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24/06/2012

Séraphine Louis, dite de Senlis (1864-1942)

Séraphine est la femme de ménage de Wilhem Uhde, marchand de tableaux. Ils habitent Senlis. Il voyage, elle peint. Et, un jour, il découvre sa peinture. Emerveillement ! Allez voir au musée Mayol, à Paris, 61 rue de Grenelle. C'est sous les combles, mais montez-y, cela en vaut la peine.

peinture, naïf

Peinture naïve sans doute, mais dans un style italien du 17ème siècle. Belle de fraicheur, spontanée, lumineuse, de couleurs vives et bien mariées. Ce ne sont que des fleurs, mais elles font rêver car toutes imaginaires, sorties tout droit de la tête de Séraphine qui peint pour égailler sa vie, pour illuminer son regard. Et c’est beau d’innocence, de charme, de fraicheur, sans recherche académique, sans réminiscence.

peinture, naïf

Séraphine valorise la nature, lui redonnant la vision de la Bible, débordant de bon, de bien et, bien sûr, de beau. Le dessin est précis, lesFeuilles.jpg couleurs ajustées, ornant les feuilles et les fleurs de pointillés de couleurs vives, chaque tableau représentant une sorte de bouquet exaltant, plongeant le spectateur dans une vision onirique, d’une volupté chatoyante qui enchante l’esprit. Les feuilles semblent avoir des poils multicolores, des nervures rouges ou bleues, des pois comme des points d’interrogation sur leur surface. La feuille devient fleur elle-même ou même plume, à l’égale de celles du paon.

 

La plupart de ses œuvres peuvent être divisées en deux ou trois zones à peu près égales.

L'arbre de vie.jpg

 

La première zone, au bas du tableau, comprend la naissance du tronc des arbres ou des tiges des plantes. Les couleurs y sont relativement foncées. Elle forme un arrière-plan symbolique, la racine de l’être et de la terre. Dans la seconde zone, au milieu de la toile, les feuilles, les fruits et les fleurs aux couleurs plus claires, s’étalent, lumineux, envoutants, exotiques, gorgés de tonalités très variées, mais toujours en harmonie. Cette surface semble une montée vers le sacré, vers un monde empli de parfums célestes. Parfois apparaît une troisième zone, en haut du tableau,  encore plus lumineuse, comme une aspiration vers un monde meilleur, vide de toute représentation terrestre.

 

On pense aux peintures africaines, débordantes de teintes, de nuances qui s’ordonnent pour former un langage de ravissement devant une création entièrement imaginaire.

Elle préparait elle-même ses couleurs, faites de toutes sortes d’ingrédients dont l’huile d’éclairage utilisée dans les églises. Elle peignait à genoux, la toile posée sur le sol, sans s’arrêter, jusqu’à l’épuisement.

 

"Séraphine" a eu son heure de gloire avec le film de Martin Provost.Film.jpg Il relate le tragique destin d'une femme du peuple un peu illuminée, domestique puis peintre autodidacte, et a triomphé vendredi soir aux 34e César, en raflant sept prix dont ceux du meilleur film et de la meilleure actrice, décerné à Yolande Moreau. Mais, arrive-t-on à comprendre son art dans les images qui relatent sa vie plutôt que sa passion ?

 

23/06/2012

Mars

 

Pluie et soleil ! Le mois de Mars en tête, tu revendiques ton appartenance à l'abstraction. Tu penses aux bruits de la pluie sur une véranda, à la clarté de l'astre dans une éclaircie. Et tout cela frissonne dans ton cerveau comme les petits poissons dans une friture. Et qu'en sort-il ? Cela. Un dessin où l'angle et la rondeur se mêlent, où le pointu et l'aplat se mélangent. Et cela fait froid dans le dos et réchauffe la pensée. Ce n'est pas le juste milieu, mais le côtoiement des extrêmes.

