L'homme sans ombre (13) (20/08/2017)

– Alors, as-tu réfléchi à la proposition de Patrick et Lauranne, c’est-à-dire notre séjour à Katmandou.

– Tu as tout de suite remarqué que je n’y étais pas opposé, au contraire. Oui, c’est une excellente idée qui nous délassera de cette année de travail.

– Effectivement tu avais l’air très intéressé, que dis-je, passionné. Mais pourquoi ?

– Je te l’ai déjà dit. C’était il y a quatre ans. J’ai assisté à une conférence par un lama tibétain, et j’ai ensuite suivi les causeries sur la spiritualité tibétaine pendant un an avant d’être trop pris par mon travail.

– Mais, dis-moi, qu’est-ce que cela t’a apporté ?

– Eh bien, d’abord une connaissance de ces pays, de leur mentalité, de leur culture, foncièrement différente de celle de l’Occident ; puis une certaine sérénité face aux aléas de la vie quels qu’ils soient, heureux ou malheureux.

– Je reconnais en effet que tu es assez calme et que tu te domines facilement. Tu as toujours la même voix posée, la même impassibilité du visage, la même patience vis-à-vis des autres. C’est d’ailleurs ce qui m’a tout de suite séduite. J’aime te voir inébranlable parmi les impatients et déchaînés. En disant ces mots, Noémie posa sa main sur celle de Mathis et la serra doucement, avec amour. Celui-ci ne disait rien et semblait penser à autre chose, plus profond, plus secret. Sous la force d’une impulsion, elle lui dit tout à coup :

– À quoi penses-tu, là, maintenant ?

Il a l’air gêné. Il lui sourit d’un air égaré, mais ne répond pas. Il se contente de lui caresser lui aussi la main.

– Mais réponds-moi !

Alors il semble sortir de son rêve.

– je ne peux te le dire, et c’est ce qui me gêne. Je t’aime et ne veux rien te cacher ; mais dans le même temps, j’ai un secret que je ne peux te dévoiler.

– Mais pourquoi ?

– tout simplement parce que si je te le dis, je le perds et le perdre revient à perdre la vie.

Noémie ne comprend rien aux explications de Mathis. Quel secret peut-il avoir qui possède une telle force qu’il pourrait entraîner la mort ? Elle le regarde dans les yeux et voit qu’il ne ment pas.

– Je n’ai pas le droit de parler de ce secret. Tu m’as dit que ce qui t'a séduite c’est mon calme. Eh bien, ce secret est lié à cela. Je ne peux t’en dire plus. Je te demande de me laisser jusqu’à demain. Peut-être alors pourrai-je t’en dévoiler plus. Tu peux, je pense, attendre demain, n’est-ce pas ?

– Oui, je pourrai même attendre cent ans parce que je t’aime et ne veux pas te perdre. Mais j’attends demain avec impatience, car j’ai également l’impression de t’avoir perdu parce qu’une part de toi-même m’est inconnue. Sans doute ai-je été trop confiante.

– Oui, tu as été très confiante et c’est cette confiance que j’ai admirée en toi. Tu étais et tu es transparente et, pour moi, cela résume ta personne et dévoile ta vérité d’être unique. C’est pour cela que nous sommes fiancés et que, bientôt, nous serons mariés. Alors, continue à me faire confiance. Ne vois pas cacher en moi des secrets bizarres. C’est simple et droit, bien que je n’en aie pas encore fait le tour.

Noémie est réjouie et inquiète à la fois : réjouie de savoir qu’en effet Mathis n’est pas comme les autres, qu’il possède un secret, et inquiète parce qu’elle ne sait pas de quoi il s’agit. Alors elle décide de continuer à lui faire confiance, malgré tout.

Elle se tourne vers lui et pose sur sa bouche un baiser qu’il lui rend en la serrant contre lui. Elle se laisse faire et cela fait monter en elle des sensations qu’elle n’avait pas encore éprouvées.

07:25 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : livre, littérature, surnaturel, envers |  Imprimer