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10/02/2019

Coeur

 

art cinétique,optique art,art contemporain

 

Lueur à l'abri

L'être associé au damier

Fuit-il sa nature ?

 

09/02/2019

L'heure

Il y a des gens qui se targuent d’être toujours à l’heure. Ce sont généralement des craintifs qui arrivent au moins un quart d’heure en avance pour être certains d’être là au moment convenu. Pendant ce quart d’heure, ils tournent en rond, ne sachant que faire, sans cependant arriver à se préparer à ce qui les attend, plus occupé par l’heure que par l’objet même de la rencontre.

À l’opposé, il y a d’autres personnes qui ne peuvent, malgré toute leur bonne volonté, être à l’heure. Ils s’apprêtent en toute bonne foi, pensant au rendez-vous, se préparant même mentalement à cette rencontre, quelle qu’elle soit. Mais au dernier moment, il y a toujours quelque chose qui le retarde, un coup de fil, un mail à envoyer, l’oubli d’un mouchoir au fond de sa poche, un lacet qui lâche, l’arrivée d’un colporteur. Vous savez qu’il arrivera avec un quart de retard, jamais plus, mais également jamais moins. Vous pouvez avancer d'un quart d’heure le rendez-vous, il trouvera le moyen cette fois-ci d’avoir une demi-heure de décalage.

On trouve plus rarement les opposés extrêmes : tout d'abord, ceux qui vivent avec une montre dans le ventre. Cela se manifeste au moment du repas. Il est midi. À midi moins le quart, discrètement, ils manifestent une faim dont l’origine remonte à ce qu’ils ont fait dans la matinée. À midi moins dix, ils demandent où se laver les mains pour revenir à midi moins cinq en proclamant que cela sent bon près de la cuisine. S’il est maître de maison, il crie haut et fort à sa femme qu’il est temps de passer à table et il s’assied tout en discutant de façon à ce que chacun se sente obligé d’en faire autant. Ces gens-là ne peuvent supporter une minute de retard. Ils vont presque chercher le plat principal tellement la faim les tenaille. Mais une fois installés à table, ils négligent leur assiette et font la conversation.

Autre type d’extrêmes, ceux qui oublient carrément leur rendez-vous ou qui n’arrivent qu’avec une heure de décalage. « Tiens, j’étais persuadé que l’on s’était dit treize heures trente. Pardonnez-moi ! » Ils font comme si de rien n’était alors que les autres participants bouillent d’impatience, certains même prétextant une course urgente pour fuir ce rendez-vous manqué. Certes, ces personnages ne sont pas les premiers venus. Ils ont un emploi du temps de ministre, se restaurent avec un élastique et n’ont le plus souvent pas le temps de dire au revoir. « Vous savez ce que c’est, c’est le seul moment où j’ai pu obtenir un rendez-vous avec le président de la Chambre à coucher. La prochaine fois, promis, je resterai plus longuement. »

Car il y a en effet, des gens qui arrivent à l’heure comme tout un chacun, mais qui repartent toujours avant les autres. Ils ne préviennent pas et tout à coup ils se lèvent et disent : « Je dois partir. Il faut que je laisse ma voiture chez le garagiste, elle a un bruit bizarre et j’en ai besoin demain pour… » Vous ne savez jamais s’ils ont réellement quelque chose à faire ou s’ils partent parce qu’ils sont las de votre conversation.

On rencontre enfin, assez rarement cependant, des gens qui n’ont pas de montre, donc pas d’heures du tout. Ce sont généralement des bavards. Invité chez eux, vous n’en sortez pas. Ils ont toujours une anecdote qu’ils font durer une fois que vous vous êtes levé pour vous retirer. Ils vous entreprennent, vous mettent un autre verre dans la main et racontent la dernière du préfet ou la bévue de Madame Untel. Ceux-là sont bien partout où qu’ils soient, à condition de pouvoir parler. S’ils sont deux, la rencontre est délicate. Pour une fois, l’un d’eux part sans difficulté, il a trouvé plus bavard que lui.

L’heure, comme le temps, est un sujet de conversation intéressant. Seuls les gens normaux, qui sont à l’heure sans se poser de questions, ne s’intéressent pas à ce genre d’échange verbal. Mais sont-ils si nombreux que cela ?

08/02/2019

Suite en sol de J-Ph Rameau, interprété par Grigory Solokov

http://www.youtube.com/watch?v=A8qR5GYK7wI&list=PL437...


Une virtuosité inégalable et une compréhension du toucher extraordinaire.

Ne disons rien et... écoutons.

07/02/2019

Avoir le sens cosmique

 

Pourquoi ce matin, par une subtile cristallisation de l'aube, ai-je ressenti ce lien puissant qui unit l'homme à l'univers ? C'est une contemplation au-delà de l'objet, vers le tout pénétrant l'être.

Alors s'arrête le temps.

Si chacun au même moment pouvait s'ensevelir dans la contemplation du tout, viendrait l'éternité.

De même, le son grave des cloches qui, à chaque coup donné sur le métal, pénètre l'âme de l'infini grandeur de l'univers et de l'énergie que l'homme ignore en lui parce qu'il ramène tout à lui-même.

