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31/12/2017

L'homme sans ombre (44)

L’amour spirituel n’exclut personne. Il s’adresse à tous sans distinction d’affinités. L’homme empli du divin dilate son cœur et y inclut le monde. Il ne possède rien et, par là, possède tout. Il déborde d’amour pour son ennemi et voudrait l’aider, lui donner la joie qui l’habite. Devenu transparent, n’ayant plus d’être propre, plus de volonté propre, il est le monde et plus que le monde. Il apporte à chacun sa part de lumière.

Ensemble, les quatre jeunes gens prirent le chemin de la colline, celle du premier jour, celle du constat de Noémie et de Lauranne. Rien n’a changé et tout a changé. Le monde extérieur est semblable à celui qu’ils ont toujours connu, mais un regard nouveau les enrobe et, au soleil couchant, pas une ombre ne se dessine sur l’ensemble de leur groupe devenu transparent.

Quelques jours plus tard, un nouvel article paraît dans le même quotidien : « Nous venons d’apprendre la dissolution de la secte bouddhiste Pingya qui n’a pu résister aux affrontements entre les deux conceptions de la réalisation de soi. Notre reporter s’est rendu sur les lieux du monastère. Ne restent que des bâtiments vides dans lesquels toute trace d’intense résurgence de l’esprit a disparu. Personne n’ose aborder le sujet du devenir des pratiquants de la secte. Où sont-ils partis ? Un homme de paille est tout à l’heure sorti et a cloué sur la porte-cochère une pancarte sur laquelle est inscrit A VENDRE. Depuis, rien ne bouge. »

 

FIN

30/12/2017

Géométrie dans l’espace, nouvelle de Ian Mac Ewan

C’est une nouvelle moyenne littérairement, mais dont l’idée de base développée est intéressante17-12-30 Sous les draps.jpg et fait preuve d’imagination : découverte du plan sans surface.

En fait, ce phénomène est impossible dans notre continuum où tout plan, fait de deux dimensions, forme par définition, une surface. Ce plan peut prendre toutes sortes de formes lorsqu’on le fait évoluer dans une troisième dimension, sans que cependant sa surface soit modifiée.

L’auteur suppose la découverte d’une construction géométrique particulière et réversible dont l’agencement une fois retourné abolit toute surface et rend le plan invisible. Par ce moyen géométrique, l’homme, adoptant certaines positions, pourrait abolir sa surface corporelle, donc se rendre invisible. Ce que l’auteur ne dit pas, c’est ce que devient son corps et comment il pourrait regagner notre continuum.

 

NB. recueil « Sous les draps et autres nouvelles » poche Folio

29/12/2017

Horizon

L'horizon ouvert sur l'infini

dans la lumière de l'irréel !

 

17-12-28 Horizon.jpg

Peint en 1968.

28/12/2017

Aphorisme

 

Beaucoup éprouve de la douceur à écouter de la musique,

Bien peu y éprouve de la joie, car ils ont l’oreille distraite.

L'école de la musique est une école de la joie.

Il faut y prêter l’attention des sens et non d’une oreille.

 

27/12/2017

L'homme sans ombre (43)

Libéré de lui-même et de sa vision du monde, il réalise la présence de Dieu en toutes choses, ainsi que la beauté de la vie et son sens pour l’homme. Il participe lui-même, consciemment, à la création. Il se sauve en sauvant le monde. Il ressent une transformation de la volonté qui s’unifie et dissout l’idée du moi égoïste, de la pensée qui dépasse la raison et l’imagination, de l’affectivité qui, surmontant l’émotion, atteint, à travers le sentiment, l’amour pur. L’être unifié laisse le principe divin agir à travers lui. Et cette unification entraîne une dissolution de l’idée de lui-même. Il se comprend et comprend ainsi l’autre. Il peut ainsi entrer en communion avec lui. L’autre devient lui-même et les barrières créées par le moi tombent progressivement. L’appréhension globale de la vie et sa compréhension se fait au-delà de la pensée. Il comprend que c’est le voile du mental qui empêche la compréhension. La connaissance de l’amour est inconnaissance, parce qu’elle est toujours nouvelle. Le monde divin ne peut se découvrir par une méthode, car toute méthode est fondée sur des habitudes mémorisées. Chaque approche de l’invisible est nouvelle, indéfinissable et ne peut être revécue. Le problème est de se détacher du mental qui cherche à renouer avec l’expérience vécue.

L’accomplissement de l’homme, c’est l’amour. L’amour humain transforme l’être. Lorsqu’on aime un autre être, le monde est transfiguré. Le cœur brûle et change le regard. La pensée sans cesse revient à l’être aimé. Cet amour est joie et cette souffrance merveilleuse s’éprouve dans le cœur. Le cœur est le lieu de l’amour, comme la tête est le lieu de la connaissance. L’homme accompli vit le monde avec le cœur, connaît avec le cœur. La vision par le cœur purifie et fait cesser l’habitude de juger. Cependant l’amour tel que le vit l’homme psychique doit être dépassé pour qu’il s’accomplisse. En effet, cet amour est mêlé de désirs et d’émotions. Il est exclusif et orienté vers un seul être ou quelques-uns. Il peut pousser l’homme à se dépasser lui-même, mais il est incontrôlable. C’est une énergie qui nous transforme, mais nous n’en sommes pas maîtres.

