31/07/2011
Le chat au point d'interrogation
Est-ce une nouvelle, est-ce un conte? Je ne sais. Mais je souhaite qu'il vous apporte un peu de plaisir en cette fin maussade de juillet.
le chat au point d'interrogation.pdf
06:36 Publié dans 43. Récits et nouvelles | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature | Imprimer
30/07/2011
L’année dernière à Marienbad, film d’Alain Resnais
L’année dernière à Marienbad 1 :
http://www.dailymotion.com/video/xa92dg_l-annee-derniere-a-marienbad-1_music
L’année dernière à Marienbad 2 :
http://www.dailymotion.com/video/xa93fl_l-annee-derniere-a-marienbad-2_music
L’année dernière à Marienbad 3 :
http://www.dailymotion.com/video/xa95yk_l-annee-derniere-a-marienbad-3_music
L’année dernière à Marienbad 4 :
http://www.dailymotion.com/video/xa96hp_l-annee-derniere-a-marienbad-4_music
L’année dernière à Marienbad 5 :
http://www.dailymotion.com/video/xa96uq_l-annee-derniere-a-marienbad-5-fin_music
D’un autre siècle, cet hôtel immense, luxueux, baroque, empli de couloirs, de galeries, surchargés de décors de stucs, de miroirs, de glaces noires, débouchant sur des salons déserts, surchargés, aux tapis lourds, épais, silencieux. Les personnages sont figés, rêveurs, les yeux fixes, ne regardant rien, indifférents. Et pourtant, ils réagissent à la fin du spectacle qu’ils regardaient : applaudissements, brouhaha des voix ; mais très vite tout se fige à nouveau, comme des pauses silencieuses, accompagnées d’un morceau d’orgue. Et bientôt, l’hôtel semble s’endormir lentement dans des conversations à deux, homme et femme. Mais la vie continue dans les salons auparavant silencieux, toujours en conversations saisies au vol, sans continuité.
Après l’introduction au jeu de Nim où toujours perd celui qui ne connaît pas l’astuce, on fait connaissance des personnages principaux du film : une jeune femme, Delphine Serig, belle, à la voix enjôleuse, mais légèrement agaçante ; un homme, Giorgio Albertazzi, de la même taille, séduisant, qui s’efforce de lui rappeler ce qui s’est passé l’année dernière à Marienbad et qui lui fait la cour ; un autre homme, Sacha Pitoëff, plus grand, également séduisant, dont on découvrira qu’il est le mari de la première et qui gagne toujours au jeu de Nim. La femme erre dans les décors, monte des escaliers, s’esquive, reprend le contact, mêlant deux moments et deux lieux, l’hôtel du présent et celui de Marienbad, voire d’autres. Tous ces fantômes se déplacent dans le décor, tantôt conversant à voix basse, tantôt silencieux, tels des spectres glaciaux, mais malgré tout attachants et même, parfois, vivants.
_ Que voulez-vous donc, vous savez bien que c’est impossible… Laissez-moi, je vous en supplie, dit-elle à celui qui lui fait la cour et dont on ne connaîtra pas le nom. Il l’accompagne cependant au concert, malgré l’intervention de l’autre personnage. Ils s’y tiennent comme deux étrangers. Puis retour à l’hôtel, dans les salons silencieux, et jeu d’attitudes entre la femme et l’homme, avec la remémoration de ce qui a peut-être existé auparavant, en un autre lieu, un autre temps, l’année dernière à Marienbad. Mais elle garde toujours une certaine distance :
_ Approchez-vous, plus près, lui dit-il.
_ Laissez-moi.
_ Et pourtant vous êtes là, à portée de ma main.
_ Pourquoi moi ?
_ Vous m’attendiez.
_ Non.
_ Il s’agit de votre vie, la vôtre. Debout devant moi, attendant peut-être, immobile, les bras le long du corps, vos lèvres un peu disjointes, vous avez peur !
_ Tout cela est faux, je ne connais pas cette chambre, il n’y a pas de glace au dessus de la cheminée. Je ne sais de quelle chose vous parlez. Je n’ai jamais été avec vous dans cette chambre. Vous inventez, je suis sûre que vous inventez.
_ Je vous ai regardé, je vous aimais, vous étiez vivante.
Et elle s’enfuit, une fois de plus.
Retour au dialogue entre elle et lui :
_ Vous m’avez demandé de vous laisser une année entière, pour me mettre à l’épreuve. Je viens maintenant vous chercher.
_ Non, non, c’est impossible.
Vision de l’année dernière à Marienbad : Seule dans sa chambre. Il explique ce qu’elle fait, mais elle-même fait autre chose, elle tourne autour de la chambre, doucement, frôlant les murs et les miroirs, alors qu’il lui dit :
_ Et vous êtes retournée vers le lit. Ecoutez-moi ! Pourquoi vouloir toujours vous échapper.
Les souvenirs se mélangent, il tente de se remémorer, mais il est incertain, il ne se souvient plus lui-même.
Ils se cherchent, ne se trouvent pas. Elle ne sait ce qu’elle veut. Elle craint son mari. L’histoire a commencé il ya un an, dans une architecture en trompe l’œil, entre un miroir et des colonnes, dans une chambre toujours ouverte.
Elle doit le retrouver à minuit. Il vient. Elle était là, assise sur une chaise, au pied de l’escalier, belle. Elle se lève, il la suit, dans l’hôtel de colonnes et d’escaliers. Ils sortent dans le parc, où ils se perdent dans la nuit tranquille, elle, seule avec lui.
Consacré Lion d’or en 1961 au festival de Venise, c’est le second film d’Alain Resnais, réalisé à partir du scénario d’Alain Robbe-Grillet. Ils recherchaient tous deux une nouvelle expression cinématographique, sortant des habitudes, comme le nouveau roman s’efforçait de renouveler le roman traditionnel. Le temps tient un grand rôle dans le film. Ce sont de perpétuels changements de temps et de lieux tout au long du film qui font qu’au bout de quelques minutes, on ne sait plus où l’on est et à quel moment. Le début du film est conçu pour envoûter le spectateur : travellings et panoramas donnent la dimension physique de l’espace. Les commentaires du narrateur qui répète pratiquement toujours la même chose d’une voix monocorde, ainsi que la musique d’orgue, qui accompagne ces descriptions, sont là pour tromper la perception de la durée. Il ne s’agit pas d’une histoire que l’on raconte d’une façon linéaire, mais d’une rêverie de l’imaginaire qui relie entre eux différents temps et différents lieux. La femme n’y croit pas et refuse les prétendus souvenirs de l’homme. Et pourtant elle se laisse prendre au jeu, au point, à la fin du film, de céder à la demande de son admirateur.
Et pourtant, on finit par douter comme la jeune femme de la réalité de ce que raconte l’homme, de ce qui s’est passé l’année dernière à Marienbad. On peut penser qu’Alain Resnais joue avec le spectateur. Il veut le contraindre à fabriquer sa propre compréhension du film, sans rien imposer. Il bâtit le décor, les personnages, certains faits et c’est au spectateur de les relier ensemble, de les animer pour faire dire au film ce qu’il veut entendre et comprendre.
06:59 Publié dans 13. Cinéma et théâtre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, voyage, nouveau roman | Imprimer
29/07/2011
Assemblage intrépide
Cet assemblage intrépide est le fruit d’une longue quête, croisement de points hauts centraux et latéraux sur fond de losanges. Je ne sais s’il peut exister, mais en dessin tout est possible.
09:13 Publié dans 22. Créations numériques | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : peinture, dessin, op'art, art cinétique | Imprimer
28/07/2011
Le chant orthodoxe slave
Le chant orthodoxe slave est profondément différent du chant romain. Intimement lié à l’âme russe, il puise ses caractéristiques dans la musique slave, elle-même influencée par de nombreux courants. Comme le chant grégorien, il dispose de huit tons, avec leurs caractères propres.
Découvrez la richesse de cette tradition :
Ecoutez quelques chants :
http://choeurslava.free.fr/extraits-sonores.htm
http://www.youtube.com/watch?v=wj5A1zvw-T8&feature=related
Mais bien d'autres sites vous offrent l'écoute de nombreux chants orthodoxes slaves, par exemple :
http://www.youtube.com/watch?v=jawFHHtqzD8&NR=1
05:20 Publié dans 52. Théorie de la musique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : musique, chant religieux, orthodoxie, tons slaves | Imprimer
27/07/2011
Pourquoi courir après les actes
Pourquoi courir après les actes ?
