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12/08/2020

L'étrange bataille de San Pedro de Atacama (35)

– Mon Capitaine, ce que vous me demandez là est fort risqué. Vous savez ce que font mes compatriotes des déserteurs. Je risque une fin déshonorante, et cela, je n’y tiens pas pour ma famille.

– Mon cher, je suis désolé, mais ce sont les contraintes de la vie militaire. A vous de ne pas vous faire prendre. Inventez-vous un personnage et jouez-le du mieux possible. Je ne peux rien vous dire d’autre. En échange, si vous réussissez, je vous ferai dégager de toute obligation militaire. Vous serez rendu à la vie civile avec un passeport bolivien. Libre à vous, par la suite, de rejoindre le Chili et votre famille pour vous expliquer. Cela vous convient-il ?

– Tout à fait, mon Capitaine. Je vais faire le maximum.

– Il me faut ces renseignements dans trois jours au plus tard, car il faudra ensuite que je prépare un plan qui dépend des renseignements que vous obtiendrez.

– Vous aurez les renseignements que j’aurai pu acquérir dans trois jours.

Le Capitaine, sachant qu’il envoyait Juan Baltazar à une mort possible, lui serra la main avec chaleur, en le remerciant. Il savait que l’avenir de la garnison et de ses filles était entre ses mains.

– Je vous fais entièrement confiance. J’espère ne pas me tromper.

Baltazar partit après un dernier regard en direction du Capitaine. La première manche était en route, mais qu’en feraient-ils, lui, le prisonnier, et lui, le Capitaine ?

Le soir même, après un long détour, Juan Baltazar arriva en vue du campement chilien. Il était sorti seul, habillé en paysan, comme s’il partait aux champs. Dans son sac, il avait caché une tenue de colporteur et l’argent nécessaire pour acheter un âne, une carriole et des bibelots à vendre. Ce qu’il fit sans même avoir besoin de se rendre au village voisin, assez éloigné. Il rencontra en effet un marchand de produits féminins, crème, lessive et autres matières liquides, pâteuses ou solides. Certes, ce n’était sans doute pas ce que souhaitaient les soldats chiliens, mais il pensait que ceux-ci seraient contents de disposer d’objets typiquement féminins pour négocier avec les filles qui leur tournaient autour. Ayant fait un long détour dans la journée, il se présenta par le côté opposé au village et fit étalage de ses frivolités.

11/08/2020

exhibition

Un ciel clair comme un voile de mariée
Découvert un matin comme les autres
Rien ne traversait l’extatique corridor
Qui conduit aux prémices du bonheur
Elle va et vient comme une princesse
Ses atours aux formes impalpables
Crème glacée aux chatoiements brefs
Qui monte vers le cœur et le fend
D’un sourire espiègle et désertique
Jusqu’au plus profond des entrailles
Là où rien ne bouge, mais tout émeut
C’est ainsi qu’il a découvert l’amour
Une plaque de métal qui résonne
Des astuces de l’autre pour exister
Et se montrer en toute puissance
Dans son plus simple appareil
La vie jaillit d’elle-même du vide
Comme une folie enchanteresse
Qui court à tout instant, en tout lieu
Et décore le cosmos de bulles roses
De rapprochements et d’éloignements
Que la soupe quantique ne peut prévoir
Cours aux bords de l’univers, cours
Et salue la foule qui t’acclame

©  Loup Francart

10/08/2020

Ile de Ré: puissance du souvenir

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Souvenir retrouvé de l'ile de Ré

un instant d'éternité au bord de l'eau

dans la chaleur de l'émotion

et la langueur d'un après-midi

Passe le vent dans le désert de la mémoire

Seule reste cette trace du passé

uns des rares aquarelles faites à l'époque

©  Loup Francart

08/08/2020

Etapes

La méditation est double. Il y a une première méditation, méditation inférieure, dirigée par le mental, destiné à augmenter la concentration sur un point, puis une méditation supérieure où le mental est transcendé, moment où l’Esprit divin s’empare du moi et nous guide. Il y a alors une rupture perçue physiquement et consciemment dans un mouvement de double spirale, ascendante de l’âme vers le spirituel, descendante du corps vers le matériel (corps : mental, sentiment et physique)].

Là, il n’y a plus de pensées conscientes, mais des intuitions plus ou moins fortes selon la grâce de l’Esprit en nous. L’âme est orientée alors soit vers l’intelligence divine, soit vers l’amour divin.

Au-delà de la méditation est la contemplation du monde divin, grâce immense qui n’est pas toujours accordée malgré les efforts. Celle contemplation est au-delà de toute pensée, dans une tension entière de l’âme vers Dieu, amour sans imagination, mais très réelle, même plus réelle que l’amour avec imagination.