26/12/2017

Le mur quantique de la noosphère (2)

Ce monde invisible ou plutôt ces mondes invisibles s’abritent derrière une frontière perceptible  que certains appellent le numineux. Le numineux est, selon Rudolf Otto et Carl Gustav Jung, ce qui saisit l'individu, ce qui venant « d'ailleurs », lui donne le sentiment d'être dépendant à l'égard d'un « tout Autre ». Là la compréhension du monde est en effet toute autre. Le mystère divin se laisse entrevoir, mais sans jamais se dévoiler réellement. Le réel et l’imaginaire peuvent se confondre. L’intérieur et l’extérieur de l’être se côtoient. Mieux même, ils s’appuient l’un sur l’autre. Le numineux procure un état de fascination et d’effroi conjugués. C’est une frontière marquant le passage d’un état à un autre, entre le monde matériel et le monde immatériel, mais bien réel de l’esprit. Le numineux est la frontière perceptible du passage du Moi vers le Soi.

Ce monde invisible peut commencer par le monde astral, c’est-à-dire le monde des expériences et des rencontres ésotériques. Il se caractérise par des expériences hors du corps (transes, bilocation, translation, dédoublement, décorporation, lévitation) ou par la présence d’entités de nature très diverses qui peuvent être maléfiques ou bénéfiques ou encore par des sensations (bourdonnement, voix, rires, légèreté, sensation d’énergie, de légèreté, de chute dans un trou, etc.). C’est un monde dans lequel les sensations peuvent être vraies ou imaginaires, comme le monde quantique dans l’univers physique. Ainsi l’ésotérisme pourrait disposer de ses propres lois, inintelligibles pour un esprit rationnel.

Mais plus profondément et sans passer par l'ésotérisme, le monde invisible ne se dévoile que dans la perte de sentiment du Moi. Il ne s’agit pas réellement de la notion de Moi telle qu’elle est développée en psychologie et en psychanalyse, comme, par exemple,  le soi primaire des nouveau-nés de Michael Fordham ou le soi de la pyramide des besoins d’Abraham Maslow (notion d’accomplissement de soi), ou encore la notion de concept de soi et d’estime de soi en psychologie sociale. Tournons-nous plutôt vers la notion d’un Soi au-delà du moi, qui ne se dévoile que lorsque l’être a pu se débarrasser de ce moi encombrant qui l’empêche d’accéder à une autre vision et à un autre monde, qui est tout autre que ce que le moi permet de percevoir du monde qui l’environne. C’est le Soi dont parlent les sages hindous, les maîtres du zen ou les mystiques des religions, même si ceux-ci emploient d’autres mots pour qualifier cet état d’être.

Pour faire une comparaison hasardeuse, on pourrait dire que l’idée de numineux s’apparente à l’existence, concept maintenant démontré, de trou noir en cosmologie. Le trou noir possède un champ gravitationnel tellement intense, qu’il empêche toute forme de matière ou de rayonnement de s’en échapper. Il est défini comme une singularité gravitationnelle occultée par un horizon absolu appelé horizon des évènements.

On pourrait également qualifier ce monde invisible de lieu de réunion des contraires, mais il est plus probable que ce lieu de réunion des contraires soit le véritable monde spirituel, rassemblant les contraires, c’est-à-dire le matériel et le spirituel, le réel et l’imaginaire, l’être le non-être.

Ce n’est pas encore le monde spirituel, car le monde spirituel est un monde sans temps ni espace, donc ni mouvement puisque le mouvement exige de l’espace pour se déplacer et du temps pour accomplir ce déplacement. Il est très vraisemblablement sans corporalité physique, mais peut-être pourvu d’une autre corporalité de nature différente telle que l’âme.

25/12/2017

Noël 2017

Le Tout est Un…

Tiens-toi droit
Que le monde vienne à toi…

Ne sois rien
Assis sur le feu de l’esprit
Tu perçois la blancheur
Mais tu ne peux l’atteindre…

Une naissance en soi
Est toujours une mort
De l’être que tu étais
Pour celui que tu deviens

Immobile devant l’immensité
Tu erres sans espace-temps
Et découvre la singularité
De cette naissance en toi

Tu n’as plus d’excuses
Il est né, fais-le vivre

©  Loup Francart

24/12/2017

Mécanicité

 Ne serais-tu qu'un simple tuyau

ou même un robinet

qui subit la volonté d'un mécanicien

qui tourne au hasard

la clé de la vie ?

Mécanicité 3.jpg

23/12/2017

L'homme sans ombre (42)

Quatre jours plus tard, un autre article concernant la même secte paraît à nouveau dans la presse : « La secte bouddhiste Pingya continue à faire parler d’elle. Divisée sur les choix pris par son guide spirituel, elle s’entredéchire entre les partisans du tulkou et ceux qui s’opposent à ses innovations, dont en particulier l’annonce de son prochain mariage. En effet, un maître tibétain, qui appartient à tous, ne se marie pas. Des heurts se sont produits à l’intérieur du monastère, à tel point qu’une intervention de la police a été demandée par quelques fidèles. Le calme est revenu, mais rien ne va plus entre les deux parties. Il semble que le jeune Rimpoché qui déjà n’habitait pas dans le monastère, ait donné sa démission au profit d’un de ses partisans qui sera chargé de traiter avec le monastère de la secte resté en Inde de l’avenir de l’école parisienne. Mathis Letourneur, nous venons d’apprendre le nom occidental du Rimpoché, est depuis introuvable et semble avoir quitté définitivement le monastère parisien. »

