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01/04/2012

Les Rameaux : la réunion des contraires

 

La liturgie de ce jour réunit deux épisodes de la vie du Christ :

. l’entrée triomphale de Jésus à Jérusalem : entrée réservée aux rois et aux héros ;

. sa passion : récit de son arrestation, de son procès et de sa crucifixion.

         Contraste saisissant : la même foule acclame, puis conspue le même homme, ou encore, le même homme est glorifié, puis méprisé par la même foule. Ce contraste illogique, terriblement illogique pour notre raison, est le propre des contrastes de la vie spirituelle : abaissement et élévation, souffrance et joie, absence et présence de Dieu.

 

Un très beau texte de Saint Paul, lu ce jour-là, résume tout le mystère de la vie du Christ :

 

« Le Christ-Jésus, lui qui était dans la condition de Dieu, n’a pas jugé bon de revendiquer son droit d’être traité à l’égal de Dieu. Mais au contraire, il se dépouilla de lui-même en prenant la condition de serviteur. Devenu semblable aux hommes et reconnu comme un homme à son comportement, il s’est abaissé lui-même en devenant obéissant jusqu’à en mourir au dessus de tout. »

 

         Le Christ se dépouilla de lui-même : traduction du verbe grec ekenosen qui signifie « se dépouiller, se vider, s’évider ». Idée d’un plein qui devient réceptacle, d’une forme qui, se suffisant à elle-même, se transforme pour n’avoir de signification que par ce qu’elle peut contenir. C’est l’image du calice, d’un bol. Totalement dépouillé, évidé, le Christ épouse l’univers, le glorifie en se glorifiant, le rend divin. En lui, s’opère la réunion des contraires : l’univers et Dieu, la matière et l’Esprit.

 

31/03/2012

Convergence et divergence

 

Dessin fait dans la fièvre combinant une construction convergent vers le centre sortant d’une construction divergente, émergeant elle-même d’un vide spatial.

Elle traverse notre vision et s’en va…

 

 

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30/03/2012

Silence. Rien d’autre que le silence…

 

Silence. Rien d’autre que le silence…
Il est sans fin, il vous prend à la gorge
C’est vrai, il y a la nuit, indivisible
Et pourtant dans cet instant qui se prolonge
Il y a des pauses, des phases, des élans
Et là, nous sommes entre deux
La nuit des noctambules s’achève
La fatigue en venant à bout
La nuit des travailleurs matinaux
N’a pas encore commencé sa ronde absurde
Le temps est suspendu, inerte
Et j’erre dans ce silence magnifique
Comme dans un palais de glace
Regardant les miroirs étincelants
Qui cliquettent d’épanouissants pincements

Je flâne entre ces murs symétriques
De la mémoire des bruits oubliés
Entre deux, coupure du son
Abaissement de la tension
Je flotte dans l’absence
J’ouvre les yeux sur le vide
Je goûte l’insaisissable déficience
De sensations habituelles :
Le grattement de la peau sur le drap
La toux d’un voisin endormi
L’égrainage des heures à l’horloge
Le craquement d’un meuble fatigué
L’imperceptible ronronnement
Du frigidaire, repu et obèse
Le cri d’un enfant dans la nuit
Oui, ce silence devient pesant
Est-il possible qu’il n’y ait rien
Que tous ces bruits du souvenir
Ne soient qu’invention diserte ?
Quel sommeil dans cette aphasie
Je ne peux fermer l’œil
A défaut de fermer les oreilles

Tout à coup, retournement
Elle se réveille, me regarde
M’adresse une parole aimable
Comment ? Que dis-tu ?
Toujours ce silence éternel
Ah, oui ! bien sûr,
Retire ses boules chatoyantes
Que tu portes aux oreilles
Et moi qui croyais
A l’éternel silence
D’une nuit blafarde
Au fin fond de l’océan

Mais, non…
Tu n’entends pas cette absence
Rien n’obture ton ouïe
Cette syncope est bien réelle
Ne viens pas troubler l’écoute des yeux
Dans le noir impalpable
Je respire l’ombre endolorie
Des mémoires revenues
De nuits sans lune
Et de jour sans amour

 

 

29/03/2012

Etude N°5 pour piano, dite Toccata, d'Unsuk Chin, joué par Mei Yi Foo

 

http://www.youtube.com/watch?v=9vqiq81TVw4&feature=related

 