07/08/2020

L'étrange bataille de San Pedro de Atacama (34)

Pour lui, la première des choses était de se renseigner sur l’homme qui prétendait vouloir se marier avec une de ses filles. Il se souvint alors du soldat qui l’avait entretenu lors de la première rencontre avec l’homme. Il avait l’air intelligent et il connaissait bien son sujet. Arrivé au poste de commandement de la compagnie, il fit appeler l’adjudant major avant de faire venir le soldat.

– Major, puis-je compter sur l’officier chilien qui sert maintenant dans vos rangs et qui a décrit le premier l’homme qui a bouleversé le village hier ? Est-il fiable ?

– Je le pense, mon Capitaine, il a tout à perdre de repasser dans le camp chilien qui exécute systématiquement les déserteurs. De plus, il a l’air de vous apprécier.

– Pensez-vous que je puisse lui confier une mission de renseignement sur l’homme ?

– Oui, mais saura-t-il la mener ? S’il se fait prendre, c’est la mort pour lui.

– Nous n’avons pas le choix. Il faut savoir ce que les Chiliens manigancent. Et il connaît bien les habitudes de ses pairs. Trouvez-lui une identité chilienne et un déguisement. Faites-le venir, que je lui explique ce que j’attends de lui.

 Quels minutes plus tard, le soldat, qui se prénommait Juan Baltazar, entra dans la pièce, salua et attendit. Le Capitaine lui demanda s’il était prêt à faire une mission de renseignement au profit de la garnison.

– Si c’est cela ou la mort, oui, bien sûr. Je vous ai dit que je tiens à la vie. Mais si vous me le demandez comme un geste personnel, je vous répondrais que non. Je tiens trop à l’existence pour la risquer sans raison très précise.

– Merci de votre franchise. Comme cette mission peut sauver la garnison, c’est effectivement cela ou la mort. Vous connaissez la règle.

– Oui, je suis à votre disposition.

– Je veux que vous m’appreniez le maximum de choses sur cet homme qui nous nargue sans cesse. Sa prestation d’hier fut un comble qui m’atteint personnellement. Ce marché est infamant et je veux trouver le moyen de le déjouer. J’ai pour cela besoin de renseignements que vous seul pouvez m’obtenir. Qui est-il ? Que veut-il réellement ? Quelle est sa part de liberté dans le jeu qui nous est imposé ? A-t-il inventé seul ce stratagème ou lui fut-il prescrit ? Ce qui m’intéresse particulièrement, c’est sa part d’initiative dans le manège qu’il mène. Lui dicte-t-on son attitude ou agit-il sans contrainte hormis celle de jouer le rôle d’un ardent patriote ?

06/08/2020

Flamboiement

Le flamboiement d’un être le distingue du mortel
Auréolé sans fin sa vue le déprécie
Effondré sur lui-même, il conserve son autel
De pâles admirateurs de nouvelles facéties

Ainsi s’ouvre l’horreur d’une manipulation
Environné de flammes, attirant les regards
L’homme n’ose avancer sans réconciliation
Errant sans relâche, avançant l’œil hagard

Le poil roux et vêtu d’un voile suffisant
Il étale son savoir et va euphorisant
Le poitrail découvert à l’assaut du monde

Plus rien ne paraîtra, pourvu de cheveux roux
Aussi trouve-t-on en vente le produit peu ou prou
Apportant la couleur aux douces têtes blondes

©  Loup Francart

05/08/2020

Sentence

 

Que d'hommes perdent leur vie

à vouloir imiter d'autres hommes

 

04/08/2020

Tournant

Me voici de nouveau seul face à la page blanche
Elle oscille sans vergogne dans le brouillard
Ne laissant que l’odeur de l’insuffisance
La souffrance du manque et la pauvreté de l’absence

Rien ne m’oblige pourtant à croire au but
Je marche les yeux fermés, sans gestes brusques
Courant de-ci de-là, les yeux ouverts
Sur la nuit profonde et le rêve intérieur

Le temps s’écoule cependant, vert comme le bois
Pris d’envies, de maladresses et d’encouragements
J’erre dans le vide de ma mémoire perdue

Enfin, j’approche de la lumière finale
Celle qui court seule sur l’asphalte
Et qui sera bientôt coupée net

Panne et résurrection
Ou flash et extinction

Tu ne peux que choisir

©  Loup Francart

02/08/2020

L'étrange bataille de San Pedro de Atacama (33)

A la surprise d’Alexandro et d’Emma, les trois, en levant la main en même temps, annoncèrent aussitôt qu’elles étaient prêtes à se marier avec lui.

– Mais, qu’est-ce que cela veut dire ?

– Mais Maman, il est beau ! dit Ernestina d’une voix extasiée.

– Oui, il nous regarde avec un tel air de certitude et de douceur ! dit la dernière Libertad, pourtant encore très jeune pour penser à de telle chose.

