08/04/2020
L'étrange bataille de San Pedro de Atacama (9)
Le capitaine Barruez s’engagea sous le portail, salua le drapeau bolivien qui flottait au vent, et se dirigea vers le lieutenant major avec lequel il échangea un salut réglementaire suivi d’une longue poignée de main. Ensemble, ils passèrent en revue la section d’honneur. Don Domingo Carrienga n’avait pas l’air particulièrement réjoui de voir le capitaine. Il allait perdre sa prestance auprès des habitants du village et le commandement provisoire de la compagnie. Mais il allait gagner en liberté et en tranquillité. Il ne savait s’il devait se réjouir ou s’attrister. Aussi prit-il un air déférent, sans autre attitude particulière.
Le capitaine vit alors le maire avancer d’un pas, inclina légèrement la tête et se présenta : « Rodrigo Podeglia, maire du bourg depuis 8 ans, très honoré de recevoir un défenseur de la patrie ! » Puis ce fut le tour du juge, engoncé dans sa dignité, et du jeune commissaire, intimidé par la franchise du regard du capitaine. Celui-ci serra également les mains des propriétaires terriens et de quelques autres hommes qui se pressaient autour de lui. Voyant qu’il ne pourrait saluer chacun, il monta sur une petite borne et dit un mot à l’usage de tous :
– Nous sommes heureux d’être arrivés. Le voyage fut long et fatigant, mais quel bonheur d’arriver dans une ville où tous vous attendent et vous saluent avec tant de chaleur. Merci pour votre accueil si vivant qui nous va droit au cœur. Je vous présente ma femme, Emma, que vous apprendrez à mieux connaître, et mes trois filles, Abigaël, Ernestina et Libertad.
Celles-ci firent une sorte de petite révérence devant les autorités, puis vers la foule qui souriait. On entendit quelques murmures admiratifs :
– Quelles sont mignonnes !
Mais le capitaine poursuivait :
– Je sais que pour vous tous la situation est difficile. Vous êtes en première ligne dans notre conflit avec le Chili. Le gouvernement m’a nommé à ce poste pour vous protéger et préserver l’intégrité de la nation. Je le ferai en tout lieu et à tout moment, quelles que soient les circonstances. Moi et la compagnie qui vous défend y veilleront à toute heure du jour et de la nuit. Cela n’implique de votre part qu’une obéissance aux consignes et une capacité à observer tout ce qui peut vous paraître anormal. Sur ce, pardonnez-moi, mais nous sommes fatigués et devons encore nous installer. Alors, bonne soirée à tous !
07:37 Publié dans 44. Livres | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : bolivie, chili, désert, guerre | Imprimer
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