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25/11/2015

Elle

Elle est là, maigre et misérable :
« Qu’as-tu, petite, à demander ? »
« Je cherche l’homme responsable
De ma vie et de ma pauvreté. »

Elle poursuivit sa route, clopin-clopant,
Les yeux fixes et l’haleine fétide,
Regardant ses pieds, penchée vers l’avant,
Tendant un doigt fragile vers le vide.

Le lendemain on la vit revenir,
Fière jeune fille sans un soupir,
L’œil vif et la chevelure brillante.

« Qu’as-tu, belle enfant, à nous donner ? »
Elle entraîna derrière elle le village entier
Pour un baiser supposé sur ses lèvres glaçantes.

©  Loup Francart

21/11/2015

Dédicace Saumur

Loup Francart présentera, lira des extraits et dédicacera ses deux derniers livres le samedi 21 novembre 2015 à l’Espace culturel Leclerc de Saumur entre 14 et 18 heures.

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Petits bouts de rien couv1ère-2.jpg

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Le temps suspend son vol, la matière flotte devant la langue française, irréelle, aux mille couleurs de l'humanité. C'était un samedi de promenade dans Paris, mais cela pourrait être à chaque instant où la pensée s'arrête et se laisse enchanter par la magie de l'apesanteur.

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19/11/2015

Attentat

On a trois attitudes : la compassion, l’indifférence ou la rage

Le choix de la compassion est un choix simple et naturel
Celui de l’indifférence peut être personnel, mais ne pas le dire
Celui de la rage est pour les accros de la politique
Rage contre l’action, rage pour l’action, sans réflexion

C’est ainsi que la France se réveille ce samedi matin
Sans trop savoir quoi faire sinon mobiliser
Pour quoi, pour qui, contre quoi, contre qui ?
Seules les forces de l’ordre sont là et agissent

Chacun a son point de vue, c’est comme une explosion
Et plus l’on s’éloigne dans l’espace et le temps
Plus les divergences se font sentir pesamment

Ce ne sera plus le rassemblement, mais l’antinomie
Dans la passion des opinions et des réactions
Hors de toute analyse, recul et discernement

La seule union est autour des victimes
Vers qui affluent les pensées de tous
La France reste la France, le pays des troublions
Qui, en un instant, se relève et chante la Marseillaise

©  Loup Francart

15/11/2015

L'autre

Qu’es-tu toi pour me dire
La vanité des rencontres
La futilité des réunions
L’inanité de tout débat ?

J’y vois au contraire
Le propre de l’humain
La parole libre de l’être
Qui condense en un mot
Ce qui le met en joie
Le terrifie ou l’encourage

Seule, la créature s’étiole
Se réduit à elle-même
Et meurt d’absence

Ne te retire pas de toi-même
Tu y perdrais le meilleur
C’est-à-dire ce double
Que l’autre regarde
Avec concupiscence
Et que toi-même ignore

©  Loup Francart

11/11/2015

Vide

Se dit d’un contenant qui ne contient rien…
Le rêve de l’astrophysicien, les jours de pluie
Qui est de définir le vide sans lui donner du plein
Et dans lequel le zéro ne peut être déduit

La quatrième dimension peut-elle être vide ?
Est-ce à dire qu’aucun événement n’y apparaît ?
Le temps s’en va et ne circule nul fluide
L’univers s’écroule et tout devient muet

L’espace peut-il sévir s’il ne peut être mesuré ?
Le vide peut-il être limité par un contenant ?
Même le mot rien ne peut le délimiter
L’imaginer c’est déjà lui donner un lieu accueillant

Alors Dieu serait-il vide et sans saveur
Ou serait-il l’ultime recours de l’imagination ?
Au fond le vide est-il un alibi contre la peur
Ou une huile pensante à manier avec précaution ?

