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01/03/2022

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Paris, la ville sans parisiens
Vierge de toute démarche
Un ciel bleu sans faille
Des fantômes dans les rues
Il les connait pourtant
Mais de les voir ensemble
Tels des jumeaux exaltés
Le rend perçant et transparent
Il erre et va dans la foule
Mais ne voit plus
Et n’entend plus
Oui, le ciel est divin aujourd’hui
Il s’est retrouvé 

26/11/2021

Ouvert

Accepte… 
Accepte ton inaptitude à faire
Contente-toi d’être, pleinement
Petitement, joyeusement…

Anonyme, confondu dans le tout
Coulé dans la masse du monde
Je cherche ma voie sans savoir
Où je vais et ce que nous devenons

Avance…
Avance à petits pas menus
Sois sans faire, confondu
Ouvre-toi, sans fin…

29/09/2021

Sommeil

Jeune, il se dédoublait
Il était le gentil garçon
Chaque jour à la tâche
Mais, dans la solitude
Il rêvait d’un monde 
Sans contrainte ni misère
Il montait sur les chevaux
Et chevauchait sans crainte
Les étoiles et galaxies
Sans jamais regarder en arrière
Un jour, il ne sait plus quand
Il fut en vue d’une galaxie 
Dont les planètes étaient bleues
Étrangères aux couleurs chaudes
Et au souffle des vents stellaires
Il se sentit en paix, assagi 
Rasséréné, bercé de bonheur
Sans en comprendre les raisons
Accompagné par sa vitalité
Il parcourut longuement
Les allées du pouvoir et la finalité
D’une vie réglée par le temps
Il se vit serviteur et maître 
Par la vitesse acquise
Jusqu’aux confins de l’infini
Là où rien ne dit où l’on va
Ni où l’on est, ni même qui est-on
Rien n’existait que cette envie
D’expérimenter l’inconnu
Sans contrainte ni misère
Il s’approcha des courants d’air
Huma les senteurs de l’inexploré
Et s’endormit benoîtement
Dans les rayons d’un soleil mou

Depuis il dort sans savoir
Ce qui lui manque
Sa vie est bien remplie,
Mais il ne sait de quoi !

11/11/2020

Sincérité

Pouvoir et savoir toujours être sincère. Être de plus sincère non seulement avec les sentiments, mais également par la raison. Se référer plutôt à ce que l’on sait qu’à ce que l’on croit. Il n’est pas donné à tous de savoir par l’amour. Si nous savions tout aimer, nous n’aurions pas besoin de la connaissance pour savoir.

06/10/2020

La sainteté

Il y a trois sortes de saints.

Les saints d’un jour meurent en héros, sur l’impulsion du moment ou, parfois, en fonction des circonstances. Ils sont l’objet d’acharnement des autres, mais restent profondément enracinés dans leur foi, alors qu’ils auraient pu la renier et vivre. Ils sont le don à l’état pur, l'impulsion du moment.

Les saints de toujours ne savent pas ce qu’est la sainteté. Il leur paraît naturel de faire et d’être selon ce qui les incline à la transparence. Ils perçoivent la pureté comme étant le but de leur vie et celle-ci leur paraît naturelle. Leur seule volonté est de sentir la présence de Dieu à chaque instant de leur vie.

Les saints sans recours sont des êtres de foi qui agissent parce que la règle  est la règle et qu’elle ne peut être dérogée. Ne vous laissez pas prendre dans leurs filets. Ils meurent droits dans leurs bottes, mais n’ont jamais profité du regard déifiant de Dieu. Seuls les hommes les proclament saints.

19/07/2020

Sens cosmique

Se laisser enlever par le sentiment d’un abandon, de l’absence de présence humaine, de soutien de l’habitude et de l’appréciation de l’autre.

Un maelstrom qui t’enserre le cœur, le comprime et t’extrait de toi-même pour te projeter dans le vide cosmique et la violence de ton inefficacité. Tu imagines ce monde grandiose sans la profondeur de la pensée, sans la prise en compte de cette aspiration  vers un autre toi-même, plus intense, plus aspirant, une tension permanente qui t’enserre et t’oblige à aller au-delà de ton petit moi enveloppé de douceur baveuse.

Plonge dans l’absence, ouvre-toi à un autre toi-même et erre dans l’immensité du cosmos.

27/12/2019

Fleurs

Les femmes aiment qu’on leur offre des fleurs. Les hommes s’y plient, mais le plus souvent ne comprennent pas pourquoi.

