13/02/2021
La musique de la Grèce antique (6 et fin)
Les harmonies
Terme familier aux pythagoriciens, le mot "harmonia" a de nombreuses significations. L'harmonie est, d'une manière générale, ce qui rapproche et tient unis, en dépit de leur opposition, les éléments contraires dont les choses sont formées.
En musique, sa première signification était l'octave (réunion de deux tétracordes). Le plus souvent, le terme désigne une structure globale d'intervalles et de systèmes. Il est enfin souvent accolé aux noms topiques de ce qui est faussement appelé mode grec. Certes, Platon, Aristote parlent d'harmonie dorienne ou phrygienne, mais rien ne permet de penser qu'elles correspondent, comme on l'a longtemps avancé, aux degrés successifs de la gamme.
A l'origine structure propre à la musique d'un peuple, les harmonies sont plutôt des modes formulaires, des échelles à "ethos" plus ou moins régulières sans doute liées à des formules caractéristiques, servant de base à des improvisations, et comportant des conventions d'exécution précises. Cette conception, seule capable de justifier les textes platoniciens, est encore vivante aujourd'hui dans les ragas hindous, les maqam arabes.
Il semble qu'elles se soient par la suite rapportées aux aspects des gammes et aux tons.
Les aspects
Les aspects sont le relevé solfégique des intervalles compris à l'intérieur d'une consonance, et de l'ordre dans lesquels ils se présentent. On analyse habituellement les aspects de quarte, de quinte et d'octave. A une époque ancienne, on leur donna les mêmes noms topiques que les harmonies archaïques de Platon.
Les tons ou tropes
C'est un procédé d'étalonnage destiné à fixer sinon la hauteur réelle des systèmes, du moins les rapports entre les différentes hauteurs réelles auxquelles on pouvait les placer. Les notions d'aspect et de ton ont entraîné de nombreuses confusions dans les dénomination des "modes grecs". On retrouve là le phénomène de la transposition: un même aspect peut avoir plusieurs tons, un même ton peut appartenir à plusieurs aspects.
* * * *
En conclusion, la musique grecque s'est élaborée lentement, la théorisation des derniers siècles dépassant sans doute l'exécution elle-même.
La base du système musical reste le tétracorde, associé en quarte ou en quinte à un autre tétracorde, semblable ou non. L'idée que la structure de la musique, dans son approche mathématique, permet d'entrer dans une certaine connaissance du monde, est intéressante. Un tel système, sur des bases 12 ou 7, avec des intervalles inégaux, pourrait conduire à des modèles mathématiques de phénomènes difficilement modélisables en système décimal.
07:41 Publié dans 52. Théorie de la musique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cérémonie, peuple, science musicale, son | Imprimer
10/02/2021
Les systèmes dans la musique de la Grèce antique
Les systèmes
Le tétracorde est le système simple qui sert d'unité fondamentale pour la formation des autres systèmes.
On distingue :
- Le système disjoint ("diazeuxis") : les modes
En les reliant deux à deux, par l’intermédiaire d’un ton, ces tétracordes donnent les modes complets suivants :
Les deux tétracordes sont séparés par un ton. On retrouve ici aussi le même phénomène du genre diatonique, mais inversé (mi-fa-sol-la = si-do-ré-mi), ce qui forme la même gamme sous forme d'octacorde.
- Le système conjoint ("synaphé")
Il est construit par conjonction de deux tétracordes (une note commune). On note que, dans le genre diatonique, selon la conjonction par le haut ou le bas, on obtient un tétracorde semblable (la-sol-fa-mi = mi-ré-do-si) et un autre qu'il faut altérer. L'ensemble du système forme un heptacorde.
- Le système réduit ou petit système parfait ("systema teleïon elasson")
Il réunit trois tétracordes en conjonction (tétracordes des conjointes, des moyennes et des hypates), avec l'ajout d'une note au grave, dite proslambanomène (note ajoutée). La gamme de Pythagore (ou gamme pythagoricienne) est une gamme chromatique dont les douze intervalles sont définis par le « cycle des quintes ». C'est la gamme toujours utilisée pour chanter, dans un mode majeur ou mineur.
- Le système complet ou grand système parfait ("systema teleïon meïzon")
Il réunit, en disjonction, deux systèmes conjoints (tétracordes des hyperbolées, des disjointes, des moyennes et des hypates), plus la proslambanomène au grave.