– Et il est drôle. Il n’est pas comme tous les jeunes hommes qui se cherchent. Il sait ce qu'il veut ! dit enfin l’ainée qui donnait ainsi la clé de leur engouement.

Les deux époux se regardèrent avec un sourire :

– Au moins vous nous simplifiez la tâche. Et le père serra contre lui la plus jeune, ému à la fois par la spontanéité de ses filles, leurs impulsions et leur méconnaissance de la vie.

– Toi aussi Libertad, tu te vois au Chili, dans un pays inconnu, avec un homme que tu ne connais pas, et, qui plus est, est soldat, peut-être même pas officier ?

– Il n’est surement pas officier de carrière. Il doit plutôt être artiste pour mettre en scène une telle histoire si bien tournée et qui vous laisse pantelante et sans réponse.

– Tu as raison, mais vois-tu, le problème n’est pas si simple. Je ne peux faillir à la mission que j’ai reçue, défendre le village et ses habitants et faire en sorte qu’il reste bolivien. Même si nous acceptions ce mariage avec l’une d’entre vous, je ne serai plus digne de me montrer devant vous et votre mère. La mission est sacrée pour un soldat et plus encore pour le chef d’un détachement comme le nôtre. Je ne peux accepter que mes hommes soient faits prisonniers sans combattre et eux-mêmes ne l’accepteront pas. Mais, je l’avoue, je ne peux non plus admettre que je vais laisser les habitants de ce village, qui n’ont rien à voir avec la politique d’accès à la mer, mourir sous les coups des Chiliens. Mes hommes sont prêts à se battre et à mourir s’il le faut, mais les villageois sont piégés de manière odieuse par cette histoire. Je ne peux l’admettre. Et pourtant, je ne vois pas d’autre alternative pour l’instant. Votre mère non plus.

– Sans même savoir qui d’entre nous sera la femme de cet homme désirable, nous sommes prêtes à vous aider à trouver une solution qui satisfasse tout le monde, dit l’ainée Abigail. Nous avons huit jours pour cela.

– Oui, et ce n’est pas de trop, dit Alexandro. Ce qu’il ne dit pas, c’est qu’il fera son possible pour qu’aucune de ses filles ne se marie avec l’individu. Ce n’était pas une manière de demander, sans même savoir laquelle il voulait, la main d’une demoiselle sans même la connaître.

 

01/08/2020

Construire un livre

Construire un livre est une histoire sans fin qui germe tranquillement dans l’esprit jusqu’à prendre le pouvoir sur les autres pensées. On écrit quelques lignes sans penser à mal, pour le plaisir de phrases bien ordonnées et leurs enchaînements. Ce ne sont que des bribes de mots attachés les uns aux autres, liés par un fil invisible qui s’appelle le thème, même si on ne le connaît pas encore. Il se façonne de lui-même imperceptiblement, secrètement, en douce diraient les garçons devant un parterre de filles, un peu comme une pluie qui ne dit pas son fait. Progressivement, avec douceur, ces bribes se rassemblent, puis dansent leur barbarie dans vos oreilles sourdes, jusqu’au moment où l’on entend sa vibration dans la tête, par intermittence, comme une mélodie mal jouée, mais devenue indispensable à certaines heures. Vous n’êtes pas encore le chef d’orchestre, tout juste un petit violoniste parmi les autres, mais déjà là à occuper son siège sans encore disposer de la partition. Puis, dans le silence de la nuit se construit l’idée : un livre, pourquoi pas ?

L’idée grignote votre cerveau comme un rat empoisonné, maladroitement, mais sans cesse, et vous vous soupçonnez à y penser par inadvertance, jusqu’à ce qu’elle recouvre vos dernières résistances d’un liant doucereux, envahissant et persuasif.  Mais ceci ne fait bien sûr pas un livre. Ce n’est qu’une injonction prenante et obsédante qui doit murir jusqu’à éclater dans la tête sans cependant savoir en quoi elle consistera réellement. J’ai bien un thème, mais celui-ci ne suffit pas. Encore faut-il le remplir de consistance comme un panier au marché. Alors vous en cherchez les ingrédients selon le thème enfoui dans votre mémoire. C’est un vide à remplir progressivement, par petites touches fluettes qui contient de nombreuses coquilles à trier ou à éliminer, d’autres à développer, d’autres encore à accueillir sans raison, parce qu’elles vous plaisent. Un plan se dessine, doucement, comme un miel collant aux parois du cerveau. Ça y est, vous êtes atteint, la machine commence à tourner à plein régime sans que vous vous en soyez rendu compte. Mais attention, rien n’est joué.

