20/03/2011
Au matin, à peine réveillé
Au matin, à peine réveillé
Quand on n’a pas encore remonté
L’immense rouage de la conscience
Les gouttes s’évadent du toit
Avec patience
Une à une, elles tombent sur la roue
Encore malhabile et bloquée du ressort
Qui s’étire lentement. Il ya parfois des fous
Qui n’ont plus d’eau dans leur moulin
Ironie du sort
L’heure la plus chaleureuse, attendue du plaisir
Celle où l’invisible cycle s’évade de la nuit
Contre tout pouvoir, comme le navire
Est-ce ce premier instant où j’ignore
Le haut du puits ?
07:24 Publié dans 42. Créations poèmes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poése, poème, littérature | Imprimer
19/03/2011
Une tasse de thé, au matin
Au matin, lorsque rien encore ne bouge, ni dans la maison, ni même au dehors, parce qu’il est tôt et que la nuit continue d’envelopper les rêves des dormeurs, je me lève, l’esprit éveillé, heureux de cette nouvelle journée qui commence. Je descends l’escalier, je traverse les pièces du rez-de-chaussée, sans allumer parce que j’aime ce défi de l’enfance de marcher dans le noir sans toucher les meubles et objets qui les encombrent, avant d’atteindre la cuisine, refuge initial du matin.
Pendant que les ampoules tardent à éclairer correctement tout ce qui n’est pas dans un cercle proche (oui, ce sont des ampoules basse consommation, tellement basses qu’elles peinent dans un premier temps à éclairer), je mets de l’eau fraiche dans la bouilloire et attends que ses premiers sifflotements se soient fait entendre pour ouvrir la porte du buffet, encouragé par son odeur de vaisselle propre, et sortir une tasse, une soucoupe et une cuillère. Je vais ensuite chercher un sachet de thé dans le placard qui abrite des trésors de futurs festins, pendant que la pièce s’éclaire d’une douce lumière et dévoile les secrets de ses recoins. La bouilloire enfin arrêtée se tait.
Alors commence la délicate activité de l’infusion du thé dans l’eau chaude. Celle-ci commence faiblement par une lueur à peine orangée qui se dissout au fond du bol, puis s’élargit en nuage intérieur, l’eau restant claire sur les bords alors que progressivement sa cavité se colore d’une couleur indéfinissable en perpétuel changement. L’odeur du thé envahit les narines, dilatant les bronches, caressant gentiment les sens jusqu’à les envelopper d’un engourdissement provisoire, avant de s’évaporer dans la lueur de l’ampoule situé au dessus de la table.
Après avoir plusieurs fois sorti le sachet, laissé le contenu de liquide s’écouler dans la tasse, diluant un nuage plus foncé que celui du breuvage initial, puis l’avoir laisser tomber à nouveau dans l’eau de plus en plus colorée de celui-ci, geste qui me rappelle celui du goupillon que l’on trempe dans le bénitier pour saluer une dernière fois celui qui est passé de vie à trépas, je pose le sachet sur un coin de l’évier comme une dépouille molle et sans couleur qui n’a plus d’utilité mais que l’on pourrait peut-être réutiliser s’il s’avérait que le breuvage n’est pas suffisamment fort ou parce que j’aurais ajouter un peu d’eau après en avoir plusieurs gorgées. J’arrête alors toute spéculation gestuelle, attendant que le breuvage soit buvable, c’est-à-dire moins chaud. Instant d’innocence ou d’impatience, quand le désir ne peut être satisfait dans l’immédiat et qu’il convient de laisser le temps user les secondes dans la torpeur matinale. L’infusion de thé fume, envahissant le halo de lumière du plafond d’un brouillard léger et tiède. Pour m’occuper, je regarde au dehors la nuit qui peu à peu s’ouvre d’une mystérieuse blessure, comme une fente dans sa chair, et laisse apercevoir la ligne d’horizon, qui se réduit à une dentelle d’arbres au loin, dans un pays encore inconnu des dormeurs.
Impatient, je hume les effluves sortant de la tasse, me rapprochant de celle-ci jusqu’à la toucher délicatement, du bout des lèvres, prudemment, comme un baiser sur la joue d’un enfant, dont l’odeur aigre est la conséquence de ses jeux endiablés dans le jardin. Mais la puissante chaleur de la boisson m’incite à une grande prudence, comme la crainte et le désir de toucher un cadeau qui ne vous a pas encore été donné. Attendre encore un peu que je puisse tremper mes lèvres dans ce breuvage odorant, odeur sucrée de feuilles et de fruits sur laquelle traine malgré tout le goût du foin en juillet à la tombée de la nuit, mais de manière presqu’imperceptible. S’il est trop chaud, le liquide ne laisse plus diffuser ce parfum qui est remplacé par une impression de brûlure. Attente donc, avec un regard sur le levée du jour, comme un halo dans une vision trouble parce qu’indéfinie en raison du manque de clarté.
