Où sommes-nous ? (24/08/2013)
Il arrive parfois qu’à la vue d’un paysage l’œil se demande ce qu’il regarde. Où suis-je ? me murmure-t-il à l’oreille. Alors le cerveau s’enflamme. Ce qu’il voit ne correspond pas à ce qu’il ressent, ni à ce qu’il sait. Là, la réalité dépasse la fiction. Cela tourne dans la tête comme dans le tambour d’une machine à laver et même quand cela s’arrête, ce n’est pas suffisamment à l’horizontal pour qu’on commence à avoir une idée précise de la réalité. J’ai un kaléidoscope dans la tête, et j’ai beau remuer les morceaux de verre pour les mettre à l’endroit, rien ne vient. On s’affole donc : qu’est-ce ceci ?
Un lac vu de la rive boisée avec quelques bateaux flottant tranquillement sur la surface calme de l’eau. Le soleil est actif, l’eau devient ruisselante de lumière et prend ce ton éblouissant, quasi aveuglant, qui procure à l’œil un défaut de vision par saturation. Lac enchanteur des jours d’été, envie impulsive de plonger dans une eau pure et fraiche, bonheur sensuel des corps au-delà de toutes considérations intellectuelles.
La photo suivante, enclenchée cinq à six secondes après cette première prise de vue, donne une vision fondamentalement différente.
Je suis transporté à l’ombre des bois, en pleine campagne, auprès d’une prairie verdoyante où paissent quelques bêtes. C’est le matin, la lumière est crue, mais tamisée par la tendresse de l’éveil. C’est là aussi l’été, mais un été plus tendre, plus alangui, et cependant revigorant.
Le plus curieux n’est pas cette différence de sensation entre deux clignements d’œil qui fait bouger les pièces du kaléidoscope, mais le fait que cette sensation bizarre n’est pas due à la réalité, mais aux photos de cette réalité. Il n’y a aucun trucage. Mais l’œil mécanique a manifesté un semblant d’insuffisance humaine. C’est bon de savoir que la technique a également des difficultés d’adaptation.
06:34 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : film, photographie, écriture, quotidien | Imprimer