Commence alors la rédaction. Elle vient toute seule, les phrases sortent d’elles-mêmes, s’alignent gentiment à partir du toucher des lettres de votre ordinateur, les doigts tricotent, la pensée siffle comme un train pressé, puis soudain s’arrête. Le trou. Ah, quelle misère ! Qu’est-ce que je cherche : un mot, une expression, ou, plus grave une suite aux idées qui pourtant s’enchaînaient tranquillement et sans difficultés. Suspendu au-dessus du trou, je fouille de mes yeux ce vide immense à mes pieds, encombré encore de notions mal taillées ou de néant sans attaches.

– Attend demain, me dit une partie de moi-même. L’autre s’acharne encore, mais roule les quatre roues dans le vide, malgré les coups d’accélérateur que je tente de donner. Je m’embourbe, impuissant, malheureux. Alors je ferme le couvercle de l’engin, laisse ces pensées reposer et vais me coucher sereinement. Bientôt un ronflement régulier flotte au-dessus du lit. L’esprit n’est plus là.

31/07/2020

Frontière

 

Entre la résignation et la révolte…

Une frontière à rebâtir chaque jour, un équilibre à trouver.

Peut-être est-ce cela la richesse : ne tomber ni dans l’un ni dans l’autre.

Être, c’est sans doute ne plus pouvoir choisir.

Mais cette pauvreté est richesse personnelle !

 

30/07/2020

L'escalier

Comme chaque nuit, après avoir pris un café, je remonte l’escalier dans le noir après avoir cherché mon chemin entre les meubles, m’efforçant de ne pas les toucher. J’aime trouver la trajectoire parfaite, comme si je voyais mon passage dans l’obscurité : éviter le fauteuil du bureau, le coin du billard qui rentre dans les côtes, les deux montants de la porte pénétrant dans l’entrée, puis la première marche de l’escalier qui monte au premier étage. Enfin, je touche le début de la rampe, qui m’indique que là commence la montée.

Ce matin, tout se passa comme chaque nuit, dans la rectitude de l’habitude. J’engageais le pied sur la première marche, puis la seconde, lorsque je me sentis sortir du connu de l’habitude. Je m’élevais hors de moi, montant sur le nuage de l’existence, franchissant chacune des marches avec aisance, tendu vers la marche finale et le passage sacré de la fin de la vie. Ce n’était pas désagréable, cela faisait partie d’un processus normal de désappropriation, d’un moment de logique dans la destinée. Au contraire, c’était un moment de libération sans aucune angoisse, un instant de connaissance qui élève l’âme au-delà des voies habituelles.

Je réalisais brusquement cet état suprême que chaque humain doit franchir à un moment ou un autre pour accéder à la connaissance de la réalité spirituelle : une apesanteur du corps et de l’âme qui flotte dans le contenu de son enveloppe et permet de saisir l’immensité du don divin, une montée joyeuse vers un autre moi-même libre de ses précautions et interrogations quotidiennes, une ivresse sans pareil, comme une aspiration vers le meilleur de l’être.

Tout cela s'accomplit dans l’obscurité, dans l’attention de ne pas tomber, de ne pas se prendre les pieds sur quelque objet ou quelque retenue d’émotions. Je franchis les dernières marches et posai un pied sur le palier lorsque tout cessa. Le cœur battant, j’avais contemplé la profondeur de la vie et le moment suprême de son achèvement, sans crainte, avec joie.

29/07/2020

L'étrange bataille de San Pedro de Atacama (32)

Le lendemain, après une nuit de rêve, de cauchemars, de cris voilés, ils se réveillèrent et purent commencer à parler. Ce fut un véritable déchaînement. Il y eut d’abord l’indignation : quel marché scandaleux ! Puis la colère : Ces Chiliens sont bien tous les mêmes ! Puis l’accusation : pourquoi nous ? Que leur avons-nous fait ? Puis la pitié : nos pauvres filles, quel choc ! Enfin l’impuissance : qu’allons-nous faire ? Nous n’en avons aucune idée ! Il fallait néanmoins parler aux filles et connaître leurs sentiments. Aussi le capitaine et son épouse, après le petit déjeuner, leur demanda de rester et de les écouter. Emma laissa parler Alexandro :

– Mes enfants, nous ne voulons que votre bien et ne seront jamais prêts à céder à un chantage dans lequel vous seriez partie prenante. Mais aujourd’hui il s’agit d’un véritable cas de conscience que,  pour l’instant, nous ne savons pas, comment aborder. Alors je vais vous rappeler ce qu’a dit l’homme pour voir si nous avons tous compris la même chose. Il nous a laissé huit jours pour décider. Soit l’une de vous trois accepte de se marier avec lui, et dans ce cas, le village ne sera pas pillé ni ses habitants passés au fil de l’épée. Soit, en cas de refus, le lendemain les Chiliens donnent l’assaut et tueront tous ceux qui s’y trouvent. Bien sûr nous pourrions tenter de résister, mais je suis certain qu’aucun d’entre nous n’en sortira vivant, vu leur nombre. J’avoue que je ne sais ce qui se passe dans la tête de nos ennemis, mais le marché est ainsi fait et vous êtes particulièrement concernées, allez savoir pourquoi. Vous êtes bien sûr entièrement libres de refuser ce marché immonde et ni votre mère ni moi ne vous en voudront. L’une d’entre vous est également libre d’accepter, en toute connaissance de cause. Mais j’y mets une condition : que ce ne soit pas pour sauver le village, mais parce que vous avez suffisamment réfléchi à ce qui vous attend et que vous acceptez cet homme parce que vous sentez que peut-être vous pourriez avoir plus que de l’amitié pour lui. Ceci étant dit, et je ne vous demande pas de réponse immédiate, l’une d’entre vous, veut-elle se marier avec cet homme ?

