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09/10/2016

Musique

– Au revoir mon amour !

La porte se referme. Plus un bruit. Je n’ose marcher. J’écoute. Rien. La pleine liberté emplit les poumons d’un parfum de rêve. Ce n’est pas que la présence de celle qui est Tout me gêne, mais l’on a parfois besoin de respirer, de se laisser aller, d’ouvrir ses bronches au vide qui vous emplit et vous donne le frisson. On ne sait pourquoi, c’est ainsi et c’est le cas à présent.

Piano ! Jouer jusqu’à plus soif, s’emmêler les doigts, lire des portées de rêve, entendre le son des cordes et derrière, qui se dessinent, la mélodie grave, le contrepoint fuyant, l’harmonie rayonnante. Quelle extase ! J’ouvre la partition, je choisie la page, je la cale avec une autre (oui, les partitions modernes s’ouvrent mal et les pages se baladent pendant que l’on joue), je pose les doigts sur le clavier et l’enchaînement des sons commence, le cerveau se vide, la mélodie embaume et le cœur exulte. La pièce danse, ses couleurs m’enivrent, le rêve se poursuit, je m’évade à bon marché dans les tressautements du boléro, les accords d’une marche, ou encore, les ronds de jambe d’une valse.

Malheureusement, les fausses notes s’entassent et commencent à déborder. C’est trop que diable, il faut en finir. Reprenons ! La magie est passée, elle s’est évaporée. Le parfum sent le soufre, les sons s’entrechoquent, la vue se trouble et donne le tangage à la portée qui s’envole hors de la page. Les notes s’éparpillent et tombent sur mes genoux avec un bruit de crécelle. Aïe, cela fait mal, surtout les doubles croches dont les flèches sortent un dard inaudible. Que faire ? Arrêter, tout simplement. Le silence à nouveau, écrasant cette fois-ci, comme un bourdonnement intempestif qui alourdi. J’ai perdu ma légèreté, de gros nuages noirs s’engagent sur l’horizon. Quelle heure est-il ? Déjà une heure qu’elle est partie. Elle me manque.

– Reviens vite !

Jouer du piano, c’est comme passer dans une lessiveuse. Ça remue dans tous les sens, en haut, en bas, sur les côtés, dans le ventre, la tête, le cœur. C’est comme si l’on vous passait une balayette à l’intérieur. Avant toute chose, ne pas oublier de s’attacher le bas de la jambe à la chaise sur laquelle vous vous asseyez ; sinon elle ne vous trouvera plus à son retour. En toute liberté, vous serez monté trop haut, ou vous serez si blanc qu’elle ne vous verra pas. Et vous-même, vous vous chercherez en raison de votre transparence. Oui, cela arrive de faire un séjour dans la forêt des partitions, de plonger dans l’eau claire des mélodies, de taper artistiquement des contrepoints vertigineux, de vous laisser bercer dans une harmonie enchanteresse. Vous en ressortez moulu, épuisé, vert, avec un mal de cœur qui vous fait dire :

– Changeons d’activité, écrivons un poème !

08/10/2016

Inconscience

Silence pesant dans l’œuf de la personne.
Ne cherche pas à voir l’ombre tatillonne,
Surtout ne casse pas cette protection.
Que le globe oculaire stagne en création !

Le paysage caresse cet horizon.
Étrange est la ligne de conjugaison
Où se mêlent lassitude et patience,
Un trouble bouillon d’absence de conscience.

Maintenant, casse cette maigre protection.
Dévoile-toi, vierge de toute filiation,
Pour courir sans fin dans la lande convoitée.

Tu es de pierre et de sang, malveillant
Jusqu’au creux de ton personnage ignorant
Qui n’ose chevaucher ce nuage ouaté…

 ©  Loup Francart

07/10/2016

Respiration

 

16-10-06 Respiration60x60cm.jpg

Pluie d'étoiles à quatre branches ou alvéoles rondes selon le regard qu'on lui porte,  et si l'on poursuit l'investigation oculaire, on distingue les courbes blanches d'une fleur à quatre pétales ou d'un trèfle à quatre feuilles qui se montrent en relief.

 ©  Loup Francart

 

06/10/2016

Le jardin de Monsieur Rameau

https://www.youtube.com/watch?v=wr75rHfZiU4


 

Le jardin de Monsieur Rameau.jpg« Cette année encore, William Christie et les Arts Florissants se sont produits avec de très jeunes chanteurs, tous lauréats de la sixième édition (2013) du Jardin des Voix. Le programme, savamment articulé de manière à enchaîner divers extraits d’ouvrages du XVIIIe siècle, permet de faire entendre des morceaux des grands opéras de Rameau, mais également quelques pièces d’ouvrages moins connus. Si la première partie, en grande partie consacrée à L’Ivrogne corrigé de Gluck, opte ouvertement pour la farce et la comédie, la deuxième permet au spectateur/auditeur de se laisser guider avec délices dans les méandres de la Carte du Tendre.

