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07/06/2020

L'étrange bataille de San Pedro de Atacama (20)

Plusieurs jours passèrent sans aucun incident. Le capitaine partait le matin, tôt, inspecter les sentinelles, donnait ses ordres pour l’entraînement du jour, puis se préoccupait d’un problème particulier. Il revit une fois le prisonnier chilien, mais sans engager la conversation. Le soir, lorsqu’il n’était pas de permanence au poste de commandement, il rentrait chez lui et demandait à ses filles comment s’était passé la journée. Il se tenait près de sa femme, lui caressant le cou, la regardant tendrement. Il était heureux ainsi que sa famille.

Une nuit, vers trois heures du matin, il fut réveillé par des coups sur la porte. Le lieutenant major se tenait là, l’air un peu affolé :

– L’homme, il est revenu !

– Oui, qu’a-t-il fait ?

– Il s’est installé face à la porte du village, s’est assis sur une grosse pierre et l’a regardé en fumant un cigarillo. Il était environ deux heures du matin et il était visible parce que la lune était pleine.

– C’est tout ?

– Non, avant de partir, il a sorti de son sac une cartouche de dynamite, a mis le feu à sa mèche, l’a regardé brûler jusqu’à moitié, et, avant qu’elle n’explose, l’a projeté en direction de la porte. Elle a explosé sans faire de dégâts, mais j’avoue que l’explosion a fait peur à une bonne partie de la population. Vous n’avez pas entendu ?

– Ma foi non. J’ai un bon sommeil. Vous avez bien fait de venir me réveiller. Je vais aller voir de plus près ce qui s’est passé.

Après avoir tranquillisé Emma, le capitaine s’habilla et sortit sur la pointe des pieds. Il était un peu inquiet, mais fit tout pour ne pas le montrer. Il se dirigea avec le lieutenant major vers la porte d’entrée dans le village. L’emplacement avait été choisi pour que ceux qui la défendaient se trouve en situation de surélévation. Les premiers arbres étaient loin. L’homme avait du courage pour venir défier la garnison de cette manière. En dehors de la trace laissée par l’explosif, il n’y avait rien de remarquable à voir. Alexandro Barruez interrogea la sentinelle qui ne lui apprit rien de plus que ce que lui avait dit le lieutenant major. Il donna l’ordre qu’on l’avertisse immédiatement si l’individu se présentait à nouveau quel que soit le lieu ou l’heure. Puis il rentra chez lui. Lorsqu’il se glissa dans son lit, Emma lui demanda si cela allait.

–  Oui. C’est à nouveau l’homme que l’on a aperçu l’autre jour. Il est venu défier nos sentinelles. Cela commence à devenir préoccupant, mais nous nous en occupons. Et il prit Emma dans ses bras, caressa son corps souple, jusqu’à ce qu’elle se calme et se rendorme. Il resta les yeux ouverts, réfléchissant. Que faire ? Dois-je donner l’ordre de l’abattre s’il se manifeste à nouveau ? Il finit par se rendormir, sans avoir résolu le problème.

06/06/2020

Dulcis

Douceur des sens :
Les yeux fermés, j’erre dans ta personne
Tu n’es que velours soyeux
Qui fait monter les plus vives sensations
Partout où tu poses ta main
Partout où je pose ma main
Je m’enfouis dans ce creux douillet
Et n’en sort que pour reprendre souffle
Et méditer ce silence d’or
Qui repose sur la suavité de ton être

Douceur des relations
Tissées par la parole :
Tu erres dans ta toile
Comme l’araignée agile
Changeant instinctivement de lieu
Dès lors que tu sens la discorde
Ou l’inadaptation des attitudes
L’affection est le miel
Qui t’enrobe, invisible et chaleureuse

Douceur morale :
Tu ne prêtes pas aux autres
Ce que tu ne connais pas
Tu ne sais ni la méchanceté
Ni l’appât du gain et l’appropriation
Ni l’arrière-pensée du voisin
Ni la jalousie des envieuses
Ni même le désir irrépressible des enfants
Tu ne vois que le ravissement
Qui emplit l’être intérieur de chacun

Ta douceur est amour
Un parfum imperceptible
Qui enrobe l’âme
Et l’ouvre au mystère de l’autre

©  Loup Francart

05/06/2020

Dérapage

Il dérape sur la râpe à fromage
Il n’a plus toute sa tête même
La bosse qu’il possède au front
Lui donne un air de dur buté
Mais son cœur est un enfant
Au grain serré et pleutre

Relâchez-le et vous pourrez aller
Dépenser vos billets mal acquis
La peur le tenaille et l’étouffe
Ses yeux se révulsent de rage

Céder sans savoir ce qu’il en est
Est un saut dans l’inconnu
Sans parachute où se pendre
Dieu seul conduit aux sages décisions

Mais où est-il ce sauveur ?
Je ne le trouve plus. A-t-il parlé ?
Au loin fuit l’étoile de la chance
Où vas-tu, toi l’unique ?

Plus rien ne sera comme avant…

©  Loup Francart

04/06/2020

Pressé

J’ai longtemps été un homme pressé, même lorsque je crois ne pas l’être et prendre mon temps : pressé dans mes sensations, l’une à peine goûtée, je veux passer à l’autre ; pressé dans mes émotions, toujours vouloir ressentir plus et se croire prêt à plus d’émotions ; pressé dans mes pensées, à croire trop vite les plus convaincantes.

Il y a deux manières de ne pas être pressé : ne rien savoir, ne rien ressentir (c’est l’apathie ou l’ignorance), savoir et tout ressentir (c’est la sérénité et la joie).

L’important est de s’assimiler aux rythmes de la nature : elle n’est pas pressée, elle est. Pour percevoir les lois de l’univers en soi vivre à son rythme.

Prendre le temps de croire que je pers mon temps, mais ne pas perdre mon temps à prendre le temps. Aller toujours au bout de la tâche entreprise, mais ne jamais prolonger plus que nécessaire le temps à lui consacrer.

02/06/2020

Chute

Tombé dans l'escalier

descendu un étage

le corps conserve quelques souvenirs

le cerveau rien

Je reprendrai dans quelques jours

le temps de laisser le passage

de la machine à laver

et un peu de séchage...