28/07/2020

Trame céleste

Si, il y a cent ans quelqu’un avait dit que l’espace et le temps pouvait se dilater et se concentrer, il eut été traité de fou. Pourtant ce n’est plus contesté par personne.

Le monde divin n’est-il pas celui en qui l’espace et le temps sont concentrés ? N’est-il pas l’espace et le temps ? Ce qui expliquerait qu’il soit sans repère pour notre monde.

27/07/2020

Pictoème

 

20-07-27 Au fil du temps.jpg

Au fil du temps

au temps du fil

L'écho du passé

 

 

26/07/2020

Inconnaissance

Il ne sait plus où il est
Sait-il même qui il est
Souvenirs d’où il vient
Absence d’où il va
L’opacité de l’existence
L’obscurité de l’avenir
Une page noire…

Une tache blanche
Ouvre son destin
Le futur renouvelle
Une vie autre
Loin des représentations
Et du paraître
Puits de lumière
Dans la nuit obscure…

Va et marche vers lui
Avance dans le brouillard
Enjambe les nuages
Et force la porte
Du nuage d’inconnaissance
Entrouvre le passage
Et ne pense plus…

©  Loup Francart

25/07/2020

L'étrange bataille de San Pedro de Atacama (31)

En réalité, ils étaient effroyablement inquiets. Sans même en avoir encore parlé, aucun des deux ne voyait ce qu’ils pourraient faire pour contrer cette machination. Emma s’alarmait pour ses filles qui n’avaient pas vraiment semblé comprendre l’enjeu de ce qu’avait avancé le chilien. Elles partageaient un certain sentiment pour cet homme qui les troublait, voire les envoûtait. Mais de là à se jeter dans ses bras sans réfléchir, elle n’y croyait pas. En réalité, elle se refusait à croire qu’une de ses filles était prête à quitter le cocon familial pour une aventure, car ce ne pouvait être autre chose, avec un homme qu’elle n’avait jamais vu il y a encore huit jours et qu’elles ne connaissaient nullement de vive voix. Emma n’envisageait pas un instant ce projet d’un mariage qui lui paraissait un cauchemar heureusement irréalisable. Elle n’envisageait pas non plus l’autre possibilité, à savoir le passage au fil de l’épée des habitants du village. Un cauchemar encore plus difficile à concevoir. Et pourtant, entre ces deux possibilités, le blanc, le vide, le désespoir. Quant au capitaine, il était plus inquiet encore, car il portait la responsabilité de la défense du village et ne pouvait concevoir un instant de l’abandonner, de la même manière qu’il ne pouvait examiner avec sérieux un mariage tel que le concevait les Chiliens. Quelle solution lui restait-il ? Certes, il pouvait estimer les chances de la garnison d’assumer sa défense seule. Il était prêt à se battre jusqu’au bout et à mourir pour protéger sa famille et les villageois. Mais, cela suffirait-il ? Il lui semblait bien que non. Il pouvait également tenter une sortie avec l’ensemble de la garnison pour chercher du secours, laissant les villageois ouvrir les portes et accueillir les Chiliens en leur offrant ce qu’ils possédaient. Mais il n’était pas sûr que ceux-ci leur laisseraient la vie sauve. Il avait du mal à approfondir un tel plan, en raison de ce que sa femme et ses filles deviendraient si les Chiliens entraient dans la place. L’homme avait bien dit qu’il s’agissait d’un marché. Il était évident que si la partie bolivienne contrevenait à une des règles du marché ce serait un massacre. Cependant, l’homme avait également énoncé, en premier lieu, que les troupes chiliennes passeraient au fil de l’épée tous ceux qui s’opposeraient à leur assaut. Peut-être accepteraient-ils que les villageois leur ouvrent les portes sans opposition ? Mais pouvait-il courir le risque d’une mauvaise interprétation du marché ? Et, dans tous les cas, il aurait failli à sa mission : tenir la place forte de San Pedro qui appartiendrait alors aux Chiliens. Il avait beau essayer depuis le moment où l’homme avait énoncé son marché, de trouver une solution, il ne voyait pas ce qu’il pouvait faire. Alexandro et Emma se couchèrent sans avoir prononcé un seul mot, se tenant fortement serrés dans les bras de l’autre, s’embrassant sur la bouche pour éviter d’avoir à se parler, essuyant de leurs lèvres les larmes qui coulaient de leurs yeux.