 

12-06-14 E34 carréscercle.jpg

22/06/2012

Labyrinthe

Quel dédale de pierres froides et grises !
Avance, te dis-je, ou l’on n’en verra pas le bout !
Et vous marchez, marchez sans cesse
Le nez levé, sans voir rien d’autres
Que ces murs qui tournent et passent
Toujours les mêmes, ronds à force de tourner
Pris dans les volutes de l’illusion
Partant en fumée dans votre imagination

Serais-tu perdu, homme sans horizon ?
Ces corridors, escaliers, chambres, galeries
Salons de brocart, couloirs de la mort
Ne t’ont-ils pas aguerri, élevé l’âme ?
Tu cherches sans trêve dans la solitude
Ton double dont tu perçois les ombres
Là, il est là ! Et tu cours derrière lui
Sans savoir qui tu vois réellement

Vous connaissez bien sûr le labyrinthe des mots
Celui de la chicane et de la jurisprudence
Et vous vous laissez noyer de lettres
Comme le mathématicien de chiffres
Il n’y a pas de nombres premiers
Dans les lois sans cesse faites et défaites
Il n’y a pas de nombre d’or, mais des rideaux
De papier, d’abjuration, de supplication
Et lorsqu’on les ferme, sous les applaudissements
De vieux relents d’incompréhension
Vous pilonnent de leur aigre rancœur

Les labyrinthes de la passion, de cœur ou de corps
Sont plus excitants. Vous vous heurtez
A la sensibilité d’autrui, en reflet
Et votre ombre devient mirage, multiple
Et vous courrez derrière, là aussi
Mais ce n’est qu’impression, engouement
Et vous courrez, exalté, fiévreux, ivre
De ces baisers de chair qui se laissent
Goûter derrière les orangers
Quel fruit délicieux que ceux-ci, n’est-ce pas ?

Un labyrinthe, qu’est-ce ?
Une machine à laver brassant le cerveau
Un coup à l’endroit, un tour à l’envers
Jusqu’au tournis conceptuel
Avec perte de la rose des vents
Vous marchez sur la tête
Vous courrez au plafond des visions
Et tombez raide, sans fard
Aux pieds de la bien nommée
Belle dans sa robe de taffetas
Souriant au benêt qui court
Croyant palper la vie
Alors qu’il n’embrasse que le vent

21/06/2012

Dream images, de George Crumb

http://www.youtube.com/watch?v=7HngOQIO2T4&feature=related

 

Réminiscences… Est-ce réellement un rêve ou un manque de mémoire, des trous dans la vie entrecoupés d’absence. Vous passez du souvenir ambigu au remplissage du temps.

Chopin passe, comme une ombre chinoise, écrasé ensuite par le silence et l’obsession d’une folie passagère ou d’un voyage spatial. Les gouttes d’eau retombent, éclatent, se pulvérisent avant de redonner vie à Chopin.

Trois notes de la gamme suffisent à créer le dépaysement. Elles reviennent obsessionnelles, comme la seule chose sur laquelle l’esprit arrive encore à de raccrocher. Trois notes dont la première jouée trois fois.

Est-ce beau ? Oui, sans doute, mais d’une beauté troublante, ambiguë, moins charnelle et vivante que monomaniaque et taillée dans le vide de la mémoire. Cela fait un peu froid dans le dos ces cloches qui résonnent derrière les trois notes fétiches. Après l’audition, on a envie de secouer son corps pour le débarrasser d’une poussière imaginaire.

  

La musique de George Crumb, américain né en 1949 en Virginie, est concise, rigoureuse, voire austère, influencée par Webern, mais aussi Debussy. Il s’inspire également des traditions orientales et populaires. C’est une musique mystique, quasi initiatique, agissant par des effets de timbres et de silence. Il fait référence à de nombreux poèmes, dont ceux de Frédérico Garcia Lorca et parsème ses œuvres de réminiscences de musique classique comme dans ce morceau Dream Images.

 

20/06/2012

Coronado, à la galerie Ariel Sibony

 

12-06-07 Silhouette d'enfant.png

L’innocence sous un regard malhabile, voilé de taches de souvenirs disparus dans la tempête du temps. Tels apparaissent les portraits, silhouettes et paysages des tableaux de Coronado. Il est espagnol, mais il pourrait être d’autres nationalités, puisque ses évocations sont intemporelles, sans marque distinctive  d’un attachement à un lieu. Le vert des jardins ou le bleu des piscines, tels sont ses encrages où se promènent, libres, les attitudes de ses réminiscences.

 

 

 

 

Les fonds bleus des piscines ou de la mer, conviennent particulièrement au style du peintre : à plat au couteau, parfois au-dessus d’un dessin au crayon, comme extrait de la buée de chlore habituel à ce décor. C’est beau d’inachèvement, de suggestion, d’impressions.

