Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

25/02/2021

L'observation de l'univers (Epilogue)

Si l’observation de l’univers s’achève dans un bistrot sur un comptoir, à côté d’une bière vide, c’est pour mettre en évidence la difficile interprétation de la vie. Une cause en entraînant une autre, le spectacle passe d’un monde gigantesque (l’univers visible) et poussiéreux (les poussières de galactiques), mais visible, à une vision plus lâche, parfois imaginaire, mais pas toujours, où se cache le rêve, la croyance et la vanité.

Et Dieu dans tout cela, où est-il ? Fouille, fouille l’homme mort et va au-delà de ce que tu vois. Les fantômes avancent également à marche forcée et sortent de leur chapeau des histoires à dormir debout. L’homme serait-il double ? Un être plein de vide qui l’encombre et lui donne de l’importance, ou un être vide plein de bonheur, qui tend la main à tout autre que lui pour lui donner la joie éternelle.

Nous n’avons certes pas la réponse et ne la connaîtrons que plus tard, derrière le léger manteau de la vie. Que cela ne t’empêche pas de vibrer, de t’exalter, de reconnaître que le mystère reste épais, plein et entier, et que cela forme le plaisir et le mystère de la vie, envers contre tout ce qui n’est ni visible ni rationnel.

 

24/02/2021

L'observation de l'univers (11)

Ainsi s’achève l’observation de l’univers
Quelques échanges de coups d’œil 
Une poignée de main entre humains
Et un vide immense entre eux

Entre en toi-même, te dis-tu
Fouille ton être transparent
Découvre la clarté de ton intérieur
Les yeux ouverts, sans lunettes

Souris à tes déconvenues
A tes échecs, à ton ridicule
Sois le joueur sans bagages
Ne porte rien et va au loin

Ta liberté vaut plus que ton être
Libère-toi de toi-même
Tu n’es rien
Et tu es tout

Adieu, être sensible et provoquant
Je te laisse sur le bord du chemin
Et pars libre de tout souci
Comme l’oiseau gonflé de bonheur

23/02/2021

L'observation de l'univers (10)

Voilà pourquoi il lui faut du rêve
Une soupape d’échappement
Qui parfois soulève le couvercle
Et laisse échapper un cri

Ce n’est pas un cri de désespoir
Mais de bonheur dilué et fragmenté
Plein d’inattendus et d’impasses
Une « multivie » d’émotions et de rêves

Ah ! Qu’elle est bonne cette vie
Qui courre sous notre peau
Et nous emplit de bonheur
Viens l’aimé(e), promenons-nous ! 

Depuis ils batifolent ensemble
Dans la plus stricte intimité
Seuls dans ce monde si vaste
Jouant à cache-cache derrière les astres

Vont-ils atteindre la fin de l’univers 
Cette région dont ne sait rien
Simplement qu’il y fait froid
Congelons-nous jusqu’au prochain réveil !

22/02/2021

L'observation de l'univers (9)

Serait-ce cela l’éternité
Une si longue ficelle
Dont on ne voit pas la fin
Et qui se dévide sans soubresauts ?

Ou l’éternité serait-elle la mort
Retournée en vie sans fin
Un bain bouillonnant d’huile
Qui frisonne sans déborder ?

Dieu seul le sait. Et encore
Est-ce si sûr ? Ne regarde-t-il pas l’homme
Comme une poussière de son imagination
Perdue dans les galaxies, asphyxié d’espace?

Dilué dans l’espace-temps
Empli de matières et de pensées
L’homme et la femme s’ouvrent
A la vie qui toujours déborde

Le lait vital l’entraine encore
A imaginer le pire, rien de rien
Derrière l’éclaircie le tonnerre
Et la peur courant sur la peau

L'observation de l'univers (8)

Alors la Déité se cachera sous le tapis
Se laissera écraser les pieds
Elle partira pour un autre univers
A inventer, construire, former

Laissant les hommes et les femmes
Ensemble, façonner leur monde
En toute tranquillité et modestie
Et contempler leur bonheur 

L’infini sera vraiment l’infini
Un labyrinthe d’événements
Que seuls les acteurs poursuivent
Et appellent la vie et, parfois, la mort

Mais y-t-il une mort à vivre
Après la ronde endiablée
Vécue par les uns et les autres
 Dans le rêve de l’inconnu ?