24/07/2020

Accomplissement de l'homme

Développer en soi l’image divine de la Trinité qui correspond à ces trois centres : l’intellect ou le mental, le cœur ou les sentiments et le corps ou le centre vital.

Faire en sorte que les trois moyens d’expression de l’existence soient en harmonie avec la volonté divine :

* la connaissance pour le mental,

* l’amour pour les sentiments,

* l’action pour le corps.

Quel voyage pour une vie !

22/07/2020

L'envol

20-07-22 (13-04-09 Symétries) Mouvement2.jpg

Où es-tu, toi, l’inconnu ?
Ce pincement au cœur
Est celui de toujours
Aux moments de détresse
Un arrêt du cœur
Un bruissement de la pensée
Le noir de l’absence
Le rouge de l’épouvante
Le jaune de la désolation
Le vert de la quiétude
Le bleu des regrets
Le pourpre de l’affolement
L’incolore du néant
Tout ce que j’ai aimé
Est perdu jusqu'à cette douleur
Qui me berce les entrailles
Et m’empêche de prendre mon élan
En sautant la barrière
Pour plonger dans l’après
Qui n’est probablement qu’un avant
En absence de présent
J’ai percé l’espace
J’achève le temps
L’envol devient mon mode d’existence
Jusqu’au dernier atome

Je travaille sur le prochain livre qui parle de la quête de Dieu. Mais c'est une longue histoire. Il ne se laisse pas ligoter au pilori de l'information.

©  Loup Francart

21/07/2020

Tout ou Rien ou Tout et Rien

Rien et ce rien engendre le Tout
Mais ce rien est-il le néant ?
Donner un nom à ce qui n’est pas
C’est livrer une chimère sans logique
Ce néant est-il le non-être ?
Qui peut dire non-être
S’il n’est pas lui-même
Il y a donc de l’existence dans l’absence d’être
Tout est lié au Tout
Même parler d’absence de tout
Implique la présence d’être
Dieu seul dans sa lunette
Voit l’homme devenir être
Dans un monde d’irréalité

©  Loup Francart

20/07/2020

L'étrange bataille de San Pedro de Atacama (30)

– Je vous propose un marché. Le capitaine Barruez, en charge de la défense de votre village, possède trois filles, toutes jolies et bien faites. Qu’il nous en offre une, celle qui le désire, pour convoler avec moi ! Aucun coup de feu ne sera échangé, les habitants auront tous la vie sauve, la garnison sera faite prisonnière et l’hospitalité est offerte à la famille du capitaine par le Chili. Vous avez une semaine pour vous décider. Je reviendrai dans huit jours exactement et vous devrez me donner une réponse. Cette proposition ne peut se discuter. Elle est à prendre ou à laisser !

Là-dessus, l’homme regarda en direction des trois jeunes filles, leur sourit aimablement, salua et repartit paisiblement. Une des sentinelles le tenait en joue, mais le capitaine leva la main pour lui faire comprendre qu’il ne devait pas tirer. Ses filles n’avaient pas réagi au discours Elles ne semblaient pas l’entendre ou ne comprenaient pas que le marché parlait bien d’elles. Mais la convergence des regards des personnes présentes les troubla. Elles rougirent légèrement, puis regardèrent leur père, semblant l’interroger sur l’attitude à prendre. Celui-ci, d’un geste discret, fit signe à sa femme qu’il était temps de partir avant que les conversations, voire les interrogations, ne commencent à fuser. La famille quitta la porte sous les regards interrogatifs de la population sans que celle-ci, cependant, n’ose poser une question. Et pourtant, les interrogations ne manquaient pas. Pourquoi la famille du capitaine était-elle visée ? Que comptait faire le capitaine ? Pourrait-il imposer quelque chose à ses filles ? Ne va-t-il pas entrer en conflit avec sa femme ? Comment se sortir de ce conflit digne des tragédies grecques sans y laisser des plumes ? D’ailleurs, très vite après leur départ, ces questions devinrent le sujet de conversation de toute l’assemblée près de la porte du village. Aucun n’avait une idée de ce qui allait se passer, mais tous avaient quelque chose à dire. Les villageois rentrèrent plus tard que d’habitude chez eux, emplis de curiosité.

Le retour à la maison du capitaine se fit sans difficulté, les filles papotant entre elles, les parents devisant de choses et d’autres sans une seule fois évoquer ce qu’avait dit le chilien. Ils leur dirent bonsoir, peut-être en les serrant un peu plus cette fois-ci. Puis ils se retirèrent dans leur chambre.