©  Loup Francart

07/11/2015

L'oiseau

L’oiseau, vert et cadencé, s’en est allé
Depuis, la pluie couvre les bois en silence

Une goutte se glisse et pénètre le col
Le frisson rappelle l’âme à elle-même

Envolée la luxure de l’automne
Qui tournait la tête aux biens intentionnés

Désormais le feu de l’hiver enchaîne
Le corps aux mouvements du cœur

Quelle est bonne cette odeur subtile
De salaisons et fumigations à ressortir
Lorsque la bise enlace la maison
Et vous force à rester là, tranquille
Dans l’attente imprévue d’une éclaircie
 
Et l’oiseau, vert et envolé, reviendra
Chantant pieusement le rayon de lumière
Qui frappe l’œil et fait fondre le cœur

©  Loup Francart

03/11/2015

Eternel

Toi, revenu sur ta parole
De la tête à la queue
Tu refuses pourtant le cercle
Et te projettes sur la ligne

Elle s’enfonce dans l’espace
Et s’enfuit dans le temps
Tu es là, seul, innocent
Perdu sur ta branche

Tu agites les ailes de la tentation
Et tombes les bras en croix
Tu es saisi par le vide
Qui courre sous tes pieds

Suis la corde de ta trajectoire
Prends la tangente de ta peine
Et parcours la moitié
Du paradoxe d’Achille

Toujours tu seras derrière
Et la course dure mille ans
Plus tu avances, plus tu ralenties
Jusqu’à t’arrêter au bord de l’éternité

Alors seulement tu pourras revisiter
Ta destinée dans l’éternel retour

26/10/2015

Vivre

Je vis mille vies
Et pourtant je n’en ai qu’une
J’habite à l’autre bout du monde
Et pourtant je ne suis jamais sorti de chez moi

Je suis ermite
Et pourtant élastique

Même le temps ne peut rien contre moi
Aussi à l’aise chez le boucher qu’à l’église
Je suis tout ce qui n’est pas moi
Je ne suis rien de tout ce qui est moi

J’ai trouvé la paix un jour de marché
Lorsque j’ai vu les œufs en gelée
Descendre les escaliers dorés
Et rebondir encore à mes pieds

Oui, rien de tout cela n’existe
Sinon dans l’imagination
D’un cafard alourdi par le rêve
Et d’une grenouille sans voix

Merci chers auditeurs
D’écouter à nouveau
L’histoire sans fin ni passion
D’un pauvre vagabond
Qui vit mille vies
Et pourtant n’en a qu’une…

©  Loup Francart

22/10/2015

Clinique

L’odeur lisse et sans arôme
Des cliniques d’un jour ou d’une nuit…
Vous entrez à l’accueil en fantôme
Et ressortez vert comme un fruit

La puissance de l’enfer médical
Ne vous incline pourtant pas à la survie
Le néant vous envahit dans cet hôpital
Et subsiste bien au-delà de l’ennui

Lorsque vous vous dressez en chantant
Autour des lits sur lesquels gisent
Ces morceaux de chair vivants

Vous ne savez où est passé le plaisant
L’espiègle, le morne et le brigand
Tous atteint d'une triste catalyse…

L’odeur lisse et sans arôme
S’empare du moindre atome…

La puissance de l’enfer médical
Envoûte jusqu’à l’homme normal

L’existence…
Quelle importance ?

©  Loup Francart

18/10/2015

Destinée

La vie, c’est cette tête d’épingle
Que l’on a du mal à domestiquer
Ce n’est ni le mont Everest
Ni les collines de la satiété

C’est un pic qui vous fait frissonner
C’est un creux où l’on enfonce le doigt
Il ne dure qu’un instant, immense
Et s’en va aussi vite qu’il est venu
Vous laissant hagard et délirant
Secoué de tremblements de bonheur

La vie se révèle alors, intense
Embrasant l’univers, vous et lui
D’une même flamme aspirante
Qui vous fait repartir, ragaillardi
Vers un autre sommet, différent

Et c’est cette succession de haut et de bas
Qui fait la magnificence d’une destinée
Différente pour chacun, inégalée
En intensité et en circonstances
Mais qui conduit, pour tous
A cette extase d’un jour qui vous fait dire
Si c’est à refaire ? Oui, tout de suite !