Le lecteur retrouve Mathis, sa fiancée et le couple ami dans la petite maison, au pied de la colline où ils se rendaient tous les soirs et où les deux femmes avaient observé le comportement étrange de Mathis. Mathis est souriant, décontracté, mais concentré. La révélation de Bourges lui fait voir les choses de plus loin, avec moins de passion et même d’émotion. Chaque jour, il a longuement médité, poursuivi ses tâches personnelles pour atteindre la vacuité du soi. Dans le même temps, il a effectué avec Noémie de longs échanges au sujet de leurs désirs et de leur accomplissement à deux. Ils se savent prêts à tout et ils attendent. Ils attendent un signe qui leur indique leur devenir. Ils sont ouverts, calmes et aimant. C’est l’heure de sa troisième méditation, celle pendant laquelle il développe les bienfaits des deux premières et entre en lévitation. Mais aujourd’hui, il n’arrive à rien. Il a beau reconstruire en lui les conditions habituelles du corps, du cœur et de l’esprit, rien ne vient. Il sent même que rien ne viendra. Il est déconnecté. De quoi ? Il ne sait pas. Ce n’est pas une lourdeur inhabituelle, mais plutôt  une liberté nouvelle qui le ramène à la réalité, mais une réalité spirituelle inusitée, une délivrance du cœur qui retourne la vision. Il sourit et tout lui sourit. Il redevient comme tout un chacun, mais dans le même temps il voit le monde transformé, riant, aspirant au bonheur. Peu importe toute lévitation, peu importe tout signe d’une quelconque atteinte d’un niveau spirituel reconnu au Tibet. Seul compte le vide silencieux et furtif du vent céleste qui passe à travers son corps et nettoie son esprit. Il sent son être atteindre l’accomplissement, malgré ses ennuis, son découragement, ses adversaires. Tout cela a disparu.

22/12/2017

La singularité

Définition singulière que celle de la singularité :
Caractère de ce qui est unique ou acte la révélant

Nous sommes tous singuliers, sans le savoir
Pourtant nous errons dans la reconnaissance
De nos ressemblances sans nous douter
De la présence de l’être singulier
Que chacun de nous est et se doit de découvrir

C’est un véritable déconditionnement à pratiquer
Se défaire de l’apprentissage de l’humain
Pour errer dans la singularité de mon être lui-même

C’est un au-delà du moi à découvrir
Un point concentrant le soi unique et singulier
Qui donne à l’être sa force et sa valeur
L’affirmation de de son accomplissement
La transparence totale de son existence

C’est lorsque je ne suis plus que je suis
Voilà la singularité de chaque être humain

Alors, franchis le pas et saute dans le trou noir
Tu ressortiras immaculé comme neige,
Dans un trou blanc, transfiguré

Mais, attention, n’oublie pas ta blancheur nouvelle
Garde ton regard ébloui et oublie ce que tu étais

 

 ©  Loup Francart

21/12/2017

Hypnose

Quel étonnant pouvoir pour une petite fille...


 

20/12/2017

La tendresse présente : location à Lisbonne

Que retenir ?
Le masque sur le poêle
Chinoise au sourire rougi
La course au mouton sauvage
De Muraki, écrivain étrange
Mais d’un réalisme absolu
La fenêtre de la salle de bain
Baignée de lumière au matin
L’autre fenêtre sous la table
Où l’on s’encastre pour réfléchir
Le grenier blanc soleil
Qui s’endort au déjeuner
Et la présence invisible
De l’hôtesse toujours là, dans ces objets
Doucement offerts au creux des mains
Lorsque, les locataires endormis
La maison reprend vie, la vraie
Celle du jeu de cache-cache
L’ignorance de cette danse dans la nuit
Comme le cosmologue face au mur quantique
Laisse percer des anomalies incompréhensibles
Derrière les certitudes du juste raisonnable
C’est un feu bouillonnant et indéfinissable
Qui engendre en l’être humain allégé
La conviction d’un infini invisible
Plus prégnant que le temps et l’espace

 ©  Loup Francart

19/12/2017

L'homme sans ombre (41)

Quelques jours plus tard, paraît dans la presse française un article intitulé « Étrange affaire de succession dans une secte bouddhiste » : Une étrange affaire s’est déroulée à Paris dans les milieux tibétains. La secte Pingya venait d’installer un monastère dans le quartier du 13ème arrondissement et commençait à s’étoffer sous la conduite d’un tulkou qui serait d’origine française. C’est cette origine qui a suscité des jalousies, puis des antagonismes au sein des lamas de la secte. Ils leurs semblent inconcevables qu’un grand maître puisse se réincarner dans un enfant étranger aux traditions tibétaines. De plus, pour se justifier, ces adversaires font état de comportement tout à fait contraire aux coutumes du Tibet. Les tulkous sont et doivent rester célibataires. Ils ont, comme nos prêtres catholiques, une obligation de renoncement à la chair pour se consacrer à l’amour divin qui se porte vers tous les hommes et les femmes. Or celui-ci (nous n’avons encore pas réussi à identifier son nom réel) prétend se marier avec une française qui n’est même pas bouddhiste. Un sacrilège que les contestataires mettent en avant pour refuser dorénavant l’exercice du pouvoir par le rimpoché [1]. Ce n’est cependant pas un fait nouveau. Plusieurs Rimpoché se sont mariés tout en demeurant à la tête de leur secte. Ainsi le Sakyong Mipham Rinpoché s’est marié récemment avec la fille d’un autre Rimpoché et est devenu un véritable occidental. On constate d’ailleurs que les problèmes sexuelles sont aussi nombreuses dans le bouddhisme que dans le catholicisme. Ainsi, en novembre 1994, en Californie, Sogyal Rimpoché  a fait l'objet d'une plainte pour « mauvais traitements physiques, psychiques et sexuels ». Après de nombreuses polémiques entre les deux parties, Sugyal Rimpoché démissionne de la direction spirituelle de Rigpa, laissant celle-ci à un groupe d'anciens étudiants et de lamas tibétains.

