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14/02/2023

Souvenirs

Souviens-toi : la fraîcheur de la nuit
Le crépitement des cigales
Le crissement de tes ongles sur ma peau
La tendresse de tes joues dans l’ombre

Merci de ces jours d’attente
Merci pour la sève montante
Merci pour l’extase de tes accueils
Merci pour ta pâle incandescence

L’amour reste vivant en nous
Toujours nous nous regarderons
L’œil pétillant, les dents blanches
La joie sur nos lèvres enfiévrées

Tu es la seule et unique femme
Que je serre dans mes bras 
Et dont la douceur me fait trembler
Lorsque je suis seul dans la nuit

 

09/02/2023

Eté

Des cris d’enfants
Le ruissèlement sur la peau
L’appel d’un canard 
Et le calme de l’après-midi
Quand la maison dort
Au pied de la rivière
La tête dans l’eau
Fraîche et sourde
Ton regard sur nous tous
Tendre et amoureux
Tu le tiens près de l’eau
Riante et charmeuse
Appelant les petits au bain
Ils se précipitent en riant
Et se jette dans la fraîcheur
Sans efforts ni simagrées
Les rires résonnent dans la campagne
Il émerge d’un assoupissement
Les bruits se mélangent
Il saute du lit, fiévreux
Oui, tout de suite
à l’eau
Revêts-toi de ta nouvelle peau
Prends ton glaçon entre les dents
et plonge sans hésiter dans la froideur

01/12/2022

Saison

Riant, le soleil fait sa pause
Il a suffisamment travaillé ce matin

Ouvrir les volets, écarter le rideau
Essuyer avec les doigts la buée
Des vitres qui donnent sur la rue
Et tenter d’apercevoir le clocher
Qui s’enfonce dans la brume  

Ah ! Le boulanger est levé
Il est donc cinq heures et demie
Brr… Quel froid ce matin
Une lueur se lève vers l’est
Le ciel est clair et l’eau prudente
D’ici un moment, il luira
De toutes ses forces vaines

Le village se lèvera, courageux
Et les adultes partiront au travail
Les uns à la cueillette, les autres à la traite
D’autre encore sur leur tracteur
Pétaradant à qui mieux mieux

Dieu, qu’il fait chaud ! se dit-il
C’est l’été, ne sais-tu pas !

 

04/11/2022

Un, deux, trois et ...

Deux, un chiffre magique
Zéro n’est qu’un mirage
Un existe, mais il est seul
Jusqu’à quand tiendra-t-il ?
Alors vient le chiffre le plus humain
Le deux est né ou est arrivé
Le un s’est-il dédoublé ?
Le un a-t-il protesté ?
A-t-il été étonné de se voir dédoublé ?
Aussi loin que l’on remonte
0n ne sait pas ce qui est arrivé
Un jour, une compagne…
Qu’est-elle ? Que vient-elle faire ?
Comment est-elle venue ?
Il était seul et elle est arrivée
Sortant de l’eau, même pas mouillée
Bonjour, a-t-elle dit, fraîche
Il tourna la tête, regarda la créature
Surpris par le pincement qu’il ressentit
Qu’est-elle cette compagne qui vient
Qui s’assied et me comble
Je me sens mieux, très bien même
Elle sourit d’aisance, me regarde
Une lueur dans les yeux
Mon cœur s’élève au-dessus des arbres
Et contemple le monde devenu autre
Il est entré quelque chose
Dont on ne percevait pas l’absence
Mais quoi, il ne sait !
Ils se serrent contre l’autre
Cela tient chaud, c’est doux
Encore, tiens-moi, serre-moi
Je t’abrite sous mes bras
Et te protège du monde
Qui n’est là que pour nous aider
Parfois nous craignons ses attaques
Mais toujours nous nous louons
De cet abri si bon et chaud
Qu’est celui qui est mon double
L’homme pour la femme
La femme pour l’homme
Puis vint un jour un trois
Mon Dieu, que d’ennuis
Ils n’eurent plus un instant à eux
Une occupation de tous les instants
Mais qu’il était beau ce petit d’humain, 
Homme et femme, pleurant et riant
Le trois est devenu l’idole


Cela a continué immanquablement
La terre est peuplée d’humains
Une vraie basse-cour !

 

08/03/2022

Au fil des jours (journal de Jacquie de Greffié de Bellecombe p.7)

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Embrouille…
Là, le passé, l’avenir et le présent
Quatre images, quatre souvenirs
Ou quatre vies, jusqu’à l’orage
Dans quatre éléments
Entre ciel et terre, 
Entre air et mer
Jusqu’au brouillage…

 

 

 

 

 

16/04/2014

Place des Vosges

Avril ! Mais… Plein été ! Heureusement l’eau coule des fontaines et ce bruissement continu rafraîchi l’atmosphère. Peu de promeneurs vont et viennent. La plupart ne sont plus passants, mais hommes (ou femmes) à l’horizontal, au ras des pâquerettes, le plus souvent deux par deux, parfois trois ou quatre.

