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30/05/2018

Les concepts constitutifs au temps (3)

La mémoire dans la perception du temps

Prenons conscience que nous ne percevons le Chronos, c’est-à-dire le temps, que grâce à la mémoire. Sans mémoire, l’ordre temporel n’existe pas. L’on perçoit la simultanéité des évènements, mais leur succession est déjà difficile selon le type de perte de mémoire et les notions d’instant et de durée sont confondues dans un magma difficile à démêler.

Au-delà de la mémoire, la perception du temps est liée à la vision du monde que lui donne la compréhension des données accumulées dans la mémoire. Cette perception est donc culturelle, et, même si, de nos jours, l’adhésion à la culture scientifique fait que progressivement les perceptions se rejoignent, elles restent encore assez différentes selon les continents et les cultures.

L’expérience humaine du temps

La réflexion sur la notion de temps ramène donc l'homme à son expérience intime. Le temps n'est pas une chose qu'on peut saisir dans l'espace, c'est au contraire une sorte d'espace mental où se déroulent les choses. Cette expérience se déroule à plusieurs niveaux :

* Le niveau des rythmes biologiques et des réflexes. Mis en évidence par Michel Siffre, on constate que l’expérience consciente du temps est encadrée par notre fondement organique structuré autant temporellement que spatialement.

* Le niveau du présent psychique, où les relations de durée, de succession et de simultanéité ne sont pas seulement pensées, mais éprouvées et vérifiées.

* Le niveau de la réflexion qui double l'expérience du « présent » par la représentation objective du passé et de l'avenir et par l'estimation relative et quantitative de ces portions de temps reconnues comme absentes.

La subjectivité du passé

Dans le présent, grâce à la mémoire, puis la réflexion, je peux penser une réalité passée. Mais le souvenir ne correspond jamais exactement à l’événement tel que je l’ai vécu. Nos souvenirs sont toujours des interprétations, des reconstructions.

Ce qui importe dans le souvenir, ce n’est pas de se souvenir exactement d’un événement, mais plutôt de lui donner un sens selon ce que la vie a fait de nous. Évoquer le passé, c’est donc toujours lui donner un sens. Évidemment, le passé en soi ne change pas, c’est l’interprétation que nous en faisons qui peut évoluer en fonction de notre présent, de notre futur. Cela montre bien l’unité de notre existence : je pense mon présent comme résultant de mon passé et s’ouvrant sur mon futur. Il y a donc bien un lien entre l’existence et le temps.

Nous nous construisons par la mémoire : nous ne pouvons faire table rase de notre passé. En revanche, l’homme est libre en ce qu’il interprète librement son passé. Il peut toujours décider d’en faire un appui positif. Cette conservation du passé par la mémoire, aussi subjective soit-elle, nous constitue. Cela signifie aussi accepter la complexité de la vie : il n’existe pas de vérité une et stable, la valeur d’un événement, le sens qu’il prend peuvent évoluer au cours de notre vie.

Le futur

Le passé est l’accumulation des temps antérieurs, selon des rapports chronologiques (succession) et chronométriques (les durées relatives). L’instant physique n’existe à vrai dire pas, puisqu’il se réduit à une durée nulle. Chaque instant se résume à un passé dès le moment où l’on y pense. Par contre, l’instant psychologique a une durée propre qui dépend de l’état d’esprit de celui qui le perçoit. Le futur est l’ensemble des présents à venir. Seuls les contenus à venir, les événements futurs, sont susceptibles d’être encore modifiés. C’est ce qui fait que l’avenir n’est pas encore.

Le propre de la conscience humaine est de se projeter vers le futur. Or, la conscience de notre mortalité se pose comme une limite à nos projections dans le futur. La conséquence de cette prise de conscience, selon Heidegger, c’est le souci, autrement dit la préoccupation quant au sens que je vais donner à mon existence. C’est ce souci qui nous fait pleinement humains (les animaux n’ont pas ce souci du sens qu’ils vont donner à leur existence).

Se pose alors la question existentielle : C’est le grand sujet d’ordre politique. Peut-on agir sur le futur par des actions dans le présent ?

D’emblée répondons "oui", il est possible d’agir sur le futur et d’influencer le présent pour qu’il conduise à un avenir envié. Depuis peu, la recherche opérationnelle s’organise autour de ces problèmes. Il s’agit de maîtriser les éléments de la décision pour la rendre la plus efficace possible. En amont de la décision, on trouve différentes étapes : recueil de l’information, capitalisation du savoir, enrichissement par la connaissance, puis la démarche d’anticipation par la prospective. La décision s’exprime par la définition de ce que l’on veut, pourquoi on le veut, vers quoi cela va nous mener, les scénarios possibles dans le contexte et les actions à conduire pour l’atteindre. La difficulté est de disposer d’une vision globale du problème et des volontés opposées. C’est le propre de la stratégie, du grec stratos qui signifie « armée » et ageîn qui signifie « conduire ». La stratégie consiste à la définition d'actions cohérentes intervenant selon une logique séquentielle pour réaliser ou pour atteindre un ou des objectifs. Elle se traduit ensuite, au niveau opérationnel en plans d'actions par domaines et par périodes, y compris éventuellement des plans alternatifs utilisables en cas d'évènements changeant fortement la situation.

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