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25/05/2014

Leçon de vie

Chaque instant de la vie peut se transformer en leçon de vie. Mais la plupart du temps, l’on n’y prend pas garde. L’instant s’en va sans que l’on réalise ce qui s’est passé. Plus tard, bien plus tard, cet instant resurgit dans la mémoire et l’on découvre l’importance d’une expérience inédite.

Jérôme avait dans son écurie un cheval fougueux. Dès qu’il lui présentait un obstacle, sa monture ne pouvait s’empêcher de foncer comme un furieux pour le sauter maladroitement. Cela faisait un an qu’il tentait de le calmer. Certes, ce cheval prenait de belles allures, exprimait sa vivacité avec élégance, mais il suffisait d’un changement d’ambiance pour qu’il retrouve sa nervosité et perde pied. Pour lui apprendre à s’équilibrer aux abords des obstacles, il ne le fit sauter qu’au trot, d’abord avec trois barres par terre ce qui le contraignait à se rééquilibrer avant la détente du saut. Puis il lui fit sauter des doubles, de préférence oxer plus droit de façon à l’obliger aussi à l’équilibre dès la réception du premier obstacle. Le cheval développa une détente extraordinaire et sautait sans problème des obstacles importants avec facilité. Cependant, dès qu’il demandait les mêmes exercices au galop son défaut revenait très vite. Il chargeait commun un fou et enjambait l’obstacle en catastrophe. Comme il fallait à tout prix le sortir et le tester, il fut engagé en concours complet, dans une épreuve de niveau national (à l’époque 4ème série). Tout se passa à peu près bien, avec quelque frayeur sur certains obstacles, en particulier ceux présentant un contrebas important. L’un d’eux, une rivière surmontée d’un oxer, fut particulièrement pénible à franchir. Jérôme décida, l’épreuve étant terminée, de lui faire franchir à nouveau dans le calme l’obstacle. Mais ce fut le trou noir. Il ne se souvient que d’une image, le vol sans pesanteur avant de toucher le sol. Réveil dans l’ambulance qui se dirigeait vers l’hôpital au son des avertisseurs d’urgence.

Après un mois d’inactivité, le temps que son corps se remodèle et se réaffirme, il reprit le travail sur le même cheval. Non, il ne songea pas un instant à l’abandonner ou à le confier à quelqu’un d’autre. Il parla un jour avec un adjudant-chef en charge des jeunes chevaux de ses difficultés. Celui-ci lui confia qu’il valait mieux abandonner l’espoir de lui faire faire du complet en raison de ses problèmes de rééquilibrage aux abords des obstacles. Mais ce n’était pas pour autant qu’il fallait arrêter l’obstacle. Ce jour-là, alors qu’ils étaient seuls dans le manège, le vieux maître lui dit : « Je ne vois qu’une solution. S’il court vers l’obstacle, non seulement laisse-le courir, mais pousse le encore plus fort. S’il ne veut pas tomber, il sera obligé de se tasser. » Jérôme n’était pas très rassuré. Mais il n’avait plus rien à perdre. Le maître mit un bon droit d’un mètre quarante et lui dit : « Ne cherche pas à le retenir ou à l’équilibrer. Il doit trouver tout seul son équilibre et il va forcément se tasser sinon il tombera. Au contraire, pousse-le, plus il approche de l’obstacle. » Jérôme se dit qu’il n’avait plus rien à perdre. Soit les choses se passaient comme le maître l’avait dit, soit il devrait abandonner ce cheval. Prenant son courage à deux mains, après une volte au fond du manège, il se présenta sur la ligne du milieu, face à l’obstacle et à la sortie. Le cheval aussitôt accéléra et rien ne vint tenter de le ralentir. Au contraire, son cavalier le poussait vers l’obstacle, ce qui le contraint à raccourcir sa foulée, à s’équilibrer et, après trois ou quatre petites foulées à sauter. Le saut fut puissant et superbement maîtrisé. Jérôme n’en revenait pas. Certes, il ne contrôlait rien, mais tout se passait beaucoup mieux que lorsqu’il cherchait à lui faire reprendre un équilibre. Il recommença plusieurs fois, écoutant les conseils du maître. Ce fut éprouvant pour lui, car il lui fallait agir à l’inverse de ses habitudes, avec une certaine peur au ventre malgré tout.