19/07/2020

Sens cosmique

Se laisser enlever par le sentiment d’un abandon, de l’absence de présence humaine, de soutien de l’habitude et de l’appréciation de l’autre.

Un maelstrom qui t’enserre le cœur, le comprime et t’extrait de toi-même pour te projeter dans le vide cosmique et la violence de ton inefficacité. Tu imagines ce monde grandiose sans la profondeur de la pensée, sans la prise en compte de cette aspiration  vers un autre toi-même, plus intense, plus aspirant, une tension permanente qui t’enserre et t’oblige à aller au-delà de ton petit moi enveloppé de douceur baveuse.

Plonge dans l’absence, ouvre-toi à un autre toi-même et erre dans l’immensité du cosmos.

18/07/2020

Entre en toi-même

 

Avoir la foi, croire, est-ce un trompe-l’œil ou une réalité ?
Le monde intérieur peut-il n’être que le produit du monde extérieur ?
Qu’est-ce que le réel ? Que signifie l’imaginaire ?
Le spirituel peut-il n’être que l'invention de nos sens ?

Je crie vers toi…
Y a-t-il quelqu’un au bout du fil ?
Le silence du vide… ou le vide du silence ?
Suis-je réellement lorsque je ne suis plus ?

L’homme crée-t-il la réalité
Ou celle-ci crée-t-elle l’humanité ?
La cause première est-elle la fin ultime ?
Quelle énigme que la vie !

Entre en toi-même et tu vivras !

©  Loup Francart

17/07/2020

Lui

Au commencement
Il n’y avait que l’amour
Et l’homme était seul

Face à lui-même
Il se sentit créateur :
A lui le monde

Il erra longtemps
Chercha sa place
Enfin s’oublia

Sans soutien du moi
Il découvrit l’absence
Et partit sans lui

Il trouva le soi
Revêtit la transparence
Plongea dans l’amour

Seul il devint deux
Fut la sagesse du soi
Sans renier le moi

©  Loup Francart

16/07/2020

L'étrange bataille de San Pedro de Atacama (29)

Quelques jours plus tard, peut-être une dizaine, l’homme revint. Le repas du soir était achevé, les villageois étaient sortis prendre l’air toujours chargé de moiteur, en attendant qu’il se rafraîchisse avec la tombée de la nuit. De longues trainées de nuages barraient l’horizon laissant l’impression d’un jour inachevé. La famille du capitaine Alexandro Barruez, comme les autres, se promenait tranquillement dans les rues du village, saluant au passage les personnalités lorsqu’un cri s’éleva du côté de la porte du village : « Le revoilà ! Le revoilà ! ». Avec toute la dignité possible que sa fonction le contraignait à prendre, le capitaine et sa famille se dirigèrent promptement vers le lieu des cris. Déjà une partie du village s’était massée autour de la grande porte, contemplant l’être qui avançait, un bâton à la main, revêtu d’une peau de bête, marchant souplement, comme soulevé de terre, le regard haut, perdu dans les étoiles dont certaines commençaient à pointer dans le ciel. Oui, il était beau. Jeune encore, entre vingt et vingt-cinq ans, blond, grand, mais sans plus, bien taillé, sans une once de graisse. Mais ce qui retenait l’attention était sa manière de se mouvoir. Il se déplaçait avec grâce, comme si le sol était fait d’ondes qui portaient ses membres au pas suivant, sans effort. Ses déplacements semblaient venir avant l’effort physique, peut-être même avant que le cerveau ne dise à ses muscles de se mouvoir. Aussi il était impressionnant de le voir avancer vers le village, en pleine possession de ses moyens, pas du tout impressionné, comme pour une promenade à l’égal de celle des villageois ce soir de chaleur. S’arrêtant à quinze mètres de la porte, il ne bougeait pas, attendant que la population continue de se masser autour de la porte et fasse silence. Le calme s’installa, la nuit tombait doucement. C’était le moment de proclamer quelque chose.

– Oyez, braves gens, ma proposition ! Les troupes chiliennes vous encerclent. Elles n’attendent qu’un ordre pour donner l’assaut. L’issue de celui-ci ne fait aucun doute, elles vaincront et passeront au fil de l’épée tous ceux qui s’y opposeront, femmes et enfants compris.

L’homme s’arrêta, pour marquer son effet. Un brouhaha monta de la foule qui s’arrêta aussitôt qu’il ouvrit à nouveau la bouche :

15/07/2020

Nouvelle humanité

C’est la fin de la nuit, le calme campagnard
Règne sur l’espace et emprisonne le temps
Seules les particules coulent sur leurs trajectoires
Sans détermination, avec roucoulement

Perdu entre le nom et de plus la fonction
Un homme s’interroge, la terre dans l’ombre
Chaque matin je suis, chaque soir création
Chaque nuit j’engendre, mort dans la pénombre

Ainsi va le destin, entre être et néant
Au cours d’une soirée, aux prises à la folie
L’œil ouvert sur le monde, océan bienveillant

Marche encore et toujours, jusqu’au bout du chemin
Sans regard derrière et sans mélancolie
Jusqu’à la naissance d’un monde plus humain

©  Loup Francart

14/07/2020

Indécision

 

19-09-24 Equinoxe.jpg

Sur la bascule

tu rêves le temps et l'espace

sans pouvoir choisir !