Pourquoi vouloir faire et défaire ?
S’arrêter, prendre le temps de se regarder !
Contempler le monde comme le hibou,
Les yeux ouverts, sans bouger
Et voir passer les incidents
Comme de petites blessures
A la perfidie de la vie
Calme serein des fontaines
Qui coulent au pied des jardins
Comme immobiles et vivantes
D’une vie statique et immortelle
Tel le scaphandre en eaux douces
Nous attendons la remontée
Pour sortir nos trésors :
Un doigt de poupée rose
Une couronne de fleurs artificielles
Trois lapins de porcelaine
Un chapeau défraichi
Par son séjour dans l’eau noire
Au-delà de ces assemblages
Nous retrouvons, cachée,
La sensation de froideur vitale
Des escargots idéologues
Qui courent aux murs de la honte
Petits délires matinaux
Comme un soulagement
Offert gratuitement
A l’errant qu’est
Chacun (ou chacune) de nous !
03:46 Publié dans 42. Créations poèmes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, poésie, poème | Imprimer
26/07/2011
Nouvelle promenade campagnarde
Retour aux trous blancs déjà évoqués le 2 mai.
Hier, promenade dans la campagne, au gré des pas et des humeurs, sous un temps moutonneux. Après la vision d’un château, hélas trop refait pour attirer notre attention, nous nous engageâmes dans un petit chemin au fond d’un vallon. Et nous entrâmes dans un autre monde, celui des trous blancs, monde merveilleux, d’un autre âge, empli d’inattendu, comme un voyage chez Alice (celle du pays des merveilles).
Marcher en catimini sur une douce couche d’humus pour pénétrer dans ce pays inconnu. De part et d’autre, un bois aux arbres emplis de lianes et de mousse, comme mis en conserve et ouvert à notre approche. Déboucher sur un chemin creux récemment débroussaillé dont les arbres pleuraient de longues tiges de cigares qui permettraient de fumer jusqu’à la fin de ses jours. Silence, lumière atténuée, aucun chant d’oiseaux, une impression d’entrer dans un monde ancien, presque préhistorique, résurgence d’un temps sans voiture, où seule la force animale permettait ce type de travaux.
Un vieil arbre, enrobé de paillettes qui lui font une barbe crissant, semblait servir de nid à des vautours imaginaires. Perdu au milieu du chemin dénudé, il apparaissait comme un fantôme volontaire, pour rappeler l’écoulement du temps.
Poursuite vers le fond du vallon, là où repose au creux des bois une eau suintant de rigoles creusées dans la pente. La lumière créait un reflet d’argent à sa surface, comme une couche de glace en plein été, dans laquelle les feuilles et la réverbération des squelettes des arbustes figeait l’ensemble en une immobilité mystérieuse et poignante. Une invraisemblable nostalgie s’empara de nous, comme un creux dans le ventre. Le regard embué, nous contemplâmes la résurgence des eaux sous le coton du ciel.
Pour finir, une petite halte au bord d’une route où poussait une chapelle du siècle dernier. Elle n’était pas très belle extérieurement, mais entretenue avec soin, enrobée d’un jardin naturel d’arbustes taillés et d’allées minuscules, mais proprettes. Regard par les deux vitres de la porte d’entrée qui nous fit découvrir un palais spirituel, aux peintures un peu éteintes, mais encore vives, et une sainte vierge enrobée de lumière nous présentant l’enfant Jésus.
Quelle belle promenade, qui nous a apporté un soleil intérieur en un jour maussade !
05:18 Publié dans 14. Promenades | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : nature, dépaysement | Imprimer
25/07/2011
Sénescence
En biologie, la sénescence (du latin senex, "vieil homme" ou "grand âge") ou vieillissement est un processus physiologique qui entraîne une lente dégradation des fonctions de l'organisme.
Le vieillissement d'un organisme débute après la phase de maturité, et progresse alors de façon irréversible jusqu'à la mort. Il se caractérise le plus souvent par une dégradation des capacités générales de l'organisme. (Wikipedia)
" Le vrai problème n’est pas de savoir si nous serons vivants après la mort, mais bien si nous serons vivants avant la mort... L’immortalité est une valeur, une dignité, une vocation, une exigence : comma la personnalité et comme la liberté. C’est pourquoi nous sommes des candidats à notre immortalité."
"C’est pourquoi l’au delà n’est pas à situer après la mort, il est d’abord un au delà de la biologie et il est en réalité un au dedans. Rigoureusement parlant en effet, on ne peut parler d’après la mort, parce que le disque du temps tourne autour d’un centre immobile."
Maurice Zundel
Ces deux faces de la réalité humaine apparaissent dans ce dessin à l’encre de chine que j’ai réalisé il y a déjà un certain temps. L’idée : l’élégance de l’homme malgré la sénescence, grâce à l’immortalité de l’âme.
04:49 Publié dans 24. Créations dessins | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : philosophie, christianisme, santé, nature | Imprimer
24/07/2011
Michel Portal & Jacky Terrasson – Concert à Marciac 2007
http://www.youtube.com/watch?v=zcGt4YeSR2k&feature=related
Après une introduction un peu bizarre pour ceux qui sont habitués à la musique classique, comme une sorte de clin d’œil au public, avec, en fin, l’utilisation de bruits plutôt que de notes, commence le morceau, un duo, sorte de petit chef d’œuvre entre le saxo et le piano, comme une ballade, calme, tranquille, une promenade, sur la Seine par exemple.
Sur une même note, il introduit réellement le morceau, accompagné par le rythme du piano, il tourne autour de la note, un sol bémol, seul d’abord, puis avec le pianiste qui lui-même joue un contrepoint. Alors commence un dialogue entre les deux instruments, avec des oppositions, mais aussi de parfaits accords, mélodiques et rythmiques. Ce dialogue est conduit par le saxo qui tourne autour de sa note, avec de brusques sautes d’humeur, avec des frasques rythmiques reprises par le piano qui enveloppe les échappées du basson d’un soutien permanent, mais volontairement retenu.
Ils reprennent enfin la mélodie de départ, avant d’entamer, comme c’est l’habitude en jazz, un solo, solo de piano, endiablé, plein de fioritures, beau de virtuosité. Ce solo est fait de petits morceaux qui s’enchaînent les uns les autres, tous subtils, tantôt pleins de pétulance, tantôt presque romantiques, toujours pleins de vie, avec quel brio !
Puis, le morceau reprend à deux, toujours sur la même note, tournant autour, avec un très beau contrepoint du piano qui se termine sereinement, au rythme de la main gauche du pianiste, juste avant le final, presqu’aussi bizarre que l’introduction, mais bien dans le style jazz.
Comment définir l’impression que vous laisse un tel morceau. On ne peut dire qu’il évoque en vous des souvenirs, à la manière de la musique classique, ou qu’il vous séduit par un équilibre harmonique et contrapuntique à la manière de Bach. C’est un remuement de tout l’être, qui chatouille d’abord la peau, par l’induction des sons, comme une sorte de dessin fait par des vagues à la surface de l’eau, puis qui vous prend par une sensation d’oubli de l’environnement pour vous enfermer dans la bulle du rythme et d’une mélodie qui semble vous atteindre de l’intérieur, à l’envers de votre enveloppe, là où l’être est à vif, mais en même temps pacifié, prêt à tout écouter, parce que restant dans cette bulle. Et vous êtes suspendu à cette musique non parce qu’elle évoque en vous quelque chose, mais parce qu’elle vous procure un sentiment indéfinissable, mais combien envoûtant.
05:45 Publié dans 51. Impressions musicales | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : musique, jazz, création | Imprimer
23/07/2011
Voici revenus le gris et le mouillé
Oui, voici revenus le gris et le mouillé.
Gris du ciel d’abord, mais aussi
Griserie des rues sans âme,
Rues grisâtres des jours verts
Vers des horizons sans fin,
Là où rien ne dit à personne,
Là où se promène, nostalgique,
Le poète dénudé des haricots blancs
Qui pleure lorsque rien ne l’enchante
Et qui rit au plaisir de savoir
Si, un jour, il sera bègue.
Alors combien sera rude sa tâche
De récitant de vers prolongés
Dans l’aube inconnue de la ville.
Mouillé aussi, comme la fourrure
Des rats un jour d’inondation
Ruisselant de brillants
Et prostrés dans un coin obscure,
Avant de ressortir au soleil du soir
Pour réchauffer leur vieille carcasse.
Enfermé dans un halo de condensation,
L’homme mouillé de larmes
Se prête au faux semblant
D’un attendrissant retour
D’une certaine innocence.