Les deux compères se donnèrent rendez-vous chaque jour pour poursuivre cette découverte, améliorer la maîtrise de l’abord avec un obstacle, puis deux, puis trois, enchaînés avec des changements de direction. Le cheval fonçait toujours sur les obstacles, mais avait compris qu’il lui appartenait de se choisir son appel. Jérôme prit confiance en lui, et dès que le cheval accélérait vers l’obstacle il le poussait encore plus. Vint le moment où ils décidèrent de le sortir en saut d’obstacles. L’adjudant-chef dit à Jérôme : « Continue à faire ce que tu fais à l’entraînement. N’ai pas peur et tout se passera bien. » Ce ne fut pas un tour de rêve, mais ce fut tout de même un sans-faute rapide. Huit jours plus tard, il bouclait un nouveau sans faute sans difficulté. Un mois après Jérôme engagea son cheval dans un « choisissez vos points », épreuve de saut d’obstacle dans laquelle le tracé du parcours est laissé libre, chaque obstacle délivrant un certain nombre de points selon sa difficulté. Jérôme, maintenant assez confiant dans sa monture, décida de tenter un grand coup : sauter tous les obstacles les plus hauts et rapporter le plus de points possibles. Il gagna l’épreuve avec pas mal de points d’avance sur le second.

Ce jour-là, il comprit la leçon de vie : il y a une marge aussi importante entre la théorie et la pratique qu’entre la pratique et l’art. La théorie n’est que savoir sans connaissance. Elle ne conduit qu’à une certaine pédanterie parce que sans apprentissage de la réalité. Celle-ci est dure, exigeante et contraint celui qui en fait l’expérience à une certaine modestie. Mais le passage de la pratique à l’art est encore plus contraignant intérieurement. Perdre l’arrogance de la certitude pour se laisser guider par quelque chose qui nous dépasse et lui faire confiance. Ne plus se fier à sa connaissance, mais être prêt à recevoir une pleine confiance en soi tout en se sachant que cette maîtrise ne vient pas de soi. Oui, c’est l’Esprit qui nous sort de notre bien-être maladif et nous permet d’acquérir ce que nous ne pouvons atteindre par nous.

Alors, profitons de ces instants merveilleux ne dépendant pas de notre volonté. Ils nous donnent des ailes et le sourire en plus. Et ce qui s’est réalisé ce jour-là en équitation se réalise en toute chose, qu’elle que soit la discipline. Mais cela n’arrive que si l’on a été jusqu’au bout de ses possibilités de travail personnel.

24/05/2014

Thèmes roumains, François Salque et Vincent Peirani

http://www.youtube.com/watch?v=7fX4XGoVgX4


 

Un pot-pourri de musique roumaine, une musique gaie et mélancolique à la fois, à l’image du pays, île de latinité dans un océan slave. Un mariage de langues, de culture, de religion et de musique. Quelle association que le violoncelle et l’accordéon, le sel et le poivre associés dans un plat à l’avant-goût sucré qui progressivement se révèle salé et fort.

Le cœur à fleur de peau vibre dans les premiers accents du thème, un déchirement dans un océan vibrant de souvenirs, qui progressivement devient une exaltation endiablée qui passe du passé au présent jusqu’à faire oublier tous les mauvais moments de la vie et faire remonter au fil des secondes ces instants de bonheur furtif dont on n’arrive plus à se souvenir. Et cela devient de véritables pirouettes sur des nuages chaleureux qui emportent dans d’autres cieux sans larmes, mais d’une mélancolie intense, comme un bonbon aux multiples goûts qui l’on suce les yeux fermés, sans savoir exactement de quoi il est fait.

Merci à ces deux musiciens dont l’association est une lumière qui donne une compréhension immédiate de l’âme de l’Europe centrale.

23/05/2014

Sous la pluie

Sous la pluie de notre déraison
Les regards abrités de tes paupières
Abordaient la venue des saisons
Du métal de leurs facettes altières


L’image vide,
Les mains à la pesanteur de l’âme
Je rêve parfois...