Impression : nous sommes dans un grenier, dehors, il fait frais et il pleut. Peu à peu, les ardoises du toit, disjointes, laissent tomber des gouttes d’eau sur le parquet, en plusieurs endroits. Cela commence doucement. Mais très vite, la pluie étant violente, cela devient une véritable fuite qui s’écoule sur le parquet, entraînant la poussière. Tout cela se fait non pas dans l’obscurité, mais sous un soleil qui contredit le fait de l’ondée. Il fait danser la poussière, en fait naître des étincelles d’argent, et l’eau s’écoule toujours du toit en bouillonnement. Deux cascades qui se répondent, s’épaulent, font preuve d’audace, l’une permanente, jouée par la main droite, l’autre plus faible, mais aux gouttes plus virulentes, jouée par la main gauche.

La beauté de l’étude tient à cet équilibre constant entre les deux mains, la main droite, contrairement à l’habitude, apporte l’accompagnement, la main gauche jouant la voix de soliste, tantôt au dessus de l’accompagnement, tantôt au dessous. Mais peut-on réellement parler de voix soliste ? Ce sont des éclatements de sons, parfaitement rythmés avec l’accompagnement, qui tournent autour du Sol, s’en éloignent, y reviennent. Et tout cela donne une musique sereine, quasi diaphane, peut-être en raison de l’absence d’accords. Tout est dans la succession des notes et le rythme propre des deux mains. In fine, tout cela se fond dans un ruisseau de sons qui s'écoulent en toute liberté.

Il faut reconnaître que Mei Yi Foo joue de manière exceptionnelle, avec une sensibilité qui n’est surement pas évidente pour ce style de musique pianistique. Avouons également que la composition d’Unsuk Chin est très difficile à jouer. Alors quel bonheur de constater ce mariage entre l’art de la composition et l’élégance du jeu. Pas d’harmonie, peu d’euphonie (beauté de la mélodie, au sens classique du terme), mais une maîtrise de l’eurythmie (qualité des sons successivement émis, considérés comme agréables à entendre), celle-ci s’entendant comme la beauté qui résulte de la combinaison harmonieuse des sons, des lignes, des mouvements. D’une manière plus générale, elle désigne la beauté des proportions, du rapport des parties entre elles et avec l'ensemble.

 

 

Unsuk Chin, née en 1961 à Séoul, est une compositrice sud-coréenne de musique classique européenne, qui vit à Berlin. Elle a étudié la composition à l'université nationale de Séoul avec Sukhi Kang, puis à Hambourg avec György Ligeti ; l'enseignement de celui-ci a fortement contribué à la définition de son propre style, beaucoup plus que l'influence coréenne qu'elle nie. Alors qu'elle était encore étudiante auprès de Ligeti, elle reçut en 1985 l'International Gaudeamus Competition for Composers. Elle emploie des instruments traditionnels aussi bien qu'électroniques dans ses œuvres. Selon ses propres mots, "la virtuosité [la] fascine".

From Wikipédia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Unsuk_Chin

 

 

28/03/2012

Ian Davenport, peintre

 

A la galerie Hopkins (2 avenue Matignon 75008), on trouve quelques belles toiles de Ian Davenport.

 

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Elles sont colorées au-delà de tout ce que l’on peut rêver. Chaque toile porte le nom d’une couleur qui est sa dominante. Le regard se noie dans ses lignes qui effacent toute pensée, mais qui laisse une impression de beauté sauvage, malgré l’ordonnancement impeccable des trainées de couleurs. Car il s’agit bien de trainées. Les toiles sont peintes debout. La peinture est déposée en utilisant une seringue industrielle qui laisse couler la peinture acrylique le long de panneau d’aluminium ou d’acier inoxydable. « Je domine la matière liquide, je me sers de la couleur et j’essaie de réunir ces différents éléments en une chorégraphie. Le processus exige une grande rigueur interne, mais le hasard y aussi sa place ».

 

Sur quoi joue-t-il ? Le choix des couleurs et de leur juxtaposition, la largeur des lignes, le fond de la toile qui donne le plus souvent la dominante, et, enfin, la gravité et le jeu du poids de la peinture qui, au bas du tableau, est invitée à manifester sa puissance par des inclinaisons volontaires données au support, ce qui n’apparaît pas dans ce premier tableau, mais est agrandi dans celui-ci.

 

Davenport 2.jpg

 

 La peinture est brillante et laisse se refléter le spectateur. C’est un processus méthodique qui permet l’exploitation de la couleur qui est à la fois prisonnière de la méthode, mais libre de se propager, in fine, où bon lui semble, mais de manière ordonnée.