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La galerie Ariel Sibony se trouve au 24, place des Vosges, 75003 Paris

http://www.arielsibony.com/

19/06/2012

Déclaration d’impôts

 

Cela vous tracasse depuis plusieurs jours. La date approche, il serait temps de s’y mettre. Et puis, vous avez laissé couler. Jusqu’à aujourd’hui, avant dernier jour. Vous avez bien rassemblé quelques documents nécessaires tels que déclaration de dons ou encore montant des avoirs fiscaux. Papiers inutiles, car pour la plupart munis de zéro. Ce petit tas devra être trié, comme on sépare l’ivraie du bon grain. Mais l’essentiel reste à faire. C’est pourtant plus simple depuis qu’il y a la toile. On ouvre l’ordinateur, on a préparé sa page excel et on y met les chiffres, ceux que l’administration elle-même vous a donnés. C’est bête comme chou, mais qu’est-ce que c’est ennuyeux.

Alors, ce matin, courage. Vous vous levez du bon pied, prenez un bon café avant de vous plonger dans les chiffres. Colonne ou ligne, 2AB, 3BH, 7UF. Surtout ne pas se tromper. Mais où ai-je bien pu mettre le papier de la banque ? Vous vous faites une comédie, voire une tragédie, d’une demi-heure passée devant votre ordinateur à aligner quelques chiffres, à faire des totaux maigres et pâlichons. Vous en ressortez exsangue et défait, alors que ces quelques additions ne vous ont prises que quelques minutes. Et tout d’un coup, vous avez fini. C’était donc cela, toujours aussi simple, mais toujours aussi fâcheux d’ennui accumulé ! Après l’envoi au centre des impôts, vous vous sentez en vacances, allégé. Les nuages noirs sont partis, le ciel bleu vous aide à vous alléger du superflu.

A quoi peut bien servir tout cet argent accumulé en une année, vous dites-vous ? Et pourtant chaque mois le laisse filer doucement, mais sûrement. Une petite signature par ci, un code glissé par là, deux ou trois billets sortis de votre poche, encore frais et plein d’encre. L’argent a-t-il une odeur ? Oui, celle de vos journées à votre table de travail, celle de réunions avec d’autres pauvres imposables qui comme vous se sont arrachés les cheveux plutôt que de remplir leur déclaration sur une musique de Haydn, enjouée, espiègle, mais reposante.

Ah, quelle demi-heure ! Epoustouflante et traitresse. A l’an prochain, pour le même devoir, incestueux, comme un mal nécessaire et utile.

 

 

18/06/2012

A cette heure où plus rien ne bouge

A cette heure où plus rien ne bouge
Quand encore la lourdeur des paupières
Et le froid des draps écartés
Vient vous frapper d’un coup
Et réveille en vous le souvenir
De la vie et de la mobilité des choses

Quand l’esprit englué,
Tourne en rond, en ratée
Et le corps recroquevillé
Se serre contre celle, amour
A qui l’on doit la vie et les pensées

Lorsqu’enfin ouvrant un œil
On ne voit que le noir sans fond
Et l’on se demande, éperdu
Où se trouve notre corps
A défaut de savoir
D’où notre esprit divague

Rupture ! Plus rien n’est comme avant
Assis au bord de l’océan
De draps et de couvertures
Je tends les bras vers l’oubli
Tente de me relever, hagard
Puis retombe, inerte
Et me rendors en toute innocence
Devant les spectres de la nuit
Et les fantômes silencieux

Puis vient le temps des rêves
Partir sur son nuage
Et laisser errer sa pensée
Sans odeur ni caresse
Pour le seul plaisir virtuel
D’un refuge chaleureux
En rond autour d’une chimère
Qui vous embrase un temps
Le temps d’un nouveau sommeil

Et, à nouveau, embarqué
Sur le navire de vos incertitudes
Vous laissez votre être
Partir à la dérive, en pluie
Inondant la chambre d’illusions
Pour, encore, le rassembler plus tard
Quelques heures… Encore
Comme le naufragé qui cogne
Sur la coque du bateau
Pour alerter les ondes
De l’absence de l’humain
 
Enfin, lorsque le matin vient
Que le feston amarante apparaît
Que l’oiseau malhabile crie sa douleur
Que l’enfant pleure le ventre vide
Vous émergez des brumes adoucies
D’une veille nocturne, engourdi
Le cœur encore enfermé
Dans ce brouillard fragile
De l’imprécision des gestes
Vous remettez en route
La machine à survivre
A moudre des impressions,
A concocter des sentiments,
A modeler des intentions,
A sculpter l’entendement

Merci mon Dieu,
Encore une fois
J’exerce de plein droit
La faveur d’entamer
Une nouvelle journée de bonheur