Mais au fond de lui,
Il sait bien, malgré ses dires,
La puissance de l’instant,
L’évocation irrésistible et instantanée
De souvenirs inconnus
Et d’un présent irrévocable,
Malgré le rêve, l’intention,
La paresse ou la vision.
Oui, voici revenus le gris et le mouillé.
Quand t’abstiendras-tu d’apercevoir,
Au-delà du temps et de l’espace,
L’espoir des jours blancs
Et des nuits de pleine lune ?
Couché dans ton lit trop grand,
Réveillé par la clarté diurne,
Tu rêves, tu deviens autre,
Tu te laisses empoigner
Par le miracle de la passion,
Une passion indéfinissable,
Celle de la création
Et de la démolition,
Pour que les lendemains
Soient autres, rosés
D’attente et de désirs,
Verts d’optimisme,
Jaune de bonheur.
05:34 Publié dans 42. Créations poèmes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, poésie, poème, nature | Imprimer
22/07/2011
Secrets de couple
Chaque couple, pour former un véritable couple, doit avoir ses secrets. C’est son trésor de guerre, amassé au fil des années, au gré des circonstances et de l’entente. Ce peut être des secrets anodins, tels que la manière de se comprendre sans avoir besoin de parler. Ce peut-être un secret ignoré d’un des deux membres du couple, tels qu’un défaut de l’autre qu’il ou elle aurait remarqué et qu’il se garde d’évoquer. Ce peut-être également un secret partagé volontairement, qui concerne une personne de leur entourage, avec laquelle ils continuent à avoir des relations tout en sachant au fond d’eux-mêmes telle ou telle chose. Mais tout ceci ne sont que des secrets superficiels, qui ne font pas le couple en lui-même, c’est-à-dire une entité propre, unique, que personne ne peut partager et qui leur permet de tenir toute leur vie ensemble, malgré les vicissitudes au fil des ans.
Le premier vrai secret est celui de leur rencontre. Non pas la rencontre extérieure telle que le lieu où ils se sont rencontrés ou par quels intermédiaires ils ont fait connaissance, mais tous ces instants d’or qui font qu’ils se sont sentis attirés l’un vers l’autre jusqu’au point où l’un et l’autre ne peuvent se passer de la présence de l’aimée(e) qui l’enrichit : la première fois où ils se sont tenus par la main, leur premier baiser, l’annonce de leur amour réciproque. Ne jamais partager ces secrets, ce sont ceux qui font vivre le couple au-delà des apparences et qui font qu’il est unique.
Le second secret, et ce n’est qu’un classement par ordre chronologique, est celui de leur vie intime, au plus profond de leur corps, dans leur bulle personnelle pourrait-on dire. Avez-vous ressenti l’importance de cette bulle ? Comme un refuge vis-à-vis du monde et de ses turpides, qui vous permet de vous déconnecter et de vous unir pour retrouver des forces. C’est la naissance de cette intimité secrète qui fait de vous un vrai couple : découverte du lieu intime de l’autre qui fait que vous y puiser un surcroit d’être, que celui-ci vous suffit et même vous comble. Ce n’est pas abstrait, contrairement à ce que pourront penser certains. C’est au contraire très vivant, réel, mais profondément intime, tels que le besoin de caresser doucement le creux de l’aine, comme un signe de reconnaissance indivise, ou de sentir le creux du cou de l’aimé(e), ou encore laisser reposer sa tête sur sa poitrine et se dire un de ces petits secrets dont nous avons parlé tout à l’heure. Un des signes de l’existence de ce secret intime est l’impression de toujours découvrir le corps de l’autre, comme une cathédrale à explorer, dans laquelle on prie ensemble (quelle métaphore !), pour renforcer la beauté du monde et des êtres. Et cette redécouverte permanente vous assure une plénitude incommensurable.
Contrairement à ce que prétendent les médias la transparence ne conduit pas forcément à plus d’être et de compréhension. Cette intimité de la vie de couple, qui ne peut se partager, est un signe de santé. La préserver est indispensable. Si celle-ci meurt, par manque de soins (extinction de ces petits gestes que nous avons évoqués) ou par dévoilement aux autres (céder ces secrets contre une excitation provisoire), alors le couple dépérit, se délite et, peu à peu, s’éteint faute de combustible.
Enfin, il existe un troisième secret, sans doute moins secret que les deux premiers, car il peut être apparent, c’est celui de leur but. Pourquoi formons-nous un couple ? Qu’est-ce qui nous tient ensemble, malgré les difficultés, les aléas de la vie ? Certes les deux secrets précédents permettent d’y répondre en partie, mais ce n’est pas suffisant. On tente d’y répondre au moment de l’engagement. Mais en réalité, il faut y repenser au fil des ans et le faire évoluer, pas seulement au fil des générations, mais également sur les motivations intimes du couple, et non se contenter d’une torpeur de bien-être qui est plus un lavement de tranquillité qu’un stimulateur d’énergie.
Ce sont les secrets de la vie intime du couple qui lui permettent d’assurer vis-à-vis des autres, son rôle d’accueil, d’entraide et d’amitié, chaque couple à sa manière, car chacun à « son entente secrète ». C’est aussi en cela que vos enfants, lorsqu’ils sont mariés, deviennent un peu des étrangers. Auparavant tous leurs secrets devaient vous concerner, sans forcément que vous en fassiez état. Mais c’est fini : ils ont leur secret, sur lequel vous ne devez pas les interroger.
06:51 Publié dans 11. Considérations diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : amour, couple | Imprimer
21/07/2011
Danse, danse, danse, d'Haruki Murakami
Je lis ce livre d’Haruki Murakami dans lequel il est confronté, dans un hôtel curieux, grand building construit sur l’emplacement d’un petit hôtel minable, mais portant le même nom, l’hôtel du dauphin, à l’homme-mouton (qui a déjà fait l’objet d’un livre antérieur). Et celui-ci ne lui donne qu’un conseil : danse, danse, danse.
" Mais il n’y a rien d’autre à faire que danser, poursuivit l’homme-mouton. Et danser du mieux qu’on peut. Au point que tout le monde t’admire. Danser tant que la musique durera. Ne te demande pas pourquoi. Il ne faut pas penser à la signification des choses. Il n’y en a aucune au départ. Si on commence à y réfléchir, les jambes s’arrêtent. "
Et Haruki (ou plutôt le personnage de ce livre) danse. Il décide de s’installer dans cet hôtel. Il a fait la connaissance de la réceptionniste avec laquelle il devient plus ou moins ami. Il rencontre également Yuki, très belle, qui n’a que treize ans et dont il se fait une amie, malgré les réticences de la jeune adolescente. Il retrouve un camarade d’école qui a réussi et qui est acteur. Il fait la connaissance d’une magnifique prostituée et en fait une amie de cœur. Enfin (je n’en suis qu’au tiers du livre), il revoit au cinéma une amie avec laquelle il a passé quatre ans, Kiki, et s’interroge sur ce qu’elle est devenue. Tout cela semble décousu. Mais au fond, ce qui semble important dans ce livre se résume au simple mot « danse ».
Mais qu’est-ce que danser ? Je vais laisser aller mon imagination ou plutôt ma propre compréhension de ce mot, sans cependant savoir ce que me dira la suite du livre. Je me trompe peut-être, mais c’est ma vision personnelle. Danser, c’est se tenir sur le fil du rasoir entre le besoin de sincérité vis-à-vis de soi-même et la nécessité de jouer un rôle en face des autres. C’est également le juste milieu entre la vie personnelle, intime, et la vie extérieure, en société, même restreinte. Et réussir sa vie, c’est la capacité de chaque individu à réaliser ce cocktail difficile, ni trop, ni trop peu.
Pour cela il faut se lancer des défis qui feront progresser votre personne, pas simplement votre personnage, mais votre moi profond, dans sa confrontation avec lui-même et avec les autres. Ce sont des défis tout à fait personnels, qu’aucun n’a besoin de connaître. Ils ne peuvent être imposés par les conventions ou les ambitions sociales. Ils ne peuvent non plus être une recherche de satisfaction personnelle. Ils doivent comporter l’équilibre entre vos deux êtres, votre moi et votre personne, celle qui se présente aux autres.
Danse, danse, danse… C’est l’exigence de la vie. Si l’on s’arrête de danser parce qu’on est fatigué, ou inversement si l’on tourne sans rythme ni grâce parce qu’on se complaît à ne plus faire que ce que les autres attendent de vous, alors on meurt à soi-même.