Peut-être cela sera différent
On ne peut vivre deux fois la même chose
Mais les péripéties n’ont pas d’importance
Seul compte le frisson d’un instant
Cette envolée inénarrable de quelques secondes
Qui transforme l’homme ou la femme
Et le ou la fait devenir Dieu

Dieu a fait l’homme pour que l’homme devienne Dieu

©  Loup Francart

14/10/2015

Marine

Il partit loin de tout, au-delà de sa volonté
Il enjamba de nombreux barrages
Il se contorsionna et s’enveloppa de courage
Il arriva au port du fond des mers
Et coucha dans le premier lit venu
Le lendemain il embarqua sur le voilier
Et partit sur l'océan, assoiffé…
Il parcourut la moitié de la terre
Et la moitié des cieux bleus
Toujours enfoui à mi-torse
Dans les huniers au sommet des mâts
Il voyait les animaux volants autour de lui
Il sentait la fin arriver, un air de musique
Tendu entre deux cordes raides
Crac. Elle cède sous la pression inusitée
Des vers de carabin enfilés sur une aiguille
Et l’homme dénudé s’engloutit dans les eaux
En fumant sa pipe vénérée. Ah, la marine !

10/10/2015

L'arbre

De ses doigts feuillus, il grattait le ciel

Il se hissa sur la pointe de ses racines
Poussa une exhalaison parfumée
En se couvrant de rose et de blanc

Rien ne le différenciait d’un thuriféraire
Portant haut et fort ses amours
Mais tous ces atours le dissuadaient
De s’élever encore en laissant ses chausses
La sève ne peut monter que gorgée
De la magie souterraine du jardin

Il passa l’été à s’extasier vertement
Attendant le matin et la chaleur ruisselante
Tendant les mains vers la piqure
Des dards brulants assiégeant son écorce

Venue l’automne, celle-ci se rida
Il courut alors se mettre à l’abri
Derrière les nuits rafraichissantes
Où naissent les champignons

Puis vint la fin, la chute, le dénuement
Il vit s’enfuir ses pellicules
Tomber les cheveux décolorés
Et il resta nu devant l’éternité
Avant de sombrer dans l’hiver
Enfilant sa robe de mariée

Ce fut alors un nouvel envol
La sève monta entre ses jambes
Il esquissa quelques pas de danse
Qui firent monter les bourgeons
Et le para de mille scintillements
Les pointes vertes de son désir s’épanouirent

Voyez comme est belle cette saison
L’amour vient et vous saute à la gorge

Et à nouveau de ses bras tendus
Il chatouilla les cieux
Et les fit rire aux éclats

©  Loup Francart

04/10/2015

Roselyne

Un prénom informel, ligne et pétales
Cela fait une enfant, délicate et chantant
Presqu’un courant d’air, au comportement royal
Quelle rose tiendrait devant ce trait béant

Le nez grec comme il se doit pour un tel prénom
Elle courait partout, virevoltant, secrète
Apparaissant seule comme un caméléon
Parée de mille couleurs et si gentillette

Oui, c’est l’enfant trouble, au regard perturbé
Elle secoue ses talents et fait trembler l’abbé
Qu’a-t-elle de plus que son caractère enjoué ?

Non, répond-elle radieuse. Je suis la bise
Qui sous la porte glisse ses vocalises.
Cours derrière moi et laisse-toi enchanter !

©  Loup Francart

24/09/2015

Perdue

Son but à portée de main, elle plongea,
Nue et vierge du passage des eaux.
Elle sourit aux crêtes blanches des vagues.
Elle n’en ressortit pas…
Parvenue au centre de la sphère,
Elle se tourna vers le ciel.
Mais il était loin, voilé et discret
Comme le vol de l’oiseau.
Elle avait découvert le pli
Dans l’espace intérieur
Et s’y installa sournoisement
En attente d’un occupant.
Plus rien ne lui permettait
De courir derrière les ondes
Et d’en tirer profit.
Quelle écervelée !

21/09/2015

Odeur

Le paradis… ce lilas qui touche l’âme
Entre deux souffles de brise discrète
Coin de ciel entre les nuages gris
Qui dit : « Respire et va sans but ! »

Le nez au vent tu vas…
Cours aux senteurs du matin
Grise-toi des nuées du raisin
Rampant en pourritures nobles

En passant au pied du ruisseau
Jette ton appendice entre les herbes
Que le barbeau opère son demi-tour
Vers le marais putride

En odeur de sainteté il est parti…
C’est tout ce qu’on en retient
Un brouillard de sentiments
Et la tristesse d’un flacon vide

Combien de fioles as-tu usées
De la senteur des champignons
A celle des bouses animales
Jusqu’à l’acidité des rencontres

Et de toutes ces émanations
Ne manque que celle du paradis
Un bouquet léger mais grisant
Qui emporte l’âme dans l’au-delà

