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02/06/2013

La Loire

La Loire toujours nouvelle, jamais la même, renouvelée chaque jour…

Aujourd’hui mélancolique, elle se prête au mystère de l’eau et de l’air mêlés. Le brouillard environne son image et trouble la perception. Seuls les bancs de sable gardent leur ardeur colorée.

 

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01/06/2013

La photo

Une photo… Un coup de pistolet dans la vie…
Prise sur le vif, elle éclaire l’instant
Sans dire cependant d’où tu viens
Où tu vas et quelle est ta destinée

Pour l’autre, tu es figé dans le sel
Expression d’un temps à jamais perdu
Et l’œil éperdu qui te contemple
Ne voit rien d’autre qu’un fantôme

Ce rectangle de papier glacé
Dans lequel tu as mis ton espoir
Devient lentement un cimetière
Dans lequel jaunit ton ardeur

Un jour, se fanera même cet instant
Ce sourire aisé que tu donnes au monde
Et ne resteront que ces images vieillies
Qui se gondolent dans une boîte de fer blanc

31/05/2013

L'art abstrait

Que signifie ce mot : "abstrait" ?

Il est assez curiart,philosophie,esthétisme,théorie de l'arteux qu’une des définitions du dictionnaire nous affirme : « qui n’est pas concret, qui relève de l’abstraction, qu’on ne peut pas voir, mais qu’on peut concevoir par l’esprit ». L’abstrait serait donc quelque chose que l’on ne peut voir, comme le carré blanc sur fond blanc de Kasimir Malévitch peint en 1918.

Pourtant l'art est perceptible et accessible aux sens. Alors que signifie les termes associés "art" et "abstrait" ? Pour aller plus loin, les rédacteurs du dictionnaire ajoutent donc : Se dit d’un art, par opposition à figuratif, qui ne représente rien existant dans le monde connu.  L’art abstrait puise sa source dans un monde non directement accessible. Cela ne signifie pas que ce monde n’est pas perceptible, donc matériel. Cela signifie qu’il faut non plus se contenter de contempler le monde, mais entrer en lui pour s’en imprégner et recréer sa vitalité. art,philosophie,esthétisme,théorie de l'art

On comprend alors le double mouvement de l’abstraction dont parle Dora Vallier dans son livre "L’art abstrait"[1] :

D’un côté, l’abstraction tend à être une science de la beauté conçue comme un ordre et une harmonie et c’est ce qu’on appelle l’abstraction géométrique.

 

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D'un autre côté, à partir de 1945, on assiste à une autre abstraction qui n’est plus la recherche de la forme, mais au contraire le désir d’exprimer, avant la forme et même en dehors d’elle, toute la richesse et la spontanéité de la vie intérieure, l’artiste se projetant sans écran dans son œuvre, et c’est ce qu’on a appelé l’abstraction lyrique ou informelle.

 

Dans les deux cas,  la création ne vient pas d’une reproduction de formes ou d’ambiance existant dans la nature, mais d’une véritable naissance intérieure, d’un volcan humain dégurgitant son feu interne. Et selon la nature de l’artiste, cette abstraction emprunte à l’esthétisme ou à la psychologie son expression : conceptuallisation (composition élaborée de formes décomposables) ou bouillonnement (accouchement de tendances qui finissent par créer une forme finale).

 


[1]Dora Vallier, L’art abstrait, Le livre de poche, 1967, p.17.

 

30/05/2013

Exposition Pierre Scholla du 16 mai au 28 juin 2013 à la Galerie Sinitude, Paris

Né en 1928, il étudie le dessin, la peinture, la lithographie et même le dessin industriel. Il est d’abord, au musée du Louvre, copiste de grands peintres : Fragonard, Boucher, Delacroix, Soutine, Van Gogh.

Il excelle dans des genres très variés : décoration, sérigraphie, affiche, fresque, maquette, etc. Il voyage : Etats-Unis, Cambodge, Grande-Bretagne, Italie. Cet éclectisme le fait peintre des extrêmes : portraits, abstraits proches de la calligraphie, natures mortes, portraits naïfs d’enfants.

Mais ce sont ses paysages qui possèdent un charme extraordinaire. Ils sont composés de dessins assez précis, à la manière des architectes, noyés dans des paysages simplifiés à l’extrême. De plus, nombreux sont vus d’une fenêtre dessinée de façon simpliste.

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Ainsi le sujet du tableau, généralement un lieu tel qu’un village, une maison, un monument, se trouve isolé de son contexte par le fait que celui-ci est stylisé jusqu’à devenir abstrait, neutre, non émotionnel, telle Notre-Dame de Paris, engloutie entre terre et ciel.

