Quoi de plus beau qu’un chant ! (18/07/2011)

 

Quoi de plus beau qu’un chant !
Et pourtant, comme ils sont différents.

Il y a le chant de la midinette
Qui n’enchante que les cœurs esseulés

Il y a le chant des marins
Qui se chante à pleine voix
Pour couvrir le bruit des tempêtes
Le chant des sirènes est d’un autre registre
Est-ce un chant ou un maléfice ?

On trouve aussi la voix égarée et criarde
Voire le cri éraillé et bestial
De ceux qui ont besoin d’électricité
Pour faire fonctionner leur guitare

Des noirs on entend la plainte longue
Et tristement joyeuse dans les champs de coton
Comme si l’accord des voix
Apportait un baume aux corps fatigués

Ecoute la voix de la chanteuse de flamenco
Qui sort de la danse des pieds
Vibre dans l’ondulation du buste
Se fait rauque dans son cri évocateur
D’une passion jalouse et brûlante
Et s’envole au dessus des mains ondoyantes

Le chant du troubadour à sa dame
Apporte un instant de distraction
A celle qui est au cœur du texte
Comme un lampion dans l’obscurité

Il y a l’accord de seconde
Du chant des femmes bulgares
Qui tournoient dans le délire
Pour enivrer qui l’entend

Il y a l’harmonie secrète
Du chant corse en bord de mer
Qui prolonge son écho dans les montagnes
Et fait frémir l’âme qui dépérie

On trouve le son unique et pur
De la note chinoise tenue longuement
En mille variantes proches
Pour aiguiser le cœur
Et fendre sa dureté légendaire

Dans les ports de l’Atlantique
On entend le tango déhanché
Qui enchante par passion
Le lyrisme n’est pas fait pour les gauchos
Qui dressent les femmes comme les chevaux
Mais qui se laissent prendre au jeu
De la séduction ondulante

Curiosité inégalée mais prenante
Le chant diphonique de la Mongolie
Qui résonne dans les collines perdues
D’une immensité enivrante
S’élevant du corps vers la tête
Au travers de cavités insoupçonnées
Jusqu’à produire des harmoniques
Entourées du bourdon des coléoptères

Plus policées ou plus maîtrisées
Les vocalises délirantes et alphabétiques
Des chanteuses d’opéra
Qui de cette gymnastique buccale
Font un enchantement des oreilles
Et caressent la corde sensible
De spectateurs attentifs et acquis

Que dire des chœurs de Wagner
Qui bouleversent l’âme allemande
Et l’entraîne vers d’extatiques rêveries
Sur fond de puissance et d’audience

Il y a aussi les voix d’enfants
Comme une campagne nouvelle
Au matin des jours de printemps
Qui éclaircissent l’entendement
Et font trembler le dur à cuire

La voix du haute-contre
Ou encore celle du castrat
Qui tierce celle du ténor
Ou délivre une couleur particulière
Aux voix chatoyantes des femmes
Qui ne s’en montrent pas jalouses

Et puis il y a le chant religieux
Destiné à réunir les fidèles
Et à les faire entrer dans la prière

L’appel guttural du muezzin
Qui plane au dessus des têtes
Et incite le croyant occupé
A laisser son ouvrage
Pour se dissoudre en Dieu

La psalmodie de l’officiant
En ténor pour le prêtre romain
En basse pour l’orthodoxe
Entraîne au voyage céleste
De la supplication ou de l’adoration

La digestion du grégorien
D’un texte biblique par la mélodie
Qui repose le cœur dans le chœur
Et lui donne une pincée mystique

Le bourdonnement des reclus
De monastères himalayens
Venu du ventre et résonnant
Vers les vallées perdues
Des origines de l’homme

Les parfaits chœurs anglais
Dont la précision légendaire
Font de l’évocation divine
Une équation mathématique

L’harmonie des chœurs orthodoxes
Emplie d’accords de septième
Qui envahit le méditant
Et l’invite à la vacuité sacrée

Le brouhaha intempestif
Des assemblées de fidèles
Qui chantent sans savoir
Et font pleurer les oreilles
De ceux qui subissent leurs affronts

Enfin le murmure de l’enfant
Qui fredonne sans y penser
Une étrange complainte
Comme une réminiscence d’antan
Acquise dans une vie antérieure

 

 

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