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23/08/2013

Le flûtiste invisible, roman de Philippe Labro

Un roman qui n’en est pas un, puisqu’il est constitué de trois nouvelles, et qui mentionne en liminaire : « Tout est déterminé par des forces sur lesquelles nous n’exerçons aucun contrôle. Ceci vaut pour l’insecte autant que pour l’étoile.13-09-23 Le flûtiste invisible.jpg Les êtres humains, les légumes, la poussière cosmique – nous dansons tous au son d’une musique mystérieuse jouée à distance par un flûtiste invisible (Albert Einstein) ». Et l’auteur ajoute : Comme Schindler, je crois qu’il n’y a qu’une seule chose dont nous devrions être certains : la sensation qu’autour de nous, avant ou après, en dedans ou en dehors, il y a un élément inconnu sur lequel n’avons aucune prise, aucun contrôle, mais dont nous pouvons imaginer qu’il en exerce un sur nous. C’est l’élément inconnu qui m’intéresse.

Seule la première nouvelle m’a paru digne d’intérêt. Pourquoi ? Elle semblait vécue, alors que les deux suivantes m’ont paru plus compassées. Elle se dénomme « Bye bye Blacbkbird ». Blackbird est une jeune américaine qui voyage sur un transatlantique et que rencontre un jeune garçon qui se rend aux Etats-Unis pour étudier. Ce n’est d’ailleurs pas vraiment une rencontre, mais le fruit d’un pari fait avec ses camarades : Qui serait assez culotté pour aller faire un compliment à cette jeune femme si belle, là-bas, à la table de gauche ? Ses cheveux étaient d’un jaune éclatant, comme des fleurs de tournesol, un jaune qui aurait pu virer à l’orange. Elle lui donne rendez-vous le soir même, mais n’y vient pas. Le troisième soir, elle ouvre en pyjama sa porte. Ils parlent. Elle lui demande : « qu’attendez-vous de moi, au juste ? ». Devant son absence de mobile, elle éclate de rire : « Seriez-vous trop bien élevé ? Vous ne voyez pas qu’il se voit votre désir ? Vous croyez qu’un homme peut dissimuler son envie d’une femme ? Vous avez faim d’amour, c’est cela, pourquoi ne pas le dire ? » Elle avait une capacité unique et déconcertante à passer de l’ironie à la langueur, de l’intime à la distance. Elle met le disque de la chanson Bye bye Blackbird et lui dit à la fin : « On ne choisit rien. Et rien n’est impossible, sauf de refuser la mort. Et tout est possible, mais rien n’est important. Tout est fatal. » Lorsqu’il va partir, elle lui demande de l’embrasser. Je pouvais sentir son corps sous la soie, touchant le mien sans bouger : « Eh bien, dites-moi, quelle vigueur dans le pantalon ! Mais dans quel émoi êtes-vous tombé ? ».

Il en devient fou, ne pensant qu’à elle, la cherchant partout et elle, se dérobant, l’évitant jusqu’à l’arrivée à New-York. Là, contrairement à toute attente, elle se donne à lui subrepticement. Puis, immédiatement après : « Rhabillez-vous. Allez, vous avez eu ce que vous vouliez ». Je l’ai regardé. Elle avait une expression voilée, hantée, une cernure mauve avait creusé sa peau sous chacune de ses paupières. On ne pouvait lire aucune satisfaction nu aucun plaisir sur ce visage auquel, en vérité, je ne comprenais rien. Quelque chose de mortel est passée dans ses yeux.

En épilogue, l’auteur philosophe : « Tout est mouvement, écrit Balzac, la pensée est mouvement. La nature est établie sur le mouvement. Balzac continue et se dévoile enfin. Il ose, enfin !, (sic) écrire les quatre lettres DIEU : « Dieu est le mouvement, peut-être. Voilà pourquoi le mouvement est inexplicable comme lui et, comme lui, profond, sans bornes, incompréhensible, tangible. »

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