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10/05/2020

L'étrange bataille de San Pedro de Atacama (15)

Le lendemain, le capitaine prit possession de sa compagnie au cours d’une prise d’armes très simple. L’ensemble des villageois était là, en habit du dimanche, pour écouter ce nouveau capitaine qui avait de si belles femmes. Il fit un petit discours sur l’importance de la garnison, rempart contre l’invasion chilienne et se dit prêt à tout pour conserver le village au gouvernement bolivien. Le maire lui répondit par des mots aimables, insistant sur la présence des femmes et leur beauté. Emma, assise sous le dais tendu au-dessus de leurs têtes, souriait calmement, entourée de ses filles. Celles-ci avaient revêtu des robes de fête, toutes les trois bleues, mais taillées de manière différente. Celle de l’ainée lui serrait la taille et faisait ressortir sa poitrine. Elle mettait en valeur l’élancement de son corps comme une promesse à venir. La seconde était vêtue d’une robe de la même couleur, mais plus solennelle, comme un vêtement de théâtre, avec des manches bouffantes. Elle lui descendait presque jusqu’aux pieds, laissant cependant voir des chevilles parfaites, vives, prêtes à courir n’importe où. La troisième, encore une enfant dont l’aspect laissait prévoir une beauté gracile, portait également une robe de couleur bleue, simple, tombant fermement sur ses genoux. Sa taille était serrée d’une ceinture de tissu rose. Elle se tenait près de sa mère, lui caressant parfois le bras avec douceur et laissant promener ses yeux sur la foule rassemblée comme pour dire : « Regardez notre famille, n’est-elle pas belle et sage ! ». Les villageois regardaient ces nouveaux arrivants, avec des pensées variées. Certains se disaient qu’il n’était sans doute pas très prudent d’exposer ainsi des femmes à la convoitise de l’ennemi chilien. D’autres pensaient aux distractions qu’allaient apporter ces femmes dans la vie quotidienne de San Pedro. Quelques hommes se laissaient distraire par leur présence vivante et épanouie : « Quelles belles femmes, que viennent-elles faire dans cette galère ! » Ils ne pouvaient s’empêcher de contempler Emma et sa fille ainée. Pendant ce temps, le capitaine passait en revue ses hommes. Il marchait d’un pas lent, mais vigoureux, regardant chacun d’eux dans les yeux et cet échange sans parole lui permit de s’allier leur fidélité. Redressant parfois une épaulette, il montra qu’il tenait à ce que ces hommes aient fière allure et s’en trouvent ragaillardis.

09/05/2020

Matière noire

Où es-tu ? Mais où es-tu ?
Existes-tu réellement ?
Je ne peux te palper ni même te voir
Ou encore te deviner en louchant
Rien, je ne sens rien et pourtant tu es
Étoiles et galaxies restent bien là
Soumises à la gravité, immuables
Pendant qu’une autre matière
Erre sans relâche dans le cosmos
Courbant l’espace et le temps
Comme les astres palpables
Mais qu’es-tu, toi dont on ne sait rien ?
Partout où la matière existe
Ta matière noire est présente
Et en très grande quantité
Cinq fois plus que celle que nous voyons
Serais-tu espiègle, petite fille invisible
Jouerais-tu à cache-cache
Pour faire peur aux humains ?
De quoi es-tu faite, la nouveauté ?
Personne ne le sait
Sans ombre, tu cours après la vie
Et la serre fortement entre tes particules
Pour empêcher la matière de fuir
Neutrons, protons et électrons
S’entassent dans l’immensité
Retenus par ce noir imperceptible
Qui n’est pas, mais qui existe
Sous peine d’effondrement de l’univers
Et donc de nous-même également
Qui regardons de l’intérieur
Ce qu’il est impossible de voir
De voir de l’extérieur
Grâce aux miracles des mathématiques
Qui conçoivent le monde en chiffres
Et reconstituent l’univers en pensées
Le zéro engendre le un
Le un engendre l’infini
L’infini est plus que le tout fini
Où va-t-on maintenant ?