17/09/2015

Hôpital

Un hôpital a de grands yeux
Qui s’ouvrent sur la folie des infirmes,
De ceux pour qui le monde n’a pas d’odeur,
De ceux pour qui le monde est un trou noir,
De ceux pour qui les bruits restent secrets.
C’est une plaie béante sur la pauvreté,
Non de l’argent mais des humains déprimés.
Des flacons, des odeurs, des couleurs
Y vivent en harmonie
Pour complaire au malheur.
Du haut des plafonds
Arrive l’écho des plaintes
De douleur ou d’orgueil.
Il s’y imbibe en cercles ronds
Qui s’élargissent en ondes
Et se contredisent en préséance.
Seul le muet ne peut rien dire,
Mais ses convulsions montrent bien
Qu’il veut défendre son droit.
La douleur reste indifférente
A qui la côtoie chaque jour.
J’ai vu des hommes
Rire de la forme d’une blessure,
D’autres pincer pour entendre crier.
Seul reste, avec sa tristesse,
Le pinson suspendu dans sa cage,
A l’entrée de l’hôpital.

©  Loup Francart

12/09/2015

Trou noir

Il enserre dans ses griffes l’espace
Il le chiffonne de ses soubresauts
Et crée des perturbations incontrôlées
Le puits s’ouvre dans la courbure
Il tombe selon sa densité
Et se referme sur lui-même
Plus rien n’en sort
Même pas une parole divine
Le mystère reste entier
Où donc est passé le temps ?
Ce trou dans l’espace est-il
Creusé par le doigt de Dieu
Dans une motte de beurre ?
Même la matière a disparu
Plus rien n’est apparent
Et cet invisible est pourtant
Aussi surement que je suis
Immatériel, dans un corps matériel

©  Loup Francart

05/09/2015

Attente

Ne rien chercher ! Ne pas penser !
C’est ainsi que viennent les idées
Quelle drôle de façon de trouver.
Y a-t-il des possibilités d’avancer ?

Laisse travailler en roue libre.
Ne te perd pas en recherche fébrile.
Retrouve un propice équilibre
Et soupèse arme et calibre.

L’idée vient lorsqu’elle est prête.
Elle dévoile sa fumée joliette
Et signale sa venue dans l’oreillette.
De pique-assiette, elle devient rondouillette.

Alors détend-toi, le regard à l’horizon.
Peux-tu te croire  ainsi en prison ?
Rien. Ne pense à rien. Pas de trahison.
Juste : attend la prochaine lunaison.

Tout viendra sans peine ni reproche.
Nul besoin d’engeance ou de taloches,
Tout se passe dans la caboche.
Et quel bonheur que cette approche !

©  Loup Francart

01/09/2015

Pleine lune

Le rayon m’atteint l’œil…
Réveil et illumination !

Les astres sont bouleversés
Ou mon horloge interne
Fait preuve d’ivresse…

Regard au bras : deux heures…
Jour comme dans un four,
Je brûle d’un coup de lune…

L’esprit bouleversé, je m’étonne.
Est-ce le don de voir sans soleil ?
Comme l’ange, je courre
Dans l’herbe mouillée des prés
Et m’étonne de cette glisse
Dans les nuages de la nuit…

Ainsi le blanc de l’œil
Est seule partie visible
Des corps en perdition
Dans cette "ouateur" incertaine…

Avance aux yeux de l’éternité…
Et, envole-toi plus loin
Dans la chaleur du rien…

©  Loup Francart

29/08/2015

Haïku

Le haïku pourrait être un texte développé, mais il ne l'est pas et c'est là toute sa toute force évocatrice. (…) D'une sensation qui peut être une expérience unique et, éventuellement, donner naissance à un texte élaboré recréant un certain univers, le haïkiste, dans son poème à la fois bref et ouvert, ne garde que le flash initial. C'est là son défi, c'est là son art.

 (André Duhaime, from http://clicnet.swarthmore.edu/litterature/moderne/poesie/duhaime.html)

 

Glace de l’été
Dans l’eau, au petit matin, gelé
Vous courrez. Chauffe-moi 

©  Loup Francart

25/08/2015

Zéro

Est-ce un chiffre ?
Est-ce un concept ou un mirage ?
Il est attirant, comme l’hypnose.
On se concentre dessus et on flotte.
Rien ne peut vous occuper autant l’esprit
Que ce Zéro qui est sans exister.