C’est bien sur le fil du rasoir que doit se délivrer la danse, jusqu’au jour de l’envol final.
04:52 Publié dans 41. Impressions littéraires | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, société, livre, philosophie | Imprimer
20/07/2011
Parure
Jusqu'au XIIIe siècle, le saphir était appelé lapis-lazuli. Il était déjà connu dans l'Antiquité grecque sous le nom de huakinthos, nom donné à l'iris bleu violacé et par extension à une gemme bleue violacée, le saphir du Ski Lanka.
Le lapis-lazuli était, à la cour égyptienne, utilisé comme fard à paupières. Cette couleur continue à être utilisée de nos jours avec d'autres poudres, celle-ci étant vraisemblablement trop chère pour nos petites bourses, même pour faire plaisir à une femme adorée. Est restée longtemps la croyance que cette pierre guérissait les maux des yeux.
Le vrai saphir sert de talisman au voyageur. Il le protège de la peste, des éclairs et des blessures. De plus, il entretient la prudence et donc procure la paix à son propriétaire.
Fort de toutes ces références, ce dessin, réalisé hier, est toujours le jeu de plans divers et de couleurs assemblées pour procurer harmonie et sérénité à qui le contemple.
Le bleu est bien la couleur de la vacuité.
05:04 Publié dans 22. Créations numériques | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : peintre, dessin, op'art, art cinétique | Imprimer
19/07/2011
Vivre en somnolence perpétuelle
Vivre en somnolence perpétuelle sans jamais vraiment connaître la réalité.
Qu’a-t-on d’ailleurs à connaître ? Des phrases, des mots alignés sans fin qui sont lancés vers le miroir concave de la curiosité. Les regarder vivre sans se sentir concerné. Même, est-ce bien moi qui renvoie les mots comme une balle de tennis ? On reconnaît le joueur adroit à cette promptitude de la réplique.
J’attrape parfois au vol un mot que je renvoie dans le jeu… Information… Négociation… Affaire… Que de mots creux et significatifs du jeu. Si toutes les raquettes pouvaient être percées ! Un jeu de silence sur une pelouse verte. Le monde de fer et de béton est fait pour résonner. Vivre dans le grand tambour où les mots s’éparpillent en ondes, comme les particules dont certaines seulement produisent une réaction.
Evaporation de la parole où la bouche s’ouvre sur la bulle irisée de l’incompréhension, carpe suburbaine, poissons de métabolisme buccal, je vous regarde vous affronter dans vos joutes mortelles. Car la parole est l’arme du crime parfait, de l’assassinat social.
Quand d’un regard je te pénètre, pourquoi détruire par le mot l’instant éternel de la compréhension.
06:48 Publié dans 11. Considérations diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : société, psychologie | Imprimer
18/07/2011
Quoi de plus beau qu’un chant !
Quoi de plus beau qu’un chant !
Et pourtant, comme ils sont différents.
Il y a le chant de la midinette
Qui n’enchante que les cœurs esseulés
Il y a le chant des marins
Qui se chante à pleine voix
Pour couvrir le bruit des tempêtes
Le chant des sirènes est d’un autre registre
Est-ce un chant ou un maléfice ?
On trouve aussi la voix égarée et criarde
Voire le cri éraillé et bestial
De ceux qui ont besoin d’électricité
Pour faire fonctionner leur guitare
Des noirs on entend la plainte longue
Et tristement joyeuse dans les champs de coton
Comme si l’accord des voix
Apportait un baume aux corps fatigués
Ecoute la voix de la chanteuse de flamenco
Qui sort de la danse des pieds
Vibre dans l’ondulation du buste
Se fait rauque dans son cri évocateur
D’une passion jalouse et brûlante
Et s’envole au dessus des mains ondoyantes
Le chant du troubadour à sa dame
Apporte un instant de distraction
A celle qui est au cœur du texte
Comme un lampion dans l’obscurité
Il y a l’accord de seconde
Du chant des femmes bulgares
Qui tournoient dans le délire
Pour enivrer qui l’entend
Il y a l’harmonie secrète
Du chant corse en bord de mer
Qui prolonge son écho dans les montagnes
Et fait frémir l’âme qui dépérie
On trouve le son unique et pur
De la note chinoise tenue longuement
En mille variantes proches
Pour aiguiser le cœur
Et fendre sa dureté légendaire
Dans les ports de l’Atlantique
On entend le tango déhanché
Qui enchante par passion
Le lyrisme n’est pas fait pour les gauchos
Qui dressent les femmes comme les chevaux
Mais qui se laissent prendre au jeu
De la séduction ondulante
Curiosité inégalée mais prenante
Le chant diphonique de la Mongolie
Qui résonne dans les collines perdues
D’une immensité enivrante
S’élevant du corps vers la tête
Au travers de cavités insoupçonnées
Jusqu’à produire des harmoniques
Entourées du bourdon des coléoptères
Plus policées ou plus maîtrisées
Les vocalises délirantes et alphabétiques
Des chanteuses d’opéra
Qui de cette gymnastique buccale
Font un enchantement des oreilles
Et caressent la corde sensible
De spectateurs attentifs et acquis
Que dire des chœurs de Wagner
Qui bouleversent l’âme allemande
Et l’entraîne vers d’extatiques rêveries
Sur fond de puissance et d’audience
Il y a aussi les voix d’enfants
Comme une campagne nouvelle
Au matin des jours de printemps
Qui éclaircissent l’entendement
Et font trembler le dur à cuire
La voix du haute-contre
Ou encore celle du castrat
Qui tierce celle du ténor
Ou délivre une couleur particulière
Aux voix chatoyantes des femmes
Qui ne s’en montrent pas jalouses
Et puis il y a le chant religieux
Destiné à réunir les fidèles
Et à les faire entrer dans la prière
L’appel guttural du muezzin
Qui plane au dessus des têtes
Et incite le croyant occupé
A laisser son ouvrage
Pour se dissoudre en Dieu
La psalmodie de l’officiant
En ténor pour le prêtre romain
En basse pour l’orthodoxe
Entraîne au voyage céleste
De la supplication ou de l’adoration
La digestion du grégorien
D’un texte biblique par la mélodie
Qui repose le cœur dans le chœur
Et lui donne une pincée mystique
Le bourdonnement des reclus
De monastères himalayens
Venu du ventre et résonnant
Vers les vallées perdues
Des origines de l’homme
Les parfaits chœurs anglais
Dont la précision légendaire
Font de l’évocation divine
Une équation mathématique
L’harmonie des chœurs orthodoxes
Emplie d’accords de septième
Qui envahit le méditant
Et l’invite à la vacuité sacrée
Le brouhaha intempestif
Des assemblées de fidèles
Qui chantent sans savoir
Et font pleurer les oreilles
De ceux qui subissent leurs affronts
Enfin le murmure de l’enfant
Qui fredonne sans y penser
Une étrange complainte
Comme une réminiscence d’antan
Acquise dans une vie antérieure
10:21 Publié dans 42. Créations poèmes | Lien permanent | Commentaires (0) | Imprimer
17/07/2011
Ivan Ivanovitch Kossiakoff, nouvelle de Jean Giono
C’est l’histoire d’une amitié de signes et d’entendement dans la même idée de l’homme et de la nature. Elle est au-delà de l’amitié des camarades de combat, bien qu’elle ait lieu en pleine guerre.
En 1917, Giono reçoit l’ordre de se rendre au fort de la Pompelle où il fait connaissance avec Ivan Ivanovitch kossiakoff, l'un des deux soldats russes dont il partage la chambrée dans une casemate du fort, et qui l'accompagne au poste de signalisation, où , à l'aide d'une lanterne, il communique en morse avec les batteries d'artillerie qui ont pris position de l'autre côté du canal.
De temps à autre, Giono sort de sa casemate : Calme plat. Un cycliste, machine en main, passe sans se presser sur la piste du canal. Le petit vent aux dents aiguës danse dans les maigres herbes jaunes. Une phrase de Spinoza me hante : « L'amour c'est l'accroissement de nous-mêmes » [...].
