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07/10/2012

Barcarolle Op.65 N°6, de Charles-Valentin Alkan, jouée par Marc André Hamelin

http://www.youtube.com/watch?v=ywaE1Mg4y2U&feature=related

Regrets, nostalgie, mélancolie, comment qualifier cette pièce romantique qui se trouve  à l’opposé de ce que l’on a entendu du même compositeur le 17 août (Le festin d’Esope, étude). Bien que musicalement elle soit très différente des pièces de Chopin, on peut dire qu’elle appartient à la même famille.

Une barcarolle est à l’origine le chant des gondoliers. C’est une forme musicale qui évoque les ondulations d’une barque sur l’eau. En Sol mineur, celle-ci nous berce de son accablement joyeux, comme le remord d’un passé qui revient sans cesse nous bousculer. Cette impression est donnée par l’accompagnement de la main gauche qui reprend sans cesse la première phrase énoncée par la main droite : trois notes montantes, puis descendantes, qui se terminent par un rappel à la basse avant de revenir à la finale. Et cette petite phrase va bercer notre vague à l’âme avec des variations qui peuvent rappeler celles de Chopin.

L’interprétation d’André Hamelin semble dans l’esprit de la pièce : romantique à souhait, elle met en valeur toutes les nuances. Peut-être en ajoute-t-elle-même ? Mais qu’importe, ces ralentissements, les diminuendo apportés dans la première phrase en donnent un exemple intéressant. Ecoutez comment la première note de la première phrase est émise : légère, détachée, piano, ralentie, elle donne le ton à la barcarolle.

 

http://www.youtube.com/watch?feature=player_detailpage&v=aScyFhJafBU

Cette interprétation de Jack Gibbons est moins fine, moins chargée d’émotions. Elle est brillante certes, mais ne donne pas la même impression de rêverie douce que procure l’autre.

 

06/10/2012

La résonance

Sonne la campanule dans l’église
Résonne son timbre dans la mémoire
Qui diffuse la fraicheur d’un dimanche
Et l’éclat d’un rayon sur les vitraux

Terre et lune sont elles-mêmes en résonance
Comme deux vieilles sur le pas de leur porte
Devenues jumelles par mimétisme
Elles errent dans leur vie trop large

Chaleur et mirage, effet de la réverbération
L’œil se lasse de se vouloir ouvrir
Alors que l’obscurité étincelante
Réduit la pensée au battant qui vibre

L’écho intérieur est plus puissant
C’est une vague qui submerge l’être
Et qui tintinnabule dans la poitrine
Eclatante de verdeur juvénile

Cette résonance profonde fait chavirer
Vos plus intimes convictions
Et vous entraîne dans des paysages
Aux couleurs chimériques. Flash !

Le coloriste émet ses signaux
En tonalités multiples et souples
Et le regard se noie dans le nuage duveteux
Emportant la magie en écho

Nostalgique est la résonnance
Qui tinte, inflexible, la même mélodie
Elle chuchote dans l’oreille qui l’attend
Et d’un baiser vous emplit l’âme

05/10/2012

Peintures et vitraux de Kim En Joong (2ème partie)

Le Père Kim En Joong s’est lancé dans le vitrail, support idéal pour exprimer l’illumination de la connaissance. Il peint sur le verre et les effets dépendent bien sûr de l'endroit où la composition est placée :

Vitrail 1.jpg

Mais il crée surtout des vitraux pour des églises et couvents :

Vitrail 2.jpg

Il pratique également la céramique ou plutôt, il peint sur des céramiques. Et là, on a du mal à aimer ce style :

Céramique 1.jpg

Il écrit aussi, sur l’art bien sûr, mais aussi sur sa foi de prêtre,Livre 1.jpg tels Ave Maria ou Vraie lumière née de vraie nuit. Fragments d’un monde inconnu, paru en 1996 au Cerf, explicite son attachement à l’invisible derrière le visible de ses tableaux : « Toute beauté vient de Dieu. Et particulièrement celle que les créateurs humains essaient de nous transmettre, car ils ne sont que les interprètes de ce qui leur a été donné. Ici, le peintre écoute en lui-même cette voix qui a ravi, dans le sens littéral, les mystiques... »

Enfin, il a créé un institut qui a pour but de :

·         Développer et favoriser les valeurs spirituelles et humaines en lien avec l’Eglise Catholique romaine par la création artistique dans l’esprit de l’Art Sacré ;

·         Détenir et gérer les œuvres artistiques du Père Kim En Joong dont notamment ses œuvres picturales et tout autre support comme les vitraux, les céramiques, les soies, les livres d’art, les photos ;

·         Aider le Père Kim En Joong dans sa création artistique ;

·        Organiser des rencontres, des sessions, des journées de vernissage, l’accompagnement d’artistes dans l’esprit de l’Art Sacré.