 

Davenport 3.jpg

 

 Faisant partie du groupe Young British Artists, il expose en 1988 avec Damien Hirst (voir article du samedi 10 mars). Il reçoit le prix Turner en 1991. Il dénomme son procédé « Puddle Paintings », c’est-à-dire peinture en flaques, évoquant ainsi le bas de la plupart de ses tableaux.

On peut cependant s’interroger sur le produit : un seul procédé utilisé, qui tient plus de l’esthétisme décoratif que de la véritable peinture dès l’instant où il est reproduit à répétition et vendu à de nombreux exemplaires. A-t-il d’autres idées ? Peut-être, mais à coup sûr, celle-ci a prévalu et est la seule retenue. Même phénomène que pour Damien Hirst : j’exploite l’idée jusqu’au bout parce que je n’en ai pas d’autres ! Mais cette idée est meilleure que celle de Damien Hirst, qui lui vend mieux. Histoire de marketing malheureusement.

 

 

 

 

27/03/2012

Le jardin du Panthéon bouddhique

 

 

Il se situe avenue d’Iéna, à deux pas du musée Guimet dont l’immeuble est une annexe.

C’est bruyant. Il y a deux écoles à côté et c’est l’heure de la sortie des PB 58.JPGclasses. Mais dans ce jardin minuscule, au plus 25 x 25 m, quelle paix. On est dans un autre monde, et ce monde, je l’ai pour moi tout seul. Après un premier tour de reconnaissance, je m’assieds au pied des marches du perron. Il y a là une colline, toute petite, une bosse au plus, sur laquelle se tient le salon de thé, un simple pavillon de style japonais. Il tient au moins un tiers du jardin. On y monte par des dalles de pierre disjointes, de simples rochers formant des marches.

PB red 49.JPG

Dans l’autre partie l’eau coule par escaliers, entre les rochers, les ponts de bois, parmi les îlots de verdure, dont, bien sûr, les bambous ramassés en petites, très petites, forêts.

 

Le jardin contient tout ce que contient normalement un jardin japonais : la lanterne traditionnellement en pierre, de petits arbustes, les rochers évidemment, choisis avec soin pour leur forme et leur taille, PB red 52.JPGde petits chemin de PB red 55.JPGterre avec des passe-pieds en pierre, le bassin d’eau recouvert de pierre de gué, sorte de pas dans la partie supérieure, les galets entassés, et de ponts de bois enchevêtrés avant l’étendue lisse d’une mare qui ne fait pas deux mètres sur deux. Les arbres sont en partie taillés pour laisser passer le regard et donner une impression de légèreté authentiquPB red 56.JPGe. Il manque cependant une chose, le sable ou le gravier parfaitement ratissé en arrondis savants et reposant pour l’œil.

 

 

Contrairement au jardin occidentaux et en particulier français, le principe d’asymétrie domine. Il donne des points de vue différents selon la place du spectateur, augmentant ainsi l’espace. Les jardins japonais idéalisent la nature en la miniaturisant. Heureusement d’ailleurs, par ce que celui-ci est un jardin de poche. Mais n’est-ce pas merveilleux déjà de disposer d’un tel lieu dans Paris ?

 

De l’intérieur du musée, bouddha, dans sa majesté, médite et veille sur le jardin, assis sur sa fleur de lotus.

 

 

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26/03/2012

Délectation, tel est le mot, ambiguë

 

Délectation, tel est le mot, ambiguë
Et tu ries de ce vocable imaginaire
Qui court dans ta tête et tes pieds
Retour sur toi-même, en creux
Là où rien ne t’atteint, sans faiblesse
Tu attends l’horizon vide des étendues d’eau
Tu baigne dans la fange de leurs pourtours
Et pourtant, que dis-tu du dialogue
Entre l’inconnue, charmante et vive
Et le jeune homme altier et disert ?
Ils dégagent l’impression d’un passé
Révolu, sans concession, mal défini
Et courent ensemble vers les fontaines
De l’innocence et de la pompe
Rien ne sera jamais comme avant
Nous avons perdu la consistance
D’impressions diverses et subtiles
Voici ce qu’il reste d’un après-midi
Où les volets fragiles et fermés
Sur le passé ressasse le présent
Boite immesurable et pauvre
De sensations promises, vite effacées.
L’avenir a-t-il une raison d’être ?