Au premier degré, ils l’expliquent par deux raisons. D’une part, les femmes aiment se parer et s’entourer de belles choses, d’autre part, c’est une coutume et une forme de politesse à laquelle l’homme sacrifie en hommage à la femme. Mais ces deux raisons n’expliquent rien, elles ne sont qu’extérieures.

Dans un deuxième degré, se cachent les raisons intérieures qui ont créé ce qui est devenu une coutume. Les fleurs font vibrer chez une femme une sensation et un sentiment physique, écho du sentiment de faire naître et de laisser s’épanouir un enfant en son sein. Plus profondément encore, les fleurs éveillent en elles un sentiment d’épanouissement, de plénitude face à la vie, d’ouverture et de fraîcheur intuitive que l’homme, plus intellectuel, ne perçoit plus en lui.

La fleur est symbole de jeunesse et d’étonnement au monde face au créateur qui entretient à chaque instant la vie.

07/09/2018

Prière

 

Ô Seigneur, Toi l'Unique, le Parfait
Qui se tient au-delà de tout
Et au plus profond de nous-mêmes
Que ta lumière guide nos pas
Que tout être t’exalte
Et chante en toute justesse ta présence
Donne-nous la transparence du soi
Et la droiture de nos pensées et de nos actes
Insuffle-nous le vrai, le bien, le beau
Incite en nous l’amour du cosmos
Et accorde-nous de participer à ta création

 

 ©  Loup Francart

 

12/08/2015

Portes (6)

Une porte cochère exceptionnelle : elle permet d’entrer dans la maison de Dieu. Elle a une autre allure et mérite le détour et l’église porte un nom béni : Saint Nicolas des Champs. On ne la voit pas, la malheureuse. Elle est noire, salie par le temps et la pollution, mais elle invite chacun à entrer, malgré la grille fermée. Il est temps de la rouvrir pour respirer un peu d’air du paradis. Mais que de travail autant à l’extérieur qu’à l’intérieur.


 


 

 



Une porte, étroite, refaite, élégante, d’une beauté classique, surmontée de son œil de bœuf, comme une bouche aspirant les miasmes de la rue pour les refouler ensuite, propres. Enfin un air pur à respirer, rien que par le fait de contempler cette porte, nous nous allégeons et marchons sur un nuage.


 


 


 


 

Enfin une porte bien pourvue, porte de banquier cossu, ornée de grâces veillant sur un G, l’air débonnaire. La porte est pourvue de fines ciselures de fer forgé pour mettre en évidence les possibilités financières de l’occupant. C’est dans les détails que l’on voit les préoccupations des êtres. Un balcon surmonte l’ensemble. Il devait servir à se montrer dans les grandes occasions.

27/07/2015

Portes (4)

 

Une porte insolite qui fait penser à l’intérieur d’un bateau du siècle dernier. Tout y est élégant, briqué, policé, ordonné. On ouvre la porte et on se trouve dans un havre de paix, rondouillard, mais stricte. La marine chez soi qui nous offre un voyage au bout du monde derrière cet arrondi concave. Embarquez, vous ne le regretterez pas : au regard de l’horizon légèrement convexe, vous laisserez vos yeux errer sur le bleu vert des mers du Sud et rêverez à ces mondes  si différents de celui que vous connaissez. Oui, c’est la porte des songes qui offre le voyage à qui veut entrer. 

La porte de l’inspiration, cachée dans les plis du cerveau, elle immerge dans l’instant et caresse la mémoire de quelques chatouillements verbaux : 

Il faut rentrer au labyrinthe
Des pas, des carrefours, des mœurs,
Où l'on sent une sombre crainte
Dans l'immensité des rumeurs.

Oui, c’est la porte de la maison de Victor Hugo, ouvrant sur la grotte  du rêve :

Je regarderai ma voisine,
Puisque je n'ai plus d'autre fleur,
Sa vitre vague où se dessine
Son profil, divin de pâleur,

Cet ange ignore que j'existe
Et, laissant errer son œil noir,
Sans le savoir, me rend très triste
Et très joyeux sans le vouloir.

Elle est propre, douce, fidèle,
Et tient de Dieu, qui la bénit,
Des simplicités d'hirondelle
Qui ne sait que bâtir son nid.

22/07/2015

Portes (3)

 

 

Ce n’est pas une porte cochère, mais une porte toute simple, de bois et de métal. Mais sa grille laisse deviner des cachotteries et des mystères insoupçonnés.

On ne regarde pas de face, mais de côté, tendant l’oreille à celui ou celle qui se trouve de l’autre côté, dans ce noir absolu et qui épie la lumière du jour. Que murmure-t-il ?