Indiquer qu’il n’est rien, est-ce une solution ?
Cela peut, mais Zéro, virgule, quelque chose
Qu’est-ce ? Un souffle d’inepties.
S’il y a quelque chose, c’est forcément Un.
Peut-il y avoir moins que Un ?
S’il n’y a pas Un, il y a Zéro, c’est-à-dire rien.
Il y a soit une chose, soit son contraire,
Mais pas les deux qui feraient trois.
Supposons qu’entre le Un et le Zéro,
Il y ait la moitié d’un Un.
C’est bien une chose en soi cette moitié !
C’est donc bien un Un appartenant à un Deux.
Toute chose divisible fabrique une autre chose
Qui est pleine et entière, donc Un
Et ce Un appartient bien à un autre Un
Pour former un Deux plein et entier
Le Un devient alors Trois et ce nouveau chiffre
Est un ensemble qui forme un autre Un
Différent de tous les Uns existant.

Ah, quelle migraine !

On peut additionner le Zéro à un Un
Voire Deux ou mille
Cela donne un, deux ou mille.
Mais Un plus Zéro égale Un,
Et Un plus Un plus Zéro égale deux,
Alors que Un multiplié par Zéro égale Zéro.
Quant à Un divisé par Zéro, n’en parlons pas,
C’est un néant inimaginable !

Mais revenons à 0,5 ?
Est-ce quelque chose que cette moitié de chose ?
Soit cela n’existe pas, et c’est bien Zéro ;
Soit cela est, et c’est Un, puisqu’il existe.
Compter, c’est commencer par Un,
Puis deux, puis trois, puis mille,
Jusqu’à un Infini inimaginable
Qui ne forme qu’un Un pour le Créateur.
Lui-même est un autre Un,
Et ces deux Un ne font pas deux,
Ils font même plus que l’Infini.
Ils sont Tout, comprenant le Rien qui n’existe
Que parce qu’il y a au moins un Un.

Dieu, quelle migraine multipliée !

Et que dire lorsqu’on pense aux contraires
Moins Un est-il le pendant de Un ?
Peut-il y avoir moins quelque chose
Qui fasse un quelque chose inversé ?
Le Zéro n’est alors qu’un col ou un canyon
Qui permet à la nature
D’assouvir sa soif d’exister.
Si je ne suis pas, je suis malgré tout.
Si l’infini est là, y a-t-il un autre infini
Qu’on ne peut saisir ou imaginer ?
Quand je pense qu’il y a un moi-même
Qui me regarde et me juge et rit
Et s’amuse de ces incompréhensions.
Qu’est-il pour se moquer ainsi ?

Oui, c’est faux. De vrais maux de tête !

Il est trois heures.
Tient, là aussi, quelle bizarrerie !
Trois heures, c’est une heure dans la nuit,
Une seule. Il n’y a pas deux trois heures.
Et pourtant on n’écrit pas trois heure.
On ajoute un s à heure parce qu’il y en a plusieurs.
Mais plusieurs quoi ? Plusieurs heures
Ou une seule trois heures ?
Trois heure (s) est bien seule,
Mais elle est trois.

Ce n’est plus la migraine,
Mais l’anéantissement…

Dormons !

©  Loup Francart

21/08/2015

Une vie

Une vie : faire le tour de la scène
A trois cent soixante degrés
Tout contempler, tout tâter
Rien ne doit être oublié
La vie est là pour nous ouvrir
Nous façonner, nous propulser
Vers une autre connaissance
Après l’épuisement de celle du monde
Votre motivation ?
Non, pas le succès auprès des hommes
Mais cet éclair sur le tout
Qui vous ouvre au rien
Et ce rien devient l’infini
Un fini multiple et fuyant
Qui s’écarte et donne à voir
L'abîme d’inconnaissance
Le cosmos lui-même ne peut
Expliciter ce vide immense
Qui envahit le cerveau
Et donne la chair de poule
Suspendu dans l’éther
Vous naviguez au gré des courants
Joie, crainte, bonheur même parfois…
Mais peu importe ces ressentis
Au fond de vous se cache
Ce Soi qui vous n’arrivez pas à saisir
Mais que vous entrevoyez là
A portée de main
Minuscule
Grandiose
Soi et Lui
Ensemble
Un…

©  Loup Francart

17/08/2015

Vieillard

C’est un tas de chair, ramassé sur lui-même,
Aux jambes jadis allègres, mais fatiguées,
Qui regarde vivre, germer les baptêmes,
Les yeux las, la main tremblante, l’espoir volé.