©  Loup Francart

 

 

13/07/2020

L'observatoin de soi

Faire taire en soi celui qui s’observe. Il est toujours là à dire : « Je n’arrive pas à me quitter et à ne plus me voir pour être. » C’est le moi existentiel  qui ne veut pas céder, la matière qui ne veut pas lâcher, toute cette partie de nous-même qu’il faut abandonner pour être. Lutter contre le moi, s’abandonner au soi, c’est-à-dire à l’âme qui cherche à s’abandonner au divin.

Alors survient la nouvelle naissance, celle de l’esprit. Elle est perceptible et consciente comme une séparation qui se fait en nous, à la fois montée et descente vertigineuse, descente du matériel, montée vers le spirituel, sans rupture de l’être propre. C’est la perception  du monde spirituel, véritable univers immatériel, aux lois différentes de notre monde.

12/07/2020

L'étrange bataille de San Pedro de Atacama (28)

Pendant ce temps, sa femme et ses filles vaquaient à leurs occupations. Les filles suivaient des cours par correspondance avec le passage d’un professeur un jour par semaine. Le reste du temps, elles travaillaient chacune dans leur chambre, avec beaucoup d’assiduité, il faut le dire. Mais depuis quelques temps, en fait depuis l’apparition de l’individu devant la grande porte, cette assiduité connaissait des trous de mémoire. Elles rêvassaient devant leurs mathématiques, écrivaient des dissertations insolites, parlant d’émotions amoureuses, rappelant les sentiments exacerbés de jeunes filles en passe de devenir femmes. Tout cela, chacune à leur manière. L’ainée était raisonnable. Elle se savait belle. Aussi s’interdisait-elle tout sentiment pouvant la conduire à des décisions irréfléchies. La seconde était plus indépendante et plus intellectuelle. Elle disséquait ses émotions, les rapprochait de celles de ses héros littéraires et pouvait ainsi se comparer avec tel ou tel personnage extravagant qui décide de sa vie sans tenir compte de l’avis des autres. La dernière avait un cœur sensible, pure, celui d’une toute jeune fille, presque encore une enfant. Elle s’enflammait, rêvait, pleurait, riait selon le jour et les émotions qui la soulevaient. Elle observait ses sœurs, copiait sa mère dont l’avis lui importait plus que tout au monde. Son cœur était sensible, ouvert, bon à prendre. Par moments, le matin, alors que l’heure de l’éducation n’avait pas encore sonné, il lui semblait qu’en tapant du pied sur le sol, elle pourrait s’élever loin dans le ciel et contempler le monde d’en haut, détaché, mais pleine de sollicitude pour tous. On ne pouvait dire qu’elle était belle au sens d’une beauté tumultueuse de jeunes filles qui s’engouffrent dans la vie la tête haute, sûres de leur séduction. Mais elle avait le charme de l’innocence, la fragilité de l’incertitude, la gentillesse naturelle.

En réalité, toutes les trois pensaient à l’inconnu, chacune à sa manière. L’ainée y pensait avec son cerveau comme une femme de tête. Ferait-il un bon mari, attentionné et capable de devenir riche ? La seconde tentait de le comparer à un héros de roman, Julien Sorel, bien qu’elle se demanda pourquoi lui et pas tel autre amant de nombreux romans du début du siècle. Elle s’était en effet entichée des romans français, et tout particulièrement de la période romantique. Elle l’exaltait comme ces héros ou ces amants d’un jour qui laisse au cœur un manque permanent. La dernière découvre pour la première fois l’attrait de l’homme sans prendre conscience qu’il ne s’agit que d’une attirance physique. Bien sûr tout ceci est déguisé dans son esprit en une épopée amoureuse  qu’elle cache à tous. Les parents, quant à eux, ont bien noté quelques dérangements des habitudes, quelques rêveries à table, quelques veillées tardives sans parole. Mais pouvaient-ils se douter d’une telle poussée chez leurs trois filles en même temps ?

11/07/2020

Particule

 

Éclatement d’une goutte

Fuyant vers l'infini

Perdue dans l’espace

Rassemblée dans le temps

Goutte isolée de matière

Sans réelle consistance

Un souvenir dans l’obscurité

Surgissant du néant

Qu'est-on ?

poésie,écriture,poème littérature

©  Loup Francart