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12/06/2016

Noosphère

Coupe les circuits de ton infosphère
Coupe les turbulences de la mondialité
Et ouvre-toi à la noosphère céleste

Étends tes ailes et couvre de ton ombre
Les faits et méfaits de tes contemporains
Et commence par ceux que tu as commis

Il est temps d’envisager un autre temps
Il est temps de construire d’autres espaces
Il est temps de voir au-delà des corps

Vois les idées qui volent sans retenue
Vois les envies de qui les fait tomber
Vois l’amertume de qui ne les voit pas

Plus loin encore, dans l’immensité
Où seule l'âme pénètre sans dommage
Brillent les lueurs de la créativité

Là se trouve la Jérusalem céleste
L’irradiante agitation des neurones
La paix bousculée des créateurs

Alors tu partiras sans peine
Sans un regret sur ton destin
Et bondiras dans l’immortalité

©  Loup Francart

11/06/2016

Le nombre manquant (22)

– Oui, c’est certain, nous dit-il à notre arrivée. C’est un ordinateur du Vatican, tu sais, ceux qui sont mis à disposition du public à la bibliothèque. Nous ne nous étions pas trompés, les religions sont bien les plus intéressées par ce genre de recherche. C’est leur fonds de commerce et il peut remettre en cause leur existence propre. Si quelqu’un découvrait qu’il n’y a pas de Dieu et qu’il pouvait le prouver, toutes les églises s’effondreraient. Cela pourrait engendrer de véritables guerres civiles, car il y aurait évidemment toute une catégorie de personnes qui ne pourraient l’admettre.

– Il est sûr que cela ne serait pas de tout repos. Le raisonnement humain peut-il, lui-même sujet à l’erreur, constituer une preuve véritable ? Mais ne rentrons pas dans ces considérations et revenons à notre préoccupation : qui ?

– J’avoue que ceci est encore inconnu. Qui se sert de cet ordinateur et l’a détourné de son objet, la recherche de documents dans une bibliothèque contenant des milliers, voire des millions de livres écrits dans de nombreuses langues ? Cela nous ne le savons pas. Pour l’instant, le Vatican n’a pas été mis au courant. Seul mon ami policier et nous-mêmes savons ce qu’il en est. Il m’a fait ses recommandations. Il ne faut surtout pas que cela s’ébruite, surtout chez les officiels. Aussitôt tout ceci serait qualifié de Très Secret-défense et le relais serait pris par les spécialistes sans que nous puissions poursuivre nos investigations. On pourrait finir par une rupture des relations diplomatiques entre la France et le Vatican, voire l’Italie.

– Alors, comment faire pour savoir qui se sert de cet ordinateur ?

– J’avoue que pour l’instant je ne vois. Peut-être auriez-vous des idées ?

– Oui, c’est possible, énonça Claire. J’ai quelqu’un de ma famille, un de mes neveux qui est un jeune prêtre et actuellement affecté au Vatican. Il pourrait peut-être faire quelque chose. Je ne sais pas, peut-être installer une caméra devant l’ordinateur, ce qui nous permettrait d’identifier le pirate. L’ennui est que cela met quelqu’un d’autre dans la confidence.

– Oui, mais a-t-on le choix ?

– Je ne sais pas.

Ne trouvant pas d’autres pistes, notre groupe fit confiance à Claire qui fut chargée de contacter son parent. Elle dut se rendre elle-même à Rome, ne pouvant évoquer cette affaire par téléphone. Ce fut fait, une caméra fut installée, coincée entre deux piles de livres, face à l’ordinateur. L’attente commença. On ne savait si au cours des derniers jours le pirate avait pénétré dans notre base de données. Alors on attendait, mais aucun changement sur nos documents ne fut signaler par l’un ou l’autre d’entre nous.

10/06/2016

Bella e perduta, un film de Pietro Marcello

Il est intéressant de lire les critiques sur ce film. Elles sont extrêmement variées. Qui croire ? S’agit-il d’un chef d’œuvre ineffable (un voyage poétique dans l’Italie champêtre), d’un navet confus (image pessimiste de l’Italie d’aujourd’hui), d’une fable politique (de nos jours, la politique est partout au cinéma et les politiques rêvent de jouer, de façon interposée, à l’acteur),cinéma,beauté,italie,camora,buffle d’un mythe moralisateur (le démuni fait triompher la beauté et l’amour).