Quand, dans ces systèmes, les tétracordes restent identiques, on les dit "ametabolon" (sans métabole). Les systèmes peuvent aussi être formés avec métabole, c'est à dire à partir de deux tétracordes différents.
NB. Pour approfondir, voir de Jacques Chailley, L'imbroglio des modes, Alphonse Leduc,1960.
07:28 Publié dans 52. Théorie de la musique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cérémonie, peuple, science musicale, son | Imprimer
09/02/2021
Les trois genres de base dans la musique de la Grèce antique
Bien qu'il semble qu'il y ait eu de nombreux genres, peu à peu, furent définis 3 genres de base :
- le genre diatonique
Les notes mobiles y respectent le cycle des quintes, donc pratiquement la gamme pythagoricienne, avec le plus souvent attraction descendante vers le demi-ton final ;
- le genre chromatique
où les mobiles définissent des intervalles d'un ton et demi et de deux demi-tons, généralement vers la note finale basse ;
- le genre enharmonique
avec un intervalle de 2 tons et deux intervalles de 1/4 de ton.
Un groupe de 3 notes serrées à 1/2 ton maximum, en chromatique et en harmonique, s'appelait "pycnon". On appelait nuances ("chroaï") la façon de varier à l'infini ces intervalles.
00:59 Publié dans 52. Théorie de la musique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cérémonie, peuple, science musicale, son | Imprimer
07/02/2021
La musique de la Grèce antique (3)
LA THEORIE MUSICALE DE LA GRECE ANTIQUE
Elle s'est formée progressivement. La synthèse présentée n'a jamais existée sous cette forme. Elle est très récente et a été en grande partie élaborée par le musicologue Jacques Chailley, professeur d'histoire de la musique à la Sorbonne.
Il faut également noter que la théorie de la Grèce antique a toujours séduit les musicologues. Mais faute de documents et d'esprit critique historique, ils en ont tiré des conclusions erronées. Disons même que la plupart d'entre eux l'ont utilisée pour justifier leur propre idée sur la musique.
La théorie de la Grèce antique repose sur :
- le tétracorde, avec trois modes extension des tétracordes ;
- des genres, selon la hauteur des notes entre les extrêmes de quarte juste ;
- des systèmes, formés par l'agencement de plusieurs tétracordes ;
- des harmonies, mot chargé de sens, désignant des formules musicales ;
- des aspects, c'est à dire la définition des intervalles compris à l'intérieur de l'octave, de la quarte ou de la quinte ;
- des tons ou tropes, destinés à fixer la hauteur réelle des aspects.
C'est la confusion entre harmonies, aspects et tons qui a conduit aux traditions erronées des modes.
Les tétracordes de base
Le tétracorde (du grec tetra : quatre et khordê : corde) est la succession mélodique de 4 sons (quatre cordes, ce qui correspond au nombre de cordes de la phorminx, la version la plus ancienne de la lyre).dont les extrêmes sont en rapport de quarte juste, soit 2 notes extrêmes fixes ou bornes (oroï) et 2 notes intérieures mobiles.
Cette structure en 4 notes date de l'époque classique. A l'origine il n'y eu probablement qu'un seul son mobile entre les deux bornes. En fonction de la place du demi-ton, il existe trois tétracordes différents, le lydien, le phrygien et le dorien, le premier commençant au fa, le second au sol et le troisième au la sur la gamme. Pour mieux mettre en évidence les écarts de ton ou demi-ton, la seconde portée pose le tétracorde avec la même hauteur de son.
03:55 Publié dans 52. Théorie de la musique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cérémonie, peuple, science musicale, son | Imprimer
06/02/2021
La musique de la Grèce antique (2)
LES INSTRUMENTS
Les percussions sont nombreuses et se rattachent surtout au tambourin et à la cymbale. Elles soutiennent, surtout pour la danse, les instruments proprement dits, flûtes, aulos et lyres (ou cithares).
- La flûte : Accessoire pastoral, elle est peu employée en musique savante. Elle est droite comme le pipeau ou à tuyaux juxtaposés (syrinx).
- L'aulos : C'est l'instrument à vent essentiel, à hanche double, de sonorité perçante. Le type le plus fréquent est l'aulos double, formé de deux tuyaux séparés tenus chacun avec une main, les doigts bouchant les trous, ce qui suppose une certaine hétérophonie.