Il faut s’approcher et admirer l’élégance du fer forgé, véritable chef d’œuvre, peut-être d’un compagnon du tour de France ? Un dessin majestueux et sobre, d’une symétrie parfaite. On peut juste regretter le manque de symétrie en face à face des deux frises verticales. N’aurait-on pas vu un décroché symétriquement inversé comme celui-ci :

 

 

 

 


 

 

 

 

 

Celle-ci, une porte imposante, mais qui a pris un air d’été. Elle est partie aux bains de mer ou à la campagne et elle bronze au soleil estival. Elle est sévère, mais sourit de toutes ses dents au visiteur. Ne nous y trompons pas, ce n’est qu’un sourire et non une invitation à entrer. Secret… Circulez, il n’y a rien à voir !

 

 

 

15/07/2015

Portes (2)

Comme un bonbon offert d’une main secourable, elle reluit de ses feux d’un bleu profond et lisse. On a envie de goûter ses parois acidulées, de sentir ses fleurs stylisées, de lécher son digicode doré. C’est un porche de cinéma, fait de carton-pâte, digne d’un Hollywood parisien. Heureux les habitants de cet immeuble, ils entrent chaque jour au paradis, les yeux exorbités, la main caressante, le corps parcouru d’une envie d’aimer.

Celle-ci a la tendresse de la Provence. C’est un coin rafraichissant, un havre de paix, rond de froideur dans lequel on fait une halte doucereuse qui lave le corps de ses gouttelettes de transpiration naissantes. Vous avez envie de rester… Là… tranquillement… Mais il faut bien repartir… Allons, un peu de courage… Vous êtes requinqué. Adieu, fraicheur… Êtes-vous allés voir derrière l’entrée ce rond de lumière débordant de promesse ?

Elle était belle et majestueuse, ornée de pierres sculptées, de femmes et d’enfants portant sur leurs épaules le poids de la société. La fenêtre veillait gentiment sur le sommeil de ses habitants, vigie aux commandes du navire lancé en pleine mer comme un aveugle dans l’éclairage du matin. Se réfugier là, ouvrir la porte, pénétrer dans l’obscurité du porche, et attendre que le soir vous prenne dans ses rêves. Vous êtes la marquise, le valet de pied, le facteur, le visiteur… Peu importe, vous êtes entré dans l’histoire, par cette porte qui pourtant mériterait bien un coup de peinture.

05/07/2015

Portes (1)

Lorsqu’on voit une porte en imagination, que voit-on en premier ? En ce qui me concerne, je vois son déplacement, cette bascule autour des gonds dans un mouvement lent, mais déterminé. Le cœur bat. Oserai-je pousser et entrer sans savoir ou bien dois-je rester en deçà dans un mystère insoluble par indécision ? Cet instant précis où le montant se met à tourner, volontairement ou involontairement, est chargé d’émotion. Il peut même être emprunt de sentiments, mais cela suppose que l’on ait une intention. Alors il n’y a plus la surprise de l’inconnu, mais celle de la motivation initiale.

Partir à la découverte des portes cochères de Paris c’est un peu partir vers l’inconnu. On en voit à chaque pas. On ne les remarque pas. On peine à les ouvrir. On s’intéresse à ce qu’il y a au-delà. Ne nous reste en tête que le bruit du battant qui, se refermant, émet un son creux, tonitruant ou doucereux. Le couperet d’une lame de guillotine qui se referme sur votre gorge.

En voici une, stricte, belle malgré tout, ornée, pleine de lauriers. Elle n’est pas grise, mais bleu gris ou gris bleu. Peu importe. On la sent solide sur ses pieds, volontairement fermée. La loi seule l’ouvrira et révèlera ce qui se cache derrière. Elle est symétrique. On ne sait quel côté s’ouvre. Seul le rectangle du bas est plus grand pour laisser passer les pieds du passant qui cherche à s’immiscer dans son intimité. La porte de justice… Titre d’un thriller haletant, mais réservé aux initiés.  

Celle-ci, avec ses grilles ouvragées, rappelle une prison ou tout au moins un lieu clos non ouvert à tous. Elle est solide, bien faite, avenante même. Que cache-t-elle, une cour des miracles, un lieu de retraite, l’isolement des perdus de ce siècle ? Dommage cependant qu’elle se soit laissée atteindre par la fièvre de la publicité, ces ex-voto de part et d’autre de son assise, disant à tous : « Oui, nous sommes là, entrez donc ! Montez dans les étages, c’est ouvert à tout vent ! » Mais la porte est fermée, puissamment, telle une tour de veille dans les rues où déambulent les passants.