L’herbe est encore jeune, d’un vert tendre. Devant moi, une jeune femme, les bras nus, les mains croisées derrière la nuque, le ventre à l’air, le pull remonté sur les seins. Elle se caresse l’estomac, comme si le soleil méritait une attention sur cette partie du corps. Pas un nuage. Les promeneurs passent, leur veste, voire manteau, sur le bras comme un poids mort. Un père et son jeune fils s’assoient dans l’herbe. Ils dégustent une glace comme deux jumeaux attentifs à ne pas en perdre une miette. Une jeune fille traverse la pelouse d’un pas alerte, souple, coulant. Elle glisse sur l’herbe avec aisance et une certaine nonchalance malgré l’ampleur de ses foulées. Quelle belle mécanique elle développe.

Il me semble que tous se parlent par l’intermédiaire d’un téléphone portable. La main sur l’oreille ou l’écouteur dans les ouïes, ils parlent, ils parlent, consultent, jouent. Voient-ils les autres ? Peu leur importe ; ils communiquent, sans un regard pour leurs voisins. Le jardin est un réseau miniature fermé par une cage de Faraday que forment les grilles qui l’entourent.

L’ombre se déplace, empiète sur le coin d’herbe, obligeant à une migration progressive jusqu’au moment où l’on se lève, on prend ses affaires et on fait une dizaine de pas pour se rassoir  épuisé derrière l’ombre qui poursuit sa course imperturbablement.

Comme elle est belle, d’une valeur sentimentale inestimable, cette humanité nonchalante, fondue au soleil, liquéfiée comme une motte de beurre parmi l’oseille dans la poêle qui chauffe. La chaleur brouille la vue, suscitant de légers tremblements lorsqu’on regarde au loin, dans les trous noirs des arcades. Une classe d’écoliers traverse le jardin, soulevant un nuage de poussière. Tout se trouble, tout devient gris, noire, sans forme. J’erre dans l’absolu. Oui, j’ai dû rester trop longtemps au soleil…

12/09/2011

Aux champignons

 

Cet après-midi, vers deux heures, je découvrais, étonné, des ceps dans le jardin. Comment diable peut-il y avoir ici des ceps ? Aussi décidais-je d’aller faire un tour en forêt. Sait-on jamais !

Arrivé sur place, j’empruntais le chemin pénétrant dans les sous-bois. Il faisait chaud, une chaleur écrasante qui vous contraint à marcher lentement, en respirant petitement. Pas un bruit, même pas le chant d’un oiseau. La forêt dormait, en léthargie. Seul le bruit de mes pas sur les branches mortes emplissait le silence d’un chant de percussions. Le soleil donnait dans les feuillages, réchauffant le sol, brûlant les feuilles mortes, enfermant la végétation dans un immobilisme écrasant. Le sol était trop sec, bien sûr. Quelle idée de partir aux champignons alors qu’il n’a pas plu suffisamment. Et pourtant, à un carrefour de chemins, je tombais sur une amanite rougissante, excellent champignon dont le nom fait fuir les faux amateurs. Elle était seule. Aussi, repérant son emplacement, j’attendis d’en voir plusieurs avant de la cueillir. Connaissant le coin, je me dirigeais vers l’ « Emplacement », celui que tous connaissent, qui est piétiné, mais dont on ne parle à personne. Pas l’ombre d’un renflement sur le sol de feuilles mortes et de fougères. Je continuais et sentis tout d’un coup l’odeur, signe caractéristique de leur présence, une odeur forte de pourriture parfumée, comme, dans votre potager, vous sentez l’odeur des tiges d’oignon, prenante et audacieuse. Mais j’eus beau chercher, me mettre à quatre pattes pour tenter d’apercevoir un chapeau de n’importe quelle couleur. Rien, pas l’ombre d’un tube ou d’une lamelle. Plus loin, cependant, surprise, une amanite épaisse, espèce assez proche de l’amanite rougissante. A la troisième, je les cueille. Mais il n’y eu pas de troisième.

Comme il était bon de se promener, seul, environné de silence lourd et charnu, marchant à petits pas, les yeux au sol, écrasé par l’atmosphère lénifiante d’une après-midi magique. Et soudain, je me suis rappelé cette même ambiance, il y a longtemps déjà, lorsque la chaleur enveloppait nos corps d’enfants, mais que notre vivacité surmontait facilement jusqu’au moment où nous tombions, écrasés de fatigue et mourant de faim. Après les courses éprouvantes dans les bois, il fallait rentrer. Plus rien ne pouvait nous faire bouger. Nous reprenions le chemin du retour, assis dans la charrette, l’un d’entre nous conduisant l’âne, les autres endormis sens dessus-dessous, jusqu’au réveil à l’arrivée à la maison, où, reposés, nous repartions pour mille autres folies à faire avant la fin de la journée.

Pourquoi y avait-il des ceps dans le jardin ? Sans doute parce qu’il conserve l’humidité plus facilement qu’un sous-bois inondé de soleil ; mais aussi, c’est certain, parce que ce jour-là, je devais forcément faire un tour en forêt pour me souvenir de ces journées d’enfance : une vie dans l'instant, libre de toute intention.