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16/07/2017

Maxime

Les gens aiment parler de leur vie

mais bien peu parlent de leur vie intérieure

La plupart avancent la pudeur

pour éviter toute réflexion intime

Ce n'est que fausse pudeur

car combien ils seraient intéressants

au lieu de n'avoir que des bavardages insipides !

 

 

15/07/2017

Divination by Snow (Adagio), de Takashi Yoshimatsu

https://www.youtube.com/watch?v=whbaUjWPax4


Quelques flocons de neige sur le zinc de la perception, qui tombent telles des perles dans le silence de la nuit. Une phrase musicale ouverte, comme une interrogation, suivi d’un rêve coloré, mais très bref, qui résonne dans la tête avec insistance, puis s’organise avant de disparaître. Une tempête se lève, protestation de l’humain devant la vie naturelle qui la surpasse. Le calme réapparaît, plus lancinant, plus bref aussi, comme une petite mort et une ouverture vers un autre lieu, un autre état, ignoré, mais attirant.

La fraîcheur caractérise le morceau, presque un froid qui vous prend le cerveau en premier lieu ; puis le plongeon de l’acier trempé qui vous secoue et vous entraîne dans un cataclysme, avant de revenir au repos dans la poudreuse. C’est une pièce courte, à écouter plusieurs fois, qui laisse une impression étrange, un résumé de vie où les images défilent rapidement, comme lorsqu'on se trouve face à un danger imminent.

 

« Takashi Yoshimatsu est né à Tokyo, au Japon, et comme Toru Takemitsu, il n'a pas reçu de formation musicale dans sa jeunesse. Il a quitté la faculté de technologie de l'Université Keiō en 1972, et a rejoint un groupe amateur nommé NOA comme pianiste, imitant la musique des Pink Floyd. Il s'est intéressé au jazz et au rock progressif, en particulier en explorant les possibilités offertes par la musique électronique.

Il a commencé à composer de nombreuses pièces avant de se faire un nom en 1981 avec « Threnody for Toki » marqué par le sérialisme. Peu de temps après, il s'est éloigné de la musique atonale, et a commencé à composer dans un style néo-romantique libre avec de fortes influences du jazz, du rock et de la musique classique japonaise, renforçant sa réputation avec son concerto pour guitare de 1984. En 2007, Yoshimatsu avait composé cinq symphonies, des concertos pour basson, violoncelle, guitare, trombone, saxophone alto, saxophone soprano et pour les instruments traditionnels japonais, ainsi que deux concertos pour piano (un pour la main gauche seule et un pour les deux mains), un certain nombre de sonates, et diverses pièces plus courtes pour les ensembles de différentes tailles. »

(https://fr.wikipedia.org/wiki/Takashi_Yoshimatsu)

14/07/2017

L'homme sans ombre (5)

Le soir, Noémie sort avec Mathis. Celui-ci n’a pas changé. Il reste affectueux, amoureux. Elle se sent quelque peu décalée. Pourquoi ? Elle ne sait pas. Sans doute, ce qu’elle a vu hier lui pèse. Elle aurait préféré n’avoir rien connu de tout cela. Mais le mal est fait et il lui faut aller jusqu’au bout. Il lui a bien parlé de son désir de solitude absolue, de sa conviction d’un monde surnaturel, de l’espoir transcendant qui tire l’homme vers un au-delà de lui-même. Mais cela a été évoqué en tête à tête, dans un état amoureux qui n’avait ni la rationalité des discours savants, ni la fièvre d’état mystique. Ce n’était que le récit de jours d’enfance ou d’adolescence en quête d’absolu, sans fondement réfléchi. Ce soir, elle tente de l’émouvoir sur ce qui l’a conduit là. Peut-être comprendra-t-il, peut-être lui révélera-t-il quelque chose ?

– Mon chéri, tu sais combien je t’aime. Nous avons décidé de vivre ensemble, pour toujours. C’est une décision joyeuse et sérieuse en même temps. Ce qui est rare en ce monde. Elle exige constance et détermination. Elle impose la transparence de l’un envers l’autre.

– Oui. Je suis conscient de tout cela et j’y adhère. Mais pourquoi me demandes-tu cela ?

Noémie sent qu’elle va être devinée. Elle ne veut pas aborder de front le sujet, mais peu à peu, par touches successives, le dévoiler avant qu’il n’ait pu deviner de quoi il s’agit. Alors elle fait machine arrière. Elle trouve une explication non convaincante et s’engage dans une série de baisers avec son fiancé sans lui laisser le temps de s’interroger. Celui-ci se laisse envoûter et en oublie les questions.

