31/01/2016
La fin de l'histoire (14)
Arrivée au Café Jaune, il aperçut l’étudiant, non, le professeur. Il lui fit un signe de la main et se rapprocha de lui. Mais celui-ci regardait à côté et fit semblant de ne pas lui prêter attention. Nicéphore vit ses yeux suppliants et comprit. Il poursuivit son chemin au-delà du jeune homme et se dirigea vers les toilettes avec naturel. A son retour le professeur était parti. Comment reprendre contact et où ? Nicéphore décida de retourner à la bibliothèque dès le lendemain. Il y serait peut-être.
Effectivement, le lendemain le professeur était à la bibliothèque au même endroit que la première fois. Ils se reconnurent tout de suite. En passant devant lui, Nicéphore lui glissa : « Ce soir, 19h, au Café Jaune », l’autre acquiesça d’un signe de tête et fit semblant d’être occupé à chercher un livre. Le soir même, ils se retrouvaient au Café Jaune et purent parler sans crainte.
– Hier, j’étais suivi par un homme de la dP. Heureusement vous avez compris et je ne crois pas qu’il vous ait repéré. Avez-vous lu mon livre.
– Oui, je vous l’ai même ramené. Très intéressant, parfois compliqué. Un point m’a marqué : nous vivons endormis et il faut nous éveiller. Si l’on prend conscience de cela, on peut commencer à s’en sortir avec des efforts personnels. Au fait, comment vous appelez-vous ?
– Charles Borowsky.
– Charles, merci pour ce livre, il m’a fait comprendre beaucoup de choses. On ne peut s’arrêter là. Connais-tu d’autres personnes qui auraient les mêmes intuitions ?
– Oui, une seule. Je peux la contacter et voir si elle est intéressée par une action commune.
– Méfie-toi tout de même, on ne sait jamais !
– Continuons à creuser nos techniques d’éveil et tentons de recruter quelques autres personnes. Il faut que je parte, car je ne peux rester trop longtemps ici, sous peine d’être suspecté. Au revoir Nicéphore.
– Au revoir Charles, à bientôt.
– Oui, après-demain au Café Bleu, à 20h. By.
Charles se perdit dans la foule.
Le lendemain, en ouvrant le journal, Nicéphore vit en première page le titre suivant : Un dangereux individualiste est capturé par la dP après une course poursuite dans le métro. Il lut le bref article qui décrivait la capture : Hier soir, vers 23 heures, un jeune homme, Charles Borowsky, a été arrêté dans le métro par la dP. Cet individu importunait un groupe d’étudiants et plus particulièrement une jeune fille. Un des voyageurs a téléphoné à la dP et, sur le conseil du policier qu’il avait au bout du fil, a tiré la sonnette d’alarme. Le jeune homme s’est alors enfui en descendant sur la voie et s’est mis à courir devant le train jusqu’à la station suivante. Poursuivi par la dP qui descendait l’escalier roulant pendant qu’il montait, il est parvenu à sortir à l’air libre et s’est réfugié dans un café. Après mise en place d’un important dispositif de sécurité et l’établissement d’une zone interdite, les policiers, armés et munis de boucliers de protection, ont réussi à l’interpeler en usant de grenades défensives. Il a été embarqué dans un fourgon sans que l’on sache où il a été emmené. La police a rappelé les consignes : tout « individualiste » doit être immédiatement signalé à la police qui, déclarée en état de légitime défense, emploiera tous les moyens pour arrêter l’individu, y compris les armes à feu.
07:25 Publié dans 43. Récits et nouvelles | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : histoire, société, individu, liberté | Imprimer
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