Rêves et insomnies (poésie de mars 1964) (12/03/2023)

Les flambeaux étaient des mains
Et leurs bras étaient ma mort
Des longues rides sillonnaient leur bronze

Les quais étirent paresseusement leurs pierres
Et la statue jette sa main en l’air
Tandis que le jaune égraine ses écailles de feuilles
Sur le gravier qui frôle ses pieds nus

Les deux fêtards se tournent le dos
Alors que brûlent leur veston 
Et que les notes s’envolent dans le froid
Gémissantes sous le doigt alangui

Blonde est ma chambre que cachent ses ombres
Et les têtes des candélabres me surveillent
De leurs yeux de feu dans la glace piquée
Au plafond coure un cheval de plâtre
Autour de lampe noircie par le soleil

Le marbre de la cheminée est nu
Je vois ses veines et son teint de cadavre
Qui jaunit déjà par endroit

Derrière une forêt de grands tuyaux
Des pattes d’échassier aux ailes ployées
Écrasent de leur ombre la paresse du tapis
Et la lyre du piano allonge ses pieds
Sous ma chaise aux cheveux de paille

Sur les riantes parois de la bibliothèque
Les cloques de l’acajou ont crevé par endroit
Laissant la chair claire pénétrée de lumière

Dors donc, me dit la rose qui repose… 

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