 

 Merci à vous, Père Kim En Joong, pour ce que vous nous laissez voir de ce monde inconnu, au-delà de cette réalité que nous avons déjà du mal à connaître.

 

 

04/10/2012

Peintures et vitraux de Kim En Joong (1ère partie)

Il est dominicain et peintre. Il est né en Corée en 1940 sous l’occupation japonaise, est admis aux beaux-arts et devient catholique en 1967. Après son service militaire, il étudie la philosophie en Suisse. Il poursuit dans la peinture et le dessin en parallèle à sa vie intérieure, puis est ordonné prêtre en 1974.

Il peint la lumière, marqué une expérience de son enfance où un professeur leur montre la décomposition de la lumière à travers un prisme. Ebloui, il chercha toute sa vie à rendre témoignage de la lumière, qu’elle soit naturelle ou intérieure. Une maxime chinoise dit : « Si tu bois l’eau, n’oublies pas où est la source ». Il raconte également : J’ai vécu une autre expérience fondatrice à la cathédrale de Chartres, il y a plus de trente ans, alors que j’étais encore novice dominicain. Lorsque je pénétrai à l’intérieur de la nef pour la première fois, je fus ébloui. Il me semblait percevoir comme un avant-goût du ciel. Je n’avais vu nulle part cette lumière diffusée par les baies où dominent mes trois couleurs préférées : le bleu de l’’espérance, le rouge de la naissance, le jaune signe de la joie.

D’abord tenté par les impressionnistes, il se lance dans l’abstrait, fasciné par la couleur et l’art de manier les taches avec le pinceau. Il participe d’une double influence, orientale et occidentale, ce qui donne à sa peinture une vigueur originale qui laisse entendre le monde vierge de l’invisible.

Le père Kim En Joong est peintre avant tout. Il peint la fluidité de la lumière dans un monde de blancheur immaculée. Chaque tache de couleur est comme une aile de papillon, fragile, aérienne, en mouvement.

huile 1.jpghuile 3.jpg

 

 

 

 

 

 

 

 

Ses noir et blanc traduisent un espace invisible, fragment d’impressions mystiques traduit dans un réalisme abstrait qui ouvre l’âme à l’invisible :

 

huile 4 N&B.jpg

Nous verrons que son talent ne s'arrête pas à la peinture,  mais que toujours il tente de faire part de son éblouissement devant le monde invisible transparaissant derrière l’univers visible.

 

03/10/2012

Téodora pécheresse, film d’Anca Hirte

 Ce n’est pas une fiction, ni même une histoire. On entre par hasard12-10-03Téodora pécheresse.jpg dans la salle, s’attendant à un conflit, même non-dit. Là, rien. C’est un documentaire ? Non plus. Le documentaire tente de motiver le spectateur pour ce qu’il voit. Ici, c’est la vie de chaque jour dans le monastère de Varatec, en Roumanie. Mieux, ce sont les derniers instants de Téodora qui va prononcer ses vœux et se donner au Christ, pour la vie. Une seule chose la soucie, garder son prénom. Une seule chose symbolise ce passage, pour Anca Hirte : les cheveux de téodora qui seront coupés.

Elle n’est pas très belle. Son visage est ordinaire. Mais deux fossettes lui donnent un charme certain lorsqu’elle sourit. Elle ne parle pas, n’explique rien. Elle est humble et sereine, sans hésitation. Elle se livre à la caméra sans y prendre garde. Elle est ailleurs, en elle-même, sans concession avec l’extérieur. La caméra l’explore, sans curiosité ni voyeurisme. Elle met en scène des détails, en gros plan : les lèvres de Téodora, priant ou immobile, ses cils dans la pénombre, sa nuque dénudée et ses cheveux abondants, coiffés par sa marraine du couvent. On la voit accomplir les rituels de la préparation aux vœux perpétuels. On ne sait pas ce qu’elle pense, comment elle réagit. Elle dit simplement qu’elle est heureuse, joyeuse, emplie de la présence du Bien Aimé. Ses seules paroles sont celles échangées avec ses compagnes : d’abord sa marraine avec laquelle elle passe de longs moments, en réalité très banals, comme deux collégiennes préparant un examen ; les autres sœurs de la communauté, à travers leurs chants ou lorsqu’on assiste à une récréation dans la neige où elle s’amuse comme toutes les jeunes filles de son âge ; la mère supérieure qui finit par la rassurer sur le fait qu’elle gardera son prénom.