Cette autre, majestueuse, protégeant les richesses d’un propriétaire soucieux de son aisance. Le grand siècle de Louis XIV, imposant, protecteur d’un monde précieux, fait de figurines posées sur des meubles cirés. Un rouge serein, lourd, chargé de secrets et d’escapades nocturnes que personne ne doit connaître. Ne laissez pas traîner vos pieds au bas de la porte, l’or qui s’y trouve vous contraint à les lever haut.

23/03/2015

Un sourire

Hier, vous avez ouvert les yeux après une nuit réparatrice et ceux-ci sont tombés sur une revue qui traînait au pied du lit : un homme, mââle bien sûr, vous regardait d’un air méchant. C’était un dur et il le montrait (il n'était bien sûr pas rasé). En bas, à droite, en petit, une fiole de parfum, pour mââle évidemment. Il y a quelques années, les publicitaires auraient mis en évidence le charme souriant d’un homme à sa belle épanouie profitant de cette suavité. Aujourd’hui le sourire est devenu rare. Il est ringard. L’homme qui sourit n’est pas un homme, il n’est pas mââle !

Et, comme par mimétisme, les « femmes magazines » vous regardent elles aussi d’un air agressif, l’oeil passant sur vous sans vous voir, préoccupée de leur beauté profonde, inatteignable et insensible. Parfois même, les deux êtres se rencontrent, dans un décor de rêve, tout de jaune, pêche, paille, abricot, clémentine et autres fruits. Ils se croisent, mais ne se voient pas. Ils virevoltent en s’écartant et finissent par se rapprocher, prêts à s’écharper, pour un cannelé de Bordeaux. La colère gronde en eux, un seul pourra le déguster. Quelle merveilleuse idée, pense le publicitaire : l’exaltation de la lutte des sexes pour une bouchée de sensation gustative.

Deux jours plutôt, vous aviez assisté au compte-rendu d’un défilé de mode : jeunes femmes fil de fer qui ont du mal à supporter le poids de robes pourtant ajourées, marchant d’un air agacé et hautain, le visage fermé comme il se doit actuellement. La beauté disparaît derrière le dédain, la plénitude des formes s’essouffle du manque de matière. Elles ne sont plus évaporées. Elles s’évaporent réellement, fantômes revêtus de brillance pour cacher l’inexistence.

Devant la résistance du sourire français, les Américains ont imposé la photo sans sourire. Il paraît que l’on reconnaît mieux les terroristes parce que ceux-ci ne sourient jamais. Donc, logique technocratique, si trois pour cent de la population ne sourient pas, il faut imposer à tous de ne pas sourire sur les photos de passeport, car il est possible que pour passer inaperçus, les terroristes simulent et se mettent à sourire sur leur photo.

Surtout n’ayez pas l’inadvertance dans le métro de sourire à une femme. C’est une injure pour elle. Seuls les sourires destinés à leur enfant sont acceptables et acceptés. Quant à un homme, il en reste ébahi et vous regarde sans comprendre. L’échange de deux sourires n’est admissible qu’à propos d’un tiers qui ne se rend pas compte qu’il vient d’être l’objet d’une compréhension humoristique de son attitude insolite. Mais ces sourires ne durent qu’un instant. Comment ai-je pu me laisser aller à sourire à quelqu’un, pensez-vous aussitôt.

Parfois, il arrive, un dimanche matin, dans une bonne humeur décontractée, qu’une jeune fille vous sourit. Et vous lui répondez, sans penser à mal. Et cet échange est un événement exceptionnel. La barrière est tombée. Sans aucune intention malveillante, ensemble, vous avez renoué avec un humain, en toute liberté, parce que vous vous sentiez bien. Quel baume merveilleux : la pureté dans un monde trafiqué d’arrière-pensées. Alors vous poursuivez cette première expérience. Vous souriez à votre voisin. Et il vous rend votre sourire ! Vous souriez à la dame assise en face de vous. Elle vous répond d’un éclair des lèvres avant de se refermer. Et bientôt, la voiture entière, ou presque, se sourit discrètement. Ah, oui, c’est le printemps depuis deux jours et même en l’absence de soleil, les cœurs se réjouissent.

Tiens... Mais c’est votre station. Il faut sortir ! Vous souriez à tous et sortez, léger, lévitant parmi ceux qui, de noir vêtus, n’ont pas encore tenté un sourire candide.