Il croît encore en lui, cet être rhumatisant.
La rosée le réveille, il précède la nuit,
Et pendant l’ivresse du repos bienfaisant,
Il danse, offert aux douze coups de minuit.

Le futur se rapetisse et s’envole.
L’ombre des amours perdus devient frivole.
Où donc as-tu la tête, toi, l’émasculé ?

Crédule, tu confonds infini et néant…
La seconde s’étire en se déjugeant.
Le grand Tout ouvre son manteau immaculé.

©  Loup Francart

13/08/2015

Pages poétiques

Dimanche dernier, pages poétiques au château de Bourgon dans la grande salle.

Au menu, introduction des textes (poèmes ou récits) par quelques morceaux de musique :

* une improvisation sur les touches noires, suivis du poème « Absurde » ;

* une improvisation de jazz suivi d’un texte humoristique « Les hérons » ;

* le poème « Désir » :

* la valse n°2 de Beethoven suivie du texte « Musique et émotion » ;

* le poème « Instant » ;

* La sonate n°  de Mozart, suivie de l’ « Eté » ;

* le poème « Loup » ;

* Le texte « La dernière traque » ;

* une improvisation classique andante, suivie du poème « Enfant » ;

* le texte « Homme et femme » ;

* le poème « Nuit » ;

* le texte « Le chat » ;

* l’Aria des variations Goldberg de JS Bach, suivie du poème « Ame » ;

* le texte « Le pianiste » ;

* Le poème « Un instant d’éternité »

* la valse n°3 de Beethoven, suivie du poème « Merci ».

 

Quelques photos :

 

 

11/08/2015

Néant

As-tu considéré les pleins qui t’entourent ?
Entiers, ils se multiplient par identité.
Il existe aussi son contraire, l’absence
D’une multiplication incontrôlée.
L’unique reste l’unique, sans partage.
Et ces uniques sont cependant milliards.
Dans ce cas, l’existence n’est que mort et déclin
Puisque l’unique meurt aussi parce qu'humain.
Est-ce possible ?
Peut-il exister cette tension vers le néant
Qui se traduit par le vide spatial,
Mais dans lequel le temps et l’espace
Restent présents, immuables.
Mieux encore, peut-on imaginer,
Au-delà du vide impensable,
Ce néant mythique qu’aucun être,
Plein de lui-même et de chair,
Ne peut concevoir sans dissolution ?
Plus que le vide, le néant envahissant
Peut-il détruire toute velléité
D’engendrement par identité
Ou de remplacement par son contraire ?
Imaginer le néant c’est mourir à soi-même
Et franchir la ligne d’un autre monde
Où rien n’est semblable au tout.
Qui gagne à ce jeu stupide ?
Nul ne le sait. Tout contre rien,
La lutte du Un contre le Zéro,
Du désirable contre l’indésiré,
De la vie face à la mort,
Ou un simple changement d’état
Comme un éternel recommencement.

©  Loup Francart

06/08/2015

Pellicule

Il y a longtemps que je n’ai exploré et franchi
Ce qui sépare la vie extérieure de la vie intérieure
Ce no man’s land  où la pensée n’est plus
Où seuls comptent les sensations et sentiments
Qui courent comme un courant électrique
A la surface interne de sa paroi transparente
Frissons et sérénité, que choisir ?
Pour les uns, seul l’extérieur est tangible
Pour les autres la vie est en dedans, unique
Dans ce désert inqualifiable de vide
Brille un feu follet servant de guide
Suis-le… Va tranquille et meurt au monde
Pour renaître solitaire à toi-même
Et sacrifier le vieil homme. A mort,
Celui qui se pare de mille propriétés
Et de brillance d’allure et de paroles
Plus rien ne doit désormais flotter
Dans l’espace où l’homme se dénude
Et laisse voir sa condition humaine
Offerte à tous sans distinction
Cette pellicule de verre incassable
Laissant passer la lumière de part et d’autre
Seule une fausse pudeur et la crainte
Empêche le mouvement de l’extérieur
Vers l’intérieur, secret et ouvert à tous
Mais n’oubliez pas votre parachute
Car la chute est libre et l’atterrissage violent
Votre amour propre en prend un coup
Alors… Bon voyage !