Chaque homme et chaque femme
Tous courent derrière la vie
Connaissant la fin ultime
Une mort dont on ne sait rien

 

 

 

21/02/2021

L'observation de l'univers (7)

La femme également errera en solitude
Jusqu’à ce que son enveloppe s’entrouvre
Et laissera voir un intérieur vide
Empli de beauté et de communion

Car pour être il faut mourir à soi-même
Il faut percer ce voile opaque 
Qui tient lieu d’individualité
Et condamne à ne plus être soi-même

L’homme et la femme ne seront qu’un
Et le Un, devenu trois, puis multitude
Errera à nouveau dans l’air du présent
D’un l’infini sans horizon

Ainsi ira jusqu’au bout sans fin
L’humanité d’une verdeur nouvelle
Reflet vivant d’un autre monde
Où rien n’est semblable ou différent

Diaphanes et rayonnants 
Ils seront immortels, présents
Là et maintenant
Auréolés de lumière divine

20/02/2021

L'observation de l'univers (6)

Peu à peu leurs enveloppes s’entrouvrent
Dévoilant pudeur et beauté
Leurs exhalaisons se mêlent
Éclairant l’univers de senteurs nouvelles

Le néant n’est plus, plein d’un rien
Qui est tout sans existence physique
Et qui frappe sans cesse le cœur
D’un impalpable bonheur inconnu

L’être naît et vit de singularités nouvelles
De caresses et d’amour envers tous
Entraîné dans la ronde des cœurs  
Ivre de magnificence et de modestie

Montagnes et mers sont des lieux enchanteurs
Que les êtres survolent en harmonie
Faisant émaner une musique divine
D’une vie ouverte sur la lumière immatérielle

L’homme ira où il veut, quand il veut
Il n’aura plus de visage, mais un cœur
Il n’aura plus de regard, mais l’infini
D’un instant transperçant l’horizon

 

19/02/2021

L'observation de l'univers (5)

Oui, pourquoi n’existerait-il pas
Au-delà de la poussière et de la masse 
La légèreté du rêve et de la mystique
Ouvrant l’homme sur un autre monde

Dieu que le vide est plein de surprises
Il tient dans ses mains ouvertes
Les pensées des hommes et leurs espérances
Pour le meilleur et parfois le pire

Allons donc plus loin, là où le moi n’est plus
Ou le soi peut être dépassé par l’existence
Dans ce vide qui n’est rien et devient le Tout
Dans une seule lumière qui s’appelle l’amour

Cette lumière est l’être, unique et entier
Plus large que ce que l’on en voit
Séparée des autres êtres aussi singuliers
Par une simple enveloppe transparente

Multitude envahissante et curieuse
Elle ne se mélange que tardivement
Le cœur soulevé d’espoir et de crainte
Respirant liberté et indépendance

18/02/2021

L'observation de l'univers (4)

Mais gardons les pieds sur terre et dans le ciel
L’univers observable n’est qu’une partie de sa totalité
Apparaît l’idée de multivers, conjugaison de plusieurs univers
Nés et non observables, progressant sur des routes parallèles

Ils ne sont certes pas visibles ni même, pour l’instant
Envisageables mathématiquement et donc physiquement
Mais chacun peut rêver et se réjouir pleinement :
Nous ne sommes plus seuls, nos fantômes sont avec nous

Finalement, le physiquement est probablement de trop
L’esprit éclairé et curieux de Teilhard de Chardin
Possède d’autres hypothèses englobantes et étonnantes
Telle la noosphère baignant dans un espace immatériel