Que va-t-il se passer pour cette  nouvelle secte bouddhiste qui jusque-là n’avait pas fait parler d’elle ? Nous n’avons pu approcher le jeune Rimpoché. Celui-ci a bien, en effet, été désigné tulkou par une commission de recherche d’un successeur. Ces parents se trouvaient en Inde où le père, ingénieur, dirigeait la construction d’un pont. Cette désignation ne posa pas de problème auprès des populations locales et il fut pris en main par les lamas de la secte sans difficulté. Devenu jeune homme, il décida de se rendre en Occident et d’y créer un monastère comme d’autres sectes bouddhistes ont pris l’habitude de le faire depuis plusieurs décennies. C’est au cours de ce retour dans sa patrie d’origine que le tulkou a rencontré une jeune fille qui, semble-t-il, embrouilla ses relations avec sa secte. Rien ne va plus au sein des fidèles et la rupture semble proche entre le maître et ses fidèles. »

 

[1] Rimpoché est une épithète honorifique propre au bouddhisme tibétain. Employé comme adjectif, il signifie littéralement « précieux ». Le titre Rimpoché est le plus souvent réservé à un lama incarné.

18/12/2017

Le mur quantique de la noosphère (1)

La poésie et l’imagination peuvent amener à des découvertes surprenantes. Cette nuit, devisant avec moi-même dans la cuisine devant un bol de café, s’assimilèrent en un éclair le monde physique et le monde des idées, c’est-à-dire la noosphère. Dans ce dernier monde, on navigue entre des idées, des impressions, des sentiments, des réactions, bref, en un univers ordonné et cohérent dès l’instant où l’on a su le découvrir avec rationalité et en tirer quelques règles relativement simples. Cette cohérence est donnée par la parole qui lie entre elles les représentations visuelles, sonores, tactiles, gustatives, odorantes et qui permet de les exprimer et de les partager. On pourrait dire que la parole est comme la gravité, elle maintient en cohérence le monde des idées qui nous entoure et nous permet d’appréhender la vie.

L’homme a toujours senti une attirance pour aller au-delà de notre monde physique. Tous les grands mystiques, chercheurs, artistes ont tenté de faire comprendre à leurs contemporains cette vision d’un monde tout autre qui les a transformés. Ils se sont exprimés selon l’objet de leurs recherches, mais derrière les apparences, c’est bien une même présence qui les attire et à laquelle ils consacrent leur vie. Certes, ce nouveau monde n’est pas perceptible directement et ne se dévoile jamais clairement. Mais des éclairs d’intuitions ont fait franchi le mur à ces élus et pénétrer dans le calme et la tempête, là où le temps et l’espace n’existe plus. On pourrait comparer cela à un trou noir du monde de la matière, mais c’est ici un trou blanc qui éclaire et guide la vision. Quelle exaltation les saisit ! Ces éclairs les transforment, les allègent, les enchantent. Revenu dans le monde habituel, ils ont contemplé leur vie et décidé d’approfondir cette surprise stupéfiante : il y a un monde invisible derrière le monde visible.

De même qu’il y a une frontière conceptuelle entre le monde de la physique gravitationnelle et le monde de la physique quantique, l’un et l’autre se comportant avec des lois différentes, on constate, par expérience personnelle, l’existence d’une frontière entre le moi bien ancré dans notre monde physique habituel et le soi appartenant au monde du sacré ou monde des symboles dont parle Jung. Peut-être même peut-on dire que ce monde qui se dévoile à nous est en lui-même une frontière qui mène au monde spirituel, frontière entre le moi et l’âme. Disons frontière parce que cet état est trouble et fait vivre dans les deux mondes sans que le choix soit fait définitivement par celui qui l’expérimente. Numineux, tel est le terme que certains emploient. Et ce terme est volontairement à double sens : d’une part, fascination à l’égard de la perception du divin et séduction  par cette présence immatérielle, d’autre part effroi et terreur  face à l’incompréhensible et au mystère. L’expérience de ce numineux est donc trouble et difficilement définissable, de même que l’expérience entre le monde physique géré par la gravitation et le monde quantique dont les lois sont fondamentalement différentes. Ainsi, dans le monde quantique, on peut être et ne pas être en même temps, comme l’a mis en évidence l’expérience du chat de Schrödinger à laquelle le physicien Everett a donné une étrange explication. L’univers serait une immense onde quantique, somme des possibilités et impossibilités de tout ce qu’il contient, imaginables ou non, toutes ces possibilités existant simultanément, comme autant de chats à la fois morts ou vivants. Toutes les possibilités existent à chaque instant, mais elles ne sont pas visibles. Il existerait donc une inconcevable multitude d’univers parallèles où toutes les possibilités sont réalité.