© Loup Francart

22/05/2014

Fuite

C’est bien une fuite vers l’infini qui pointe son doigt vers le spectateur. Ce grain de matière grandit dans le temps et le regard le pénètre, se concentre en son milieu et tourbillonne avec lui. Venu de la nuit des temps, il part vers la froideur des espaces lointains, auréolé de l'admiration du regard des hommes.

 

 © Loup Francart

21/05/2014

Le visage de Dieu, d’Igor et Grichka Bogdanov

Le livre d’Igor et Grichka Bogdanov, Le visage de Dieu, Grasset, 2010, a soulevé de nombreuses polémiques. Hors de cela, il a un avantage. Il met à la portée de tous les réflexions des plus grands savants actuels sur la naissance de l’univers : le Big Bang  et ce qui pouvait être avant celui-ci. Commentant les images de l’univers naissant transmises par le satellite COBE, George Smoot, prix Nobel de physique, s’exclame : « Pour les esprits religieux, c’est comme voir le visage de Dieu ! ». Cependant, aujourd’hui le mystère reste entier. Ce dont nous sommes certains, c’est que l’univers possède un code, les lois physiques, dont l’origine est au-delà de l’univers créé, au-delà du temps et de l’espace qui sont, avec la matière, nés avec l’univers. Paul Davies (The Mind of God, Simon et Schuster, 1992) dit que ces lois ont un caractère abstrait, intemporel, éternel. Il écrit : « J’appartiens au nombre de ces chercheurs qui ne souscrivent pas à une religion conventionnelle, mais refusent de croire que l’Univers est un accident fortuit. L’univers physique est agencé avec une ingéniosité telle que je ne puis accepter cette création comme un fait brut. Il doit y avoir, à mon sens, un niveau d’explication plus profond. Qu’on veuille le nommer « Dieu » est affaire de goût et de définition. »

Au-delà de l’histoire de ces recherches et des récentes découvertes de la cosmologie, Igor et Grichka Bogdanov tente, sans doute maladroitement, mais toute idée nouvelle est perçue comme maladroite, une explication de ce qui a donné naissance au Big Bang. Faisant suite à l’interrogation de George Smoot (Pourquoi y a-t-il quelque chose plutôt que rien ? Pourquoi y a-t-il de l’Etre ?), ils posent la question de l’ADN cosmique, ce code de l’Univers au-delà du temps, de l’espace et de la matière.

« L’un des objectifs de la science consiste, pour l’essentiel, à réduire la complexité apparente des phénomènes, à leur donner une explication simple. Si vous ramassez une poignée de neige au creux de votre main, vous verrez très vite que chaque flocon est différent des autres. Certaine sont cristallisés en étoiles, d’autres en hexagones, d’autres encore en cercles parfaits couronnés de six petites pointes : tous uniques, les flocons peuvent être ramifiés d’une infinité de formes, ces myriades de combinaisons  vont se résoudre en une réalité très simple, commune à tous les flocons ; il suffit de les faire fondre dans votre mains pour réduite l’infini des figures géométriques à quelques gouttes d’eau ; un soupçon d’hydrogène et un souffle d’oxygène. »

Les auteurs répondent-ils à leur question du chapitre 21, le dernier : d’où vient le Big Bang ? Leur réponse : l’information. Malheureusement cette hypothèse, qui n’est certes pas idiote, est insuffisante pour être prise au sérieux et surtout insuffisamment réfléchie et expliquée, d’autant plus qu’ils ajoutent : « Y a-t-il encore quelque chose au-delà ? Si nous acceptons l’idée que l’Univers est un message secret, qui a composé ce message ? Sans doute l’absence de réponse est-elle écrite dans le message. »

Ont-ils ajouté leur toute petite pierre à la compréhension de notre origine ? Cette réponse semble bien insuffisante et même s'ils apportaient les preuves de leur affirmation, que signifie le terme information ? S’agit-il d’un contenant ou d’un contenu. L’information n’est qu’un terme vide qui ne dit rien du contenu. Ils ont transposé le fait que toute réalité est information pour dire qu’à l’origine de l’univers il y a l’information. Cela rappelle cette affirmation de Proudhon : « Dieu est la force universelle, pénétrée d'intelligence, qui produit par une information d'elle-même, les êtres de tous les règnes, depuis le fluide impondérable jusqu'à l'homme » (Pierre-Joseph Proudhon, Confessions d’un révolutionnaire, Garnier Frères, 1849). Oui, l’information certes, mais laquelle, que contient-t-elle et d’où vient-elle ? Comment aurait-elle pu se fabriquer toute seule ?