Bien que ne se comprenant pas, Giono et kossiakoff réussissent à se parler par signes. Ils sortent de leurs portefeuilles les photographies de leurs familles. Et progressivement, d’abord une camaraderie, puis une amitié réelle naît entre les deux hommes, si bien que Giono demande à ne pas être relevé comme cela était prévu. Et l'amitié, chaque jour, me lie plus étroitement à Kossiakoff [...] Nous allons sur le canal pêcher la carpe à la grenade ; à la coopé du moulin nous achetons des confitures, des provisions et nous les mangeons en route avec notre main comme cuiller. Je fume du tabac russe, des cigarettes comme le doigt, roulées dans du papier buvard. Kossiakoff m'a procuré une blouse pareille à la sienne ; il m'appelle Ivan et il tire sur ma pipe sans grande conviction [...]
Puis, un jour, un ordre arrive qui enjoint Giono de retourner à sa compagnie. Il dit rapidement adieu à Kossiakoff qui l'accompagne jusqu'au canal, et ils se quittent pour toujours : Kossiakoff me saisit aux épaules, m'embrasse légèrement sur la bouche, puis à grandes enjambées, sans un regard en arrière, il contourne le dépôt des obus et disparaît. Abasourdi, seul, vide, j'essaye d'appeler Kossiakoff et le nom s'embourbe dans la gorge [...] Ivan Ivanovitch Kossiakoff a été fusillé au camp de Châlons en juillet 1917.
Ecoutons aussi ce morceau de jazz assez extraordinaire et émouvant, intitulé du nom du héros de la nouvelle. Est-ce une musique écrite pour le film, est-ce en mémoire de la nouvelle de Giono ? Je ne sais, mais comme elle est belle et comme sont brillants et inventifs ces musiciens.
Michel Portal et Richard Galliano jouent Ivan Ivanovitch Kossiakoff, de Michel Portal :
http://www.youtube.com/watch?v=xF0adG2PPv8
C’est un chant de liberté pure, peut-être une ode à l’amitié, comme la nouvelle de Giono. Il commence par une sorte de plainte, puis très vite devient un hymne à l’entente, grâce à un passage assez classique au regard de l’ensemble. Il utilise ensuite une mélopée très balancée, faite d’envolées de notes montantes et descendantes dans un rythme propre, au gré des émotions.
Puis commence le duo avec l’accordéon, qui change dans un premier temps le style de la musique, la rendant argentine par moments, mais toujours très personnelle, faite de rires musicaux, de cris de la clarinette, de sourires de l’accordéon et de pleurs des deux instruments pour finir dans une envolée romantico-argentine.
07:03 Publié dans 41. Impressions littéraires, 51. Impressions musicales | Lien permanent | Commentaires (0) | Imprimer
16/07/2011
Lever de soleil derrière la montagne
Derrière la montagne, se cache l’avenir, incertain, trouble certes, mais lumineux, attirant comme les bras d’une femme.
Le reflet laiteux dans l’ombre de la montagne n’est qu’un pâle souvenir du passé qui s’estompe devant un avenir inconnu, mais combien captivant.
Cette toile à l’huile n’emploie qu’une seule couleur, ocre brun très foncé ou ocre rouge jaune très clair, les deux plus ou moins blanchis. L’ocre est en Afrique la couleur de l’initiation. C’est une des plus beaux pigments naturels encore utilisés de nos jours. Elle est inaltérable, ce qui explique la conservation des peintures pariétales. Sa chaleur envoûte, sa couleur charme le regard, sa profondeur entraîne à la rêverie.
06:44 Publié dans 23. Créations peintures | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : peinture, rêve, montagne | Imprimer
15/07/2011
Abandonne tout désir
Abandonne tout désir.
Que rien ne vienne empêcher
Ton appréhension de la vie.
Que la nuit soit le jour
Et qu’inversement,
Les jours restent vierges.
Alors, du fond de ton être,
Surgissant de nulle part,
Un feu brûlant te prendra
Et te conduira plus loin,
Là où rien de sensible
Ne peux t’atteindre.
Dans ce halo de lumière,
Emprisonné d’indifférence,
Tu règneras en roi,
Tu officieras en prêtre,
Tu parleras en prophète.
Et parce que tu sauras
Conserver ton innocence
Sans te laisser griser
Par ce vide immense,
Déroutant et fragile,
Tu deviendras ce que tu n’es pas,
Tu te découvriras autre.
Et libéré de toute contingence,
Tu ouvriras ton corps,
Ton cœur, ton intelligence,
Ton esprit enfin, à la beauté
De l’absence de personnage,
A la nudité absolue,
A l’étrange pâleur
De ta renaissance.
04:17 Publié dans 42. Créations poèmes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, poésie, poème | Imprimer
14/07/2011
Jardin d’agronomie tropicale (bois de Vincennes)
Un parfait abandon.
Les simples bruits de la nature qui se superposent à ceux de la ville, en fond sonore indescriptible. Et là, dans une forêt qui reprend ses droits, surgissent des images coloniales : treillages aux dessins géométriques et compliqués, murs ajourés de briques en quinconce, portes de bois ouvrant sur des ruines, ruisseau boueux et, un peu partout, des bambous, les uns petits et verts tendres, les autres en sous-bois de pousses et d’adultes bleus-verts, colonisant certaines étendues d’eau, à profusion.
Beaucoup de pins également comme un jardin du midi ayant échoué en plein Paris, avec un ciel bleu, sans nuage, recouvrant ce coin d’Indochine perdu en terre française. Rien, pas un passant, pas une ombre parmi ces monuments qui sont tous, ou presque, des monuments dédiés aux Indochinois morts pour la France. Tout est plus ou moins à l’abandon, comme ce passé colonial dont on n’ose plus parler.
Et plus on reste dans ce décor passé, plus une incroyable mélancolie s’empare de vous. En effet, il y règne un parfait abandon, volontaire, nous dit la Mairie de Paris. Seules les allées de gravier sont encore entretenues. Autour la forêt prolifère, en désordre, lianes envahissant les pins et certains bâtiments, pousses d’acacia piquantes, lierres s’emparant des sculptures, boue s’entassant dans un ruisseau malodorant. Atmosphère de mélancolie coloniale, comme un film de Marguerite Duras, les personnages en moins.
On s’attend à voir surgir de ce décor passé un vietnamien au chapeau de paille pointu, courbé sur l’eau d’une rizière. Il ouvrirait la porte de bois et ferait signe d’entrer dans sa cabane en ruine. Sans parler, nous échangerions quelques amabilités gestuelles avant de nous quitter en joignant les mains et en s’inclinant devant l’autre.
Ce jardin a une histoire. Créé en 1899 pour accroître les productions agricoles des colonies, il fournissait en graines et boutures les exploitations des colonies et recherchait une acclimatation de ces plantes à notre climat. En 1907, une exposition coloniale reconstitue cinq villages habités : indochinois, malgaches, congolais, soudanais et touareg. Tout ceci est resté longtemps à l’abandon. En 2002, la ville de Paris envisage des travaux de restauration qui ont commencé avec le pavillon Indochine.
Mais le sortilège de ce jardin est bien son abandon voulu, revendiqué, fait de menues détresses, de démission de l’homme civilisé, pour ne laisser apparaître que le fait historique brut : bâtiments en ruine, délaissés, plantations de bambous proliférant et statues perdant des morceaux de pierre ou de ciment pour leur donner l’air pathétique et désuètes.
07:27 Publié dans 14. Promenades | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : paris, art, colonies | Imprimer
13/07/2011
Perception affective du matin
La perception affective, c’est-à-dire cette faculté, à la vue d’un objet, de ressentir une certaine émotion qui, en quelques instants de communion avec celui-ci, suffit à nous donner de la joie pour une journée, n’est pas une valeur constante et varie en fonction d’un certain nombre de facteurs dont l’humeur, l’espace, le temps et, en particulier, ce temps qui se renouvelle périodiquement, celui d’une journée.
Au matin, à cette heure où le jour est suffisamment levé pour avoir la possibilité de percevoir chaque détail d’un objet, mais où le soleil n’est pas encore assez haut pour lui donner un volume de lumière, et que l’esprit, libéré pendant le sommeil de l’affectivité accumulée dans la journée précédente, est prêt à recevoir et à emmagasiner un nouveau courant de sensations, nous percevons avec une émotion plus intense, plus aiguisée par la liberté de l’esprit, la beauté d’un paysage jusqu’alors peu remarqué, le charme d’un bibelot sans importance, le tendre attachement à un objet usuel. A l’état de l’air, plus léger et plus libre, donnant aux formes une netteté accrue, correspond un état d’esprit semblable qui permet une perception intense dans l’émotion purifiée au maximum puisqu’elle est dégagée de tous les facteurs affectifs accumulées pendant la journée.
