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04/01/2012

L’art du roman (suite du 31 décembre)

 

L’art du roman est avant tout dans le style et non dans l’histoire qui a moins d’importance qu’on ne lui accorde. Revenons à nos propos précédents. Etaient opposés deux constructions d’un roman : soit sur les souvenirs (qu’ils soient personnels ou publics, inspirés par un fait), soit sur l’imagination.

Mais comment se décrivent les souvenirs qui ne sont que le reflet d’une réalité ayant existé ? Par l’imagination du choix des mots pour décrire ce que vous avez vécu. Et comment se décrit l’imaginaire ? Par la réalité des mots qui transforment l’imagination en structure cohérente qui donne du poids et de la vérité à ce que votre cerveau a concocté. Ce qui signifie que dans tous les cas, c’est votre art de conter, produit de votre culture et de votre personnalité, qui fait la qualité d’un roman.

Or qu’est-ce que l’art de conter ? C’est faire partager sa vision en se servant des mots pour décrire, émouvoir, faire naître des sentiments chez le lecteur (et non forcément décrire des sentiments), qu’ils soient de plaisir, de crainte, de drôlerie, de tristesse, etc. Plus réellement, c’est le choix des mots et leur rythme à travers les phrases qui créent le style.

La première étape consiste à choisir les mots que l’on souhaite utiliser pour arriver au résultat affiché ci-dessus. Un même auteur peut avoir plusieurs registres à sa disposition, selon le sujet sur lequel il écrit. D’autres n’en ont qu’un jeu, toujours le même. Enfin, bien sûr, l’inventaire des mots évolue dans la durée de l’écrivain, avec généralement une augmentation de la pertinence du choix au fur et à mesure de l’écoulement de sa carrière. Ces mots peuvent être simples, précieux, châtiés, recherchés, drôles, etc. L’association des mots entre eux procure également des effets divers, particulièrement lorsque les genres sont mélangés. On ne parle pas là des dialogues et du caractère donné à chaque personnage, mais bien de l’ensemble du récit et du choix du vocabulaire utilisé pour le décrire.

La seconde étape est plus complexe. Il s’agit d’imprimer un rythme aux mots, une musique particulière qui donne la qualité de l’écriture. Le rythme n’est pas seulement fondé sur la longueur de la phrase ou l’emploi différencié de la ponctuation. Il est musique, c’est-à-dire non seulement sons, mais également silence. La syncope donne une tonalité magique à la musique. Quelle est la syncope en écriture ? Probablement dans l’alternance de phrase aux sons variés et qui se lisent avec une respiration différente. A travers le halètement de l’écriture, le lecteur ressent des variations insoupçonnées. Mais ce n’est peut-être qu’une illusion.

En cela le roman rejoint la poésie, mais en cela seulement. Apporter trop de comparaisons, trop de détours dans ce que l’on exprime, fait du roman un chewin gum difficilement digeste. La simplicité, adaptée à l’histoire, est sans doute la meilleure manière de faire passer les idées. Et pourtant, on ne peut qu’admirer, par exemple, le style contorsionné de Marcel Proust ; on ne peut que se régaler du style de Marcel Aimé ou de Jean Giono. Bref, chaque écrivain a son style et celui-ci est sa marque, son flambeau, qui restera dans l’éternité. Ainsi des mémoires de Saint Simon, des écrits de Voltaire ou de Chateaubriand, et, plus récemment, de Marguerite Duras ou de Jorge Luis Borges.

Dieu merci, comme en musique, en peinture et tout autre art, l’infinité des combinaisons et des styles laissent encore de nombreux chefs d’œuvre à écrire et à découvrir.

 

 

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