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14/04/2019

Haïku

 

L’horizon barré

Le tonnerre gronde au loin

Un coup de poignard

 

13/04/2019

Pluie de couleurs

Bleu du ciel
Vert des prairies
Jaune des sables
Turquoise des mers
Rouge des baisers
Blanc des corps
Vanille des jeunes filles
Pourpre de l’amour

Gris perle des flatteurs
Noir des vilénies
Violet des enquiquineurs
Zinzolin des pervers
Viride des indécis
Topaze des bilieux

Bleue nuit des fougueux
Vert impérial des classiques
Bisque des peureux
Abricot des tristes
Brique des têtus
Terre d’ombre des veules
Souffre des vantards

Elles peuvent être :
Chatoyantes comme un vitrail
Pâles comme la mort
Odorantes comme le jasmin
Mais elles ne sentent
Que la couleur que vous leurs prêtez

©  Loup Francart

12/04/2019

Sublimer

Tournant la tête

Fermant les yeux et les mains

Il la sublima

 

Elle partit sans peur

Prit part à la bataille

Et mourut sans foi

 

La femme était là

Se tenait rayonnante

sans pleurs ni raisons

 

poésie,poème,haïku

 

 

11/04/2019

Pluie de mots

Ouverte la main qui se tend

Obscène le visage de l’autre
Qui n’est plus toi-même

Séduisante la bouche qui profère
Et pépie à la face des hommes
La lente valse des souvenirs

Le panier de mots secoué en mains
Il sort sous la lune jeter le trop-plein
D’ivresse et de bonheur
A-t-il jamais rêvé ?

Elle se tient devant lui, blanche
Sur la réserve et éveillée
Elle tend ses lèvres entrouvertes
Et rit de voir l’effroi dans ses yeux
Où donc es-tu passé ?

Lente montée des sons
Brouhaha d’un passé révolu
Chaleur des mains sur la chair
Le tremblement du cœur exaspéré
A quoi peut bien servir
La dune des baisers perdus ?

Et maintenant, redevenu l’enfant
Marchant d’une voix rebelle
Il décline l’offre du bien-être
Et va affronter l’ombre obscure
Des réserves insoupçonnées
Qui courent sur le toit du monde
Et planifient le devenir

Quel jour quitteras-tu ce corps ?
Quand revêtiras-tu l’évanescence
Pui reviendras-tu pourvu de nouveautés
Pour plonger à nouveau dans l’absurde
Des jours qui chavirent devant l’inconnue
Chaque nuit, seul face au souvenir
De bribes de vie et d’absence de mots
Quand donc s’ouvrira la lumière ?

©  Loup Francart

10/04/2019

Humanité

 

Toute femme mérite de devenir ce puits de chaleur physique et moral

dans lequel l'homme puise sa force

 

 

Sans elle, rien n'existerait, la nature serait abandonné.

 

 

 

09/04/2019

Immémorial : Convento de Cristo (Tomar, Portugal)

L'entrée vue des remparts. Toujours aussi impressionnant. 

 

19-04-08 Tomar couvent (5 ter).JPG

 

La couronne de vertus
Surmontée du clocher de l’orgueil
Menacée par la nature
Et l’étouffement des pierres

Pourtant rien ne vient troubler
L’impressionnante assise
De ce couvent ouvert sur le bleu
Et tourné vers les étoiles

08/04/2019

Votre double

Accoutumée à se défier tout autant des sentiments qu’elle ressentait que de ceux qu’elle suscitait chez les autres, la jeune fille marqua devant moi un temps d’hésitation. (…)

Je ne dispose pourtant pas des mêmes qualités qu’elle. De vingt ans son aimée, sans prétention de beauté, vêtu comme un valet de ferme qui rentre les foins, aucun signe ne lui permettait de savoir qui j’étais ; je ne pouvais faire impression sur elle par aucun pouvoir ni artifice. Et pourtant, je le sais, elle a dans cet instant éprouvé un profond sentiment pour moi.  (…)  L’explication qu’elle m’a donnée n’a guère éclairci le mystère. Elle m’a, d’après ses dires, reconnu immédiatement  « comme son double ». C’est un mot bien étrange, je vous l’accorde, et jamais double ne fut plus dissemblable. Mais elle vivait dans un monde qui lui appartenait en propre et auquel le monde réel ne participait que peu. Sans doute était-ce le refuge qu’elle s’était créé pour se protéger des agressions de la vie. En tout cas, seuls entraient dans ce monde ceux qu’elle élisait en secret et j’eus le privilège douloureux d’y prendre une place éminente dès notre première rencontre.

Jean-Christophe Rufin, Le grand cœur, Gallimard, 2012, Folio p.322

 

C’est un sentiment violent que celui éprouvé en un instant pour quelqu’un que l’on n’a jamais vu et qui se révèle comme son double. Peut-être n’est-ce pas le mot juste. Mais existe-t-il un mot qui vous donne ce sentiment inconnu jusque là de connivence et d’aisance envers une personne de sexe opposé qui vous fait penser que vous la connaissez depuis toujours et qui vous attire avec autant de force et de mystère. Ce contact vous submerge de transparence. Vous changez d’être physiquement et moralement tout en ressentant l’impression de déjà vu, déjà entendu, déjà vécu avec cette personne, même si rien ne vous permet de dire quand et où vous pourriez l’avoir rencontré et aimé.

Elle avait quarante ans de moins, peut-être même un peu plus. Adolescente, elle n’était pas encore femme au plein sens du terme. Elle était vive comme l’éclair, discrète comme un poisson, indépendante comme un sauvage. Au premier coup d’œil, nous nous comprîmes, une étincelle au fond de l’être nous anima sans cependant qu’aucun n’ait un mouvement vers l’autre. Pas besoin de rapprochement, nous savions que l’autre était notre double intérieur : même sentiments, même réactions, même vision de son avenir, même respiration venant du cœur et de la pensée, même si notre vie extérieure est si profondément différente.

De telles intuitions sont rares. Elles n’arrivent qu’une ou deux fois dans la vie. Vous découvrez votre double qui vit une autre vie dans un autre contexte. Mais vous savez qu’il est vous-même. Quel choc ! Des années après vous vous en souvenez et ressentez un trou dans votre poitrine, un ouragan qui vous impressionne, vous dévaste et vous fait du bien malgré tout. Vous avez entrebâillé une porte inconnue et regardez ce que vous n’êtes pas normalement autorisé à connaître : le mystère de l’être avant la naissance et après la mort. Oui, vous n’êtes pas seul au monde. Des liens indéfinissables vous relient à d’autres dimensions dépassant vos capacités d’appréhension du mystère de la vie au-delà de la simple existence individuelle.