Quelques minutes plus tard, déjà l’esprit se remet en marche et fait remonter des fonds vers la surface les bulles de soucis, de préoccupations et de souvenirs qui, lui redonnant sa fonction normale, c’est-à-dire un filtre qui permet de passer de la perception sensorielle directe à la perception intellectuelle, y ajoutant justement le courant qu’il a accumulé, lui retire cette faculté précaire, mais facilement éducable, de percevoir l’objet dans l’émotion directe de son contact. Et pendant la journée, au hasard des circonstances, des rencontres, d’autres bulles feront surface, créant une certaine tension entre les deux pôles du cerveau, celui de la sensation pure et celui de la sensation intellectualisée, jusqu’à perdre les références de la première impulsion des sens.
06:36 Publié dans 11. Considérations diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Imprimer
12/07/2011
L’île nue, film de Kaneto Shindo (1960)
Voir la présentation du film :
http://www.dailymotion.com/video/x7fvo9_l-ile-nue-kaneto-...
Voir des extraits du film
L’île nue 1 :
http://www.dailymotion.com/video/x9e067_l-ile-nue-1_music
L’île nue 2 :
http://www.dailymotion.com/video/x9e8py_l-ile-nue-2_music
L’île nue 3 :
http://www.dailymotion.com/video/x9e9pe_l-ile-nue-3_music
L’île nue 4 :
http://www.dailymotion.com/video/x9ej0z_l-ile-nue-4_music
L’île nue 5 :
http://www.dailymotion.com/video/x9ek3h_l-ile-nue-5-fin_m...
Synopsis (From Wikipedia) :
Au Japon, sur une minuscule île de l'archipel de Setonaikai, un couple vit avec ses deux jeunes enfants. La terre est aride et l'île ne possède pas de ressource en eau douce. Pour cultiver cette terre ingrate et survivre, le couple est donc obligé de faire de continuels voyages en barque entre la terre ferme et l'île : ramener l'eau précieuse et en arroser avec attention et parcimonie chacun des plants cultivés. Ces gestes, renouvelés sans cesse, rythment le quotidien. Les jours passent, puis les saisons. Un jour, alors que les parents sont partis chercher l'eau, un des enfants tombe malade, sans raison. Il meurt rapidement sans que personne n'ait pu faire quoi que ce soit pour le sauver. Ses camarades de classe arrivent en bateau pour lui rendre un dernier hommage, puis repartent. Malgré un bref moment de révolte de la mère contre cette vie, le rituel reprend.
Un film majestueux :
Histoire simple, banale, pourrait-on dire. Mais quelle beauté dévoile ce film qui, pourtant, répète inlassablement les mêmes images, les mêmes gestes et la même mélodie, sans qu'une seule parole soit prononcée. C’est un véritable poème qui donne une nouvelle version du mythe de Sisyphe, dénudée comme l’île, presque froide dans son réalisme, mais si prenante dans la contemplation d’une nature aride et de la famille qui vit là, rudement, d’un travail incessant sur une terre ingrate. Il met en lumière, sans jamais le dire, l’impuissance de l’homme face à la nature, la souffrance humaine, le temps et finalement la mort.
"L'Île nue", sortie en 1960, est l'une des œuvres les plus remarquables du réalisateur japonais Kaneto Shindo. La musique lancinante de Hikaru Hayashi, de part sa modalité occidentale, peut choquer au début, mais très vite elle prend le spectateur qui l’associe ensuite aux successions d’images sobres, mais combien belles. Musique et images permettent de donner au film une ambiance que des paroles et des explications n’auraient pu expliciter.
Un film à voir, à revoir, comme on relie un roman de Marcel Proust, pour le savourer, même si l’on en connaît toutes les péripéties.
05:17 Publié dans 13. Cinéma et théâtre | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, film, nature, poésie | Imprimer
11/07/2011
Prière d’abandon du Père Charles de Foucault
Qui ne connaît cette prière de Charles de Foucault, prière d’abandon et de confiance envers le Père, dont voici le manuscrit :
La mise en musique doit être méditative et permettre d’en mesurerchaque phrase. Un refrain simple, l’abandon au Père, ramène en permanence à l’essentiel.
Ce refrain peut être chanté par toute la chorale, la psalmodie par un petit choeur de quatre ou huit voix.
06:52 Publié dans 53. Créations musicales | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : mausique, chant, liturgie | Imprimer
10/07/2011
La trajectoire des piétons
Imprévisible. En conduisant, vous pouvez prévoir la trajectoire d’une voiture et anticiper ce que le conducteur compte faire, même lorsqu’il semble ne pas savoir où aller. Mais il est impossible de prévoir la trajectoire d’un piéton sur un trottoir lorsque vous courez dans Paris.
Il y a, en premier lieu, les piétons isolés qui viennent vers vous sur le même trottoir. Ceux qui regardent ailleurs et, parce qu’ils ont la tête tournée suivent une courbe dans le sens du regard. Ils sont anticipables, s’ils ne changent pas l’objet de leur regard, mais c’est rarement le cas. Ceux qui regardent au loin, les yeux dans le vide, c’est-à-dire qui ne regardent rien et dorment au monde immédiat pour se réfugier dans une rêverie sans fin où d’angoissantes questions les obligent à oublier leur environnement. Enfin, on rencontre des gens sérieux qui sont capables d’anticiper comme vous. Malheureusement, le plus souvent, ils anticipent dans le même sens que votre propre anticipation, ce qui conduit à une valse d’hésitation qui se termine par un sourire ou parfois un rire commun.
On trouve ensuite les duos de piétons : femme avec un enfant, femme avec une autre femme, femme avec un homme ou encore homme avec un homme. Chacun d’eux a des comportements différents, même à l’intérieur de chaque catégorie.
La femme avec un enfant, parce qu’elle-même est dans ses pensées, occupe tout le trottoir et ne vous voit même pas approcher et être contraint de s’engouffrer entre deux voitures garées pour laisser passer leur traineau de deux personnes que rien ne peut entamer. Il arrive parfois qu’un sourire accompagne le geste de tirer l’enfant pour vous laisser un passage, comme une excuse de laisser si peu de place sur un étroit trottoir.
Deux femmes ensemble sont des duettistes indissociables qui restent de front quoi qu’il arrive. Impossible de les faire passer de la ligne à la colonne, ce serait rompre leur plaisir incommensurable de discuter de tout ce qui n’est rien.
Lorsqu’il s’agit d’un homme et d’une femme, ce sont pour beaucoup des amoureux. Or, nous le savons, l’amour est sans pitié, tête en l’air et corps contre corps. Alors comment les dissocier lorsqu’ils sont soudés l’un à l’autre par la main, les bras ou la bouche ? La rue leur appartient !
Vous vous effacez, contemplant leur bonheur qui vous procure un air de vacances avant de vous trouver en face de deux hommes parlant de sport avec force gestes et expressions corporelles. Vous vous dites, ils vont me laisser un passage et vous vous mettez manifestement devant eux pour pouvoir y accéder. Peine perdu. Ils vous ignorent, ne savent même pas que vous êtes là et l’un d’eux vous bouscule et se retourne l’air offusqué comme si volontairement vous lui aviez fait l’affront d’engager une partie avec lui. Ne voulant pas perdre de temps, vous continuez en haussant intérieurement les épaules.
Il est encore plus difficile de dépasser, plutôt que de le croiser, un piéton sur un trottoir dont la largeur ne surpasse pas deux personnes et demi. Il marche généralement au milieu de la chaussée et selon son regard, il oscille de droite à gauche au gré de ces intérêts ou de ses pensées. Vous vous décidez à le doubler par la droite, mais à ce moment il arrive devant une agence immobilière ou elle passe devant une boutique de vêtements et, sans que ce soit volontaire, s’en rapproche pour mieux la contempler. Au dernier moment vous décidez de passer de l’autre côté, mais il se tourne vers la gauche parce qu’il a vu une somptueuse voiture garée là ou parce qu’elle a remarqué sur sa plage arrière un chapeau qui lui paraît admirable.
Deux personnes, qu’ils soient du même sexe ou différent, constituent un obstacle infranchissable. Soit ils sont tous les deux dans leurs pensées dont rien ne peut les en faire sortir, soit ils parlent entre eux, et, quel que soit ce qu’ils disent, ne vous entendent ni arriver sur eux, bien que vous accentuez implicitement le bruit de votre course, ni même demander le passage après que vous ayez été contraint de vous arrêter. « Pardon Madame, peut-on passer ? » Elle vous regarde d’un air furieux puisque vous la dérangez et, de plus, surprenez sa conversation intime avec son ami (probablement plus) ou son amie (peut-être moins).