Reprise de la tasse, les doigts sur le haut de la courbe, à l’endroit où se posent les lèvres, en raison de la chaleur extrême de sa cavité arrondie et plus encore de son fond qui repose sur la table et y laisse une empreinte de vapeur faite de petites bulles très légères, qui éclatent autour des poussières déposées sur l’horizontalité du bois. Je trempe les lèvres sur la surface du liquide ocre rouge, aux reflets parfois orangés, frontière entre l’air et l’eau, infime partition des éléments dont on a du mal à définir l’exacte lieu du passage entre l’un et l’autre, jusqu’à ce qu’à l’aspiration ténue, je sente monter vers le palais le parfum odorant des fruits chauds avec cet arrière goût d’herbes sèches qui restent le souvenir de ces premières gorgées, à l’aube, au sortir de l’hiver. Je ferme les yeux et me laisse pénétrer par cette lente ouverture intérieure qui empoigne l’être lorsque l’invisible se dévoile subrepticement quand on ne l’attend pas. Alors éclate une nouvelle appréhension de la vie, de ces instants privilégiés du matin, qui donne au jour nouveau un goût d’inattendu et de pourtant connu. Ce n’est pas la madeleine de Monsieur Proust, mais la joie toujours renouvelée d’un instant où tout bascule vers un monde où l’intérieur et l’extérieur se confondent dans une même vision de plénitude ressentie intégralement.
Mais le thé est encore trop chaud pour être réellement bu. On n’en saisit que quelques subtiles impressions qui ne peuvent se transformer en félicité. Frontière indescriptible, parce qu’inappréciable physiquement, entre le moment où le thé est encore trop brûlant pour être bu en chaleureuses gorgées et déjà trop refroidi pour être apprécié dans l’intégralité de son arôme. Ce moment passe sans que l’on prenne conscience de son passage, et, soudain, le thé devient un breuvage comme les autres, que l’on boit par habitude parce qu’il faut boire quelque chose le matin avant de faire sa toilette et de se vêtir des vêtements appropriés à ce qui est projeté de faire. On le boit alors à grandes gorgées, tentant de retrouver la senteur paradisiaque dont on s’était promis de jouir lorsqu’il était encore brûlant. Et bientôt, reposant la tasse déjà tiède sur la table, on ressent une impression d’absence au plus profond de soi, comme un rêve que l’on a laissé filer par inadvertance ou besoin de sommeil. Alors l’on se lève, encore un peu alourdi par les restes de sommeil, mais surtout par cette insatisfaction que l’on ne peut maîtriser : trop chaud, trop tiède, où se trouve le juste milieu ?
07:24 Publié dans 11. Considérations diverses | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : réveil, matin, thé, rêve | Imprimer
18/03/2011
Mandala
Le terme Mandala signifie « cercle ». Plus largement, un mandala est un support de méditation, composé de triangles, de carrés et de cercles imbriqués qui modéliserait notre nature profonde de manière inconsciente.
En fait, il représente l’ordre du monde avec ses quatre points cardinaux et laisse apparaître plusieurs plans successifs qui correspondent à nos diverses personnalités. Le centre du mandala représente l’unité fondamentale de l’être autour de laquelle se construisent ces différents moi.
D’après C.G.Jung (1875-1961), le mandala symbolise, après la traversée des moi, la découverte du noyau spirituel de l'être, le Soi, aboutissant à la réconciliation intérieure et à une nouvelle intégrité de l'être.
06:08 Publié dans 22. Créations numériques | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : dessin, peinture, méditation, art oriental | Imprimer
17/03/2011
Un tableau, c’est une sorte de prière
Un tableau, c’est une sorte de prière qui naît de la contemplation de la beauté du monde. Quel qu’il soit, son dessein est toujours d’exprimer cette beauté à travers une multitude d’impressions et d’expressions. C’est la prière du simple, une prière manuelle. Mais elle nécessite une attention intense du corps et de l’esprit entièrement tendus vers l’œuvre à réaliser. Tension difficile à vivre, car elle n’a d’achèvement qu’au sortir d’un processus de transformation intérieur qui conduit de l’insatisfaction existentielle à la plénitude hors du monde matériel. L’artiste n’a pas conscience de cette transformation lorsqu’elle se produit. Ce n’est que plus tard, lorsque l’apaisement interrompt le processus, qu’il concède cet allègement et y trouve le bonheur de la création.