Un nuage supplémentaire sur nos têtes encombrées
Existant sans masse et hors de l’espace-temps
Comme une épaisse nuée cauchemardesque
Qui dégage les neurones et offre l’innocence

16/02/2021

L'observation de l'univers (3)

Plus curieux encore, ce qu’il voit n’existe plus
Ce n’est certes pas que cela n’a jamais existé 
Mais cela était il y a des milliards d’années
Quand l’homme n’avait pas encore foulé la terre

Quelle tromperie Dieu nous met sous les yeux
Un monde de passé sans visibilité sur l’avenir
L’homme, chaque homme, est seul dans le cosmos
Face à l’univers en mouvement dans un temps incertain

A quoi peut-il se raccrocher, où peut-il d’appuyer ?
Même l’espace-temps est percé de trous
Et cahote sous les pas de l’observateur
Pavé de soleils et d’astres rondouillards

Quant à chercher l’avenir dans le présent
Qui n’est qu’un instant insaisissable
C’est comme voir le monde avec une lunette
Qui, prise à l’envers, s’ouvre sur la pupille de l’œil 

Ainsi l’homme se fouille avec une lampe de poche
Pour contempler un cosmos à l’existence passée
Qui peut mourir sans qu’il puisse le prévoir
Et peut détruire la merveille qu’il représente

 

15/02/2021

L'observation de l'univers (2)

Mais il reste prisonnier de son univers observable
Prisonnier de l’espace, du temps et de la matière
Qui ne laisse pas tout voir et encore moins toucher
Prisonnier de l’instant présent et de sa position

Mais la divagation peut remplacer la vision
Les idées percent l’horizon de mots fulgurants
Que conduisent vers d’autres horizons
Et pénètrent en d’autres mondes imaginaires

Derrière la pellicule de la visibilité
Se cache le rêve, la croyance et la vanité
Duperie excitant pour les petits hommes
Qui toujours veulent aller plus loin

Et si l’on veut aller au-delà, dans les nuages
Au-delà de moi qui voit difficilement le sens
La totalité parfois le prend à gorge
Et conduit jusqu’à l’infini ou parfois au zéro

14/02/2021

L'observation de l'univers (1)

De l’univers, l’homme n’observe pas grand-chose
"L’univers, c’est un livre et des yeux qui le lisent"
Disait Victor Hugo, ajoutant curieusement
"La matière n’est pas et l’âme seule existe"

Tout d’abord, l'homme s’observe lui-même s’observant
Il ne se voit que d’où il est et au moment où il observe
Il est au cinéma, assis, face à une image à l’arrêt
Sans pouvoir tourner la tête à droite ou à gauche

Certes, il peut bouger les yeux sur le tableau du monde
Mais sa visibilité est limitée par la qualité de son œil 
Par son angle de débattement et l’atmosphère poussiéreuse
Ce qui n’ouvre guère la vision et l’imagination

Il a ensuite amélioré sa vue par le grossissement
Multipliant lentilles et positions d’observation
Mais il reste bien sur terre devant un ciel bleu
Ou noir à d’autre moment du temps qui file

Il s’est offert de nouveau spectres observables de lumière
Qu’il ne voyait pas auparavant, agrandissant ses pupilles
Il voit maintenant hors de la lumière visible à l’œil 
Perçant jusqu’aux rayons qui traversent son corps

11/02/2021

Blanc et noir

Nuit envahissante
Mais pas un bruit
Il ne se passe rien
Excepté le coton
Tombant sur l’herbe
Qui devient blanche

La ferveur des femmes
Se dévoile peu à peu
Elles ôtent leur corsage
Et roucoulent d’aise
La fraicheur les glisse 
Entre deux pages écrites
De leurs plaintes douces

Caresse-moi, toi
Ami de toujours
Qui rafraichit le corps
Et nettoie l’esprit
Fond sur mon cou
Emplis ma chevelure
Étonne mes longues jambes
Ouvre mon cœur 
Et prends mon âme