Apprendre à percevoir dans chaque chose l'esprit du tout et celui-ci nous pénètrera.

 

06/02/2019

Le silence

Le silence est en moi
Il n’est pas froid
Juste un glaçon sous l’aisselle

Il marche sans bruit
Et te touche l’épaule
Sans dire d’où il vient

Je l’ai goûté un jour
La fenêtre ouverte
Une nuit d’été
Il sentait le citron
Et faisait crisser les dents

Enfin j’ai fini par le voir

Regarde-le entre tes deux jambes
Certes la position est bizarre
Mais elle demeure renversante
Pour n’entendre que l’absence

Tu peux penser le silence
Tu n’obtiens qu’un rien
Même pas audible
Une parenthèse sans points
Et sans aucune suspension
Inaccessible aux mathématiques
Un trou dans la feuille blanche
Ouvert sur un non-fini
Et même l’indéfini
Qui n’est pas l’infini

Et pourtant ton cœur
Se penche sur ce silence sacré
Ouvre ses corolles
Et pleure de ne pas entendre
Le silence de bienvenue
Dans le monde des sourds

©  Loup Francart

05/02/2019

La vraie réalité

Aujourd’hui, l’homme se rit de celui qui ne parle pas en termes d’utile et d’inutile, de bien ou de mal, de beau ou de laid. Pour lui, une chose est utile parce qu’elle lui permet d’accéder à un niveau supérieur en termes de rémunération, de notoriété ou d’amitié. Pour lui, une chose est belle parce qu’il a coutume de dire qu’elle est belle. Mais il est incapable de voir la beauté de ce qui est laid.

Pourtant, finalement, une chose n’est ni belle ni laide, elle est tout simplement. Plus nous en percevons l’essence intime, plus nous lui trouvons de la beauté. Pour l’homme d’aujourd’hui, la réalité se réduit à ce qu’il lit dans les journaux et l’aspiration à une communion avec le monde n’est pour lui qu’une fuite hors du réel.

04/02/2019

Félix et la source invisible, d’Eric-Emmanuel Schmitt

–  Tu ne remarques pas que ta mère est morte ?

Ainsi commence l’épopée d’un gamin de douze ans qui veut retrouver sa mère. Il ne l’a pas perdu, elle est morte, c’est-à-dire en dépression. En bref, elle n’a plus goût à la vie. Alors Félix demande à l’oncle :

– Peut-on la soigner ?

– on guérit les vivants, pas les défunts.

– Alors, que fait-on ? Rien ?

– On la ressuscite !

(...) Pendant des années, Maman avait été vive, pétillante, curieuse, rayonnante, explosive, elle gazouillait d’une voix soyeuse, charnue, verte… Elle tenait le café de la rue Ramponneau, à Belleville, intitulé « Au boulot ». (…) Maman m’élevait seul, car elle m’avait conçu avec le Saint-Esprit. (…) Félicien Saint Esprit, mon géniteur, antillais, capitaine de bateau commercial, avait séjourné une semaine à Paris il y a treize ans…

Ainsi commence sur une trentaine de pages, le drame de Félix dont la verve et la gouaille introduisent le récit. Cela se poursuivra jusqu’à la fin du livre. Une multitude de personnages plus ou moins loufoques s’introduisent dans l’histoire : Madame Simone, une pute et un homme ou plutôt non, précise Félix, un homme et une pute, dans l’ordre chronologique ; Mademoiselle Tran, qui jouait le rôle d’une grande sœur au sourire constant ; Philippe Larousse, un timide de première, qui ne cherchait qu’une chose : connaître le dictionnaire par cœur ; note philosophe, Monsieur Sofronidès ; Monsieur Tchombé, le cancéreux guéri.

Des problèmes d’immobilier lui causant de profonds soucis, Maman allait mal. L’arrivée de l’oncle Bamba, averti par les occupants du café de la situation de Maman, bouleversa la donne : recherche de marabouts d’abord, puis, carrément, voyage au Sénégal et rencontre de Papa Loum, le féticheur. Elle guérit, seule ou avec l’aide de tous. Elle rentre à Paris, joyeuse, retrouve son café aux soins de Madame Simone, se laisse courtiser par le Saint Esprit. Chaque jour, elle pratique avec Félix l’« exercice d’Afrique » exigé par Papa Loum, car le monde se donne à ceux qui le contemplent, disait le féticheur. L’apparence n’est pas l’apparence de rien, plutôt l’apparence d’un univers dérobé. Ce soir-là, elle est comblée : Paris a l’apparence de l’Afrique. Papa Loum les avait avertis : L’Afrique c’est l’imagination sur Terre. L’Europe, c’est la raison sur Terre ; tu ne connaîtras le bonheur qu’en important les qualités de l’une dans l’autre.

On aime les récits d’Éric-Emmanuel Schmitt qui, sous des dehors simples, parfois simplistes, sait donner aux mystères humains l’apparence du quotidien, tel qu’il l’a déjà fait dans Oscar et la dame en rose, Monsieur Ibrahim et les fleurs du Coran.