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06/02/2011

La poésie ne prouve pas. Elle impose.

 

La poésie ne prouve pas. Elle impose. Elle ne démontre pas, ne calcule pas. Elle suggère, elle laisse glisser la compréhension à travers des méandres inconnaissables. Chaque image verbale se suffit à elle-même, mais c’est l’enchaînement des images qui fait de ce texte un poème et lui donne son impact sur le centre de l’être. Ne pas chercher de rapport logique, mais le rythme qui s’impose à soi, hors de soi, comme une écriture automatique qu’il faut cependant contrôler. Les images se succèdent. Il ne s’agit pas d’images au sens de la vue, mais d’impressions fixées en quelques mots, qui donnent au lecteur l’ambiance et la finalité de ce que l’auteur a ressenti et a voulu exprimer.

Dans l’immense vide de la conscience, jaillissent les mots qui éclatent en bulles d’images et rendent vie aux instants privilégiés où s’est établie l’étincelle d’une affection de l’âme pour le fait vécu ou l'imaginaire qui s’enracine dans la réalité. Rien ne saurait dire auparavant que cette synergie s’établirait. Elle surgit en un instant, impromptue, lancinante, jusqu’au moment où il faut céder à cet impérieux désir d’exprimer ce que remue en soi ce petit bout de vie, si petit qu’il s’oublie très vite, malgré les efforts faits pour le conserver en mémoire. Alors commence le travail des images, puis des mots, puis des enchaînements, jusqu’au moment où se forme ce que certains appellent un poème, mais qui, pour l’auteur, n’est qu’une naissance inespérée, à chaque fois différente. Cet enchevêtrement, il lui arrive parfois de le reprendre, de retravailler chaque image, jusqu’à ce que, derrière l’apparent jaillissement des mots, se cache une construction subtile, aux apparences candides.

La poésie est la pensée à nu, simplifiée de tout l’appareil de la raison, comme un don invisible de l’auteur à son lecteur, invisible mais authentique et unique. La poésie aspire, ouvre l’être qui se jette dans le grand vide, heureux de sentir cette sensation extraordinaire de l’envolée du corps, du cœur, de l’esprit et de l’âme. La poésie est le liant des défaites terrestres et des espoirs célestes, une harmonie souveraine qui fait de l’homme un archange des images mentales qui transcendent son égo et l'ouvrent à la sérénité.

 

 

05/02/2011

Revenir, comme après un long voyage

 

Revenir, comme après un long voyage,

Dans ces pièces qui abritent vos souvenirs,

Ou plutôt les objets qui font que vous êtes vous-même,

Depuis vos cahiers d’écolier abritant vos impressions

Cueillies au fil des années, jusqu’au goût subtil

Des salades préparées par la même main amoureuse.

Retrouver intacte également la brillance du secrétaire

Comme un objet de collection utilisé quotidiennement.

Se réjouir du silence feutrée qui colle à l’appartement

Et emmitoufle nos pensées de mièvres délices.

Attention, ne pas se laisser envahir par cette quiétude amère

Qui, progressivement, noie l’esprit dans un tourbillon d’images

Sans suite, sans fin, sans consistance, sans pouvoir sur le monde.

Le retour doit rester un commencement et non une continuité.

Donner les éclairs nécessaires à la redécouverte

Comme la foudre transperce le ciel bleu nuit, un soir d’été.

Par exemple, le confort dodu du lit,

Comme un édredon de crème fouettée et de fraises des bois,

Ou cette place préférée dans le canapé, façonnée au fil des jours,

Comme un creux de mollesse et d’habitude,

 Ou encore la plainte verdoyante des pieds du fauteuil

 Noyés dans la forêt de troncs qui encombre le salon.

Oui, ouvrir les yeux sur une nouvelle réalité

Ou de nouvelles sensations ou des perceptions inédites.

Quel plaisir d’éprouver pour un quotidien dépourvu d’attraits

Des sentiments qui serrent le cœur, dégazent l’esprit,

Ouvrent des perspectives roses dans un ciel bleu cobalt.

