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23/10/2022

Elle et lui

Il est
Elle est
Mais sont-ils tous les deux
Qu’ont-ils de commun ?
Lui ne sent qu’un feu dans le corps
Elle, que sent-elle ?
Une chaleur douce l’envahit
Le calme s’empare d’elle
Et pourtant, le diable au corps aussi
Ils se regardent comme des aimants
Elle avance la main et le contemple
Il ne sait quelle attitude adopter
Mais brusquement, il touche sa manche
Elle lève les yeux et le voit
Alors elle s’avance vers lui
Et se jette dans l’inconnu
Comme du haut d’une montagne
Ce fut une chute réelle
Un arrêt du cœur et de la pensée…
Enfin, elle reprend vie…

22/10/2022

Chien errant

Il est là, le chien errant
Il s’agite, remue la queue
Aboie un peu, pas trop
Et se couche au pied

L’autre le regarde
N’ose le caresser
Il tendrait bien sa main
Mais craint de la perdre

Ainsi de mains en mains
Il va d’un côté et de l’autre
Sans jamais trouver la paix
Ni savoir où aller

Alors, Odalisque se leva
Se pencha sur la bête
Ausculta ses yeux
Et vit remuer l’autre

Il prit un épilateur
Tint la tête de la bête
Et, patiemment, approcha
Tout en lui parlant

Soigneusement, il le caressa
Gentiment, il le regarda
Ne bougea plus
Et se laissa mourir

Ainsi revit celui qui mourrait 
Pleura l’enfant sauvage
Partit l’homme prudent
Rit le gamin frondeur

21/10/2022

Divagation

La fin… Elle est là, repue
Elle ne peut plus
Elle n’en peut plus
Elle n’est plus
Tombée de plus

Y a-t-il moins
D’humains sans soins
Qui finissent comme un point
Enfilent leur pourpoint
Et prennent de l’embonpoint

Montée vers le haut
Accompagné au piano
Vêtue d’un paréo
Elle va vers les idéaux
Des sveltes cachalots

Tout est rondeur    
Plein de candeur
Sans tiédeur
À bon entendeur

Salut…
U… U… U…

Oh… Oh… Oh…

20/10/2022

Mort au bullfinch

Ainsi est mort le petit cheval
Un soir d’automne brumeux
Devant les spectateurs médusés
Qui se tenaient sur la tribune

Ce matin-là, il n’avait pas pris d’avoine
Il avait regardé sa soigneuse
Elle l’avait caressé un instant
Puis s’était occupée d’autres chevaux

Elle sentait bien que cela n’allait pas
Mais que faire lorsqu’on ne parle pas
Il dressait ses oreilles vers l’avant
Et baissait la tête tristement

Elle avait préparé ses harnachements
L’avait caressé, une larme aux yeux
Il était inscrit dans la dernière course
Un steeple-chase de 5500 mètres

Son jockey, sûr de lui, bravache
Fut propulsé sur son dos
Il fit un clin d’œil à la soigneuse :
« Tout va bien aller », lui dit-il

Sur la ligne de départ, il renâcla un peu
À quoi bon se plaindre, il en a vu d’autres
Alors, il partit au top, ragaillardi
Par ses voisins, l’œil égrillard  

La terre volait sur sa tête
Le bruit des fers sur le turf
Les cris des jockeys excités
Le bullfinch énorme devant lui

Un trou noir dans la nuit
Il s’écrasa sur la verdure
Mort avant d’avoir sauté
Après avoir propulsé le jockey

Oui, le petit cheval est mort
Et la soigneuse pleure de chagrin

19/10/2022

Abandon

Tendu est l’élastique de son souvenir
Chaque matin, il s’enferme dans son personnage
Plus un bruit, plus un mouvement
Le calme plat d’un lac de montagne

Il y rentre précautionneusement 
Il emprunte le chemin des odeurs
La pluie qui ne cesse de tomber
Le passant dans la rue noire
La boulangère sur le pas de sa porte
L’eau coule sur le tambour de la route

Elle dévale la pente des années passées
Saute les pavés du caniveau fuyant
Suscite les images des premiers jours
Quand, descendant l’escalier,
il allait chercher le pain du matin
et, sur le chemin du retour
Croquait le crouton chaud
Il devait bientôt en chercher un autre
Pendant que la famille attendait anxieusement

De quoi sera fait l’avenir ? se demandait-il

L’exigence de ces aurores brumeuses
Où le froid descendait dans le dos
Et s’agrippait à vous de ses os fragiles
Lui donnant conscience de son insuffisance 

L’avenir a coulé, dévalant la pente
Le lac est là. Il ne voit plus que l’horizon
La fente claire de la surface entre terre et ciel
Il a froid aux pieds et chaud à la tête
Il est étendu sur le pont du navire
Et attend mollement le virage de l’abandon

 

 

18/10/2022

A bout !

Une montagne de papiers froissés
Des fils partout, noirs, rouges, épais ou fins
Des écrans brillants, avides, clairs
Au-dessus, une tête, pleine, lasse
Bougeant difficilement, ne voyant rien
Que ses écrans de blanc vêtus

Oui, il est là, observant les lueurs
Un chèche sur le chef
Un manque à son palmarès
Un gant aux doigts agiles

Nu, il va de la chambre au salon
Regardant sans cesse les écrans
Tremblant à l’annonce de chiffres mauvais
Se mordant les doigts jusqu’au sang

Plus rien ne va, dit sa compagne
Si tout va bien, répond-il
Et il part dans une autre pièce
Ricanant de bonheur éternel

Il revient, vêtu d’un manteau noir
Engoncé dans ses pensées
Ouvrant l’œil et les mains
Il s’écroule d’une masse
Puis ne reste qu’une poussière
Sur le pas la porte 
Qui s’envole sous l’effet de la bise

À quoi lui ont servi ces années de labeur
Sans voir la beauté du ciel
Et la profondeur de la vie à deux