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 D’autres fois, cet environnement représente d’assez près la réalité, mais reste suffisamment stylisé pour donner un effet à la fois naïf et indépendant. Le sujet reste planté là, déconnecté du paysage, comme collé sur celui-ci.

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La fenêtre fait partie du décor, à tel point qu’elle prend la couleur du paysage : ici verte comme les bois et les prés, là bleue pour augmenter le contexte abrupte et montagnard du sujet. 

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Il lui arrive même d’en oublier le sujet. L’encadrement de la fenêtre devient le sujet, mais sans le dire nettement. C’est sans doute un peu pauvre, mais cela peut charmer certains.

 

 

Allez, laissons notre regard s’évader vers l’horizon de sable et d’eau derrière cette tour du mont Saint Michel et rêvons … Oui, nous sommes bien sur les hauteurs mystiques de ce lieu entre ciel et mer.

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29/05/2013

Cantique de Jean Racine, de Gabriel Fauré

http://www.youtube.com/watch?v=HV09me1sg78

 

 

 


En ré bémol majeur, la pièce, composée en en 1864 alors que Fauré n’avait que 19 ans, débute par une partie d’orgue ou de piano (ensuite orchestrée) qui annonce la mélodie, presqu’une berceuse ou un rêve. D’une sensibilité extrême, elle ne correspond pas réellement, dans son style, aux paroles du texte, écrites dans la forme édulcorée de la littérature religieuse du Moyen Age.

C’est une prière magnifique chantée, avec des relents romantiques, qui sont marqués lors des reprises de l’orchestre entre chaque strophe.  C’est un cri d’admiration devant la toute puissante divine et sa tendresse, un cri d’amour éperdu que Gabriel Fauré exprime avec douceur et solennité.

 

Le texte de Jean Racine (1639-1699) est en fait une traduction d'une hymne médiévale en latin attribuée à St Ambroise (340-397) : "Consors paterni luminis".

Verbe égal au Très-Haut, notre unique espérance,
Jour éternel de la terre et des cieux,
De la paisible nuit nous rompons le silence :
Divin sauveur, jette sur nous les yeux.

Répands sur nous le feu de ta grâce puissante ;
Que tout l'enfer fuie au son de ta voix ;
Dissipe ce sommeil d'une âme languissante
Qui la conduit à l'oubli de tes lois!

Ô Christ ! Sois favorable à ce peuple fidèle,
Pour te bénir maintenant assemblé ;
Reçois les chants qu'il offre à ta gloire immortelle,
Et de tes dons qu'il retourne comblés.

28/05/2013

Matin

Trois gouttes d’eau s’élancent du toit

Elles s’étirent, puis se laissent tomber
Se poursuivant dans leur chute

L’une s’étale sur le ciré… bavure…
Elle éclate de rire et se rengorge
Morte, elle est perdue pour toujours

L’autre se noie au sein d’un géranium
Se laisse couler dans le terreau
Envahissant la moindre lézarde
Pour finir aspirée par une racine

La dernière, enfin, s’engouffre
Entre chemise et peau…
Frisson et recherche de la main
Mais déjà elle dévale le dos
Evitant les poils maigres

Trois gouttes d’infini
Perles rares d’un matin
Quel éveil endolori
Pour chanter en solitaire
La montée du feu
Qui consume les craintes

27/05/2013

La mort est mon métier, de Robert Merle

Ce n’est pas un roman, plutôt un récit : la vie de Rudolf Hoess, le commandant d’Auschwitz, racontée sous le pseudonyme de Rudolf Lang.  Ecrit en 1952, Robert Merle a utilisé les notes du psychologue américain Gilbert. Le plus curieux est l’absence presque totale d’impression et de sentiments du narrateur Rudolf. Il n’a qu’un seul leitmotiv : les Allemands sont des soldats et les soldats obéissent sans discuter, ni même réfléchir.

Son enfance pourrait expliquer cette vie sans pensée propre. Il est complètement dominé par son père qui est lui-même excessif dans tous ses actes, dont sa pratique religieuse. Rudolf, depuis que tu es en âge de commettre des fautes, je les ai prises, l’une après l’autre, sur mes épaules. J’ai demandé pardon à Dieu, pour toi, comme si c’était moi qui était coupable, et je continuerai à agir ainsi tant que tu seras mineur. Je fis un mouvement, et il cria : Ne m’interromps pas !

