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05/11/2016

L’écriture des dieux

Écrire de la musique, ce n’est pas simplement retranscrire les notes sur une, deux ou trois portées. C’est avant tout et en premier lieu, trouver une phrase qui possède sa propre personnalité. Elle et courte, simple, cadencée, fermée sur elle-même, se suffisant à elle-même. C’est le point de départ. Ensuite, on la triture. On change sa hauteur, sa largeur, sa profondeur en la jouant à la quarte ou la quinte, en allongeant ou raccourcissant la longueur des notes, en créant un autre accompagnement que l’initial, en ajoutant des harmonies cachées, mais toujours en respectant la cadence qui constitue l’unité intérieure de la phrase.

On joue et rejoue la phrase, seule, puis sa sœur, à la quinte, puis ses sœurs, en variations sans fin. Alors, on est prêt. On sort le papier à musique, son crayon et on dessine les notes, blanches ou noires, munies de queues ou parfois de hampes avec de petits drapeaux.

« Oui, c’est bien l’écriture des dieux ! », me suis-je dit ce matin en pleine transcription. Une écriture universelle, chantante, fraîche de bonheur partagé avec celui qui reproduira les sons et en fera le chant des dieux. Et vous dessinez calmement les ronds que vous remplissez ou non de noir. Vous chantez en même temps la mélodie, ajoutant quelques variantes au développement initial, vous vous demandez comment passer de l’une à l’autre, sans heurt, sans rompre le charme, sans vous sortir de vous-même, engoncé dans le bonheur. Vous vous remettez au piano, vous étudiez les passages entre les différentes variations, vous vous souriez intérieurement lorsque vous avez trouvé une transition inusitée. Vous ne pensez plus à rien qu’à cette mélodie qui vous trotte dans la tête et marque sens interdit à toute autre pensée.

C’est cette absence de pensée qui vous permet d’arriver à vos fins, un morceau de musique dont la délicate mélodie agrémentée d’un accompagnement en contrepoint vous satisfait pleinement. Alors non seulement vous avez imité les dieux en utilisant leurs instruments, mais vous les avez égalé en créant.

Alors, il faut reprendre la maxime de Bernard Grasset, oui, l’éditeur : « Être véritablement modeste, c’est comprendre que le sentiment que nous avons de notre propre supériorité ne vaut que pour nous. »

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