20/05/2014

La tourada à Lisbonne, le 14 mai

La tourada est la corrida pratiquée au Portugal, essentiellement à cheval, mais également à pied, sans mise à mort. Trois cavaleiros affrontent chacun un ou deux touros. Aujourd’hui, c’est la réouverture des arênes à Lisbonne  et cela promet.

A l’arrivée dans les arènes, ce sont les cris des anticorridas qui créent l’ambiance. Ils sont parqués entre des barrières de grillage et hurlent leur désaccord. Cela n’empêche nullement les acteurs et les spectateurs de poursuivre tranquillement leurs préparatifs : s’échauffer pour les uns, trouver sa place pour les afficionados.

Dans une abiance excitée, les cortesias commencent, c’est-à-dire les défilés des cavaliers, de leurs quadrilhas et des forcados. Tradition oblige, les cavaleiros sont mis en valeur. Ils défilent en montrant le meilleur d’eux-mêmes et de leur monture : petits galops sur place ou mieux, mais tous ne peuvent le faire, au passage. Les spectateurs applaudissent, criant, excités. Les cavaliers font le tour de l’arêne dans le sens des aiguilles d’une montre (c’est curieux comme la plupart des activités humaines dans une surface en cercle se passent de gauche vers la droite et non l’inverse !). Ils font face au public en permanence dans un galop en appuyé très exagéré qui n’a rien à voir avec l’appuyé des reprises de dressage. Ils mettent en évidence l’adresse de leur monture. Celles-ci sont calmes, habituées au spectacle et aux cris. Les cavaliers sont vêtus d'un habit du XVIIème siècle, étincellant. Ils portent beau et sourient à la foule, levant la main d’un geste de danseuse à la Française. Contraste avec les grupos de forcados, jeunes gens habillés en valets qui, en rang dans l’arêne, ne bougent pas. Ils sont tendus, presque blancs, ils tracent au sol des croix de leur pied droit. On sent cette angoisse des premiers instants quand bientôt tout doit se jouer, mais où rien ne se passe encore. Le défilé terminé, le silence se fait. Un trompetiste, à côté du président de la tourada, sonnent les joues gonflées et le teint rouge, le premier tercio. Le cavaleiro entre seul, vient saluer la présidence, fait quelques tours d’échauffement au galop à droite et à gauche, puis se place devant la porte de sortie du tauro. Il fait signe qu’il est prêt. La porte s’ouvre. C’est le silence après les applaudissements et les cris du public qui a salué son cavaleiro. Mais rien ne sa passe. Dans la plupart des cas le taureau hésite à sortir, il faut le pousser, l’exciter avec les capes. Il sort soudain, et voit sur sa droite les capes agitées par la quadrilha du cavaleiro. Il fonce dessus avec célérité jusqu’au péon qui fait quelques passes à la cape, mais qui n’ont rien à voir avec l’art des toreros espagnols. Il a l’air gauche, éloigne le plus possible la cape de son corps et esquive au plus loin les cornes gainés de cuir du taureau. Ces passes sont d’ailleurs considérées comme des à côtés de la tourada et non rien à voir avec la noblesse des passes du torero espagnol.