Pour ce qui est du monde de la pensée que l’on pourrait également appelé monde de l’information, on constate la même frontière entre le monde du rationnel (celui de la noosphère, somme des pensées sur le monde physique) et le monde spirituel ou monde du sacré, seul accessible par le numineux, état trouble et indéfinissable qui contraint l’être à revoir sa vision de l’univers et de la vie. Mais ce n’est que l’ouverture sur plusieurs mondes : le soi permet d’accéder à la connaissance de l’âme, entité du monde spirituel, puis, au-delà, au monde du Tout divin que certains appellent le Tout autre pour ne pas employer un terme rappelant celui de "Dieu", trop empli d'appropriations exclusives.

17/12/2017

Il est encore temps

Oui, il est encore temps de commander "Un sourire et quelques mots" pour vos cadeaux de Noël ou de nouvel an.

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« C’est justement lorsque nous abandonnons notre histoire personnelle que nous découvrons la vraie vie. »

 

Sourire aux autres, au monde et à soi-même reste la meilleure thérapie contre la morosité et l’amertume. Dans de brefs textes, l’auteur s’interroge sur le mystère de la vie individuelle (notre histoire personnelle, le destin, le bonheur, l’au-delà du moi), l’avenir collectif (la politique, la culture, la communication, l’art), l’univers (le Big Bang, l’infini, la noosphère), ainsi que d’autres sujets plus terre à terre (la danse de la Parisienne, le bain de mer, courir la nuit).

Ces anecdotes et réflexions sont drôles, provocantes, parfois intimes, à méditer, au lit, sur la plage ou dans le métro.

 

 

Livre broché : 18,90 € TTC
E-book : 7.99 €
298 pages
ISBN 979-10-326-0249-2

 

A vous qui errez dans votre être sans le comprendre,
A vous qui cherchez la lumière au-delà du moi,
A vous qui entrevoyez derrière votre histoire personnelle
Ce vide qui possède avec sobriété l’attrait du plein,
Ouvrez ce livre et laissez-vous prendre
Par ses anecdotes, réflexions, interrogations
Qui vous ouvrent la voie et incitent au retournement.

 

https://www.youtube.com/watch?v=OodjVwXH1Co


  Les commandes peuvent être passées :
- Sur le site internet de l'éditeur : http://7ecrit.com/livre/sourire-quelques-mots 
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16/12/2017

La peur du condamné

 

La grande peur du condamné n’est pas la crainte de mourir.

C’est la connaissance du fait qu’il ne vivra plus.

 

15/12/2017

L'homme sans ombre (40)

Mathis envisage de démissionner et de rompre définitivement avec ses fonctions religieuses. Il ne sera pas le premier. Très récemment, Jamgon Kongtrul Rinpoche s’est démis de ses activités après une cabale de plusieurs années. Il se souvient encore de ce que celui-ci a écrit lors de sa démission en 2016 : « Les choses paraissent si bien et correctes en façade mais par derrière c’est un chaos, et je ne puis vivre une vie telle que cela, montrant un visage radieux mais à l’intérieur je me sens incapable et indigne de ce nom. (…) Ceux qui pensent uniquement à leur image et solennité en public risquent d’être déçus et seront ceux qui vraiment sont centrés sur leur ego, et égoïstes. Plutôt que de m’accuser vous feriez mieux de regarder les problèmes et voir clairement quelles circonstances me poussent à partir. »[1]

Cependant, Mathis ne rejette pas le bouddhisme. Il continuera à progresser sur le chemin de l’éveil, mais ce sera en s’appuyant sur l’amour et non sur la connaissance. De plus, sa position de tulkou l’engage et il ne peut rompre sans résoudre le problème. Il se réfère  à sa Sainteté le Dalaï Lama pour qui la chose essentielle qu’un tulkou doit garder à l’esprit est de ne jamais abandonner les enseignements du Bouddha. Terminant son allocution lors du départ de Jamgon Kongtrul Rinpoche, le Dalaï Lama dit qu’un tulkou ne doit jamais cesser de travailler pour les êtres, quelle que soit sa situation : "C’est tout ce que j’ai à dire. J’ai fait tout ce que j’ai pu jusque-là. Je ne suis pas débarrassé de tous les défauts, je n’ai pas développé toutes les qualités. Mais quoi qu’il arrive, je continue de penser que je ne renoncerai pas à mon activité bénéfique envers le bouddhisme et les êtres. Gardez bien ceci à l’esprit."

Alors, il lui faut encore franchir quelques étapes envers la hiérarchie tibétaine, dans la rage des hommes à acquérir le pouvoir. Et celui-ci ne l’intéresse plus. Il n’aspire qu’à l’amour, un amour universel qui se porte vers tous.

 

[1] https://www.larbredesrefuges.com/t11165-jamgon-kongtrul-lodro-chokyi-nyima-quitte-ses-fonctions

14/12/2017

Solitude et révolte

L’homme d’aujourd’hui se meurt hors de la société et il n’a jamais été aussi seul dans la société.

L’apprentissage de la solitude volontaire est l’apprentissage de la connaissance de soi, alors que la solitude dans la société entraîne la révolte ou l’inaction. Le monde d’aujourd’hui est un monde de solitaires par obligation, aussi n’y a-t-on jamais autant vu de révoltés et d’inactifs.

Le seul moyen de lutter contre la révolte ou l’inaction est de résister à la solitude involontaire. Elle est plus souvent morale que matérielle et est due au mouvement.

 

Redonner à la vie corporelle et spirituelle, la stabilité qu’elle a perdue,

Retrouver les valeurs immuables.

