Les leçons de Don Juan (11/03/2023)
q Effacer sa propre histoire[1]
- Je n’ai plus d’histoire personnelle. Lorsque j’ai eu la sensation qu’elle n’était plus nécessaire, je l’ai laissé tomber.
- Tu es obligé de renouveler ton histoire personnelle en racontant tout ce que tu fais. Si tu n’avais pas d’histoire personnelle, il n’y aurait pas une seule explication à fournir à qui que ce soit, personne ne serait déçu ou irrité par tes actes. Mais surtout, personne n’essaie de te contraindre avec ses propres pensées.
- Effacer sa propre histoire libère des encombrantes pensées de nos semblables.
- Actuellement ton problème réside en ce que tu es trop réel. Ne prends absolument rien comme allant de soi. Il faut que tu commence par t’effacer toi-même. Ou bien nous prenons tout comme réel et nous parvenons à l’ennui mortel du monde et de nous-mêmes ; ou bien nous adoptons le point de vue contraire et en effaçant notre propre histoire nous créons le brouillard autour de nous. L’ultime liberté est de rester inconnu.
q Perdre sa propre importance
- Sa propre importance est aussi une chose à laisser tomber, tout comme sa propre histoire. Aussi longtemps que tu croiras que tu es la plus importante des choses de ce monde, tu ne pourras pas réellement apprécier le monde qui t’entoure.
- Tu es trop important. Tu es tellement important que tu peux te permettre de partir lorsque les choses ne vont pas à ta guise. Tu es tellement important que tu crois normal d’être contrarié par tout.
q La mort est une conseillère
- Lorsque tu t’impatientes, tournes-toi simplement vers ta gauche et demandes un conseil à la mort. Tout ce qui n’est que mesquineries s’oublie à l’instant où la mort s’avance vers toi.
- Vis chaque instant comme si la mort allait te toucher.
- Toi, tu as l’impression d’être immortel, et les décisions d’un immortel peuvent s’annuler, être regrettées, faire l’objet de doute.
q Assumer une totale responsabilité
- Lorsqu’un homme décide d’entreprendre quelque chose, il doit s’y engager jusqu’au bout, mais il doit avoir la pleine responsabilité de ce qu’il fait. Peu importe ce qu’il fait, il doit en tout premier lieu savoir pourquoi il le fait, et ensuite il lui faut accomplir ce que cela suppose sans jamais avoir le moindre doute, sans le moindre remords.
- Tu te plains. Toute ta vie tu t’es plaint, ceci parce que tu n’as jamais assumé l’entière responsabilité de tes décisions.
q Devenir chasseur
- Il est important pour un homme vivant dans le milieu naturel de savoir découvrir si un endroit est bénéfique ou ennemi.
- Pour trouver la place bénéfique, il faut forcer graduellement les yeux à voir séparément la même image. Regarder par de rapides coups d’œil donne aux yeux la possibilité de saisir des vues inhabituelles ou plutôt des sensations. Peu importe ce que tu vois, l’important est ce que tu sens. L’astuce, c’est de sentir avec tes yeux.
q Etre inaccessible
- Je ris souvent parce que j’aime rire. Cependant tout ce que je dis est terriblement sérieux.
- Tu dois apprendre à être à volonté disponible ou indisponible. Dans le cours actuel de ta vie, tu es, sans le vouloir, disponible en permanence.
- Etre indisponible ne signifie en aucun cas se cacher ou être secret, mais être inaccessible.
- Etre inaccessible signifie que l’on touche le monde environnant avec sobriété.
- Se faire du souci, c’est devenir accessible.
- Un chasseur est intimement en rapport avec son monde et cependant il demeure inaccessible à ce monde même. Il est inaccessible parce qu’il ne déforme pas son monde en le pressant. Il le capte un tout petit peu, y reste aussi longtemps qu’il en a besoin, et alors s’en va rapidement en laissant à peine la trace de son passage.
q Briser les routines de la vie
- Tout ce que tu fais est routine.
q Ne pas croire à notre continuité
- Il faut que tu apprennes à faire en sorte que chaque acte accompli compte, car tu ne vas rester que peu de temps sur cette terre. En fait trop peu de temps pour découvrir toutes les merveilles qu’il contient.
- Il n’existe qu’une chose mauvaise en toi : tu crois que tu as l’éternité devant toi.
[1] Carlos Castaneda, Le voyage à Ixtlan, les leçons de don Juan, Collection Témoins-Gallimard, 1972
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