30/08/2020
L'étrange bataille de San Pedro de Atacama (39)
– Mon Capitaine, je crains que les Chiliens ne soient trop forts pour nous. Ils possèdent de nombreux engins de siège, le détachement est important et le commandant des troupes m’a dit que d’ici moins de huit jours le village serait à eux. J’ai appris qu’il ne comptait pas combattre et que notre homme, qui s’appelle Don Rodrigo, était probablement l’innovateur de cette tactique qui devrait leur donner une victoire facile. Ce Don Rodrigo semble un peu hurluberlu, mais sympathique et aimé vraisemblablement des soldats et des officiers, probablement en raison de ses largesses. J’ai pu discuter avec lui et mon impression est bonne. C’est un homme raisonnable et sérieux sous des dehors folkloriques et baroques. Il aime les femmes, vu les colifichets qu’il a acheté pour vraisemblablement leur donner.
Le Capitaine, au travers des paroles de Juan, comprit qu’il était de son côté et qu’il pouvait compter sur lui. Il parlait en effet des Chiliens comme en parlent les Boliviens, sans jamais faire allusion à des points communs qu’ils pourraient avoir avec lui. Mais les renseignements rapportés étaient insuffisants et ne lui permettaient pas de concevoir ne serait-ce que l’ombre d’une solution. Que savait-il ? Que les Chiliens comptaient prendre le village sans combattre ? Il s’en doutait bien sûr. Que s’ils y étaient contraints, ils n’auraient aucun mal à le prendre et passerait ses habitants au fil de l’épée ? Il le savait aussi. Il avait appris le nom de l’homme : Don Rodrigo ? Il savait qu’il était fantasque, qu’il aimait les femmes, mais qu’il avait un cœur juste, lui semblait-il. C’était au fond les seuls renseignements intéressants. Mais comment les utiliser ? Il avait toute la nuit réfléchi à ce marchandage. Une de ses filles contre la reddition du village et l’échange de la vie sauve pour le village. Pourquoi une d’entre elles et non telle ou telle ? Deux possibilités : soit il ne les connaissait pas et se demandait laquelle accepterait, soit c’était un piège et il savait laquelle il voulait. Mais qui et pourquoi ? De plus il ne comprenait pas comment, du fait qu’il venait d’arriver dans cette garnison, il avait pu manigancer tout cela sans réellement les connaître. Peut-être l’idée lui était-elle venue de les voir sur le parapet de la porte d’entrée du village lorsqu’il venait faire son numéro. Mais pourquoi ce numéro ? Pour s’amuser, faire une bonne farce ? Etait-ce réellement pensé ou cela a-t-il jailli d’un coup de sa pensée ? A quel moment a-t-il cru pouvoir faire état de ses filles alors qu’il ne les connaissait pas quelques jours auparavant ?
07:44 Publié dans 44. Livres | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : chili, guerre, bolivie | Imprimer
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