Vert comme une pomme ou un élastique sucré,

Le paysage de notre vie quotidienne prend le poids de l’avenir,

Débarrassé du passé, dans la désaffection des réminiscences,

Difficilement présent par manque de consistance,

Ouvert à l’inconnu, tendu vers un horizon improbable,

Et pourtant attrayant comme une sucette glacée.

 

 

04/02/2011

Réveil

Où suis-je ? Une usine : mille chuchotements et même quelques cris m’arrivent dans le brouillard. Plus rien. Puis, un tableau d’art moderne, style Braque, fait de prismes, de lumière, d’angles et de couleurs. Mais juste un instant. A nouveau la désintégration. Des lumières au plafond, et, à nouveau, des voix, un bourdonnement de paroles jusqu’au retour à la nuit. Je geins sans le savoir, longue plainte dans le brouhaha des voix. Quelqu’un parle plus fort et semble s’adresser à moi. Mais je ne comprends pas ce qu’il me dit. Je parle, mais m’entendent-ils ? Et d’ailleurs, que dis-je ? Je ne sais.

Je suis bien dans ma bulle. Pourquoi vouloir m’en faire sortir ? Retomber dans le néant, dans le silence sans fond d’où je sors. Pourquoi retrouver les lentes orbites des objets autour d’un rien de conscience. Je ne veux plus de conscience, simplement l’absence de pensée, de sensations et même de réflexes qui me poussent à ouvrir les yeux et à écouter.

 Je n’ai pas mal, mais ce n’est pas pour cela que je vais bien. Je ne sais pas ce qui se passe, sinon que l’usine tourne, fonctionne à côté de moi, vivante et bien réelle. J’entends les paroles ou plutôt j’entends leurs sons, mais je ne les comprends pas. Je vois des images sans pouvoir les relier à une réalité vécue. C’est un bourdonnement, tout d’abord faible, comme une petite musique dans un coin de la tête, puis il s’amplifie, se fait plus réel, prend de la consistance. Chaque morceau du puzzle se raccorde, éclate à nouveau en pluie d’impressions sans logique, puis s’assemble comme un kaléidoscope.

Je ne sais si je suis moi-même réel. Pourtant, je suis. Je suis différent de tout ce que je vois et entends. Je les ressens et je sais qu’ils ne sont pas moi. Mais qu’est-ce que je suis ? Je ne sais. Peu importe d’ailleurs. Ecrasé sur un matelas d’aluminium, mon cercle d’appréhension se limite à un mètre autour de moi. Je ne tiens pas à aller au-delà.

Non, ne me bougez pas, je suis bien, que le temps ne reprenne pas sa course. Qu’il s’arrête pour que je récupère.

(suite à un séjour en clinique)

03/02/2011

Musique et émotion

 

Il n’y a pas l’émotion de la musique. Il y a une émotion bien particulière à chaque morceau de musique. Et encore, elle ne dépend même pas de la musique, mais aussi de la disposition de l’esprit et du corps, de la vibration de l’air, de l’état du monde et des choses et de leur agencement par rapport à nous.

 

On écoute toujours une musique pour la première fois, car jamais on ne ressent la même émotion à son audition et jamais on ne la perçoit de la même manière. En musique, l’habitude doit être bannie. Trop souvent, on aime une musique par habitude. Mais alors ce n’est plus l’émotion de la musique qui nous agite, mais celle du souvenir d’une musique. On aime telle sonate de Beethoven par ce qu’elle nous rappelle une soirée d’hiver au coin du feu où l’on a rêvé en l’écoutant.

 

Il ne faut pas chercher dans la musique la quiétude de l’esprit et la mélancolie de l’âme, mais la passion de chacun des instants où l’on perçoit la note pure, idéale, « la note clé ». Il faut apprendre à écarter le voile de la mélodie qui cache la nuit étoilée de la musique, l’espace doré de chaque note, la constellation d’un accord.