Rien ne m’appartient plus
Je suis la neige immaculée
J’ai perdu ma consistance
Et mes couleurs troubles
Tu ne peux me prendre
Car si tu me touches
Je fonds et m’évanouis 

Je suis la passagère
D’un jour, d’un matin
Au réveil ébloui
Entre deux draps

Oui, je suis…

08/02/2021

Tendre hiver

Le tendre hiver s’en est venu
Le jardin ruisselle d’eau
Les arbres se penche sur leurs genoux
Et rêvent de jours meilleurs
Peu de bruits troublent ce silence
Le craquement d’une articulation
L’envol d’une poule d’eau
Les jappements d’un chien
Et toujours cette sensation de froid
Dans la pièce mal chauffée
Qui donne sur la rivière

Heureusement, ce matin
Comment ne pas courir dans la campagne
Se laisser aller dans une poursuite
Sans but ni dessein littéraire
Pour le seul plaisir enchanteur
De respirer l’air frais de l’aurore
Et ramener dans le lit encore chaud
Le blottissement des premiers rayons
Sur le corps glacé du dehors

04/02/2021

Haïku

 

Avait-il rêvé
Était-elle innocente ?
Mourir sans savoir

 

01/02/2021

Peurs

La beauté de ton environnement
t’est-elle, un jour, venue à l’esprit

Tu erres sans cesse entre tes idées
Et ne vois plus la punaise cachée
Tu retournes une page blanche 
Et n’aperçois pas la fuite d’un cafard

À une plus grande échelle
Tu glisses ta main dans le mur
Et sens les fourmis grouiller

La prison de tes sens exacerbés
T’empêche d’apprécier la chatouille
Des pas de tendres mille-pattes
Et la symphonie ailée des moustiques

Alors, fais l’expérience un jour dans ta vie
Enferme-toi dans la prison
Ferme tes écoutilles, serre tes poings
Et laisse-toi aller dans tes peurs enfantines
Jusqu’à verser quelques larmes
Avant d’ouvrir la porte sur le monde
Et de rire de tes frayeurs inavouées

 

23/01/2021

Verte

Le décor n’a guère changé
Le vert en compose la toile de fond
Vert de la fièvre de l’enfance
Vert des délires verbaux
Vert des fumeries d’opium
Vert d’un mal de tête
Et pourtant tu trônes hors de toi-même
Dans l’obscurité de tes maux
Et la blancheur de tes pouvoirs
Le décor se meut hors de toi-même
Tu marches léger, en chaussettes
Un brin d’herbe entre les dents
Tu regardes défiler ta vie
Un va et vient d’automne
Une immobilité bienvenue
Une queue de rat comme main courante
Qui parfois s’immobilise
Pour mieux te piéger et tromper
Ton sens aigu de l’écoulement du temps
As-tu vu passer ces années ensoleillées
Ta jeunesse dans ses craintes
Tes désirs ambigus et vertueux
La caresse troublante et passionnée
De celles que tu convoitais
Jusqu’au jour où tu la rencontras
Verte de vertus esseulées
Parapluie contre l’adversité
Immortalisée et tremblante
Sous la pluie de sa beauté
Que toujours tu contemples
Encore maintenant et à jamais
Le regard fixe et émerveillé
Seul point fixe dans ton rêve
D’une vie de jeune homme
Toujours à fleur de peau
Oui, le vert te va bien
Même lorsqu’il jaunit

20/01/2021

Fil d'Ariane

Vous arrive-t-il d’être muet
Et de n’avoir aucune pensée 
Rien qu’un vague écœurement 
Qui vous fait rejeter l’environnement
Et vous contraint à vous lover
Sur un délicat et discret secret ?

