Marcher sur un chemin de terre (promenade campagnarde) (02/05/2011)
Marcher sur un chemin de terre, quand encore la rosée mouille les chaussures et fait de chaque feuille une larme de fraicheur, et se laisser aller au rythme lent d’une marche sans but autre qu’une promenade, quel délice !
Déjà le soleil engage sa course folle à travers l’espace d’un ciel d’azur et ouvre de larges taches sur la verdoyance. Ebloui, l’on se laisse aller les yeux mi-clos, au long d’un chemin qui est plus qu’un sentier, mais moins qu’une allée. Entourés de frondaisons, rétrécis dans la pâleur lumineuse perçant celles-ci, nous marchons, devisant joyeusement sans y prendre garde.
Arrêt magique… A un détour du chemin, nous découvrons une sorte de halo éblouissant, sortant de l’ombre des feuillaisons, mystère vivant de la nature qui offre au contemplateur des visions de l’incommensurable beauté de la création.
Le mystère s’épaissit lorsque nous tombâmes sur un second trou blanc, à l’égal des trous noirs dont les astrophysiciens nous content les caractéristiques. Un trou noir est un corps qui empêche toute forme de matière ou de rayonnement de s’en échapper en raison d’un champ gravitationnel très intense. N’émettant pas de lumière, il est alors perçu noir. Ils ne sont décrits que par un très petit nombre de paramètres : la masse, la charge électrique et le moment cinétique. Ces trous ouvraient sur un autre monde, celui du rêve dans lequel la masse est sans consistance, la charge électrique déterminante et le moment cinétique spécifique. Ce moment entraîne l’espace et le temps dans son voisinage.
Ainsi la contemplation d’un trou blanc pourrait nous conduire à une sortie de notre univers mental pour nous induire à des comportements illogiques dans notre monde.
Forts de cette déduction, nous prîmes de multiples précautions à son abord : avancée lente à pas menus et écoute discrète, le regard tendu vers les bords du trou blanc avant de pouvoir avancer jusqu’au moment où l’épaisseur du trou s’évanouit pour laisser place à un paysage d’une autre atmosphère, comme sortie d’un chapeau incontrôlable. La vraie campagne contre une feuillaison enjôleuse et geôlière. Ouverture sur un paysage à l’horizon lointain, aux mouvements ondulés dont les recoupements couverts de chênes pleins et sereins d’un vert composé donnent à ce tableau une beauté diffuse, que l’on ne saurait définir.
La promenade continua, suspendue aux nouveaux trous blancs que nous pourrions rencontrer au hasard d’une courbe du chemin. En voici un nouveau, qui est encore plus mystérieux au premier abord, mais qui se révéla assez décevant.
Ainsi notre promenade nous conduisit aux confins d’un univers visible, là où se trouve une zone qui délimite la région d’où lumière et matière ne peuvent s’échapper, et que les astrophysiciens appellent « horizon des évènements ». Au-delà, seule l’imagination permet de naviguer à ses risques et périls. Nous n’en manquions pas et faillîmes ne plus revenir.
Les trous blancs sont des instants merveilleux à saisir chaque fois qu’ils se présentent. Hors du temps et de l’espace, l’esprit erre dans l’extase d’une compréhension innée qui ne vient pas de lui. Cette extase, qui n’est qu’un grand vide qui envahit l’être, laisse la place à la création ou l’exaltation de la beauté du monde et de son imprévisibilité.
Alors, dans cet instant magique, naît un sentiment de gratitude envers ce que Graf Dürckheim appelle le numineux, c’est-à-dire la manifestation d’une transcendance absolument autre qui nous empoigne et nous conduit à une autre vision du monde et de nous-mêmes, libre de toute contingence.
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