Alors que dire des groupes, d’enfants, de femmes, d’hommes ou même mixtes, encore plus difficiles à manœuvrer.
Il peut vous arriver si vous courrez dans les lieux touristiques, que vous tombiez sur des touristes ou des personnes âgées qui se dirigent vers l’entrée d’un car tout en pérorant sans cesse entre eux. Renoncez tout de suite et traversez la voie publique ou vous serez immobilisé, puis avalé par cette guimauve humaine dont vous aurez beaucoup de mal à vous décoller. Ils ne vous feront aucun mal, ils ne vous verront pas, même coincé entre eux, la tête à hauteur des seins ou des parapluies selon l’origine géographique du car.
Les groupes d’enfants sont généralement accompagnés par un professeur et quelques parents ayant accepté de fournir une main d’œuvre à l’enseignant. Là, d’une voix péremptoire, il vous sera intimé de rester sur place sans bouger en attendant que la longue chenille d’enfants piaillant vous soit passée sur les pieds. Malheur à vous si vous tentez de passer, vous agressez les enfants, vous êtes un mauvais citoyen et même les autres passants vous regarderons comme criminel. Alors vous trottez sur place en attendant que le dernier des enfants qui, bien sûr se traine, convient qu’il est temps de rejoindre les autres.
Il y a aussi les collégiens ou lycéens, et pourtant ce n’est pas votre faute si vous habitez à côté d’un établissement d’enseignement, qui occupent le trottoir, sont assis sur les voitures en stationnement et débordent largement sur une chaussée où les automobilistes tentent de les éviter. Là il vaut mieux avoir changé de trottoir largement plus avant, afin d’éviter toutes sortes d’ennuis qui vont de l’obstruction pur et simple aux quolibets qui peuvent parfois, mais rarement, devenir humoristiques.
Rien, bien sûr, ne contraint le piéton en matière de déplacement sur les trottoirs. Il y avait autrefois des règles de politesse telles que « les hommes se mettent du côté chaussée et les femmes du côté immeuble », « laisser passer un vieil homme lorsque le passage ne permet qu’une seule personne à la fois ». Mais tout ceci est prohibé, puisque, lorsqu’on marche sur un trottoir, on n’a pas le temps de faire attention aux autres. De nouvelles règles ? Jamais ! Ce serait encore plus contraignant et pénible que la situation actuelle. Vous voyez-vous face à un agent de la force publique vous contrevenant parce que vous avez dépassé une dame par la droite plutôt que par la gauche ?
Alors me direz-vous, quelle idée de courir dans Paris ? Oui, drôle d’idée, comme de coudre sur une plage, de marcher dans la boue ou de chanter au bureau. Et pourtant, quelle joie au petit matin, lorsque le soleil pointe ses premiers rayons, de laisser dérouler sa machine corporelle, d’enclencher ses rouages et de partir au gré de la course, le nez au vent, heureux de cet air frais qui vous donne des jambes et égaille votre esprit. Alors, malgré ces obstacles humains perpétuels, vous souriez à la vie et aux gens pour rentrer chez vous, apaisé et prêt à poursuivre une journée d’enchantement.
06:39 Publié dans 11. Considérations diverses | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : paris, société, sport | Imprimer
09/07/2011
Merlin le Roi, visite chez l'enchanteur
A côté de Beaubourg pour les artistes,
Merlin le Roi et non l’Enchanteur
Et pourtant l’enchantement est là
Par la succession d’outils et d’objets
Qui tous servent à construire
Ou encore réparer ou enjoliver
Quand on n’est pas artiste,
On peut tenter de se faire artisan !
J’ai parcouru les couloirs souterrains
De cette caverne d’Ali Baba
Entouré de personnages extasiés
Portant de lourds paniers
Emplis de creux, de bosses
Débordant d’ustensiles très utiles
Pour apaiser la plainte
Et redonner espoir
Au nid si douillet qu’ils chérissent
Des caisses d’ampoules dites bio
Qui n’éclairent que leur ombre
Des boîtes de vis, clous, chevilles
De toutes couleurs et de toutes tailles
Qui piquent la main égarée
Et même, des outils, marteaux et scies
Electriques pour la douceur féminine
Des appareils à poncer, à amincir
A donner un air aimant
A l’objet le plus anguleux
Des colles, pour réunir deux
Et ne plus faire qu’un,
Des joints pour boucher
Les écoulements nuisibles
Et non prévus fonctionnellement
Stand de peinture déluré
Où la couleur se conjugue
En changement subtil
Du blanc crème au vert pastel
En passant par le rouge coquelicot
Les yeux exorbités je contemple
Les étagères enduites de pots
Emplis de signes illisibles
Et de dessins qui les remplacent
Jusqu’à quel point les mélanger ?
Des vasques blanches ou noires
Arrondies ou anguleuses
Au dessus desquelles coule l’eau
Transparente, d’un robinet
Sans poignée ni poussoir
Qui laisse la soif s’emparer
Du compulsif égaré
Et pourtant, ceux-ci ne manquent pas
De toutes formes, brillants
Et majestueux en col de cygne
Et parmi tout ceci l’homme
Ou la femme, affairé(e) et stoïque
S’interrogeant sur l’achat
Se pliant au paiement
Encombré(e) et alourdi(e)
Mais combien illuminé(e)
A l’idée d’avoir à
Scier, gratter, poncer, peindre,
Pour faire de la matière
Un objet bien vivant
06:54 Publié dans 12. Trouvailles diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : société, pésie | Imprimer
08/07/2011
La piste de skate
Sur les deux estrades de part et d’autre de la rampe ou half-pipe, double tremplin courbe, ils s’élancent sur leur machine roulante, leur planche volante appelée skateboard, tels des rats dans un demi-tonneau, sans discontinuer. Nous sommes square Emile Chaut, en face de la Gaîté lyrique, à Paris.
La planche levée au bord de la piste descendante, les skateurs se lancent à tour de rôle, dans le désordre, courbés sur leurs jambes, se redressant au gré des montées et descentes, se laissant glisser d’un bout à l’autre sur le travers de la piste, l’art étant d’opérer un renversement de sa planche au plus haut avant de se laisser redescendre sous les applaudissements de la foule d’amateurs. Ils sont jeunes, il n’y a que des garçons, blue jeans, casquettes, à l’envers, bien sûr, et puis pour certains, le blouson de laine à capuche. Tous très sûrs d’eux, travaillant comme des professionnels, sans un mot, sautant sur leur planche, la perdant sur une figure, mais se rattrapant toujours sur leurs pieds sans jamais tomber réellement, le tout avec aisance et légèreté.
Chacun fait son run avec un certain nombre de tricks (figures). Le corps détendu, ils s'envolent, épousant des jambes le mouvement arrondi de la piste. Mille fois, ils reprennent l’exercice jusqu’au moment où ils réussissent, sans lâcher leur planche, la figure enviée, en particulier le three-sixty (rotation de 360° du skateboard).
Mais chacun a son style. Certains paraissent morts, sans mouvement, mais réussissent des best tricks. D’autres, décontractés, accompagnent du haut du corps et des jambes à demi-fléchies, la remontée. La planche semble indissociable des pieds, et pourtant, certains arrivent à leur faire faire un tour à vide avant de reprendre le contact avec elle. Subtile figure : rouler sur le coping (le bord de la rampe) avant de redescendre le vert, départ vertigineux de la rampe.
Le skateboard est-il un sport ou un art ? Les deux très certainement. La performance technique est essentielle, mais elle s’accompagne d’un idéal esthétique dans lequel chacun met son style propre. C’est au fond assez semblable au patinage artistique avec moins d’élaboration dans les règles.
Il faut l’avouer, ce mariage du corps et d’une planche à roulettes atteint parfois un véritable enchantement de part la souplesse et l’élégance du skateur, l’apesanteur que semble atteindre le skate et l’envolée au dessus de la rampe qui, toujours, se termine par un retour précis sur la piste afin de repartir pour un nouveau trick.
Le skateur : un danseur qui s’ignore, recherchant la beauté à travers le mouvement. Et il la trouve !
07:09 Publié dans 11. Considérations diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : beauté, art, paris | Imprimer
07/07/2011
Esprit et matière
Y a-t-il réellement d’un côté la matière et de l’autre l’esprit ? C’est ce que pensait Descartes. L’opposition reste d’actualité, mais la recherche récente introduit le doute.