 

13/07/2017

Encore

C’est la parole de chaque enfant
Devant les satisfactions de la vie
Et tout ce qui agit sur les sens

Encore le fruit qui pétille dans la bouche
Encore l’eau qui coule entre les pieds
Encore la course folle dans les herbes coupantes
Encore la main tendue d’un adulte
Qui partage le secret de polichinelle
Encore le baiser tendre sur la joue
Encore le lit douillet encombré de sommeil

Mais viendra le jour où l’exaltation
N’aura plus le dernier mot
Il faudra la trouver en soi
Dans les plis de la connaissance intime
Ou dans celle de livres obscures
Il faudra faire tourner la machine
Et déclamer à l’envie le jus
D’une mémoire grelottante

Quelles étaient belles ces quelques années
Où rien ne venait freiner la liberté
Des jeunes enfants du monde
Sans l’ombre d’un adulte
Pour engager la danse communautaire
Et céder devant la déesse raison

La liberté est bien cet étendard vertueux
D’une petite enfance, quand encore
Signifie toujours, sans horizon…

©  Loup Francart

12/07/2017

Coucher à la belle étoile

L’arbre pénètre de sa solitude la terre dénudée, l’herbe rare siffle entre les jambes, le soleil huppe de gaîté la cime des pins.

Dans ma tente, une maison de toile à l’ombre gigantesque au matin, je devine la nuit le bruit de l’arbre qui se gratte l’écorce, de la fleur qui minaude à l’ombre de la lune. J’entends aussi la quiétude des respirations, un dormeur qui se retourne sur son lit de paille, la toux d’un inquiet sous ses couvertures.

Souvenirs de manœuvre, quand dans la poussière, tu rêvais au calme d’une vallée où coule l’eau fraîche.

Brusquement, réveil. « Vite, debout, nous partons ! » Où, je ne sais. Pourquoi, encore moins. Mais c’est ainsi. Déjà les derniers hommes quittent le campement. Voilà, c’est bouclé ! Le sac arrimé sur le dos, la marche reprend dans la nuit. Il fait frais, mais bon. Je sens la fraîcheur de l’aurore qui sommeille encore avant de naître en douceur. Je ferme la marche. Devant, mon prédécesseur enfonce ses grandes jambes dans les herbes hautes. Je ne vois plus que son buste s’agitant bravement. Une route qui s’étire mollement entre les ombres arborescentes. C’est bruyant, mais la marche est simplifiée. On sait où le pied va car sa résistance est toujours semblable. Elle berce la volonté et lui donne un fond de vérité tranquille, doucereux, plutôt qu’un combat permanent contre soi-même.

Je m’éveille complètement, léger, attendri par l’air rafraîchissant, allégé des miasmes de la nuit, aux aguets d’un jour nouveau, exaltant parce que différent des habituels matins. Les sens exacerbés, je vais au bout de moi-même, ouvert à tous les vents, délivré de ce moi qui me pèse et m’empêche de marcher. Le ciel est étoilé et un sentiment de profonde reconnaissance naît dans l’intimité de la solitude. Je pourrai marcher des jours dans cet état second où le rien devient tout.

11/07/2017

Street Art (2)

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Inégaux certes, mais de belle facture !

10/07/2017

L'homme sans ombre (4)

Ah, enfin, un livre qui parle de la lévitation pratiquée par les moines bouddhistes du Tibet.  Voyons voir ! Elle apprit que les dieux dans la mythologie avaient un caractère qui les distinguait des humains : ils volaient. Effectivement, peu d’humains ont ce pouvoir. Les Indiens Brahmanes, les yogis, les ermites, les fakirs et les magiciens semblent maîtriser l'art de la lévitation. Les Védas, dont le Seigneur Suprême est lui-même l’auteur[1] et qui datent entre 1800 à 500 av. J.-C, décrivent comment pratiquer la lévitation. Un peu plus tard, Appollonius de Tyane, un philosophe né en l’an 16, décrit des brahmanes se soulevant du sol et flottant pendant un certain temps au cours de cérémonies spécifiques. Au Tibet, au siècle dernier, Alexandra David Néel, première femme d'origine européenne à séjourner à Lhassa en 1924, témoigne avoir rencontré un moine qui volait. C’est en fait une sorte de lévitation appelée «lung gom» : « L'homme ne courait pas... Il semblait être soulevé et emporté par des bonds successifs. Il paraissait aussi élastique qu'une balle et il rebondissait chaque fois que ses pieds touchaient le sol. Ses pas avaient la régularité d'une pendule ». En utilisant cette marche effectuée dans un état second il prétendait parcourir très rapidement de longues distances. Mais elle constate que cette pratique existe également dans d’autres pays. En Afrique, des explorateurs ont observé auprès des tribus Fang au Gabon ou des Bouiti au Congo des hommes qui restaient suspendues dans les airs pendant plusieurs minutes. Il en est de même des Amérindiens et des Inuits d’Amérique du Nord aux aborigènes d’Australie.

Lauranne s’arrête là. Elle est lasse de compulser ces ouvrages tous plus savants les uns que les autres. Elle a bien vu les livres traitant de la tradition chrétienne, mais elle n’en peut plus. Si au début elle eut l’impression de devenir plus légère, cinq heures plus tard, elle se sent lourde, les épaules affaissées, embourbée dans une pesanteur collante. Comment ces gens ont-ils fait ? se questionne-elle. Le soir, elle téléphone à Noémie et lui explique qu’elle retourne demain à la bibliothèque car elle n’a compulsé qu’une petite partie des recueils traitant de lévitation.

 

[1] Vedanta-sutra (2.1.27)