La littérature crée l’émotion de l’imagination, la poésie creuse plus profondément en faisant goûter une émotion de l’image pure, mais seule la musique crée l’émotion artistique pure. Cette émotion véritable, on ne l’éprouve pas à l’audition totale d’un morceau, elle demande une attention trop soutenue surhumaine, on l’éprouve à la perception plus dense d’un accord, d’une reprise, d’un jeu nouveau. On s’émeut à l’occasion d’une nouveauté, d’une coupure, d’une différence inattendue. Alors l’émotion du morceau se cristallise comme les ramures d’une étoile de givre sur cette impulsion.

 

C’est peut-être en cela que la musique contemporaine est plus propre à faire éprouver l’émotion de la musique, car elle ne prête pas, ou moins (parce qu’elle la rompt) à la rêverie qui engourdit la perception de nos sens. Par sa rupture, elle dissèque l’émotion dans l’espace et le temps, l’isolant à chaque seconde de l’émotion dernière en lui conservant son intensité.

 

02/02/2011

Andalousie : "mémorations"

Ci-joint quelques images prises entre le pouce et l'index au long d'un périple débordant d'écarquillements et de clignements d'yeux. Depuis, quelques mois ont passé. Occasion de se les remémorer.

 

Les jours étaient comptés, l'automobile boite à sardine, mais pratique, les hôtels différents, mais avec un café qui laissait à désirer, les villes conversantes et fouleuses, la campagne en oliviers à la parade, les monuments mauresques, gothiques, renaissance, picaresques et parfois même tarabiscotés, les tapas maritimes à la gargoulette facile, les odeurs parfumées de fleurs en boutons, bref, un enchantement des yeux, du goût, et de bien d'autres choses.

 

Nous en sortîmes, réchappés des foudres d'un volcan fantôme, épuisement consumé et valises consommables.

 


Un premier thème important : les plaques d'égout, dénommés du pays, ici Grenade Alhambra. Elles ont ponctuées nos préoccupations, le nez sur le guidon, les pieds écartés, la vue arrondie, bref, un clignotant dans la nuit du soleil journalier.

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Deuxième thème : les portails ouvrant sur d'autres portails qui eux-mêmes ouvrent sur une porte qui ouvre sur une autre porte, puis des géométries distinguées qui s'enchaînent inlassablement. Exemple : 

 

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Troisième thème : L'eau, transparente et filante, coulante et roucoulante, bonheur des oreilles et bienfait sur le visage, exubérante et prolixe, dans un pays où elle devient art de vivre.

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Quatrième thème : les jardins luxuriants et grandioses, emplis d'arbres, de lianes, de fleurs, de toutes sortes d'espèces botaniques, boutonneuses et bucoliques, dans une harmonie de couleurs exaltantes et mirifiques.

 

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01/02/2011

Il me manque, certains jours

 

Il me manque certains jours, lorsque le soleil confie sa face rubiconde aux mains boisées de l’horizon, l’ombre du désir blotti dans la chaleur de ton être.

Quand je te regarde, étrangère, sous une apparence de femme, riante de tes doigts autour de mots inventés, et que sur tes yeux ouverts, j’abaisse les paupières du souvenir, je revois ta pâle dépendance hébergée sur mes lèvres. Partagé d’étonnement, j’imprime au vide du néon la lettre lumineuse de l’attente.

Inlassablement dépecée de la vérité du moment, tu danses de dix bras et de sourires multiples le ballet de tes retournements. Je te vois, là, assise, au regard de la glace, et je te vois courbée au cygne de mon épaule, reposante de ton corps dans l’abîme de notre endurance.

 

 

31/01/2011

Divination

 

Mystère de la simplicité. Quelques carrés dispersés créent le mystère. Est-ce la symétrie, l'équilibre, l'enchevêtrement des formes ? Le saurons-nous ? Mais sous l'oeil impassible, peu de pensées, un peu d'émotion.

La divination est l'art de deviner, de découvrir ce qui est ignoré ou caché en sortant des voies ordinaires de la connaissance.

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