©  Loup Francart 

02/08/2015

Retour

Elle est de retour, celle qui partit
Un jour d’avril au fil de l’indifférence.
A-t-elle dit pourquoi elle a fui,
Pourquoi elle s’écarta de la bienveillance ?

Nul ne le sait si ce n’est elle.
Elle est rentrée la tête haute,
Vêtue comme une demoiselle,
Propre et vierge de toute faute.

Le mystère reste entier.
Où donc est-elle allée,
A qui s’est-elle offerte ?

Nul ne connaît son destin.
Ne l'a-t-elle pas pris en main?
Debout et grandit, elle est ouverte.

©  Loup Francart 

28/07/2015

Festival International du Livre Militaire

Errance entre les piles
L’œil attiré par la couleur
Plutôt que par un titre.
Ça parle, ça parle
Et ça regarde, compulse…
Acheter que nenni.
Discrètement refermé
Le livre retourne à la pile
Qui monte, descend, remonte.
Certains cependant ont les bras chargés
D’un échafaudage inconsidéré
Qui tombe inutilement entre leurs pieds.

Temps mort…
On parle entre nous, de nos efforts, de nos peurs,
Rarement de nos joies.
On ne retient que les difficultés.
Et pourtant… Qu’il est bon d’écrire
Au petit matin quand tout dort,
De dire le monde et les autres
Et sans doute un peu de soi-même

Ecrire : oui…
Ecrivain… Non…

Quel ennui cette foule
Qui passe et repasse sans voir,
Jette un œil miséreux sur vos piles,
N’entrouvre même pas un livre.
Vous êtes devenu transparent,
Un objet derrière les livres
Que l’on contemple sans le voir.
Y a-t-il un auteur dans la salle ?

 Coëtquidan, le samedi 25 juillet 2015.

 

 

 

 

25/07/2015

L'été

Le lent écoulement des jours d’été
S’étire entre mouvement et mémoire

Le soleil n’arrête pas de tourner
Au-dessus des têtes chargées de rire

Les gestes soupirent de lenteur
L’œil clair regarde l’éclat tendre
D’un enfant courant sur le pré

Les mères sourient d’indulgence
Les pères regardent l’avenir immobile

Tout est figé, blanc et moite

Seuls quelques oiseaux s’étirent
Dans la douce glissade du souffle
D’un jour comme les autres

Et ce ralenti dure… dure… pur
D’absence de vie et de paroles

Chacun se regarde vivre
Clos dans son enveloppe corporelle
Comme un cocon résonant
Des sons perdus d’autrefois

Suis-je encore ? Et elle, est-elle ?

On se confond d’un air familial
Le cœur en un azur unique
Vide de toute prétention

Combien est-on ? On ne sait
Le nombre importe peu
Seul compte la présence multiple
D’un amour tranquille
Dans le tremblement perceptible
De l’air d'un jour d’été

©  Loup Francart 

21/07/2015

Opprobre

Ici, rien n’est semblable
Le poil devient plume
La tonne est légère comme l’air
Le papier transparent
Est carreau aux fenêtres
Toi-même as-tu encore un visage ?

Oui, toujours je resterai
Semblable à la vigie
De marbre blanc, tendue comme un arc
Le doigt pointé sur toi
Accusant nos passions communes
Et la froideur de nos rencontres

Sommes-nous condamnés
A vivre en un monde déjanté
Où le blanc devient noir
Le chaud aux pôles
La glacière sous les pieds
La gorge emplie de fiel

Elle est là, à portée de mains
Environnée de vertus
Elle court en toute liberté
Et chante d’une voix claire
« Délivrance, délivrance
Partons en d’autres lieux ! »

Il est mort l’enfant sauvage !
Le policé a revêtu sa robe
Il encourt mille peines
Mais n’a pas peur de l’opprobre
Applaudi, il court vers l’horizon
Pour s’évanouir sur sa ligne

Le monde s’en est allé
L’amertume gagne nos lèvres
Pourquoi mêler nos doigts
Pourquoi baiser nos lèvres
Si déjà finit cette page d’histoire
Dans la marche du temps