Si l’on pouvait craindre, lors des dix premières minutes, l’artifice du concert « mis en espace », conçu pour des chanteurs tous habillés en tenue de soirée, l’intelligence et la finesse de la réalisation scénique réglée par le ténor Paul Agnew et la soprano Sophie Daneman ont très vite balayé toutes les appréhensions que l’on pouvait avoir. Tous parfaitement investis dans leurs rôles, les cinq jeunes lauréats se sont investis à fond dans une entreprise audacieuse, et finalement couronnée d’un véritable triomphe. »

(From : http://www.resmusica.com/2013/04/08/metz-les-arts-floriss...)

05/10/2016

Pour écrire un poème

Pour écrire un poème, il faut tourner dans sa tête la première phrase. Elle doit être poétique… ou… non… Mais elle doit entraîner la suite, qui vient tranquillement comme les vagues sur la plage.  Saisir cet instant précieux où la phrase vous berce de son chant et vous force à écrire, où que vous soyez. Il faut trouver le crayon et le bout de papier qui traîne autour de vous. Ne le perdez pas, il ouvre la porte au poème qui découle naturellement de la phrase magique.

Mais comment trouver cette phrase ?

C’est un état d’esprit. Elle vient seule ou vous la malaxez. Elle jaillit du fond de soi ou elle se construit lentement en retournant les mots. La première manière est vivace, il faut la cueillir par surprise. La seconde est à bâtir avec les pierres des mots que vous assemblez une à une jusqu’à ce que sa musique vous parle, puis vous séduise. Les deux manières naissent d’une sensation, que celle-ci soit image, son, toucher, goût. La sensation, c’est l’instant où l’on saisit la beauté. On ressent, puis on admire et cette sensation crée en vous le vide fatal qui fait surgir la phrase ou les mots de la phrase que vous allez construire. Vous la tenez, vous la retourner en vous, vous en écoutez la musicalité ou la rudesse volontaire. Oui, elle peut être rude, piquante, intoxicante même ; mais vous savez que c’est celle-ci qui créera le poème. Il suffit de se laisser bercer. Vous vous la répétez et… Vous attendez, dans le silence de votre être. Et la seconde phrase apparaît, brutalement, sans bavure ni anicroche, puis la troisième. Ne perdez pas le fil, ne pensez surtout pas à autre chose, restez concentré, mais détendu. Laissez-vous glisser dans l’eau fraîche de l’inspiration. Chaque vague produit son vers, au même rythme, sans bouger, sans chercher. Bien sûr notez-le rapidement, sans réfléchir. Il vous passe par la tête, ne le perdez pas, sous peine de ne plus le retrouver.

Et vous marchez parmi les cailloux, la pointe des pieds fragile, évitant les écueils, extirpant les mots et les vers. Certains se cachent parfois sous un bloc de pierre, il ne veut pas se livrer. Vous sortez votre dictionnaire, cherchez le synonyme, le tournez dans votre mémoire et vous choisissez celui qui vous paraît le plus approprié. Ces instants peuvent vous couper de l’inspiration, le mot ne vient pas, vous vous épuisez à chercher et rien ne vient. D’autres fois, ils sont au contraire source d’un nouveau flot de vers qui viennent cogner à votre porte et que vous vous efforcez de noter, en vrac, quitte à les reprendre plus tard, à tête reposée. Vous poursuivez votre route, évitant les cailloux ou les retournant pour y trouver une image ou un son. Vous n’entendez rien, le silence du grand large sur une mer d’huile.

Et, d’un coup, le cri de la baleine, profond, lointain, mystérieux. Il vient de vous-mêmes, vous le crachez, l’emprisonnez, l’attachez et le notez. Oui, c’est le mot de la fin, percutant, résumant votre histoire, l’ouvrant à d’autres histoires ou, au contraire, fermant la page d’un trait de plume que vous clamez dans le silence du contentement. Il est fini le poème, vous ne savez ce qu’il contient, combien il a de vers, mais vous savez aussi qu’il est fini. Vous êtes asséché. Vous avez beau vous pressurer, rien ne vient. Adieu poésie, seul reste le poème.

04/10/2016

Concentre-toi

Une tête d’épingle. Rien d’autre
Ne la cherche pas dehors
Elle est en toi, là où tu n’es plus toi
Là où l’infini te pénètre
Et te prend comme une proie
Concentre-toi !

Ton corps n’est plus qu’enveloppe
Une feuille légère que tu ne peux saisir
Ta raideur devient souplesse
Ton inertie devient attente
Au bord du précipice, tu guettes
Espérant la venue du Tout Autre
Concentre-toi !

Noirs, puis rouges, puis blancs
Entre tes yeux clos se pressent
Les grains vivants de l’attention
Qui s’amassent en toute liberté
Tel un nuage lumineux qui te prend
A la jonction des pensées et des sensations
Et t’aspire, là où Tout est en Tout
Concentre-toi !

Sans poids ni durée, tu flottes
Entre les eaux primordiales
Tu gouttes sur la pointe de ta langue
Cette saveur étrange et méconnue
D’un infini qui t’est familier
L’ouverture vers une absence
Plus aimante que la présence
Le rien devenu Tout
Concentre-toi !

Tout est vide
Le vide est Tout
Le Tout n’est rien
Et, derrière, Il Est...

ou peut-être Je Suis...

Concentre-toi…
Et… va…


 ©  Loup Francart

03/10/2016

Invasion

 

Fuis l’eau,

Cours vers les hauteurs…

La voici !

 

 ©  Loup Francart