Déjà Spinoza avançait que l’esprit et la manière ne sont que deux attributs d’une seule et même réalité considérée sous deux angles différents (Ethique III, 2). Mais qu’est-ce que la réalité ?
On a séparé irrémédiablement la conception religieuse de l’homme et une conception scientifique. Cependant, les scientifiques, qu’ils étudient l’infiniment petit ou l’infiniment grand, constatent que la matière est un amas d’énergie en transformation constante. Le Père Teilhard de Chardin est un des rares penseurs religieux à adopter de son côté une vision conciliant l’esprit et la matière. La noosphère, pellicule de pensée faite de relations qui se forment, se combinent, et se superposent, détermine ainsi la trame d’un ensemble en perpétuelle transformation, l’homme ajoutant de l’esprit à la matière. L’univers apparaît alors comme une véritable toile cosmique où tous les événements seraient interconnectés les uns aux autres.
Cette encre de Chine tente de mettre en évidence cette fausse opposition : d’un côté la matière, froide, lunaire pourrait-on dire, mais façonnée par l’homme qui crée une « matière » artificielle dans la ville et de l’autre l’esprit, transparent, diaphane, s’élevant au dessus de la matière, mais en résonnance avec elle. Certes, je ne le compris qu’après avoir fait le dessin.
07:10 Publié dans 24. Créations dessins | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : peitnure, dessin, philosophie, religion | Imprimer
06/07/2011
Ils sont ronds, dorés comme un rôti
Ils sont ronds, dorés comme un rôti,
Ils enjolivent les champs de leur masse répartie.
Ce sont les rouleaux d’été,
De paille ou de foin enrobés.
Comme des guirlandes sur un arbre de Noël
Ils font une parure de fête au regard des vivants.
Appuyé sur l’un d’eux, je respire l’odeur de moelle,
De terre, mêlée d’herbes et de grains. Purifiant !
Seul le mugissement d’un bovidé esseulé
Trouble la torpeur de l’instant présent,
Accompagné des soupirs d’une brise affolée
Qui ondule sur le blé en chantant.
Enfin, cueillir l’origan, d’un sécateur pataud,
Pour les laisser sécher sur un plateau
Jusqu’à la fin de cet été.
Et les utiliser en les écrasant de la main,
Comme on le fait pour le cumin,
Afin de doter chaque met d’odeur de sainteté.
07:13 Publié dans 42. Créations poèmes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, poésie, poème | Imprimer
05/07/2011
Le chant byzantin
Voici un style de chant profondément différent du chant grégorien. Et pourtant, ses racines sont bien chrétiennes. Le chant byzantin est à l'origine du chant liturgique traditionnel de l'église orthodoxe, développé d'abord en grec et en syriaque. Progressivement, l'église orthodoxe s'est dotée selon les régions de chants propres dérivés du chant byzantin.
Mais commençons par le chant byzantin qui est explicité dans le document ci-joint.
Ecoutons quelques chants pour se faire une idée :
http://www.dailymotion.com/video/xej89w_irhamna-ya-rab-ir...
http://www.dailymotion.com/video/xc3ubl_o-baptises-vous-a...
03:32 Publié dans 52. Théorie de la musique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : musique, chant religieux, orthodoxie | Imprimer
04/07/2011
Emboitement
Lueur dans la nuit, qui surgit des profondeurs du rêve et vous contraint à sortir de l'engourdissement du sommeil. Vous ne savez plus s'il s'agit d'un rêve ou de l'éveil. Elle est là et vous dérange. Vous préférez les soubresauts du demi-sommeil ou la tendre quiétude d'un assoupissement passager. Et pourtant, c'est dans cette demi-veille que la créativité est la plus remarquable.
04:03 Publié dans 22. Créations numériques | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : peinture, art cinétique, op'art | Imprimer
03/07/2011
Un instant d’éternité
Il existe de ces instants magiques où le temps suspend sa course immuable. C’est encore plus perceptible lorsque se mêle au présent un souvenir de jeunesse et qu’il surgit, très prégnant, au travers de ce que chaque sens nous dit.
La chaleur d’abord, de celle des étés de Pagnol, quand l’ombre d’une branche vous semble une caresse furtive et apaisante, alors que la pure lumière vous est un poids qui épuise le corps.
Le silence lourd de la campagne ajoute à cette torpeur. Seul le chant de quelques oiseaux, parfois, le trouble pour vous rappeler que tout cela est vivant, mais que la vie est suspendue. Sous chaque noyer, l’ombre bienfaisante sert de repère à la méditation, troué de taches de lumière qui suivent le frémissement des feuilles. L’herbe de la prairie se balance au gré de la brise indolente, survolée de moucherons qui dansent l’éternelle fête de la brume de chaleur qui les enrobe.
Ce chemin, vous l’avez parcouru des milliers de fois, mais ce retour aujourd’hui vous conduit à constater l’apaisante vérité de la succession du temps et des espèces. Dans la rangée des noyers qui descend vers la rivière, seul manque l’un d’eux, déjà remplacé par un petit, très petit noyer qui a poussé seul contre la volonté de tous. Le chemin de pierre laisse une bande d’herbes entre les roues des voitures. Quelle étrange sensation que celle des pas sur cette bande de terre qui vous aide à descendre vers le passé, lorsqu’enfant, vous dévaliez à un rythme effréné, en bicyclette, le chemin pour vous laisser ensuite freiner dans les hautes herbes aux abords du ruisseau. Parfois, entraîné par l’élan, vous vous arrêtiez à quelques centimètres de la berge, en vous jetant par terre. Plus tard, votre propre enfant s’est cassé une dent en se laissant tomber sur le gravier plutôt que de percuter la porte cochère.
Mais aujourd’hui le temps s’est arrêté. La chaleur, probablement, qui engourdit vos perceptions et endort votre attention. Alors vous longez la haie à gauche du chemin, là où l’ombre maintient encore une certaine fraicheur. Vous regardez chaque espèce d’arbres, la rugosité de leurs troncs, le dessin de leur développement jusqu’aux derniers rameaux, leurs feuillages, pleins, aux larges feuilles, ou encore clairsemés de petits opuscules, et chacun d’eux évoque en vous des moments différents, des lieux et des temps éloignés, mais qui redeviennent si présents qu’ils semblent revivre sous votre regard attentif.
Et vous descendez toujours, écrasé de soleil, vous laissant bercé par ces instants remémorés jusqu’à l’approche de la maison que vous connaissez bien et qui vous fait sortir de votre rêve éveillé.
Au loin, très loin dans le ciel, un avion vole sans bruit et seule sa trajectoire vous rappelle que la vie continue, inexorable, dans cette nature immobile, anéantie de chaleur sourde troublée par l’aboiement d’un chien aux confins du village qui vous signifie que le frémissement des feuilles fait aussi partie du tableau vivant.
Je me souviens être venu, adolescent, quelques jours après un concours, pour me reposer, seul dans l’immensité de la maison et de la campagne et avoir passé huit jours au rythme de la terre et de l’inspiration. Je me couchais tard, me relevais deux fois, trois fois, dans la nuit pour reprendre un tableau, transcrire une idée, écouter une symphonie. Et les jours passaient dans l’indolence et la création, avec pour seul plaisir la contemplation d’une nature riche, parfaite parce qu’imparfaite, dans laquelle je pouvais me rouler jusqu’à pleurer de joie.
04:48 Publié dans 11. Considérations diverses | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, poésie | Imprimer
02/07/2011
Ensemble, nous irons au paradis
Ensemble, nous irons au paradis
Des amants d’antan
Je te regarderai, tu me verras,
Nous nous contemplerons
Et verrons le chemin écoulé
Comme une mélodie achevée
Toi, rien que toi, blanche
De vérité et d’innocence
Que j’apprends toujours à connaître
Qui m’apprend la vie et l’amour
Et qui court au plus large
Des rues encombrées de passants
Pour montrer la beauté de chacun
Je te regarde en odeur, en couleurs,
Tu me prends la main,
Tu me tends ta bouche,
Je ne suis plus, je deviens toi,
Et tu es la reine de ma nuit
Et la femme des jours sans fin
Où l’amour coule comme une source
Belle, tu me fais un clin d’œil
Serein, coquin, malin,
Et tu m’encourages dans ma folie
De ne penser qu’à toi, aimée
Perdue dans ce monde
Que nous sommes appelés
A quitter un jour, ou une nuit,
Après nous être aimés encore
Dans le secret de nos corps
Et la tendresse de nos rêves
10:24 Publié dans 42. Créations poèmes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : littérature, poésie, poème | Imprimer