Le monde vous délaisse
Eh bien laissez-le tomber
Prenez votre tête en main
Et courez la mettre au coffre-fort
Puis sortez en toute liberté
Aux vues de tous et toutes

Montrer vos faiblesses
Faites entendre vos plaintes
Transformer votre solitude
Jusqu’à ce point unique 
Où tout ne rime à rien
Et rien devient le tout

Alors se dévoilera l’absence
Ce tendre matelas de laine
Où s’enfonce ce moi
Et d’où émerge le soi
La légèreté faite autre
Hors de toute connaissance

Flottez au-dessus du quotidien
Mêlez-vous à l’inconsistant
Aux nuages sans image
Jusqu’à n’être plus qu’un filament
Encore attaché au pouvoir
D’être homme sans devenir

A… Dieu…
Ne rompez pas le fil…

15/01/2021

La vie

Le vers de terre est un drôle d’être
Comment ne pas lui donner raison ?
Il lui arrive d’être prisonnier
Mais il se délivre sans difficulté
En se lovant sur lui-même 

L’oiseau moqueur a une grande gueule
Et un petit bec prétentieux
Il ne sait pourtant pas protester
Face aux attaques des petits
Qui l’accablent et rient de son inconséquence

L’homme dans sa naïveté frêle
Court après la vie sans pouvoir la doubler
Il lui tend même des embuscades
Sans toutefois pouvoir la piéger
Il ne sait pas feinter le dernier jour

04/01/2021

Voeux aux lecteurs d'un jour

Un point crée l’univers
Puissance de la volonté divine
Il souffla sur la poussière 
Et celle-ci devint créatrice à son tour
Engendrant la beauté et la vérité
Le souffle divin sur la braise cosmique
Crée l’infini et vous fait participant de l’infini

Que nous tous rêvions d’être créateurs
Faisant avancer l’année
Par de beaux projets
Et apportant notre pierre
Ainsi sera comblé l’infini
En nous conduisant à notre réalisation

Bonne année 2021 à vous tous,
connus ou inconnus,
qu’elle vous apporte espérance et amour du monde.

 

03/01/2021

La grande Charlotte

Plus rien ne sera comme avant
Elle n’aura plus ses cheveux blonds
Ne sera plus harnachée de la tête aux pieds
Elle ne partira plus sans que l’on sache où
Elle n’errera plus dans les rues de Tokyo
Ni dans celles de Topahunca la désolée

Dorénavant, elle ira comme sa sœur 
Sage et froide comme la mort
Elle sourira aux passants échevelés
Elle caressera les plumes du paon
Elle ira bravement à la ville voisine
Voir si son professeur de musique
Joue toujours du violon à cinq cordes
Elle partira courir aux pieds du Mont Blanc
Et toujours reviendra fraîche et jolie
Auprès de tes rêves les plus fous
Jusqu’à t’enjôler et te rendre fou 

Ainsi dépassa en une matinée
L’image dévoyée de la grande Charlotte
Qui dansait la nuit dans les rues de Paris
Et pour moi, ce n’est plus qu’un souvenir
Qui passe au creux de ma mémoire
Et s’évapore au fond d’un rêve

 

28/12/2020

L'autre

Il entra subrepticement
Le noir l’emplissait
Il venait de crever l’abcès
Et pénétra au-delà du connu

Le silence accompagnait l’image
Noir, pas un bruit
Rien où s’appuyer
Il marchait dans le coton
Avançait avec peine
Malgré l’absence d’obstacles
Là, au centre de lui-même
Il n’y avait rien
Juste une sphère
Un grain de folie
Dans l’immensité du quotidien

Le temps s’arrête
La vie n’est plus
Ou tout au moins l’agitation

Il s’absente
Il ne sait rien
Et il sait tout
Mais le tout n’est rien
Et le rien devient tout
Il voudrait bien secouer ce refuge
Savoir si le grelot tinte

Est-il encore là, au centre
Dans ce moi qui le détient
Ou a-t-il franchi la porte
De la blancheur absolue
Dans laquelle rien ne pèse
Sans temps ni espace
Juste un douillet nuage
Qui l’entraîne au loin
Au-delà des apparences
Où le rien et le tout se côtoient
Où ni la hauteur ni la largeur
Ni même la profondeur
N’ont d’existence 