Après un drame à l’école et devant l’attitude de son père, il tombe malade. Allant mieux, il prend un premier repas avec sa famille et son père dit : – Et maintenant on va faire la prière. Père entama un Pater. Je me mis à imiter le mouvement de ses lèvres et sans émettre un seul son. Il me fixa, ses yeux creux étaient tristes et fatigués, il s’interrompit et dit d’une voix sourde : – Rudolf, prie à haute voix. Tous les yeux se tournèrent vers moi. Je regardai Père un long moment, puis articulai avec effort : – Je ne peux pas.

Il perd la foi. Mais il devient brancardier et fait connaissance avec un Rittmeister (capitaine). Il finit par s’engager. Se bat, est blessé et découvre l’amour avec une infirmière. Rendu à la vie civile, il fait de nombreux petits boulots. Il découvre  les S.A. et prête serment au führer pour sauver l’Allemagne.

Il est engagé par un colonel pour s’occuper de ses chevaux. Il se marie. Il poursuit ses activités chez les SS. Désormais, par conséquent, tout était parfaitement simple et clair. On n’avait plus de cas de conscience à se poser. Il suffisait seulement d’être fidèle, c’est-à-dire d’obéir. Et grâce à cette obéissance absolue, consentie dans le véritable esprit du Corps noir, nous étions sûr de ne plus jamais nous tromper, d’être toujours dans le droit chemin. Il s’installe à Dachau avec sa famille, puis est muté à Auschwitz : Je vous ai choisi, vous, à cause de votre talent d’organisation… et de vos rares qualités de conscience. (…) Dans quatre semaines exactement, vous me ferez tenir un plan précis à l’échelle de la tâche historique qui vous incombe. (…) Pour les six premiers mois, vous devez prendre vos dispositions pour un chiffre global d’arrivages se montant environ à 500 000 unités.

Rudolf Lang se pose la question le plus rationnellement possible : comment faire pour éliminer des milliers d’unités ? Il trouve des solutions sans penser un seul instant qu’il s’agit d’êtres humains. Vint la fin de la guerre. Il apprend qu’ils ont arrêté Himmler et qu’il s’est suicidé au cyanure. La douleur et la rage m’aveuglaient. Je sentis Georg me secouer vivement le bras et je dis d’une voix éteinte : – Il m’a trahi. Je vis les yeux pleins de reproches de Georg fixés sur moi et je criai : – Tu ne comprends pas ! Il a donné des ordres terribles, et maintenant, il nous laisse seuls affronter le blâme… au lieu de se dresser… au lieu de dire : « C’est moi le responsable ! » (…) Il s’est défilé, lui que je respectais comme un père. (…) Il aurait dit : « C’est moi qui ai donné à Lang l’ordre de traiter les juifs. Et personne n’aurait eu rien à dire !

Il est finalement arrêté et trainé de prison en prison. Je pensais quelquefois à ma vie passée. Chose curieuse, seule mon enfance me paraissait réelle. Sur tout ce qui s’était passé ensuite, j’avais des souvenirs très précis, mais c’était plutôt le genre de souvenirs qu’on garde d’un film qui vous a frappé. Je me voyais moi-même agir et parler dans ce film, mais je n’avais pas l’impression que c’était à moi que tout cela était arrivé.

Un lieutenant- colonel l’interroge : – Êtes-vous toujours aussi convaincu qu’il fallait exterminer les juifs ? –  Non, je n’en suis plus convaincu. – Pourquoi ? – Parce qu’Himmler s’est suicidé. (…)– Par conséquent, si c’était à refaire, vous ne le referiez pas ? – Je le referais, si on m’en donnait l’ordre. (…) – Vous n’éprouvez donc aucun remord ? – Je n’ai pas à avoir de remord. L’extermination était peut-être une erreur. Mais ce n’est pas moi qui l’ai ordonnée. – Depuis votre arrestation, il vous est bien arrivé de penser à ses milliers de pauvres gens que vous avez envoyés à la mort ? – Oui quelquefois. – Eh bien, quand vous y pensez, qu’éprouvez-vous ? – Je n’éprouve rien de particulier.

Histoire d’un homme ordinaire, d’un Allemand qui croyait en son pays et à l’obéissance. Devenu bourreau sans s’en rendre compte, il a exterminé des milliers d’hommes, de femmes et d’enfants sans prendre conscience de ce qu’il faisait. Et ce n’était même pas l’idéologie qui le conduisait, mais la simple bonne conscience d’obéir.

 

Les militaires français ont maintenant l’obligation légale de désobéir à des ordres illicites concernant des actes contraires aux lois et  coutumes de la guerre, des actes qui constituent des crimes et délits contre la sûreté de l’Etat la constitution ou la paix publique, ou encore des actes portant atteinte à la vie, l’intégrité, la liberté des personnes, ou au droit de propriété, quand il ne sont pas justifiés par l’application de la loi.