Écoutons ce qu’en dit Nicolas Didier sur Télérama : « Chez Pietro Marcello (La Bocca del ­lupo, en 2009), la fiction n'est qu'un prétexte. Sa fable écolo, mâtinée de commedia dell'arte, fait le portrait d'un (véritable) berger, surnommé « l'ange de Carditello » pour avoir pris soin d'un palais abandonné, transformé en décharge par la Camorra. Un bâtiment qui symbolise à la fois le passé, glorieux, et le présent, vulgaire. Note d'espoir dans ce film franchement pessimiste sur l'Italie contemporaine : en 2014, le palais a été racheté par le gouvernement... »

Certes, c’est effectivement un peu confus, c’est une dénonciation masquée de l’inertie des politiques, c’est une lutte inégale contre le gâchis incroyable de lieux magnifiques, mais c’est beau et la beauté sauvera le monde. Ne cherchez pas dans ce film ce qu’il veut dire. Laissez-vous aller, vivez-le avec vos sens, la vue d’abord, mais aussi l’ouïe et même, suggérée, l’odorat ; vivez-le avec vos impressions, vos émotions et vos rêves.

Non, l’histoire ne se raconte pas. Il faut la laisser se dérouler devant les yeux, sans intellect, sans théorie, sans idéologie. C’est une fable poétique qui s’impose sans compréhension, parce qu’elle vous sort de vous-même et vous fait entrer dans un monde tellement imaginaire qu’il ressemble à la réalité.

09/06/2016

Une maison insignifiante

16-06-07 Maison d'Aups.JPG

Curieux par nature, comme tous les humains finalement, je passe la tête, tentant de distinguer quelque chose dans l’obscurité. Oui, elle est habitée par une femme. On sent son odeur doucereuse. Ne pas se laisser prendre, rester sur ses gardes ! Je cherche l’interrupteur à droite, à l'opposé de l’ouverture de la porte. Je le trouve à gauche. Quelle idée ! Lumière : faible, veloutée, caressant les objets plutôt que les éclairant. Un fauteuil Voltaire, un piano droit, un tapis effilé, quelques photos aux murs, dont une femme encore jeune, blonde, au sourire incertain, qui vous regarde étrangement. Elle semble presque vivante et vous fait un signe de la main : « Viens », semble-t-elle dire. Non, elle ne bouge pas. Ce n’est qu’une photo. Mais je ne la quitte pas des yeux. Elle reste muette. Une porte au fond de la pièce est entrebâillée et un escalier, sur la gauche, permet de monter à l’étage. Je l’emprunte. Un palier avec trois portes. J’ouvre la première. Elle donne sur une chambre aux volets fermés. Le soleil laisse quelques raies sur le sol recouvert de moquette grise et des grains de poussière dansent dans ses rayons. Rien d’intéressant, me dis-je en refermant la porte. La seconde s’ouvre sans bruit, comme entretenue de quelques gouttes d’huile passées sur ses gonds. Une chambre de femme. Je distingue un jupon du début du siècle, une robe au teint passée, une paire de chaussures hautes. Apparemment, il s’agit d’une jeune femme. La même probablement que celle vue sur la photo.

A ce moment, j’entends du bruit sur le palier. Je la vois passer, droite, fière, le regard perdu. Vite ! Je me cache derrière le paravent. Elle revient sur ses pas et pénètre dans la pièce. Elle ouvre un placard, en sort une robe jaune, assez longue, avec des volants en guise de manches. Retirant sa robe de chambre, elle l’enfile, se regarde dans la glace, avance de deux pas, recule de trois, puis avance, à tel point qu’elle disparaît derrière le miroir. Plus rien. Personne. A-t-elle vraiment existé ? Ne reste que cette odeur persistante, déjà perçue en bas en entrant dans la maison. Non, même avant, dans le jardin. Le silence est revenu, lourd, angoissant. J’étouffe. Que fais-tu ici, me dis-je. J’ai peur tout à coup et je presse le pas pour descendre les escaliers et me diriger vers la porte de sortie. Au moment où je tourne la poignée, un bruit bizarre retentit, semblant venir du premier étage : une sorte de plainte inhumaine, qui se prolonge inutilement, au-delà du souffle habituel d’un humain. Elle dure, dure à tel point que je sors épouvanté et referme au plus vite la porte. Dehors, toujours le silence. Pas un chant d’oiseau, pas un grattement, pas un chuintement. Je cours jusqu’au portail et me retrouve dans la rue, mes oreilles débouchées. Quel rêve, me dis-je. Non pourtant, ce n’est pas un rêve, j’ai bien vu cette femme changer de robe et disparaître dans la glace de l’armoire. Qu’est-elle devenue ?