Le soi est vide de tout
Le tout n’est plus qu’un chatouillement
Au fond de la gorge
Qui n’est ni un rire ni un regret
Un vague souvenir
D’une vie antérieure
Pleine de bruits et de fureur

Ne reste plus qu’un rideau impénétrable
Qui cache l’autre monde
Inconnaissable, mais bien réel

 

22/12/2020

Viens écouter l'herbe pousser

Un matin, elle lui prit la main
Elle sourit, mystérieuse, grandie
Et, sans rien dire, l’entraîna
Vers les champs et les prés
Pour écouter l’herbe pousser

Où aller pour cela ?
Derrière la maison,
Près de la rivière
Là où le bétail ne va pas
Il y a trop d’orties

Elle portait sous son bras
Un tissu de fleurs en fête 
Qu’elle déploya souplement
Avant de s’étendre dessus
Souriante, elle lui tendit la main

Viens écouter l’herbe pousser
Lui dit-elle d’une voix douce 
Pour cela, il faut t’étendre
Fermer les yeux en ouvrant les mains
Et laisser ton cœur battre

Les yeux clos, elle s’alourdit 
Avec la légèreté d’un écureuil
Volontairement inerte, elle resta
Un brin d’herbe dans la bouche
Entre ses incisives blanches

Dieu, qu’il était beau ce brin
Vert tendre, droit de souplesse
Reposant sur le velours des lèvres
Approche, me dit-elle
Écoute l’amour du monde !

Il s’étendit à côté d’elle
Glissa également un brin d’herbe
Entre ses dents et ferma les yeux
Quel silence, pensa-t-il
Il oublia son corps. Ils étaient deux

Que se passa-t-il ensuite
Il ne sut ce qu’elle projetait
Il sentit la caresse de l’herbe verte
Le souffle tiède de ses lèvres 
Et les brins d’herbe se frôler

Chut ! Ne parle pas
Elle lui prit la main
La posa sur sa poitrine
Le regarda profondément
L’amour était là, bien vivant

20/12/2020

Lune

Dernière année de jeunesse
J’approche du moment fatidique
Où les astuces ne marchent plus

Un an seulement à vivre
Avant de perdre la blancheur
Et de devenir adulte définitivement

Que vais-je faire de ma vie ?
M’agiter dans mon bocal
En regardant la jeunesse

Je ne pourrai me délecter de fraîcheur
Ah, j’ai encore un avantage
Je peux courir dans les prés sans relâche

Oui, la barbe à papa ne fait plus effet
D’ailleurs les gens me regardent
Comme un crocodile empaillé

Ils n’ont plus peur de glisser un doigt
Dans la gueule du monstre
Pour le faire sourire bêtement

Dieu, que les adultes sont ennuyeux
« Fais risette mon doux lapin
Et goûte ce doigt de miel »

Je n’ai que faire de vos gâteries
Encore enrobé de chocolat
J’hume la grandeur du passage

C’est la dernière année
Réjouis-toi, l’œil écarquillé
Et fume tes dernières réjouissances

Rien ne vient sans effort
Même les derniers instants d’enfance
A la lecture du journal des jeunes

Encore un an et je serai adulte
Définitivement engoncé et malheureux
Dans mon costume trois-pièces

Ne pleure pas, c’est le lot
De chacun sur cette terre
Pour s’évader au petit matin

Mais pas avant de fêter
La dernière lecture du journal
« On a dansé sur la lune ! »

18/12/2020

Fille ou femme

C’était une fille, une jeune fille
Si jeune qu’elle était encore fille
Et non femme de toujours
Aux traits versifiés de miel

L’éclair du regard monte en flèche
Au-delà du clocher sur le soleil
L’ombre n’est plus de noir
Mais de chaleur de peau

Elle avançait avec délectation
Dans la blancheur de la nuit
Haussant ses frêles sourcils
Souriante de lèvres enfiévrées