On vit la cérémonie de l’extérieur, en spectateur passif. On n’imagine ni ses certitudes de foi, ni ses peurs, ni ses doutes si elle en a. Chaque geste est un geste quotidien. Mais le déroulement de ces gestes sur une heure et demie de film leur donne un poids, une signification qui dépasse toute explication. Elle se donne, sans question ni réponse, dans la banalité d’une éternité qu’elle vit déjà.

Est-ce un beau film ? On ne sait. On s’ennuie parfois, mais on reste en attente de quelque chose qui ne vient pas. Lorsqu’on sort de la salle, on a le sentiment d’avoir assisté à quelque chose d’insolite, de décalé par rapport à ce qu’on appelle un film. C’est ce qui en fait sa beauté.

 

02/10/2012

Terre

La terre entassée, lourde, dure, et pourtant belle
D’un pouvoir d’arrachement de soi égale
A sa collante attraction de pesanteur
Oui, mes membres ne sont plus à moi, mais à elle

Elle peut être pomme, velouté et rondeur
Que l’on tient dans sa main, charnue
Avant de la cuire à sa convenance
Et de s’emplir de son goût si varié

D’autres sont terre à terre, face contre face
S’observant en combat, les yeux exorbités
Et bouillonnants d’impatience d’en venir aux mains
Les pieds encrés dans la chair de la glèbe

Parfois elle se sent battue, piétinée par l’humain
Et, humblement, silencieusement,
Elle se couche à ses pieds, en attente
Comme une femme enceinte, à son terme

Cuite, elle devient bronzée, comme l’olive
D’un soleil chaleureux et odorant
Admire la pâte devenue autre
Objet de convoitise et rêve de beauté

Quand le cavalier met pied à terre
Il descend de son nuage, blanc d’écume
Et semble un fantôme évadée
Des rêves d’enfants devenus grands

Elle fut promise à beaucoup, mais peu
Poursuivirent jusqu’au bout
Aussi semble-t-elle un mirage, incandescent
A  qui la regarde de loin, en rêve inconnaissable

De Sienne, elle se colore d’ocre, de brun et de rouge
Son bonnet s’enflamme parfois, la faisant brûlée
Mais naturelle elle est femme dans son huile
Et revêt son chaste abandon au désir

Jean s’est trouvé sans terre, orphelin
Des îles de propriété, rien, sans pain
Ni même un souffle de désir
Esclave du temps et de l’espace

Adélie, elle s’appelle vierge et animale
Pourtant les glaces survivent, raidies
Transparentes d’un long séjour
Au royaume de la mort coupante

Malgré tous ces défauts les vers
Se régalent de leur pâtée quotidienne
Creusant inconsciemment dans la nuit
Des routes tracées et significatives
De la vivante résurgence de tant de naissances

01/10/2012

Pierre-César Lagage, galerie Pierre Lévy (2ème partie)

 

Ces bouillonnements intérieurs se transforment en un art abstrait plein de renouvellement, chaud, lumineux dès les années 45, qui s’épanouit à partir de 1950. La « nature morte au pichet » en est la première manifestation.

Nature morte au pichet 1947.jpg

Deux compositions sont significatives de cette évolution :

Composition 1951.jpgComposition 1952.jpg 

 

 

 

 

 

 

 Cette période donne la pleine mesure du peintre, dans des compositions équilibrées, aux couleurs chaudes, éclatantes de vitalité et de vie intérieure. Oui, cela peut paraître étrange, mais l’abstraction, autant que le figuratif, favorise l’expression d'une force vitale tendant vers la transcendance. C’est un véritable embrasement qui apparaît dans la période suivante, à partir des années 60. Sa peinture devient tachiste, telles ces compositions de 1956 et 1960 :

Composition 1956.jpgSans titre 1960.jpg

 

 

 

 

  

 

Sa dernière période est plus sombre, ou peut-être moins compréhensible. C’est un retour à une abstraction non géométrique faite de nature brute. Elle fait penser aux roches délavées par l’eau de mer que l’on regarde en détail jusqu’à ne plus voir que grains détachés les uns des autres qui manifestent encore l’intériorité caractérisant la vie du peintre.

 

Composition abstraite rose 1967.jpg