https://www.youtube.com/watch?v=y0NQZAuxmF0

Le cavaleiro commence alors son travail ou plutôt se livre à son art. Il débute par la Farpa en fatigant le taureau et en l’observant, puis en plantant sur son encolure une farpa, sorte de petite lance qui se détache du manche en libérant un drapeau qui contraint le taureau à le suivre dans ses évitements des cornes. Le cavaliero change alors de cheval et entame le Tercio des banderilles : quelques provocations, quelques tours où le taureau poursuit le cavalier, puis le défi du face à face entre le taureau et le cheval qui charge pour permettre au cavalier de planter ses banderilles. Celles-ci deviennent de plus en plus petites. C’est le moment le plus important de la tourada, une sorte de ballet entre trois volontés, le taureau déjà essouflé et fatigué par les farpas plantés sur son cou, le cheval et le cavalier qui esquivent les cornes au plus près soulevant les cris et applaudissements du public. Certains cavaleiros pratiquent l’art pour l’art, restant très distants vis-à-vis de ce qu’ils font. D’autres jouent avec le taureau, l’esquivent dans la ferveur des afficionados, encourageant le public à applaudir. Certains exagèrent même cette mise en scène, transformant leur prestation en manifestation virile et macho. Le juste milieu est pourtant une fois de plus ce qui émeut le plus : sérieux, équilibre, domination des émotions. Ce fut le cas avec Pablo Hermoso de Mendonza.

https://www.youtube.com/watch?v=xF01AQv4Fw0

Enfin, le troisième tercio est la pega, effectuée par les forcados, une équipe de jeunes gens qui vont arrêter la charge du taureau à mains nus et l’immobiliser. On les sent nerveux, l’angoisse monte sur leur visage, mais aucun ne montrera réellement sa peur dans cet affrontement où la démonstration de courage représente le but ultime, mais non dit, surtout de la part du premier forcado qui défie le taureau à l’autre bout de l’arêne, l’appelle, l’incite à le charger, l’invective jusqu’à ce que celui-ci se tourne vers lui et le charge d’une ultime poussée de fièvre aveugle. Le forcado ne doit pas bouger, il se retrouve à cheval sur la tête du taureau, entre les deux cornes gainées de cuir pour que les autres puissent arrêter celui-ci à mains nus. C’est un instant de silence étonnant après les clameurs entendues lors du tercio des banderilles. Chaque spectateur s’imagine à la place du forcado, attendant la charge, la forçant, se voyant déjà projeter en l’air d’un coup de tête. C’est un instant d’angoisse quand on entend les défits du forcado qui appelle le touro à le charger. Cela ne dure que très peu de temps, mais qu’il doit être long pour les forcados dont certains roulent entre les pattes du taureau et se font piétiner.

La fin du spectacle consiste à faire sortir le taureau hors de l’arène en l’entourant de vaches portant une cloche jusqu’à ce qu’il les suive. Etonnant dernière partie, car on est propulsé en Suisse un siècle en arrière, mais cela fait partie de la tourada.

Deux heures de communion avec la tradition portugaise, un bain d’émotion pure pour l’afficionado, de maîtrise du dressage pour le cavaleiro et de maîtrise de soi pour les forcados. Oui, c’est beau de grandeur ancestrale, d’élégance féminine et d’envolée macho.

19/05/2014

Automobile

C’est ma maison, nous crie
Le sans domicile fixe
Elle est encombrée de paquets
Elle regorge d’ardeur
Car c’est le seul lieu
Où plus rien ne l’atteint

C’est mon apparence
Dit le vantard aimable
Il la brique chaque jour
Pour mettre en évidence
Son indigence personnelle
Mais sa brillance s’efface vite

C’est mon cheval de course
Regarde ce moteur en V
Il ne traine pas des pieds
Oui, il court plus vite
Que son ombre enfumée
Et pourtant elle reste à ses côtés

C’est mon salon à vivre
Chante la dame emplumée
Elle reçoit deux à deux
Converse aimablement
Et part à la première alerte
D’une atteinte à son hospitalité

C’est l’accueil pour le sans patrie
Elle devient droit d’asile
Ile au milieu des terres
Refuge du contestataire
De la femme opprimée
De l’enfant sans parent

Pour les plus simples
Ceux qui n’ont pas de rêve
Qui n’ont pas l’âme d’un poète
Ce n’est qu’un moyen
De faire don d’ubiquité
Ou même de bilocation

Le permis est obligatoire
Pour laisser l’imagination
Concrétiser ses rêves
La réalité nous rattrape
Tournez la clé dans l’antivol
Et partez tous phares allumés

 © Loup Francart