Le tableau achevé apporte un goût de joie et de paix. On ne peut bien peindre que sous l’emprise de l’infini, c’est-à-dire après avoir ressenti l’insuffisance du bonheur matériel ou la nécessité de s’élever à un bonheur autre. « Participant de la création », tel est l’objectif final de l’artiste, le plus souvent inconsciemment.
Cette création est offerte à tous, librement. Mais pour l’apprécier, en tant que public et admirateur, il faut soi-même se recréer, s’ouvrir, quitter son habit terne, pour permettre la reconstruction d’une réalité nouvelle, celle que nous donne l’artiste.
« Quel que soit sa manière et quel que soit son sujet, un artiste s’exprime toujours avant tout soi-même (…). Il nous confesse sa sensualité ou son goût du spirituel, la sensibilité de ses yeux ou l’intensité de ses visions ; il nous montre sa fougue ou sa réserve, sa poigne ou sa délicatesse, son orgueil ou son humilité, la passion, les tourments ou la paix de son âme. Et ses œuvres contiennent non seulement ce qu’il avait décidé d’y mettre, mais aussi ce dont il les a chargées inconsciemment, ce qui s’est exprimé obscurément par le travail de sa main. Il y est engagé à la fois comme individu et comme membre d’une société, comme représentant d’une époque. »
(Joseph-Emile Muller, L’art moderne, Librairie générale française, 1963)
07:41 Publié dans 21. Impressions picturales | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : peinture, dessin, art, sens | Imprimer
16/03/2011
L'engrenage
Réminiscence du "troisième homme", film de Carol Reed, dont la musique géniale et entêtante, ainsi qu'un décor extraordinaire d'égouts et de ruines dans la capitale autrichienne lui donnent une atmosphère unique. Réminiscence aussi du roman de Franz Kafka, "Le procès" (The trial), mis en scène par Orson Welles en 1962, avec Anthony Perkins.
Linogravure réalisée entre le décor du film, au premier plan, et un fond de paysage marin ouvrant sur l'infini pour montrer qu'au delà de la condamnation et de l'enfermement, chaque homme reste libre en lui-même.
07:03 Publié dans 25. Création gravures | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : gravure, dessin, cinéma, liberté | Imprimer
15/03/2011
Cet instant imprévu et subtil
Cet instant imprévu et subtil,
Quand la grisâtre odeur d’un ciel d’hiver
Dresse devant nous le souffle
D’un irréel sentiment d’ouverture,
Comme une respiration dans l’air
Ou une apnée prolongée et opacifiante.
Alors, transformation du paysage !
Le vert devient rouge, le jaune se détache
De murs sales et fripés d’ombres.
J’ai par magie laissé le poids
D’années lourdes des tracasseries
Des professionnels de l’ennui,
Du travail méticuleux et attachant,
D’obligations impératives
Et de contacts permanents
Avec les autres fantômes
D’un système qui tourne sur soi-même.
Aujourd’hui, devant moi,
S’ouvre la consistance du rêve,
La palpable vertu de l’inconnu.
Comme un aveugle les bras tendus,
Je cherche, au devant, dans l’obscurité,
La faible caresse de l’inavouable.
Perception d’un instant unique,
Celui d’un achèvement prévu,
Attendu et confondu parmi les songes,
Pour une renaissance émerveillée
A l’instant éternel et envoûtant
D’un jour semblable aux autres,
Comme une brume d’enthousiasme
Sur la pâleur du monde.
06:22 Publié dans 42. Créations poèmes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : poésie, poème, littérature, métamorphose | Imprimer
14/03/2011
Vivre en contemplation
Vivre en contemplation,
N’est-ce pas se contempler soi-même,
N’est-ce pas se regarder dans le miroir
De l’étang qui lui-même reflète l’éclat du soleil ?
J’examine mes sensations diverses,
Je les analyse selon les rencontres,
Celle d’un éclat reflété sur l’eau,
Celle d’un cri dans le silence du vent,
Celle d’un canard qui s’envole à mon approche.
Et de tout cela je me construis,
Je me reconstruis, brisé en mille morceaux,
Pour franchir le miroir des souvenirs
Jusqu’au silence bienfaisant de l’absence de pensée.
Au loin, derrière l’étang, dans les bois,
Des enfants jouent bruyamment.
J’entends leurs cris étouffés,
Des bribes de paroles et de rires,
Sans pouvoir discerner le lieu de leur présence.
Puis à nouveau, le silence,
Entrecoupé d’un tressaillement de moteur
Et prolongé par le frémissement de la bise.
Silence. L’eau même s’immobilise
Et se pare de petits scintillements
Qui constituent autant de reflets
Des pensées qui partent au fil de l’eau.
07:43 Publié dans 14. Promenades | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : méditation, promenade, contemplation | Imprimer