Aube (02/01/2016)
Elle n’ouvre qu’une paupière discrète,
Un regard de biais, en faiblesse.
Elle étire un bras hors des draps
Et engage l’horizon au lever.
Les nuées lui font obstacle,
Un nuage barre l’accès à la transparence.
L’aube des matins d’hiver
Peine à se lever en fanfare.
Enfin, son visage s’éclaire,
Un rayon de feu sur la platitude
S’empare des formes vagues
Et leur donne une allure squelettique.
Ce doigt décharné déclenche
Un ruisseau d’or et de mauve
Qui déferle à vue d’œil
En éclats de diamant
Et paillettes de sang.
L’aube, de ses cheveux blonds,
Ébouriffée sur l’oreiller,
Contemple l’univers endormi,
Écoute l’avertissement des oiseaux
Et attend le retour du hibou.
Le voici ! Il s’engouffre, majestueux,
Dans le bois du vieux saule
Pour y cacher ses yeux béats.
Alors, en un moment divin,
L’espace prend ses dimensions.
Il enveloppe de son corps puissant
Cette aube aux yeux de biche
Et l’élève dans le ciel pur
À sa place de reine, un trône
Tendu d’une main égale
À la contemplation du mouvement.
Telle une femme de feu,
Elle lance la langueur du nord
À l’assaut de l’intercardinal,
Vers ce nord-est ouvert dans l’océan
Où déjà les vagues humaines
S’agitent et s’organisent.
Ont-elles pu admirer l’étrangère
Qui sortit du lit la marée
Et lui fit dire "l’heure est venue
De reprendre votre vocation".
Alors sous les derniers festons,
Encore colorés de pourpre,
L’espace infini du jour
Se revêt de son bleu virginal.
© Loup Francart
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