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03/10/2017

L'homme sans ombre (24)

Le lendemain, Lauranne invite Noémie à déjeuner. Après avoir raconté son entrevue avec Mathis, elle lui demande ce qu’elle doit faire : arrêter ses recherches ou continuer. Noémie hésite : elle risque de perdre Mathis si elles insistent. Mais elle a besoin de savoir et se dit que sa vie sera gâchée si elle n’arrive pas à éclaircir ce point noir. Alors elle donne le feu vert à Lauranne.

Celle-ci décide, avant de parler avec Mathis, de refaire un tour du côté du temple. Elle a besoin d’en savoir un peu plus sur ceux qui le fréquentent et ceux qui le dirigent, dont probablement Mathis. Est-ce une religion, une secte, une association secrète ? Poser directement la question à Mathis lui semble un peu maladroit si elle n’en sait pas plus. Alors, elle décide d’adopter un déguisement et de tenter de pénétrer dans le temple. Elle passe sa soirée à se teindre les cheveux, achète une paire de lunettes, va chez Tati et rassemble un chemisier mauve, une jupe blanche et une paire de baskets passe-partout. Elle modifie sa coiffure et se met des boucles d’oreille un peu voyante. Ainsi revêtue, elle a du mal à se reconnaître. Mais elle prend soin de tester malgré tout sa tenue. Elle descend l’escalier de l’immeuble et va sonner chez la concierge. Celle-ci entrouvre sa porte :

– Qu’est-ce que c’est ? demande-t-elle avec son accent normand de fille de la campagne.

Elle ne me reconnaît pas, pense Lauranne. Alors elle lui demande Monsieur Le franc qui, bien sûr, n’existe pas.

– Non, y a pas de Monsieur Le Franc ici, vous vous trompez.

Lauranne alors repart en direction de la porte d’entrée pendant que la concierge ferme sa porte, puis elle remonte sans faire de bruit les marches pourvues d’une moquette rouge et moelleuse. "Ça marche", pense-t-elle.

Le lendemain, elle se prépare, se maquille avec soin comme elle l’avait fait la veille, prend son cabas qui lui sert à faire son marché, le remplit de vieux papier (c’est moins lourd qu’un objet) et marche jusqu’à la station de métro. En une demi-heure, elle atteint sa destination et se noie dans la foule bigarrée du XIIIe arrondissement. Elle reconnaît les petites rues tordues et la place où se trouve l’entrée du temple ou ce qu’elle croît être un temple. La porte-cochère est fermée. Elle s’approche en faisant mine de poursuivre sa route et aperçoit le gardien dans sa petite pièce qui regarde au-dehors. Elle détourne les yeux et poursuit sa route, l’air de rien. "Que faire", se dit-elle. "Oui, je peux essayer par-derrière, il y a peut-être une porte d’accès dans l’immeuble". Elle contourne le bloc d’immeubles et tombe sur une petite impasse déserte avec quelques portes donnant vers le temple. Elle ne sait laquelle choisir. Elle en essaie une première qui donne sur les portes d’appartement où les noms des locataires sont indiqués. Rien qui ne manifeste l’existence d’un lieu public ou même privé dans lequel les gens ont l’habitude de se rendre. Elle ressort et choisit la suivante. Elle est plus large, engageante, surtout au niveau du premier étage. Rien n’indique que c’est l’entrée d’autre chose qu’un appartement. Mais elle sent que c’est très probablement là. Alors elle attend. Pas très longtemps. Quelqu’un ouvre la porte de l’intérieur, parle à une personne invisible et sort en vitesse, sans même le voir. Avant que la porte ne se referme, Lauranne glisse son pied dans l’ouverture et empêche la porte de se refermer. "Allons-y !", pense-t-elle, tout en ressentant une certaine appréhension.