- La lyre : Elle est l'instrument symbolique du culte d’Apollon et de la poésie chantée. Elle est formée d'une carapace de tortue recouverte de peau tendue et prolongée par deux bras incurvés en travers desquels sont tendues les cordes. Sa sonorité est mince et grêle. Elle a été rapidement supplantée par la cithare à caisse de bois, de sonorité plus forte et à cordes de plus en plus nombreuses.
07:17 Publié dans 52. Théorie de la musique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cérémonie, peuple, science musicale, son | Imprimer
11/01/2013
La musique chinoise de cérémonie
Elle se caractérise pas des intervalles d'un ton, divisant l'octave en six intervalles égaux. On obtient ainsi six "liu" masculins et six "liu" féminins espacés d'un demi ton. Ces liu ne formaient cependant pas une échelle : l'ancienne musique chinoise était fondée sur des effets de notes isolées, et non sur une courbe mélodique. Certains accords étaient autorisés, permettant de marier les liu masculins et les liu féminins, soit à la quarte, soit à la quinte.
Il est possible d'imaginer à partir d'une telle gamme, dite gamme par ton, chère à Debussy, des accords de deux sons à la tierce mineure entre les deux gammes ou des accords de trois sons, tierce et quinte sur une même gamme.
07:41 Publié dans 52. Théorie de la musique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : liu, musique chinoise, cérémonie, gamme, pentacorde | Imprimer
27/12/2012
La musique religieuse chinoise
Cette note est la suite de celle du 17 octobre 2011, intitulée "La musique Extrême-orientale" que vous pouvez consulter en cliquant ici : http://regardssurunevissansfin.hautetfort.com/archive/201...
"Si une note se produit, c'est dans le cœur humain qu'elle a pris naissance. Si le cœur humain est ému, c'est par l'action des objets. Sous l'impression des objets, il s'émeut, et son émotion se manifeste par des sons. Les sons se répondent entre eux, ainsi, ils se différencient. C'est lorsqu'ils présentent des différences qu'ils prennent le nom des notes."
Ainsi commence le Yüeh Chi, partie du Li Chi ou Mémorial des rites, qui expose la doctrine officielle de la Chine sur la musique. Rédigé au 1° siècle avant notre ère, son existence est beaucoup plus ancienne.
Selon le Yüeh Chi:
· La musique est la langue naturelle des sentiments. Ceux-ci expriment la relation de la conscience avec l'univers, du sujet avec l'objet, du moi avec le non-moi. Le son est le signe de cette relation. Le son ne devient musique que lorsqu'il succède à plusieurs sons. Ils expriment alors l'émotion, les états mouvants du cœur.
· La musique agit sur les sentiments. Il y a une musique qui inspire la vertu, une autre qui corrompt les mœurs. Comme dans la Grèce antique, les chinois estiment que la musique fait partie de la morale.
· Le fondement de la musique est l'harmonie de toute la nature. Intimement liée aux rites dont elle est inséparable, l'harmonie embrasse le ciel et la terre, exprimant les relations du Ying et du Yang. La musique est associée au ciel, à la lumière, au principe mâle, au Yang; les rites à la terre, à l'obscurité, au principe femelle, au Yin.
"La musique recherche l'harmonie. Elle est associée aux plus hautes valeurs spirituelles: elle est du domaine du ciel. Les rites tendent à percevoir les différences, ils sont du domaine de la terre. C'est pourquoi les sages ont composé de la musique pour qu'elle puisse correspondre au Ciel et qu'ils ont institué les rites, pour qu'ils correspondent à la terre. Ainsi, quand les rites et la musique se manifestent en toute perfection, le ciel et la terre sont en parfait accord."
· La musique n'est pas faite pour exalter les passions, mais pour les modérer. Ce qui importe, c'est la pensée qu'elle exprime et non la sensation qu'elle donne. Par la musique, l'humanité se rapproche de la sagesse.
· Les cinq notes de la gamme pentatonique s'intègrent aux cinq éléments (terre, métal, bois, feu et eau), aux cinq directions de l'espace (centre, ouest, est, nord et sud), aux cinq planètes (Mercure, Saturne, Jupiter, Mars et Vénus) et aux cinq couleurs (jaune, blanc, bleu, rouge, noir).
Et pour illustrer cela, voici les chants de la prière du matin au temple bouddhiste de Hong Fa, à Shen Zhen :
07:28 Publié dans 52. Théorie de la musique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : musique orientale, chine, cérémonie, liu, gamme, pentacorde | Imprimer