employer refrain et couplets, le premier par l’énoncé de la phrase sonore qui est la mélodie première qui permet à l’imagination de construire sa profusion sonore. Le refrain revient en arrière-fond, retourné, inversé, avec changement de modes et autres bouleversements, mais d’une manière différente de celui de la poésie, qui utilise la répétition comme une preuve de musicalité et de retour au thème, sans broderie qui défigure le son et le perd dans les chausse-trapes de la compréhension. Comme la musique, la poésie s’entend, elle ne se lit pas à la manière d’un roman. Et lorsque vous lisez un poème, vous le parlez-chantez dans votre tête sans même vous en rendre compte. La musique du poème vient d’elle-même, et, si elle ne vient pas, ce n’est pas vraiment un poème, mais une prose mise en vers. La poésie utilise d’ailleurs l’allitération (répétition de sons identiques), l’anaphore (commencer par le même mot les divers membres d’une phrase), l’antanaclase (reprise du même mot avec un sens différent), l’assonance (répétition d’une même voyelle dans une phrase), le chiasme (termes disposés de manière croisée), etc.

Poésie et peinture ont en commun l’image. L’image, c’est la forme et la couleur qui deviennent évocation. La couleur est le plus simple à faire jaillir dans l’esprit, grâce aux subterfuges du langage et la profusion de mots qui l’évoque : l’allégorie (figuration d’une abstraction par une image), la comparaison, l’ellipse  (omettre certains éléments logiquement nécessaire à l’intelligence du texte), etc. La forme peut employer l’antithèse (rapprocher deux mots opposés pour en faire ressortir le contraste), l’oxymore (alliance de mots dont le rapprochement est inattendu), etc. La forme bien sûr, rapproche de la musique, mais également la couleur. On parle bien de la couleur des sons (comme de leur température : ambiance froide, chaude, comme pour les modes majeurs et mineurs). Bâtir une image et la même gageure pour le poète et le musicien. Ils utilisent un matériau différent, mais tous les deux sans réel rapport avec ce qu’ils veulent exprimer : le son parlé ou musical pour exprimer une vision  à partager avec l’auditeur. Le peintre donne sa vision sous la forme et la couleur qui, assemblées, évoque sans détour l’image voulue.

Quel merveilleux assemblage que ces trois arts qui s’enchevêtrent et recherchent au fond la même chose : la part d’évocation qui fait revivre un instant, un événement, une impression et qui permet de la partager avec celui qui la reçoit et ne la connaît pas.

Que l’homme est grand et mystérieux !

 

02/09/2012

Chers disparus, de Claude Pujade Renaud

 

Leurs chers disparus sont Jules Michelet, Robert Louis Stevenson,écrivains,littérature,écriture,histoire Marcel Schwob, Jules Renard ou Jack London. Les héroïnes sont les veuves de ses écrivains. Elles décrivent leur vie au côté du grand homme et ont en commun de poursuivre le travail de leur mari. Non, il ne s’agit pas de poursuivre ses écrits, mais de les trier, classer, organiser, publier les œuvres inédites, voire les œuvres complètes. Non, ce n’est pas un livre de bibliothécaire, ni de chercheur. C’est la vie de plusieurs femmes, subjuguées par leur cher mari, grand écrivain.

Au-delà de cette sommaire description de ce que représente le livre, je n’ai aimé que le premier récit, intitulé La jolie morte. Athénaïs Mialaret ose adresser une lettre à l’historien connu dans toute l’Europe. Très vite, elle se retrouve mariée, entre l’auteur et sa famille, une belle-mère, une fille et son mari. Ce n’est pas un récit organisé chronologiquement. Ce sont des impressions, des événements qui ont marqué soit leur vie en commun, soit sa vie après la mort de Michelet, dont la rencontre d’Emile-Antoine Bourdelle, sculpteur, soit aussi des événements de sa vie de jeune fille. Elle parle de l’amour de Michelet, parfois de manière crue, voire érotique. Elle raconte ses recherches sur les manuscrits de son mari. Elle découvre que dans son journal, Michelet parle d’elle et de leur vie intime :

A soixante-quatre ans, il se livre à une étude comparée de ses deux épouses. Pauline faisait jouir en jouissant beaucoup. Avec Athénaïs, il goutte l’exquise volupté qu’on a d’entrer dans un esprit. A-t-il rêvé d’une femme alliant les deux registres ? Je n’en suis pas certaine. Ma pureté, ma perpétuelle virginité, voire mon air de première communiante lui plaisaient, le stimulaient, je crois.

Elle déclare à ses amis qu’elle est moins la veuve de Jules Michelet que son âme attardée, un prolongement de lui-même qui veille à la publication intégrale de son œuvre. Enfin, elle signe le bon à tirer du quarantième volume. Sa tâche est achevée.

Le récit est intéressant, ses souvenirs sont vifs, amusants parfois, malgré les répétitions voulues concernant ses maux et leurs conséquence sur leur rapport avec Michelet.

 

Les autres récits de chacune des femmes des auteurs cités sont une répétition de ce premier récit. Certes différents, mais qui racontent leur histoire avec les mêmes détails, les mêmes thèmes. L’ennui s’installe assez vite. Toutes ses vieilles femmes entourées de leurs chats, parlant de leurs maux, finissent par lasser.

L’histoire de la femme en elle-même disparait devant les histoires de famille et l’évocation du grand homme. La femme s’annihile, malgré ses souvenirs.

Dommage !

 

 

 

 

01/09/2012

Le monde s'est évadé de ma mémoire

Le monde s’est évadé de ma mémoire

Aux confins de l’univers
Je contemple l’inconnu
Et je ne le reconnais pas
La couleur elle-même ne fait plus loi
La forme n’atteint plus sa plénitude habituelle
Musique sans notes, aigrelette

Tourne toujours le manège
Dans la tête ou le cœur
Mais à vide, sans consistance
Comme un vent de fronde
Dans le calme des matins d’hiver

Il ne me reste plus que le souvenir
De jours et de nuits délaissés
Quand le temps coulait encore
Qu’il glissait sur nos fronts
L’enlaçant d’une obscure fraicheur
Lui donnant un teint de pêche
Et ravissant nos danses ondulantes
Devant le cerceau de l’écoulement des jours

Oui, nous dansons tous
Mais de manière différente
Le chat ondule
Le canard se dandine
Le cheval se cabre
L’hippopotame s’ébroue
La puce saute
Clair-obscur des attitudes
Dans la tempête de l’avenir

Dorénavant, j’irai sur la pointe des pieds
Chanter l’angélus à la lune
Je hurlerai la soif des humains
Et la faiblesse de leur rapprochement
Pour enfin m’étendre sur la pierre froide
Et contempler la ronde sans fin
Des hommes et des femmes
Qui courent dévêtus de pudeur
Devant la vie qui va, qui vient
Sans vraiment savoir
Ce qu’il en advient

Détaché, je suis
Tant et tant que plus rien
N’atteint mon cœur de pierre
Le satellite passe, rose
Dans le ciel vert
Un petit pois précis
Qui parcourt sans faiblir
L’espace de la journée
Et je tourne en rond
Autour d’une boule ronde
Jusqu’au vertige
Et la chute, douloureuse

Rendors-toi
Retire-toi de tes songes
Et laisse le vent
Emporter tes lambeaux
De vie,
Pour enfin dormir
Unique