 

13/12/2017

Femme

Toi, femme, origine et avenir de l’univers
Ignorée de la force destructrice de l’évolution
Assise dans l’éternel repos du cœur
En mouvement discret entre les êtres
Reliant les uns aux autres avec aménité
Emplissant l’âme d’absence rayonnante

Comment ne pas te dire, en toute fraîcheur :
« En toi, je suis ; par toi j’étais ; avec toi, je serai »

Coule-toi dans sa quiétude tranquille
Épouse ces courbes chaleureuses
Immerge-toi dans l’être chéri et revivifiant
Laisse parler en elle la vie et l’amour
Et considère-toi chanceux de côtoyer
L’origine de ton être dans sa pleine lumière

La femme n’est rien pour être tout
La femme est l’avenir du monde
Éveillant la vie entre les entités
Leur donnant élasticité et reliance
Mettant en convergence les sons
Pour devenir contrepoint et harmonie

Oui, tu es belle, femme parmi les femmes
Amour donnant ton amour à tous
Centre de l’être, infini par humilité
Tout en recherche de l’unité
Et pourtant rien aux yeux du cri sauvage
Sur le pouvoir et l’arrogance de la force

 ©  Loup Francart

12/12/2017

Bouteilles vertes échappées de l’oubli

 

Bouteilles vertes échappées de l’oubli
Qui dorent leurs liquides au soleil de l’oubli
Bienfaisantes, chaudes, dépouillées
Vous êtes ce que nous sommes au regard
La consistance et la racine de la gaité
Vides, ignorées, vous sombrez dans l’oubli
De nos corps gorgés et repus

 ©  Loup Francart 

10/12/2017

Le professeur de philosophie et de physique

Ce professeur était un homme remarquable, à la fois professeur de philosophie et de physique dans les classes de terminale. Il maniait les concepts scientifiques avec autant d’aisance que ceux de philosophie. Sa salle de classe était une toute petite pièce disposant d’une fenêtre  qui donnait sur un puits de lumière, sans autre paysage que le mur d’en face à 2 m de distance. Les élèves étaient serrés ; des tabourets permettaient de s’assoir derrière des tables en fer gondolées. Mais peu leur importait, ils entraient dans le salon de Mme de Sévigné, dans la chambre d’un philosophe ou dans le laboratoire d’une université américaine.

Ils l’avaient surnommé Einstein. Il s’appelait Monsieur Moréas. Il portait comme le célèbre savant des cheveux crépus en envol autour de sa tête et se laissait pousser une petite moustache. Il marchait lentement en raison de son âge, un peu courbé, mais ses réparties étaient fulgurantes et drôles. Nous l’écoutions religieusement, subjugués par son verbe.

Il disserta un jour sur la femme enchanteresse du monde : « La femme est une amphore, serrée à la taille, s’élargissant aux hanches, sans angles droits, une courbure parfaite, façonnée pour la procréation. La femme est la poésie de la terre, elle nous donne le goût de vivre par sa simple beauté naturelle. » Ses camarades jeunes filles en rosissaient, quelque peu gênées, mais fières de cet hommage du vieux professeur.

Il éclairait sur l’origine du monde, leur parlant du Big Bang, étrangeté à l'époque, tout en gardant le mystère de la création présent dans son discours. Il les initia à la pensée logique, à l’imagination créatrice. Homme complet, il avait un sourire charmant dont il usait lorsqu’il disait quelque chose de personnel et le plus souvent en plaisantant. Sa pensée était profonde, mais il parlait comme s’il disait des choses banales et ses élèves ne soupçonnaient pas les trésors qu’il leur divulguait. Ils l’ont tous remercié à la fin de l’année.

Il n’a qu’un regret, c’est de ne pas l’avoir revu. La jeunesse oublie, préoccupée par son entrée dans la vie adulte.

09/12/2017

L'homme sans ombre (39)

Que doit-il faire ? Il ressent maintenant les difficultés de ce qu’il a entrepris. Il discerne dans le même temps, toute la joie apportée par sa rencontre avec Noémie et la libération intense de ses préoccupations. Il comprend qu’il n’atteindra pas le nirvana en poursuivant dans cette voie. Il comprend également que l’amour humain seul ne peut lui permettre de l’atteindre. Mais il sait d’instinct qu’il constitue une aide pour le conduire à l’amour universel et au bonheur suprême. Que de chemins encore à parcourir, mais cette fois-ci sans recherche d’un but matériel,  lié à des désirs personnels, mêlés, il est vrai, à des préoccupations mystiques. Il n’est pas encore éveillé et sa connaissance ne lui sert à rien. Il doit maintenant s’efforcer de franchir la dernière barrière : passer de l’amour humain à l’amour divin. Il sait qu’il ne pourra le faire que dans la joie que lui donne Noémie qui le précède dans cette compréhension de l’amour. Redevenir le petit enfant et suivre celle qui l’a précédé. Enfin, il s’éveille, non à la manière du bouddha, car il n’a pas encore accédé au nirvana, mais à une voie autre qui pourrait l’y conduire.

Il dit alors adieu au compagnon qui l’a aidé et prend le chemin de Paris. Il est prêt à envisager une autre vie, plus libre, plus réelle, moins tendue et, finalement, moins fausse. Il part le nez au vent, sans souci, sans interrogation, sans l’ombre d’un regret. Il sait où il va, ce qu’il veut et plus rien ne l’en fera démordre. Il a détruit les barrières qu’il s’était érigées et s’ouvre à l’inconnu, sans aucune crainte. Il sait qu’il perd ce qu’il a mis tant de temps à acquérir, mais peu importe. Il est libre. Il va perdre ses pouvoirs, tous ses pouvoirs : matériels, psychologiques, spirituels. Cela ne le bloque plus. Il est libéré.