Sans un mot, elle avançait
Tendant la main aux vents
Pour goûter la fraîcheur
De ce jour si nouveau pour elle

Jamais elle n’avait connu
Ce frémissement imperceptible
Ce tremblement divin de la chair
Jusqu’à son ouverture involontaire

Avance vers la lumière !
Enrage d’être ce que tu es
Deviens ce que tu seras
Quand la femme surgira

14/12/2020

Immortels

L’ombre des grands arbres s’est retirée
Ne reste que le nuage d’incertitude
Que donne l’absence de ta présence
Comme la douceur d’un voile de mariée

Te souviens-tu, toi, belle comme le jour
De l’étincelle de ton sourire de bonheur
Dans la fraîcheur de la campagne glacée
Rien d’autre n’existait, que ta beauté

Puis, le temps est passé, imperceptiblement
Les feuilles sont tombées, une à une
Les sourires se sont tus, muets de stupeur
Nous étions figés dans le stupre protecteur

Le réveil nous incite, sagement
À rêver à d’autres voyages à deux
Les yeux ouverts sur la nuit vacillante
Les bras tendus vers l’inconnu

Quand donc redeviendrons-nous immortels ?

10/12/2020

mort d'un personnage

Mort… Il est mort
Celui qui vécut un train d’enfer
Qui courut au-dessus de ses jambes 
Et tint longtemps la dragée haute
 A ses concitoyens égarés

Affairé, mais discret, il suivait
Sa tâche, guidant les autres
Seul, sachant ce qu’il voulait
N’expliquant rien, pensant en lui-même
Jusqu’à ce qu’il tombe une nuit
Comme une masse de roc
Ou une fleur desséchée…

Il était le maire
Il fut le père du village
Que le Seigneur l’accueille
Et le comble de ses grâces… 

 

29/11/2020

Cécité

Il vécut prudemment
Toujours aux aguets
Épiant les interventions
Fuyant les incapables
Grappillant sa nourriture
Sans connaître la somme
Des accumulations
Ni celle des pertes
Jamais il ne calculait
La dose à transmettre
Un secret bien gardé
Qui l’enchantait seul
Comme l’écureuil
De branche en branche
Il courrait vers la lumière
Et fut poursuivi sans fin
Jusqu’au jour du départ
Du dernier train
Pour le bout du monde
Sans billet de retour
Il connut la faim, l’absence
Le manque de sommeil
La solitude et l’ignorance
Jusqu’à la rencontre
Avec la finaude des nuages
Qui glisse son regard
Derrière l’opacité des mots
Et l’absence de clarté


Le monde est plus que ce qu’il était…

 

25/11/2020

Rat

Le rat n’est pas là
Le chauffeur râle
Je ne vais pas m’enraciner ici !
Crie-t-il à qui veut l’entendre
Il déraille, s’exclame le chat
Y a-t-il plus enragé ?

 

20/11/2020

Le chat qui pêche

Le chat qui pêche n’a plus vingt ans
Son poil lustré est couvert de farine
Il étire mollement ses membres
D’une grimace de dégout et de crainte
Laissant sa queue dans l’eau
Sous la contrainte de la faim

De l’autre côté du miroir, sous la surface
La raie étale son corps de rêve
Et caresse les vagues d’un air tendre
Attendant qu’un jour, lasse
Elle épuise ses dernières forces
À surfer sur le creux des eaux
Et s’enfonce dans l’ombre noire

Le chat, qui regarde en lui
Voit le manteau blanc de la raie
Passer sur son ombre grise
Caresser la queue luisante
Subjugué par la proéminence
Flottant au fil de l‘horizon

Oui, les raies ont aussi une queue
Qui danse à la surface ondulée
L’étincelle se produit
L’air et l’eau se rencontrent
L’étincelle explose
La mort a fait son œuvre

Le rêve s’est évanoui
Ne restent que quelques poils
Couleurs d’argent et d’or
Qui tournent en rond
Jusqu’à l’engloutissement

La faim de la fin n’est plus