©  Loup Francart

08/05/2020

Prière

Prier, ce n'est pas penser à Dieu,

ni même demander quelque chose à Dieu.

C'est vivre de Dieu,

c'est exulter Dieu.

06/05/2020

Cauchemar à trois heures

Devant toi je suis
Mais que signifie être ?
Un battement du cœur
Un cri dans la nuit
Le souffle du bonheur
Le dégonflement d’un pneu
La chouette dans la nuit
Et puis, très vite,
Le ronronnement de l’autre
Le social indéfendable
Les pleurs des enfants
La plainte des vieillards
Les bruits estompés
Les chuchotements des femmes
Les clameurs des perdants
Les déflagrations des armes
Il existe pourtant des sachets
Qui enrobent les oreilles
Et te ferme dans la boite
Pour le meilleur et le pire
D’une vie d’adulte ramolli
Lève-toi homme mort
Crie ton innocence
Et fuit la société des hommes
Pour embrasser celle des anges
Ou des démons poilus
Au pieu… Adieu… A Dieu…

©  Loup Francart

05/05/2020

L'étrange bataille de San Pedro de Atacama (14)

Malgré la chaleur et l’aridité du terrain, ils ne mirent que cinq heures pour arriver en vue du village assiégé. Mettant pied à terre avant de passer à l’action, l’adjudant major et ses hommes observèrent les Chiliens. Une bonne partie d’entre eux se tenaient sur un petit promontoire presqu’à l’opposé de la porte d’entrée. Ils semblaient regarder quelque chose à l’intérieur du bourg et rire énormément. L’adjudant se dit que c’était le moment d’attaquer avant que la troupe chilienne ne reprenne ses emplacements pour l’assaut. Ils se remirent en selle, armèrent leurs fusils, sortirent les épées du fourreau et chargèrent en direction de la porte. Ce fut une furie qui emporta les hommes d’un seul trait jusqu’à la porte, avant que les chiliens n’aient le temps de réagir. Très vite les soldats de la garnison de San Pedro ouvrirent les portes et sortirent eux aussi, armés, prêts à en découdre. Les chiliens furent tellement surpris par cette irruption qu’ils ne savaient que faire. Aucun ordre cohérent ne passa entre les différents détachements. Les cavaliers boliviens chargèrent les groupes de Chiliens les uns après les autres. Ce fut une véritable boucherie. Les cavaliers boliviens tiraient, puis chargeaient avec leurs sabres, coupant des bras et des têtes. Il y eut peu de résistance. En une heure, les assiégeants furent soit exterminés, soit mis en fuite, laissant sur place leurs matériels. Les habitants du bourg embrassèrent les cavaliers, leur offrant des présents. Le chef de la garnison ne fut pas en reste pour les remercier. Il envoya aussitôt deux escouades réparer les arrivées d’eau si bien que vers cinq heures de l’après-midi l’ensemble de Socaire fut de nouveau alimenté en eau. L’enfant eut un enterrement quasi national et ses parents vivement récompensés financièrement. C’est ainsi que Caracuela, homme arrogant sauva le bourg de Socaire et gagna ses galons de capitaine. Il fut tué quelques mois plus tard, lors d’une altercation avec une patrouille chilienne.

Des applaudissements et des cris nourris saluèrent la fin de cette histoire. Emma regarda son mari, souriante et heureuse de voir qu’il s’en était bien tiré. Les hommes, toujours sensibles aux aventures de guerre, étaient enthousiastes. Seuls les enfants ne semblaient pas apprécier cette histoire qui se terminait bien par la délivrance du village, mais mal avec la mort d’un enfant. Après un chant de guerrier entonné par le lieutenant major et repris par l’ensemble des hommes, ils purent rentrer chez eux, heureux que tout ceci se soit bien passé.

04/05/2020

Pesanteur

Comme nous aimons nous vautrer dans notre condition d'homme.

Ce n'est pas de l'orgueil,  mais l'effet de la pesanteur.