08/12/2017

Souvenirs

Parfois reviennent des bribes de souvenirs
Elles sont ténues, orphelines et soumises au vent
Elles errent comme les atomes dans l’espace quantique
Apparaissent où on ne les attend pas, indiscrètes
Et mêlent leur irruption d’un parfum de déjà vu
Mais te souviens-tu de leur lieu et du moment
Où elles frappèrent de surprise ton attention
Jusqu’au bout de tes certitudes et désolations
L’effet produit, elles repartent aussi vite que possible
Et s’oublie cet instant, béni ou non, de l’apparition
Dans l’horizon des possibles et le ciel du probable
D’une certitude d’un fait sans rappel de sa naissance

Le jour où la larme rappela ta détresse sans motif
La nuit où ton corps fut mon dernier refuge
Le matin quand la fraîcheur des vies t’enivre
Le soir quand l’espoir endort tes défenses
Et tous ces entre-deux, de surprise en surprise
Qui frappent à ta porte et enfoncent leurs doigts
Dans le cerveau brûlant des jours d’antan

 ©  Loup Francart

07/12/2017

Ecoulement

Seul,
Il est.
Il frémit.
Est-il parti ?
Rien ne le retient
Au bord de l’abime.
Quel voyage cahotant…
La chute en sera plus rude.
Plonge et surnage dans les vagues !

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06/12/2017

Aimez-vous Brahms ?

Un film franco-américain d'Anatole Litvak, vieux certes, inspiré du roman du même nom de Françoise Sagan et sorti en 1961. Une histoire très banale qui, au fond, manquerait d'intérêt si Ingrid Bergman ne jouait merveilleusement. Les dialogues possèdent  parfois la saveur de la vérité, en particulier une phrase qui semble banale à première vue : "J'ai rencontré une femme. Une vraie. Elle est gaie, elle est triste aussi." Une autre, moins belle : "La pire des condamnations: vivre seul et sans amour". Mais c'est un lieu commun.

http://www.dailymotion.com/video/xalcae




05/12/2017

L'homme sans ombre (38)

Il lui revient à la mémoire qu’au-delà de la compassion (karunâ) mise en avant par le bouddhisme, l’essentiel est bien l’amour (sanskrit maitrî), sentiment qui vise à procurer le bonheur à tous les êtres : « Que tous les êtres soient heureux ! Qu'ils soient en joie et en sûreté ! Toute chose qui est vivante, faible ou forte, longue, grande ou moyenne, courte ou petite, visible ou invisible, proche ou lointaine, née ou à naître, que tous ces êtres soient heureux ! Que nul ne déçoive un autre ni ne méprise aucun être si peu que ce soit ; que nul, par colère ou par haine, ne souhaite de mal à un autre. Ainsi qu'une mère au péril de sa vie surveille et protège son unique enfant, ainsi avec un esprit sans limites doit-on chérir toute chose vivante, aimer le monde en son entier, au-dessus, au-dessous et tout autour, sans limitation, avec une bonté bienveillante infinie. Étant debout ou marchant, assis ou couché, tant que l'on est éveillé, on doit cultiver cette pensée. Ceci est appelé la suprême manière de vivre[1]. » Il se souvient que l’homme est sur terre pour être heureux et que le rôle d’un véritable tulkou est bien sûr de faire vivre une communauté ou une école de méditation, mais surtout d’incarner la compassion et l’amour. Il prend conscience de cet oubli et de son acharnement à ne se pencher que sur la renaissance de la secte. Il a perdu la joie (muditâ). S’il n’y a pas de joie dans l’amour, il ne s’agit pas d’amour véritable. De même, s’il n’y a pas de liberté (upékshâ), il n’y a pas d’amour véritable. Quand on aime, on offre la liberté à celui ou à celle qu’on aime, une liberté tant extérieure dans le monde matériel qu’intérieure dans son être le plus profond[2].

 

[1] Suttanipâta, I, 8. Cité in Rahula, p. 125.

[2] Thich Nhat Hanh, l’amour veritable, in http://www.buddhaline.net/L-amour-veritable  

04/12/2017

Comment ?

Comment s’épousent mes angles droits
Avec tes courbes et tes douceurs ?

Comment encore peux-tu dormir sans douleur
Auprès du paillard ronflement des organes outranciers ?

Comment tes exclamations rafraîchissantes
Rivalisent-elles avec la profondeur de nos vitalités ?

Comment ton rire et ta joie de vivre
Se concilient-ils avec l’éclat de nos moqueries ?

Comment la tendresse envoûtante de ta nudité
Accepte-t-elle la gaillarde prétention de nos manifestes dressés ?

C’est un miracle bien léger, mais si débordant
Que chaque jour l’homme et la femme se retrouvent
Serrent ensemble leurs peines et leurs espoirs
Dans une félicité conjointe et revivifiante
Qui chante joyeusement l’amour et la filiation
Et contemplent du haut de leur union le mystère humain
Deux en un, divergents et pourtant étroitement emboîtés

 ©  Loup Francart

03/12/2017

La création artistique

 

Il faut un thème à chaque création artistique, sinon l'art tombe dans la facilité de certains surréalistes et devient une sorte d'automatisme psychologique qui, bien que naissant d'une même aptitude à saisir les rapports, est opposé à l'art, car il ne possède pas cette réflexion qui doit épauler la création.