Je n’ose plus retourner dans la maison et je pars vers le centre en m’efforçant de ne plus y songer. Mais chaque fois que je repasse devant le portail, je ne peux m’empêcher de revivre ces moments et d’en éprouver une angoisse indescriptible. Ne vous inquiétez pas, j’ai retrouvé mon âge réel. Seul mon sourire garde un regret imperceptible. Je n’arrive plus à sourire comme auparavant.

08/06/2016

Une maison insignifiante

Hier, j’étais à un vernissage. Peu de gens, des œuvres assez disparates, car il y avait quatre exposants qui ne semblaient pas avoir grand-chose en commun. Tout à coup, un tableau, une maison, insignifiante, mais qui attirait mon regard. J’eus envie d’écrire son histoire, ou une histoire qui s’y rapporte.

16-06-07 Maison d'Aups.JPG

Il passa devant l’entrée, un simple portail constitué de deux piliers de pierre brute. Il eut l’impression que la maison le suivait des yeux. Il se retourna, mais rien. Elle se tenait immobile, insignifiante, effacée. Il poursuivit donc son chemin.

Le lendemain, elle est toujours là, à la même place, guillerette cette fois. Le soleil luit haut dans le ciel et les hirondelles ont repris leurs rondes échevelées. Tiens, les deux piliers sont plus avenants aujourd’hui, remarque-t-il. Il s’arrête, intrigué. Ce chemin de gravier sale qui mène à la maison lui tend les bras : « Viens ! » lui dit-il. La maison semble inoccupée. Les rideaux des fenêtres ne bougent pas, les portes restent fermées, l’arbre est toujours pelé. Non seulement pas un signe de vie, mais une impression d’abandon augmentée par la peinture de la façade, une peinture violette, non, disons mauve pâle, un peu sale. Le jardin est également laissé à lui-même ; les herbes envahissent tous les recoins. Tiens, mais c’est vrai. Il n’y a pas un animal. Je franchis l’espace entre les piliers et avance d’un pas. Un silence étouffant, roide, au goût de farine. Mes pas soulèvent une petite poussière fine qui retombe lentement, au ralenti. Un silence oppressant qui résonne dans les oreilles et endort les autres sens, y compris la vue. Une sorte de voile grisâtre s’est abattue sur mes yeux. Je rentre dans un autre siècle. Je vieillis très vite. Le compteur tourne à toute vitesse les années en remontant vers ma jeunesse. Mais je vieillis malgré tout. Une impression désagréable. Ah, il ralentit, puis s’arrête : cent douze ans. Je ne sens plus mes os. Ils sont tellement friables. Ma peau est devenue jaune et gaufrée. Ma tête est restée la même. Ni mieux, ni moins bien. J’ai toujours eu quelques difficultés à l’équilibrer pour m’en servir. Tantôt elle penche du côté du cœur et me fait accéder au royaume des larmes, tantôt elle penche du côté de l’intellect et déborde de concepts. Ils deviennent si encombrants que je dois les entasser à la cave, dans le ventre mou des idées perdues. 

J’avance à petits pas, respirant une odeur de papier vieilli recouvert d’une fine pellicule de poussière rose, féminine. Non, elle sent le musc, odeur masculine s’il en est. Mais s’y ajoute un mélange de rose, de mûre et d’angélique qui détonne dans ce jardin désuet. Au moment où j’arrive à la porte au linteau arrondi, celle-ci s’ouvre en grinçant. Personne n’en sort. Elle bée devant moi, comme une invitation muette, et je ne vois rien d’autre qu’une ombre épaisse et collante.


La suite et fin : demain !

07/06/2016

Haïku

Un haïku doit contenir un kigo (mot de saison), c'est-à-dire une référence à la nature ou un mot clé concernant une saison. Ici, la rose des vents remplace la saison.

 

Il ouvre un œil

Il court dans la rose des vents

Et part,  éperdu

Trois mondes en un.JPG

 

06/06/2016

Hymne chérubinique, Bortniansky

https://www.youtube.com/watch?v=wLzJrQyzSJc


Une fois de plus la musique liturgique orthodoxe enchante les sens, l’intellect et le cœur de sa pureté. Elle fait dissoudre les impuretés de l’âme, conduit aux frontières du monde divin et noue fait presque prendre la tangente.