 

02/12/2017

L’annulaire, un roman de Yoko Ogawa

Le livre pourrait s’appeler le mystère du laboratoire de spécimens. La jeune filroman,japon,littérature fantastiquele qui y travaille a eu un accident dans la société qui l’employait auparavant. Elle a perdu le bout d’un doigt dans un engrenage. Ici le travail est plus simple, mais sait-elle réellement à quoi il sert ? Son propriétaire recueille des spécimens qu’amènent les gens et les conserve avec une préparation en laboratoire auquel elle n’a pas accès. Ils sont ensuite étiquetés et placés sur des étagères dans diverses salles. A quoi servent ces spécimens ? Il est difficile de leur trouver un but commun. Les raisons qui poussent à souhaiter un spécimen sont différentes pour chacun. Il s’agit d’’un problème personnel. Cela n’a rien à voir avec la politique, l’économie ou l’art. En préparant les spécimens, nous apportons un réponse à ces problèmes personnels. Vous comprenez ? explique M. Deshimaru, le propriétaire du magasin laboratoire.  Un visiteur arrive avec l’objet qu’il veut faire naturaliser. Après les formalités d’usage, vous le prenez et j’en fais un spécimen.

C’est ainsi qu’un jour, une jeune fille vient faire naturaliser un morceau de musique. Pas la partition, la musique elle-même. Pour cela, M. Deshimaru fait appel à une vieille demoiselle qui jouera la partition et le tout sera enfermé dans un tube de verre fermé par un bouchon de liège. Le même jour, M. Deshimaru lui offre une magnifique paire de chaussures qui s’ajuste parfaitement à ses pieds et les lui met aux pieds avec des mains caressantes. Elle doit les garder et il détruit les anciennes chaussures. Ils prennent l’habitude de se retrouver dans la salle de bain du magasin pour discuter, puis pour s’aimer étroitement dans la baignoire. Une autre jeune fille débarque un matin. Elle veut conserver un spécimen de sa brûlure sur une joue. Elle passe dans le laboratoire avec le propriétaire, mais ne ressort jamais. Qu’est-elle devenue ?

D’autres péripéties s’échelonnent au long des pages. Laissons-les là pour que vous les découvriez. La fin est-elle une fin ? L'assistante veut aussi son spécimen, c’est-à-dire le bout de son doigt. Elle prépare le tube, les étiquettes et va frapper à la porte du laboratoire. C’est ensuite à votre imagination de finir le roman selon votre personnalité.

Une atmosphère pleine de mystère au travers de descriptions très matérielles et pratiques. C’est une sorte de rêve éveillée, une histoire simple, si simple que l’on se demande ce qui transforme le récit en un conte énigmatique dont le déroulement vous envoûte.

 

01/12/2017

L'homme sans ombre (37)

Voilà pourquoi il s’est enflammé pour la jeune fille merveilleuse qu’est Noémie. Cette expérience nouvelle lui ouvrait des horizons inconnus. Il avait senti en lui naître des perceptions mystérieuses, des sensations ignorées, des impressions étranges, des sentiments cachés qu’il avait du mal à analyser. Une faille était apparue dans l’être auquel il était habitué, une dimension jusqu’ici non perçue s’était ouverte. Il avait découvert sa part de féminité, une vision adoucie de l’univers se surajoutant à sa propre vision. Il connaît maintenant non seulement la consistance et le poids des choses, mais également ce qui les relie entre elles, ces ondes colorées qui tissent l’harmonie et la sérénité, le mariage du plein dans le vide. C’est une libération. Il ne connaissait les choses qu’une à une, les analysait dans leur forme, leur couleur, leur senteur, leur toucher, et il en découvre l’envers, ce qui leur permet d’être pleinement ce qu’elles sont au milieu des autres, leur particularité, leur infinitude, leur extraordinaire plénitude. Le langage de l’amour est en toute chose, il suffit de se mettre en condition pour le recevoir, de s’abandonner à cette mélodie des frissons, caresses, baisers.

Pendant environ une année, ces deux appréhensions de la vie se sont côtoyées, tantôt orientées vers une plus grande connaissance,  tantôt vers un plus grand amour. La présence de Noémie l’emplissait de bonheur, mais il ne pouvait dans le même temps, s’empêcher de penser à son monastère et à son rôle. Un jour, il découvrit qu’un certain nombre de Rinpoché s’étaient mariés et que cela ne les avait pas empêchés d’exercer leur fonction. Cela le tranquillisa et lui donna la force de poser le problème au sein de la secte. Ce fut alors que commencèrent ses ennuis. Une importante minorité s’opposait à ce mariage, en particulier parce que la fiancée était européenne et non tibétaine. Il est maintenant au stade du choix. Il ne peut plus reculer : l’amour ou les pouvoirs spirituels ! Il a maintenant entrevu que la connaissance, même d’ordre supérieur, c’est-à-dire une connaissance mystique, mal comprise et mal dirigée, est une impasse dont il faut sortir. Mais il a également compris que l’amour humain entre un homme et une femme ne permet pas non plus la connaissance de l’amour mystique. Sa durabilité est trop souvent insuffisante. Seuls quelques êtres accomplissent pleinement une vie d’amour jusqu’au bout. D’ailleurs la littérature met en scène non pas des couples ayant accompli leur vie dans l’amour mutuel, mais ceux qui ont eu des difficultés et qui, le plus souvent, n’ont pas tenu jusqu’au bout ou encore sont morts avant d’avoir connu la félicité de cet amour.